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12 janvier 2017 4 12 /01 /janvier /2017 17:45

Mise à jour le 22 mars 2019

Réponse à Michel Onfray sur quelques erreurs sur le christianisme

Hier 11 janvier, à l'occasion de la sortie de son livre "Décadence, de Jésus au 11 septembre, Vie et mort de l'Occident", le philosophe athée Michel Onfray, invité de RMC, a expliqué que la "civilisation judéo-chrétienne" était en train de mourir. [1]

 

Or, le concept de "judéo-christianisme" a été interdit par lÉglise au concile de Jérusalem en 49 ap. J.-C., le judéo-christianisme, lui-même, s'est effondré au premier siècle (Cf. Jean DANIELOU, L'Église des premiers temps, des origines à la fin du IIIe s., Points Histoire, Tours 1999, p. 37)

 

Michel Onfray explique pourquoi il n'est pas chrétien (à partir de 15:18 dans le podcast) :

 

"Aucun évangéliste n'a connu Jésus... Parce que le premier qui commence à écrire, il écrit plus d'un demi-siècle après la mort de ce fameux Jésus qui n'a pas existé..." (sic)

 

Michel Onfray date ainsi le premier évangile "plus d'un demi siècle" après la mort du Christ (en 33), ce qui nous fait remonter à après 83. Cette datation n'est pas partagée (et loin de là) par la majorité des historiens, pour qui les évangiles ont été écrits entre 50 pour les plus anciens (Marc et Matthieu) à 95 pour les plus récents (Jean).

 

Nouvelle Clio, PUF, Clamecy 2018

Sans compter que "les sources les plus anciennes et les plus abondantes relatives à Jésus" "ont commencé à être rédigées une dizaine d'années après" la mort de Jésus. "C'est notamment le cas pour les Lettres de Paul de Tarse, entre 40 et 65 - ce témoignage, à lui seul permet d'ailleurs d'affirmer que Jésus a bien existé et qu'il a laissé dans on entourage un souvenir extraordinaire.

 

[...] Les plus anciens blocs de tradition écrite sont sans doute des récits de la Passion de Jésus, composés pour des cérémonies destinées à faire mémoire de l'évènement, et quelques ensembles de controverses, de paroles et de miracles. À cela s'ajoutent des hymnes qui ont été transmises dans les lettres de Paul, mais qui ne sont apparemment pas de lui (Ph 2, 6-11; 1 Co 13 ; Rm 3,24-26 ; 6,1-11 ; 8,31-39 ; 11, 22-36)." (Simon Claude Mimouni, Pierre Maraval, Le Christianisme, des Origines à Constantin, Nouvelle Clio, l'Histoire et ses problèmes, PUF, Clamecy 2018, p. 43.)

 

"L'Évangile selon Marc est situé autour des années 60 après l'avoir été autour des années 70, mais il pourrait bien être des années 50

"L'Évangile selon Luc + les Actes des Apôtres sont situés de manière habituelle dans les années 80, mais ils pourraient bien être aussi des années 60. 

"L'Évangile selon Jean est situé autour des années 90, mais à cause de son caractère mystique et de certaines caractéristiques relevant de la topographie et de la chronologie il pourrait bien être des années 60." (Simon Claude Mimouni, Le Judaïsme ancien et les origines du christianisme, Bayard, Italie 2018, p. 21.)

 

L’archéologue biblique William Albright a conclu, d’après ses recherches, que tous les livres du Nouveau Testament avaient été écrits du vivant de la plupart des apôtres. Il écrit : Nous pouvons déjà déclarer avec certitude qu’il n’y a désormais plus de raison justifiable de dater quelconque des livres après environ 80... (William F. Albright, Recent Discoveries in Biblical Lands, New York: Funk & Wagnalls, 1955, 136.)

 

Albright situe la rédaction de la totalité du Nouveau Testament  très probablement quelque part entre approximativement 50 et 75. (William F. Albright, Toward a More Conservative View, Christianity Today, January 18, 1993, 3.)

 

Un intellectuel pourtant célèbre pour son scepticisme, John A. T. Robinson, date quant à lui le Nouveau Testament plus tôt que la plupart des érudits les plus conservateurs ! Dans son ouvrage, "Redating the New Testament" [Une nouvelle datation du Nouveau Testament], il affirme que la plus grande partie du Nouveau Testament fut écrite entre 40 et 65. Cela situe la rédaction de celui-ci aussi tôt que sept ans après la vie du Christ. (John A. T. Robinson, Redating the New Testament, quoted in Norman L. Geisler and Frank Turek, I Don’t Have Enough Faith to Be an Atheist, Wheaton, IL: Crossway, 2004, 243)

 

Les premiers chrétiens ont écrit des milliers de lettres, sermons et commentaires sur Jésus. Par ailleurs, des crédos qui parlent de Jésus apparaissent aussitôt que cinq ans après sa crucifixion. (Gary R. Habermas and Michael R. Licona, The Case for the Resurrection of Jesus, Grand Rapids, MI: Kregel, 2004, 212.)

 

Plus de 36.000 de tels écrits, complets ou partiaux, ont été découverts, certains datant du premier siècle. (Norman L. Geisler and Paul K. Hoffman, eds., Why I Am a Christian, Grand Rapids, MI: Baker, 2001, 150). Ces écrits non-bibliques pourraient reconstituer le Nouveau Testament dans sa totalité, à l’exception de quelques versets. (Bruce M. Metzger, The Text of the New Testament? New York: Oxford University Press, 1992, 86.)

 

Comment est-ce qu’un Jésus mythique pourrait inspirer tant d’écrits à son sujet en l’espace de quelques décennies après sa vie ?

 

Les témoins étaient toujours en vie, or aucun n'a remis en question l'historicité des événements rapportés. Toute erreur historique eut été immédiatement exposée, tant par les témoins oculaires que par les ennemis du Christianisme.

Les rédacteurs du Nouveau Testament ont prétendu fournir des témoignages oculaires sur Jésus. L’apôtre Pierre le déclare ainsi, dans l’une de ses lettres : "En effet, ce n’est pas en ayant recours à des récits imaginaires sophistiqués que nous vous avons fait connaître la puissance et la venue de notre Seigneur Jésus Christ, mais c’est pour avoir été les témoins oculaires de sa grandeur" (2 P 1 :16)

 

L'Evangile de S. Marc, le plus ancien, a ainsi été rédigé entre 41 et 70 au plus tard, probablement en 62. Et ce qui est sûr, c'est qu'il a été rédigé avant 70, de même que l'Evangile de Matthieu : dans ces deux évangiles, Jésus annonce en effet la destruction du Temple de Jérusalem, qui aura lieu en 70 (Mc, 13, 1-4; Mt 24, verset 2). Ces deux évangiles n'ont pas pu être écrits après un évènement que le Christ annonçait qu'il adviendrait.

 

Le fameux archéologue, Sir William Ramsey, a d’abord rejeté le récit historique de Luc concernant Jésus. Toutefois, plus tard il a reconnu : Luc est un historien de première classe … Cet auteur devrait figurer parmi les plus grands historiens.… L’histoire de Luc est sans pareille pour ce qui est de sa fiabilité. (Quoted in Josh McDowell, The New Evidence That Demands a Verdict, Nashville: Thomas Nelson, 1999, 61.)

 

Des fragments de l'évangile de Marc retrouvés à Qumran entre 1947 et 1956 prouvent que l'évangile de Marc est antérieur à 68, voire à l'an 41, selon certains spécialistes. A l'aide des ordinateurs, on a pu prouver scientifiquement que dans ces papyrus écrits seulement en grec (pas de textes en hébreu ni en araméen), issus de la "grotte 7", le groupe de lettres en question ne pouvait appartenir à nul autre qu'à l'évangile de Marc.  Le papyrologue allemand Carsten Peter Thiede a élargi le champ de sa recherche en l'étendant au papyrus P64, fragment de l'évangile de Matthieu... qui se trouve au Madgalen College d'Oxford. Ce papyrus a été daté comme apparte­nant approximativement à l'an 200, mais le professeur Thiede affirme qu'il est de l'an 50 et établit une relation avec la datation du papyrus de Qumran. La datation offerte par Tiede offrirait une garantie de véracité. (Figaro Magazine, Et si les évangiles étaient un reportage?, 14-4-1995, p. 80-81.)

 

... De même, l'Evangile de Luc est écrit au plus tard en 65 : c’est en effet pendant la captivité de S. Paul que Luc aurait composé son évangile. Et vers 65 eut lieu le martyre de Pierre et Paul à Rome. L'Evangile de Jean, l'Apôtre le plus jeune et aussi celui qui vécut le plus vieux, est plus tardif et date de la fin du premier siècle.

 

Les 13 lettres de l’apôtre Paul adressées aux jeunes églises et à certains particuliers constituent la majeure partie du Nouveau Testament. Les lettres de Paul sont datées entre les années 45 et 65 (12 à 33 ans ap. J.-C.) et elles représentent les témoignages les plus anciens sur la vie et l’enseignement de Jésus. Will Durant écrit sur l’importance historique des lettres de Paul :  La preuve chrétienne du Christ commence par les lettres attribuées à Saint Paul. Personne n’a remis en question l’existence de Paul, ou de ses multiples rencontres avec Pierre, Jacques et Jean; et Paul admet avec envie que ces hommes ont connu le Christ dans la chair. (Will Durant, Caesar and Christ, vol. 3 of The Story of Civilization, New York: Simon & Schuster, 1972, 555.)

 

Saint Paul (Paul de Tarse en Asie mineure), portant aussi le nom juif de Saul qui se prononce "Shaoul" (né probablement à Tarse en Cilicie au début du Ier siècle et mort vers 67 - 68 à Rome) est un apôtre de Jésus-Christ, tout en ne faisant pas partie des "Douze". Il est citoyen romain de naissance et un juif pharisien avant sa conversion. Saint Pierre et saint Paul sont les deux piliers de l'Église et jamais la Tradition ne les a fêtés l'un sans l'autre. Tous deux virent leur vie bouleversée par l'irruption d'un homme qui leur dit: "Suis-moi. Tu t'appelleras Pierre" ou "Saul, pourquoi me persécutes-tu?".  Pierre reçut de l'Esprit-Saint la révélation du mystère caché depuis la fondation du monde: "Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant." Paul, ravi jusqu'au ciel, entendit des paroles qu'il n'est pas possible de redire avec des paroles humaines. Persécuteur des premiers chrétiens, Paul se donna au Christ: "Ce n'est plus moi qui vis, c'est le Christ qui vit en moi." Pierre reçut la charge de paître le troupeau de l'Église: "Tu es Pierre et sur cette pierre je bâtirai mon Église." Paul devint l'apôtre des païens. Pour le Maître, Pierre mourra crucifié et Paul décapité. Comment la vie de ces deux hommes a-t-elle pu ainsi être bouleversée si Jésus n'avait pas existé, surtout Saint Paul, quelqu'un qui persécutait les premiers chrétiens ? D'autant plus que saint Paul s'est converti sans le truchement d'autres chrétiens.

 

La ville de Thessalonique était à cette époque devenue la capitale de la Macédoine et le port le plus commerçant de la Méditerranée: elle avait dans l'Empire la qualité de ville libre. S. Paul s'y rendit dans sa seconde mission à sa sortie de Philippes. Il y trouva une synagogue, où il prêcha à des Juifs, des prosélytes et des païens durant trois semaines et jeta les fondements d'une petite chrétienté. Mais bientôt chassé par les intrigues des Juifs accusant les prédicateurs d'agir contre les décrets impériaux et traînant certains chrétiens devant les magistrats (Ac 17:5-9), il se retira à Bérée, puis à Athènes, et de là à Corinthe. C'est de cette dernière ville qu'il adressa à l'Eglise naissante de Thessalonique vers l'an 51, à peu d'intervalle l'une de l'autre, deux épîtres, les premières que nous ayons de lui. La première, qui contient des encouragements, est le plus ancien écrit du Nouveau Testament. L'apôtre y fait l'expérience de la mort et de la résurrection du Christ. Il l'a envoyée une vingtaine d'années après la mort de Jésus, peu après son arrivée à Corinthe où Thimothée, vint lui apporter des nouvelles en provenance de Thessalonique (1 Th 3:6). A cette date, les traditions évangéliques ont déjà pris corps et d'autres textes peuvent nous rapporter des traditions plus anciennes, mais 1 Thessaloniciens est le plus ancien document chrétien connu. Dans leur relative simplicité, les deux lettres aux Thessaloniciens, parlent des "Eglises" et de ceux qui sont "à leur tête", elles mentionnent tout ce qui est la foi commune des premiers chrétiens et l'expérience des premiers missionnaires : l'amour de Dieu qui appelle (1 Th 1:4; 1 Th 2:12, la foi en la Trinité de "Dieu le Père, et le Seigneur Jésus-Christ" et l'"Esprit-Saint" (1 Th 1-5; 1 Th 4:8), la foi dans la mort et la résurrection du Christ (1 Th 1-10 ; 1 Th 4:14), l'attente du retour du Christ (1 Th 3:13; 1 Th 5:23), la croyance dans la résurrection de ceux qui sont morts dans le Christ (1Th 4:16), la persévérance dans la persécution (1 Th 2:14-16), l'amour fraternel (1 Th 4:9) et le caractère collectif et solidaire des premières communautés chrétiennes (1 Th 4:6), l'action de l'Esprit Saint dans la parole de proclamation et dans la vie des communautés. S. Paul met en place des "anciens", comme nous le voyons à Ephèse (Actes 20, 17). Il envoie deux collaborateurs, Tite et Timothée, deux convertis du paganisme dans les communautés qu'il a fondées, pour éviter qu'elles ne dérivent. Ils sont destinataires de trois épîtres avec des conseils pour l'avenir. A Thimothée, en particulier, il rappelle le "don spirituel que Dieu a déposé en toi par l'imposition de mes mains" (1 Tm, 4: 14; et 2 Tm 1:6). La mission principale de Timothée est de "garder le dépôt" (1 Tm 6,20 ; 2 Tm 1,14). Ce dépôt doit être transmis à d'autres de génération en génération : "Ce que tu m’as entendu dire en présence de nombreux témoins, confie-le à des hommes dignes de foi qui seront capables de l’enseigner aux autres, à leur tour" (2 Tm 2,2). S. Pierre recommande aux "anciens en fonction" de paître "le troupeau de Dieu qui leur est confié et aux "jeunes gens" d'être "soumis aux anciens" (1 P. 5, 1-2).

Le souci de la continuité, la transmission de la charge ecclésiastique (office) par les apôtres, le caractère collectif autant qu’individuel, le titre de "pasteurs", titre qui convient d’abord au Christ et que Jésus avait donné à Pierre, sont autant de traits particuliers de l'Eglise primitive.

 

Indiquons ici que les récits païens d’un dieu mort et ressuscité, plus ou moins comparables à l’histoire de la résurrection de Jésus, ne sont apparus qu’au moins 100 ans après les témoignages de la résurrection de Jésus. (Gary R. Habermas and Michael R. Licona, The Case for the Resurrection of Jesus (Grand Rapids, MI: Kregel, 2004), 90.) En d’autres mots, les récits d’Horus, Osiris et Mithra mourant et se relevant d’entre les morts, n’étaient pas des mythologies originales, mais furent greffés à leurs mythes après que les récits de l’évangile de Jésus furent écrits.

 

Michel Onfray parle ensuite du "fameux Jésus qui n'a pas existé". Or, pendant 19 siècles, pas même les Juifs, ou ses adversaires talmudistes et Romains, les païens eux-mêmes, n'ont remis en question l'existence de Jésus.

 

Pendant des siècles, jusqu’aux Encyclopédistes et à ceux qu’on a appelé plus tard les philosophes des "Lumières" au dix-huitième siècle, la question de l'existence de Jésus, soulevée par Michel Onfray, ne se posait pas. Voltaire lui- même - qui fut pourtant un ennemi acharné de l’Église et du christianisme - ne nia jamais l’existence historique de Jésus de Nazareth. Ce n'est qu'au dix-neuvième siècle que des chercheurs qualifiés de "rationalistes" entreprirent de mettre en doute l’existence de Jésus : un dictionnaire russe rédigé pendant la période communiste de l’U.R.S.S., décrit Jésus comme un personnage mythique ou mythologique n’ayant pas existé... Il n’existe plus aucun historien sérieux aujourd'hui pour nier l’existence historique de Jésus de Nazareth.


Le fait que Jésus ait existé n’est pas une doctrine de foi, c’est une vérité historique attestée par des témoins qui n'étaient pas chrétiens. Un Jésus qui fut crucifié au temps de Ponce Pilate est attesté pas les historiens romains contemporains de Jésus, dont l’intérêt n’était pas de faire croire à l'existence d’un personnage n’ayant soit-disant jamais existé. Les preuves de l'existence de Jésus viennent également de sources juives...

 

De sorte qu'il n'y a pas plus de raisons de nier l’existence de Jésus que celle d’autres personnages de l’Antiquité. César, Aristote, Alexandre le Grand, ou Socrate… auraient même moins de preuves de leur existence !

 

La quantité des manuscrits du Nouveau Testament est énorme. Il existe plus de 24.000 manuscrits complets ou partiels des livres qui le constituent, les situant bien au-dessus de tous les autres documents anciens. L’historien Paul Johnson remarque : “Si nous considérons, par exemple, que Tacite ne survit que grâce à un seul manuscrit médiéval, la quantité des manuscrits anciens du Nouveau Testament est remarquable.” (Paul Johnson, “A Historian Looks at Jesus,” speech to Dallas Seminary, 1986.)

 

Le livre de Callisthenes (un historien contemporain d'Alexandre le Grand exécuté en 327 av. J.-C., suite à l'affaire du refus du rite perse de la proskynèse) sur les Actes d'Alexandre et le Journal Royal sont des sources primaires de la vie d'Alexandre, mais depuis perdues. L’histoire d’Alexandre le Grand provient de cinq sources antiques, écrites 300 ans ou plus après sa mort :

Arrien (Ier siècle ap. J.-C. Son Anabase d'Alexandre est le récit antique le plus rigoureux que nous ayons des campagnes militaires menées par Alexandre le Grand);

Diodore de Sicile (Ier s. av. J-C.), "Bibliothèque historique";

Justin, IIIe s. ap. J.-C.,"Abrégé des Histoires philippiques de Trogue Pompée" ; 

Quinte-Curce, Ier s. ap. J.-C., L'Histoire d'Alexandre le Grand ;

Plutarque, Ier s. ap. J.-C., Vies parallèles, Vie d'Alexandre ;

 

(Cf. “Alexander the Great: The ‘Good’ Sources,” Livius,http://www.livius.org/aj-al/alexander/alexander_z1b.html .)

 

Autrement dit, il n’existe pas un seul témoignage direct de l’existence d’Alexandre le Grand. Les auteurs antiques qui permettent de construire un récit sont tous d'époque romaine, et ils ont travaillé à partir de sources primaires auxquelles nous n'avons plus accès, sauf sous forme de citations ou de paraphrases ("fragments d'historiens"). Pour autant, aucun historien sérieux, ne remet en question l'historicité d'Alexandre.

 

Un professeur de droit, John Warwick Montgomery, a affirmé : Pour être sceptique vis-à-vis du texte des livres du Nouveau Testament, il faut permettre à toute l’Antiquité classique de glisser dans l’obscurité, car aucun document de l’Antiquité n’est aussi bien attesté d’un point de vue bibliographique que le Nouveau Testament. (Quoted in Josh McDowall, The New Evidence That Demands A Verdict (Nashville: Thomas Nelson Publishers, 1999), 36.)

 

Michael Grant, un historien athée de Cambridge, défend le fait que le Nouveau Testament devrait être considéré comme preuve, au même titre que le reste de l’histoire antique :

Si nous employons à l’égard du Nouveau Testament le même genre de critères que nous devrions employer à l’égard d’autres récits anciens contenant de la matière historique, nous ne pouvons pas plus rejeter l’existence de Jésus que nous ne pouvons rejeter l’existence d’une foule de personnages païens dont la réalité historique n’a jamais été remise en question. (Michael Grant, Jesus: An Historian’s Review of the Gospels, London: Rigel, 2004, 199-200.)

Clark Pinnock, professeur d’interprétations à McMaster Divinity College, l’a bien résumé en disant :  Il n’existe aucun document du monde ancien attesté par un ensemble aussi excellent de témoignages textuels et historiques. Une [personne] honnête ne saurait rejeter une source pareille. Le scepticisme à l’égard des qualités historiques du Christianisme se base sur l’irrationnel. (Quoted in Josh McDowell, The Resurrection Factor, San Bernardino, CA: Here’s Life Publishers, 1981, 9.)

 

Simon Claude Mimouni résume : "[P]our de nombreux hommes de l'Antiquité, on dispose d'une argumentation bien moindre que pour Jésus et aussi peu fiable, a priori sans que personne ne songe à mettre en doute leur existence." Le "témoignage de Flavius Jospèhe, [...] le Testimonium Flavianum, qui remonte avec certitude à la fin du Ier siècle [...] à lui seul, suffit à affirmer l'existence historique de Jésus - la question ne son authenticité, pour l'essentiel, ne saurait être mise en doute. [...] Jésus est loin d'apparaître comme un personnage isolé de son temps et s'inscrit dans une série documentaire bien connue et bien identifiée, tant d'un point de vue topographique que chronologique.

[...] [L]'existence de Jésus ne saurait en aucun cas être remise en cause.

[...] Peu de personnages de l'Antiquité bénéficient d'une attestation documentaire aussi riche d'un point de vue quantitatif comme qualitatif." (Simon Claude Mimouni, Pierre Maraval, Le Christianisme, des Origines à Constantin, Nouvelle Clio, l'Histoire et ses problèmes, PUF, Clamecy 2018, p. 43-44, et 80.)

Les témoignages romains :

 

"Le témoignage le plus ancien, et l'un des plus intéressants, est celui de Pline (appelé le Jeune) [...], riche aristocrate romain qui gravit les échelons de la carrière sous les empereurs Domitient (81-96), Nerva (96-98), et Trajan (98-117). [...] C'est au cours de l'automne de l'an 112, dans les cités d'Amisos [(Samsun) et d'Amastris (Amasra), en Turquie actuelle], ou en un lieu entre les deux, que Pline eut affaire avec des chrétiens. Il prit à leur endroit des mesures dont il rend comte à Trajan dans une lettre, lui demande des instructions sur les mesures à prendre (Lettre 96, Livre X de la correspondance). [...] Avant l'aube, les chrétiens se réunissaient et chantaient, en choeurs alternés, des hymnes au Christ 'comme à un Dieu' (on ne peut certes extraire une christologie de cette expression, mais seulement la perception que Pline en avait, à savoir que les chrétiens, en s'adressant au Christ des hymnes dans un contexte cultuel, le traitaient comme une divinité)." (Enrico NORELLI, La Naissance du Christianisme, Comment tout a commencé, traduit de l'italien par Vivian Dutaut, édition Gallimard, Folio Histoire, 2019, p. 217-223)

 

Tertullien était un juriste et un théologien de Carthage. Tandis qu’il faisait un discours pour défendre le christianisme devant les autorités romaines d’Afrique, il mentionne les échanges qu’eurent Tibère et Ponce Pilate :

 

"En ces jours où le nom de chrétien fit son entrée dans le monde, Tibère, qui avait reçu l’intelligence au sujet de la divinité du Christ amena le sujet devant le sénat, en comptant bien appuyer sa position en faveur du Christ. Mais le Sénat rejeta cette proposition parce qu’il n’approuvait pas lui-même cette opinion. César la soutenait, cependant, et menaça de sa colère contre tous les accusateurs des Chrétiens." (Apologie, V.2 (aussi Justin Martyr dans Apologie, 1.35).

 

Thallus fut un des premiers écrivains païens à mentionner le Christ. Il écrivit en 52 apr. J.C.. Malheureusement, ses écrits ont disparu ; et on en a connaissance seulement parce que d’autres auteurs les citent. Un de ces auteurs s’appelle Julius Africanus, un écrivain chrétien qui vécut vers 221. Julius fait allusion à un commentaire intéressant provenant de Thallus :

 

 "Dans son troisième livre d’histoires, Thallus explique naïvement les ténèbres comme étant une éclipse de soleil – ce qui me semble bien déraisonnable (déraisonnable, bien sûr, parce qu’une éclipse de soleil ne pouvait pas arriver à l’époque de la pleine lune, parce que Christ mourut à l’époque pascale de la pleine lune)."
 

Nous voyons donc que la référence des Évangiles aux ténèbres, qui survinrent à la crucifixion de Jésus, était bien connue, et que les non croyants qui y assistèrent recherchaient une explication naturelle.

 

Phlegon, un historien du 1er siècle.


 

Ses Chroniques ont aussi été perdues, mais Julius Africanus mentionne aussi un fragment de cette œuvre, confirmant les ténèbres qui survinrent lors de la crucifixion de Jésus. Et après sa réflexion sur l’opinion déraisonnable de Thallus, il cite Phlegon selon lequel "au temps de Tibère César, survint une éclipse de soleil durant la pleine lune." Phlegon est aussi cité par Origène dans Contre Celsum, Livre 2, sections 14,33,59.

 

Justin Martyr, Patron des philosophes (vers 150 apr. J.C.) adressa sa Défense du Christianisme à l’empereur Antonius Pius, et il le renvoya au Rapport de Pilate, qu’il suppose être dans les archives impériales. Il dit :


 

"Mais les mots ‘il perça mes mains et mon pied’ dit-il, sont une description des clous qui furent plantés dans Ses mains et dans Son pied sur la croix ; et après qu’il fut crucifié, ceux qui le crucifièrent jetèrent les dés pour se partager ses vêtements ; et ces choses arrivèrent ainsi, tu peux en avoir connaissance d’après les actes qui furent enregistrés sous Ponce Pilate."


 

Un peu plus tard, il dit :


 

"Qu’il fit ces miracles, tu peux facilement le vérifier d’après ‘les actes’ de Ponce Pilate." (Apologie 1.48)

 

Le philosophe anti-chrétien Celse, en 110, écrit : "Vous nous donnez pour Dieu un personnage qui termina par une mort misérable une vie infâme." (Origène, Contre Celse, 7,58)

 

Dans le livre 15ème de ses Annales, Tacite écrit au début du IIe siècle (entre 100 et 116) :

"Mais ni efforts humains, ni largesses du prince, ni cérémonies religieuses expiatoires, ne faisaient taire l'opinion infamante, d'après laquelle l'incendie (de Rome Ndlr.) avait été ordonné. Pour mettre fin à ces rumeurs, Néron supposa des coupables et fit souffrir les tortures les plus raffinées à ces hommes détestés pour leurs abominations et que le vulgaire appelait chrétiens. Ce nom leur vient de Christ, qui, sous Tibère, fut livré au supplice par le procurateur Pontius Pilatus. Réprimée sur le moment, cette exécrable superstition perçait de nouveau, non seulement dans la Judée, berceau du mal, mais à Rome même, où tout ce qu'il y a partout d'infamies et d'horreurs afflue et trouve des partisans. On commença donc par saisir ceux qui confessaient leur foi, puis, sur leurs révélations, une infinité d'autres, qui furent bien moins convaincus d'incendie que de haine pour le genre humain. On fit de leurs supplices un divertissement : les uns couverts de peaux de bêtes, périssaient dévorés par des chiens; beaucoup, mis en croix, étaient, lorsque le jour avait disparu, brûlés pour éclairer la nuit. Néron avait offert ses jardins pour ce spectacle et donnait des jeux au Cirque, se mêlant au peuple en habit de cocher, ou conduisant un char." (Annales, livre 15ème, 44, in Tacite, Annales, GF Flammarion, Manchecourt 2002, p. 439.)
 


Vers 120, Suétone écrit :

"Les Chrétiens sont mis à mort. [...] Il (Néron) livra aux supplices les Chrétiens, race adonnée à une superstition nouvelle et coupable." (Vie des douze Césars, Vie de Néron 16, 2)

 

Suétone écrit encore :

 

"Comme les Juifs se soulevaient continuellement à l'instigation d'un certain Chrestos, il les chassa de Rome." (Vie des Douze Césars, Gallimard Folio Classique, Saint-Amand 2003, Livre V, Claude, 25, p. 286.)

 

Or justement, le livre des Actes des Apôtres - livre qui complète l’Evangile de St Luc - fait une allusion directe à cette expulsion lors de l’arrivée de Saint Paul à Corinthe :

 

"Paul se rendit ensuite à Corinthe. Il rencontra là un juif nommé Aquilas, originaire du Pont, qui venait d'arriver d'Italie avec sa femme, Priscille. Claude, en effet, avait décrété que tous les Juifs devaient quitter Rome..." (Actes 18,2)

 

Le proconsul romain de Bithynie et du Pont (Asie mineure), Pline le Jeune, écrit en 111 que les Chrétiens "se réunissent avant l'aurore à des jours déterminés pour chanter des hymnes au Christ comme à un Dieu." (Epist. 10, 96).

 

Les témoignages juifs : le Talmud et la Michnah juifs

 

Les Juifs ont toujours considéré Jésus comme réel. "Plusieurs écrits juifs font référence à Jésus comme une personne réelle à laquelle ils s’opposaient." (D. James Kennedy, Skeptics Answered (Sisters, OR: Multnomah, 1997), 76)

Le Talmud babylonien : "À la veille de la fête de Pâque, on pendit Jésus. Quarante jours auparavant, le héraut avait proclamé : 'Il est conduit dehors pour être lapidé, car il a pratiqué la magie et séduit Israël et l’a rendu apostat. Celui qui a quelque chose à dire pour sa défense, qu’il vienne et le dise.'

Comme rien n’avait été avancé pour sa défense, on le pendit à la veille de la fête de Pâque. Ula (un rabbin de la fin du IVe siècle) répliqua : 'Crois-tu qu’il ait même fallu chercher quelque chose pour sa défense? Car il devint un séducteur et la loi dit : Tu ne dois pas l’épargner, ni passer sa faute sous silence.' (Dt 13,9). Bien plutôt il en allait autrement pour Jésus, parce qu’il était en relations avec l’Empire."

Le Talmud Tol’doth Yeshu fait référence à Jésus comme "Ben Pandera" (ou Ben Pantere). Beaucoup de Théologiens pensent que "pandera" est un jeu de mots, et un travesti du mot grec pour "vierge", "parthenos", l’appelant ainsi un "fils d’une vierge". Joseph Klausner commente "la naissance illégitime de Jésus était une idée courante chez les juifs". Dans la Baraila (Babylone Sanhedrin 43a)

L’Anoa Ulla. Les autorités Juives ne contestaient pas le fait que Jésus fit beaucoup de signes et de miracles, mais ils les attribuaient à Satan, et les assimilaient à des actes sorcellerie (Mat 9.34 ; 12.24 ; Marc 3.22). Sanhedrin 43a; aussi Yeb IV 3; 49a

 

Le témoignage de Flavius Josèphe (entre 93 et 94) est le plus étonnant. Tellement étonnant que l’on a pensé que le texte avait été arrangé par des copistes chrétiens plus tard dans la transmission du manuscrit.

Ceci méritait d’être discuté très sérieusement, et l’a été. Flavius Josèphe avait participé à "la guerre des Juifs" (entre l’année 66 et l’année 7O). Il s’agit de la grande révolte des Juifs réprimée par Vespasien et son fils Titus. Flavius Josèphe s’était d’abord battu dans les rangs des insurgés, puis s’étant rendu aux Romains, il avait pris leur parti. Il a écrit en grec vers 93 une histoire très précise de ces événements. Dans cette histoire il rapporte la mise à mort de l’apôtre Jacques. Et puis il parle du Christ. Un certain nombre de critiques donc ont estimé que le passage de Flavius Josèphe était trop favorable à Jésus... Un Juif romanisé aurait-il été jusque là ? Un copiste chrétien, en recopiant le manuscrit, aurait arrangé le texte ? Cette objection est sérieuse, mais nous avons plusieurs manuscrits avec des origines différentes. Un savant Israélien, Shlomo Pères, a étudié ces différents manuscrits et il estima avoir atteint la version "minimum" de Flavius Josèphe. La voici :

"En ce temps là, vivait un sage nommé Jésus. Il se conduisait bien et était estimé pour sa vertu. Nombreux furent ceux tant Juifs que gens d’autres nations qui devinrent ses disciples. Pilate le condamna à être crucifié et à mourir. (Flavius Josèphe, Antiquités judaïques, 5, 1-7). Mais ceux qui étaient devenus ses disciples ne cessèrent de suivre son enseignement. Ils racontèrent qu’il leur était apparu trois jours après sa crucifixion et qu’il était vivant. Sans doute était-il le Messie sur qui les prophètes ont racontés tant de merveilles."

 

L’intellectuel israélien, Shlomo Pines, écrit : Les opposants les plus mordants du christianisme n’ont jamais exprimé le moindre doute quant au fait que Jésus avait réellement existé. (Josh McDowell and Bill Wilson, Evidence for the Historical Jesus (Eugene, OR: Harvest House, 1993, 44.)

 

Will Durant, un historien de l’histoire mondiale, remarque qu’aucun Juif ni gentil du premier siècle n’a jamais nié l’existence de Jésus. (Will Durant, “Caesar and Christ,” vol. 3 of The Story of Civilization, New York: Simon & Schuster, 1972, 555.)

 

Que dit l'archéologie ?

 

Les évangiles contiennent de nombreux détails historiques et ne constituent pas seulement des enseignements spirituels. Ces faits historiques relatés dans les évangiles ont toujours été confirmés par les découvertes archéologiques...

 

Exemples:

 

- certains, comme le dit Michel Onfray dans cette émission de RMC, estimaient que Nazareth (le village où Jésus a passé son enfance) n’existait pas... Or, en 1962 on a retrouvé une plaque du IIIème siècle avant J.C, gravée en hébreu et portant le nom du village... Et le 21 décembre 2009, des archéologues ont annoncé la découverte de morceaux d’argile à Nazareth, datant du premier siècle et confirmant ainsi que ce petit village existait bel et bien du temps du Christ.

 

- La piscine de Bethesda, dite la "piscine aux 5 portiques" est décrite dans l'évangile de St Jean lorque est racontée la guérison du paralytique : cette piscine a été retrouvée en 1888, à l’endroit situé par St Jérôme en 372 et St Eusèbe en 332...


- Ponce Pilate, qui a condamné Jésus à mort. On a prouvé son existence en 1961 en retrouvant un bloc de calcaire, une plaque comportant son nom et son titre... "Ponce Pilate, Préfet de Judée", dans les ruines de Césarée maritime.

 

 - En 1990, des archéologues découvrirent un ossuaire (une boîte contenant des ossements) portant l’inscription de Caïphe, connu dans le Nouveau Testament pour son implication dans la livraison de Jésus à Ponce Pilate, qui l'a crucifié. Celle-ci fut vérifiée et reconnue authentique au-delà de tout doute raisonnable .

 

- Récemment, dimanche 19 mars 2017, l'autorité des antiquités israéliennes a annoncé des découvertes archéologiques récentes d'objets datant du 1er siècle, retrouvés dans la région de Jérusalem et en Galilée et permettant aux historiens de mieux comprendre la vie à l'époque de Jésus-Christ. Parmi ces objets, une cage funéraire de calcaire décorée de façon intime, appartient à un descendant du grand prêtre Caïphe. Gideon Avni, chef de la division archéologique de l'Autorité des antiquités d'Israël a déclaré qu'il n'y avait aucune raison de croire que Jésus n'existait pas simplement parce que les archéologues n'ont pas trouvé de preuve physique de lui... "Il faut se rappeler que le Christ était l'un parmi plus d'un million de personnes vivant en cette période en Terre Sainte", dit-il.

 

- Dalmanoutha, une ville des temps bibliques mentionnée dans l'Evangile selon saint Marc (Mc 8:10), a été découverte par l'Université de Reading (RU) en septembre 2013, le long de Mer de la Galilée (ou "Lac de Tibériade"). La Mer de Galilée est située à plus de 200 m au-dessous du niveau de la mer. Le lieu traversé par le fleuve Jourdain est celui du baptême de Jésus-Christ par saint Jean-Baptiste, mais aussi l'endroit où le Christ navigua avec ses disciples après le miracle de la multiplication des pains. Le bateau daté de deux mille ans et découvert en 1986, parfois appelé "barque de Pierre" ou "barque de Jésus" a été trouvé sur le littoral de la ville nouvellement découverte.

 

A ces témoignages impartiaux de l'archéologie, des auteurs païens, romains et juifs, il faut ajouter la multitude des textes religieux chrétiens qui ont une valeur historique certaine. L'existence de Jésus comme personnage historique du premier siècle ne fait donc aucun doute.

 

Quelques questions montrent a contrario la véracité des premiers témoins :

Si Jésus de Nazareth n’était qu’un personnage imaginaire, pourquoi les évangélistes seraient-ils parfois si discordants d’un texte à l’autre? N’auraient-ils pas dû donner de Jésus, avant tout une image cohérente, un portrait harmonieux, dans le souci primordial d’écarter les soupçons?
 

Si ce Jésus avait été inventé pour jouer le rôle du sauveur qu’Israël attendait comme l'explique Michel Onfray (avec ses "comme par hasard dans l'Ancien Testament"), pourquoi n’avoir pas vu en lui, par exemple, le héraut de la fin des temps (les modèles sont nombreux dans l'Ancien Testament) ? Pourquoi en faire une victime, pourquoi inventer l’échec de sa mission sur une Croix dont à ce moment-là, personne n'eut parié sur sa réussite ?

 

Si Jésus n’était qu’une fiction, un personnage héroïque destiné un jour à convertir l’immense Empire romain, pourquoi le faire mourir sur une croix, un supplice qui désignait aussitôt les Romains comme auteurs de sa mort, et d’autre part supplice horrible et infamant apparemment en contradiction avec la nature divine du christ?

 

Si les premiers chrétiens avaient voulu faire croire à leur histoire, pourquoi dans une société qui alors n’accordait aucun crédit aux témoignages des femmes faire partir cette histoire du témoignage premier d’une femme (sainte Marie-Madeleine) sur la résurrection du christ ?... Si les évangélistes avaient voulu faire croire à une "fable" comme le dit Michel Onfray, ils n'auraient pas choisi des femmes comme premiers témoins de la résurrection du Christ !

 

Ce sont au contraire toutes ces complications, ces difficultés, ces contradictions à résoudre, du point de vue de ceux qui avaient à écrire l’histoire de Jésus, qui précisément plaident en faveur de l’authenticité historique. Et tout particulièrement le souvenir de sa crucifixion, supplice horrible et infamant.

 

Rappelons que jamais les adversaires du christianisme aux premiers siècles, qu’ils soient juifs ou païens, n’ont mis en cause l’existence de Jésus. Ils ont combattu sa doctrine et ses disciples, mais ils n’ont jamais contesté la réalité de sa personne.

 

Michel Onfray explique ensuite : "A un moment donné, cette religion ... devient une religion par la grâce d'un homme, l'empereur Constantin qui décide que Jésus a existé."

 

Michel Onfray confond avec l'édit de Milan qui donne la liberté de culte au christianisme...

La mère de Constantin, que Michel Onfray tourne en ridicule, sainte Helène, ne retrouve pas "comme par hasard" "des reliques de la Vraie croix, des clous" : elle en fit la découverte lors d’un pèlerinage en Palestine entrepris en 326 et suite à des fouilles sur le lieu du Calvaire...

 

Michel Onfray tente de justifier son anti-christianisme par le blasphème :

 

"Le christianisme du Jésus des évangiles, ce serait plutôt le christianisme de S. François d'Assise. [...] Moi ce que j'aime, c'est que les gens donnent l'exemple. Et si tous les curés accueillaient dans leur presbytère, leurs églises, leurs cathédrales, leurs évêchés, des migrants en quantité, parce qu'il y a de la place, là ils seraient crédibles.

[...] Qu'ils commencent par donner l'exemple, parce que le christianisme c'est cela pour moi. Et voilà pourquoi je ne suis pas chrétien : il y a peu de chrétiens qui sont vraiment chrétiens. Et d'ailleurs Nietzsche a dit à un moment donné : 'Il y a eu un seul chrétien, c'était Jésus, et il est mort sur la croix'", explique Michel Onfray.

 

Si le Christ demande qu'on accueille l'étranger, c'est à titre individuel et autant qu'on le peut. Cet accueil n'est pas imposé aux états, ou d'une manière collective : les autorités politiques "en vue du bien commun" (à titre collectif) ont la possibilité de "subordonner l'exercice du droit d'immigration" et l’immigré est "tenu de respecter avec reconnaissance le patrimoine matériel et spirituel de son pays d’accueil" (n°2241 du "Catéchisme de l'Eglise catholique").

 

En soutenant qu'il n'est pas chrétien parce qu'il ne rencontre pas assez de chrétiens autour de lui, Michel Onfray blasphème notre Seigneur Jésus-Christ à la manière des cardinaux qui lors de la rencontre de S. François d'Assise et du pape Innocent III au palais de Latran jugeaient la Règle de S. François trop difficile et inapplicable : soutenir que l'observance des conseils évangéliques et le voeu qu'on en fait sont quelque chose de contraire à la raison ou d'impossible, c'est blasphémer ouvertement contre Jésus-Christ, auteur de l'Evangile.

Michel Onfray affirme ensuite que le christianisme a contribué à l'"antisémitisme". Quid de l'antichristianisme juif dans le Talmud dont on entend jamais parler?

 

Il dit qu'"il faut attendre le XXe siècle, après la Shoah, pour que le christianisme officiel dise qu'effectivement les Juifs ne sont pas un peuple maudit et que ce n'est pas le peuple déicide".

 

C'est faux : même si des Pères de l'Eglise ont pu le dire, cela n'a jamais été un enseignement dogmatique de l'Eglise que de dire que les Juifs étaient un "peuple déicide"... En 1566, le Catéchisme du Concile de Trente précise même que les responsables de la mort du Christ sont les pécheurs de toute l'humanité, non les Juifs seuls.

 

« [S]i l'on veut chercher le motif qui porta le Fils de Dieu à subir une si douloureuse Passion, on trouvera que ce furent, outre la faute héréditaire de nos premiers parents, les péchés et les crimes que les hommes ont commis depuis le commencement du monde jusqu'à ce jour, ceux qu'ils commettront encore jusqu'à la consommation des siècles.
 

[…] Les pécheurs eux-mêmes furent les auteurs et comme les instruments de toutes les peines qu'il endura. » (Catéchisme du Concile de Trente, Première partie : Du symbole des Apôtres, Chapitre 5 Du 4e article du symbole Qui a souffert sous Ponce Pilate, a été crucifié, est mort, et a été enseveli, § 3, éditions DMM, Niort 1998, p. 56.)

 

« Nous devons donc regarder comme coupables de cette horrible faute, ceux qui continuent à retomber dans leurs péchés. Puisque ce sont nos crimes qui ont fait subir à Notre-Seigneur Jésus-Christ le supplice de la Croix, à coup sûr, ceux qui se plongent dans les désordres et dans le mal (Hebr., 6, 6.) crucifient de nouveau dans leur cœur, autant qu’il est en eux, le Fils de Dieu par leurs péchés, et Le couvrent de confusion. Et il faut le reconnaître, notre crime à nous dans ce cas est plus grand que celui des Juifs. Car eux, au témoignage de l’Apôtre (Cor., 2, 8.), s’ils avaient connu le Roi de gloire, ils ne L’auraient jamais crucifié. Nous, au contraire, nous faisons profession de Le connaître. Et lorsque nous Le renions par nos actes, nous portons en quelque sorte sur Lui nos mains déicides. » (Catéchisme du concile de Trente, 1re partie, chapitre 5, § 3, ibid., p. 57.)

Saint Pierre, Prince des Apôtres qui lors de son supplice choisit d'être crucifié la tête en bas pour ne pas avoir l'honneur de mourir comme Jésus

Saint Pierre, Prince des Apôtres qui lors de son supplice choisit d'être crucifié la tête en bas pour ne pas avoir l'honneur de mourir comme Jésus

Je crois les témoins qui se font égorger.

Blaise Pascal

Aujourd’hui, tout ce que nous pouvons voir de la Rome antique, ce sont des ruines.

 

Les puissantes légions de César et la splendeur de l’empire romain sont tombées dans l’oubli. Cependant, à quel point se souvient-on de Jésus aujourd’hui ?

 

Les nations ont utilisé ses paroles pour établir les principes de leurs gouvernements. Selon Durant : Le triomphe du Christ a été le début de la démocratie. (Will Durant, The Story of Philosophy, New York: Pocket, 1961, 428.) Son sermon sur la montagne a établi un nouveau point de référence en éthique et en moralité.

Des écoles, des hôpitaux et des œuvres humanitaires ont été fondés en son nom. Plus de 100 grandes universités – y compris Harvard, Yale, Princeton, Dartmouth, Columbia, Oxford, Paris– ont été commencées par ses fidèles.

 

Lire : Les Plantagenêt et l'influence française en Angleterre

 

Le rôle élevé de la femme au sein de la culture occidentale retrace ses sources à Jésus. (Au temps de Jésus, les femmes étaient considérées comme des personnes inférieures et virtuellement inexistantes jusqu’à ce que son enseignement soit suivi.) C'est la modernité qui a fait régressé les droits de la femme (Régine Pernoud). L’esclavage a été aboli en France au VIIe s. sous les Mérovingiens par une femme, Sainte Bathilde, en Grande-Bretagne et en Amérique à cause de l’enseignement de Jésus selon lequel chaque vie humaine possède une valeur intrinsèque.

 

L’historien du monde, H. G. Wells, questionné sur qui avait eu le plus fort impact sur l’histoire, répondit :  Jésus est irrésistiblement le centre de l’histoire. (Quoted in Bernard Ramm, Protestant Christian Evidences (Chicago: Moody Press, 1957), 163.)

 

Si Jésus n’a pas existé, comment un mythe peut-il changer autant l’histoire ?

Enfin, Michel Onfray se dit être un "athée judéo-chrétien". La première contradiction dans les termes est que les judéo-chrétiens croyaient en Dieu. La deuxième est qu'en 1789, un clivage est officiellement né, un clivage métaphysique. La république en France est le fruit de la philosophie individualiste nominaliste apparue dès le Moyen Âge au XIVe siècle et continuée avec l'épicurisme, Hobbes, Rousseau, Kant, Charles Darwin et quelques autres, où l'idée d'un ordre de la nature voulu par un Premier Moteur intelligent et où chaque être a sa finalité propre a disparu (prémisse de l'athéisme). Un monde où la loi civile devient le seul critère de moralité qui ne soit pas subjectif... et qui s'impose à tous (...même si la loi enfreint la morale! ). Un monde où avec l'épicurisme et le darwinisme se développe la croyance dans un monde en "progrès", et où la Démocratie obligatoire et universalisable prend le caractère d'une nouvelle religion.

À la place d'une décadence de la civilisation chrétienne, n'y a-t-il pas plutôt une décadence de la "civilisation" moderne ? Comment en tant qu'athée défendre la modernité-nouvelle-religion ? Il s'agit sans doute-là de la raison profonde pour laquelle Onfray se définit comme "athée judéo-chrétien", mais on en revient alors à la première contradiction. L'athéisme d'Onfray est une impasse car tout est religieux, toute politique est métaphysique, même la modernité (Voir les travaux de Simon Claude Minouni : la politique qu’elle l’accepte ou non est d’essence religieuse. Par exemple, le marxisme, dans son application "soviétique" s’est inspiré du fonctionnement de l’Église orthodoxe russe, le culte des "Pères de la Révolution" correspondant à celui des "Saints").

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11 janvier 2017 3 11 /01 /janvier /2017 10:04
"Le lieu dans lequel une communauté musulmane prie devient Dar al-Islam, un lieu qui appartient pour toujours à l'islam" (Marco Tosatti)

FAUT-IL LAISSER LES MUSULMANS PRIER DANS NOS CHAPELLES ?

 

A l’aéroport international de Milan Malpensa, le chapelain a ouvert la chapelle catholique Notre-Dame de Lorette au culte musulman et désormais les photos de la Mecque et les tapis de prière côtoient l’autel et la Croix. Dans la chapelle, une lampe orientale trône au milieu des rosaires et des encycliques du Pape François. Lorsqu’on tourne l’interrupteur, une psalmodie en arabe s’élève : « c’est une sorte de jingle du Ramadan – répond en souriant un employé musulman – ce sont des formules de bons vœux, un peu comme votre Noël ». Le chapelain, Don Ruggero Camagni hausse les épaules : « ils me l’ont laissée, je l’ai mise là, où est le mal ? »

Selon Marco Tosatti, vaticaniste au prestigieux journal La Stampa, même si cette initiative part certainement d’une bonne intention, il pourrait bien s’agir d’une erreur colossale, il nous explique pourquoi :

« Le lieu dans lequel une communauté musulmane prie devient Dar al-Islam, un lieu qui appartient pour toujours aux compagnons du Prophète. A la différence du reste du monde, l’Occident en particulier, qui est Dar al-harb, la maison de la guerre, c’est-à-dire la terre qui doit encore être soumise à la vraie foi.

C’est précisément la raison pour laquelle Saladin, après avoir conquis Jérusalem et avoir visité l’Eglise du Saint Sépulcre s’est comporté comme il l’a fait : il fit abattre la Croix, briser les cloches et y installa un portier musulman mais il ne voulut pas y prier, justement pour éviter que le Sépulcre ne devienne Dar al-Islam. Il souhaitait en fait que ce lieu puisse demeurer un lieu de pèlerinage chrétien, notamment pour des raisons économiques parce que le flux de pèlerins était favorable au commerce.

Ce n’est pas un hasard si la Conférence Episcopale Italienne a publié les recommandations suivantes dans un document pastoral :

« Afin d’éviter toute confusion et tout quiproquo dangereux, les communautés chrétiennes ne doivent pas mettre les Eglises, les chapelles ni les lieux de culte catholique ni leurs locaux paroissiaux à disposition pour des rencontres de fidèles de confessions non chrétiennes. C’est pour cela qu’avant de promouvoir des initiatives culturelles ou des rencontres de prière avec les non-chrétiens, il faut soigneusement en discerner le sens et garantir un style de rapport interreligieux correct en suivant les dispositions de l’Eglise locale ».

C’est ainsi que ces derniers mois, une réunion au plus haut niveau s’est tenue au Vatican, rassemblant le Pape et ses collaborateurs autour de la problématique du dialogue avec l’Islam et de ses nombreux aspects. Le responsable d’un important dicastère, qui a une grande expérience de cette question et du monde musulman, a affirmé qu’il fallait mettre nos agents pastoraux en garde pour éviter que, par naïveté, ils ne prêtent des églises ou des locaux car ces événements restent gravés dans la mémoire collective des fidèles musulmans et pourraient faire l’objet de revendications dans un futur plus ou moins lointain.

Donc, s’il y a un évêque à Milan, il devrait s’activer pour remédier à la bonne volonté du chapelain.

Source : Marco Tosatti, San Pietro e Dintorni, La Stampa

Diakonos.be

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10 janvier 2017 2 10 /01 /janvier /2017 17:54
« "Qui suis-je pour juger ?" "Mais, le pape, Très Saint-Père !" », abbé J de Pluvié - 10 janvier 2017

Si une personne est gay et cherche le Seigneur avec bonne volonté, qui suis-je pour la juger ? » Tournée en boucle comme un « tube » par les fossoyeurs de la morale catholique, cette courte interrogation du pape François (lors de son retour des Journées mondiales de la jeunesse à Rio le 29 juillet 2013) conduit finalement à remettre en cause une des opérations humaines les plus élémentaires : le jugement moral.

Car dès lors que le chef suprême de l'Église n'est pas habilité à juger des pratiques contrenature d'un homosexuel qui, surtout s'il cherche Dieu, devrait tout simplement les abandonner, quel individu pourra se permettre de porter des jugements sur autrui ? Si un homme est terroriste, s'il est pédophile, et s'il cherche le Seigneur, qui suisje pour juger ? À la rigueur, allons jusqu'à l'ultime conséquence de cette réflexion pontificale : si même quelqu'un ne cherche pas le Seigneur, qui suis-je pour juger ?

Faudra-t-il laisser toute sentence morale à Notre-Seigneur Jésus-Christ ? Pour répondre à cette question, que chacun se demande : qui suis-je ? Un homme, un être doué de raison dont le jugement me permettra de me conduire vers le bien, vers mon salut, et si je suis responsable d'autrui (parent, dirigeant, chef au sein d'une société civile ou ecclésiastique), de faire régner la paix et la justice, de corriger mes subordonnés avec prudence dans le domaine qui m'incombe, ou d'enrayer la propagation du mal.

Certaines recommandations de l'Écriture sainte sembleraient cependant corroborer la retenue du pape qui reprend d'ailleurs presque mot pour mot une réflexion de saint Jacques : « Mais qui es-tu, toi qui juges le prochain ? » (Jc 4, 12) Notre- Seigneur dit aussi : « Ne jugez point afin que vous ne soyez pas jugés. » (Mt 7, 1) Dans l'une de ses paraboles, le Christ reproche à demi-mot au pharisien de se faire l'inquisiteur de la vie morale du publicain. Mais il n'est pas besoin d'avoir suivi de hautes études pour comprendre que les passages cités stigmatisent seulement le jugement téméraire, malveillant ou sans fondement sérieux. Les accusations hâtives et divulguées inconsidérément demeurent une tare malheureusement trop fréquente de la nature humaine, même en milieu chrétien. Si les paroles oiseuses nous seront reprochées, que dire des réquisitoires sans pitié envers les autres ? Ce que Notre-Seigneur condamne, c'est de « juger selon l'apparence » (Jn 7, 24), de « juger selon la chair » (Jn 8, 15).

D'autres paroles de l'Écriture demandent au contraire le jugement : « Jugez selon la justice. » (Jn 7, 24) Dans ses paraboles, Notre-Seigneur Jésus- Christ réclame un discernement : Lazare et le mauvais riche, le levain des pharisiens, l'obole de la veuve, l'arbre qui se juge à ses fruits. Saint Jacques nous encourage à la correction fraternelle : « Mes frères, si quelqu'un d'entre vous s'égare loin de la vérité, et qu'un autre l'y ramène, qu'il sache que celui qui ramène un pécheur de la voie où il s'égare, sauvera son âme de la mort, et couvrira une multitude de péchés. » (Jc 5, 19-20)

Comment donc corriger le prochain, avec charité s'entend, si un certain jugement ne se formule pas à son encontre ? Comment éduquer et diriger droitement un enfant si son responsable doit suspendre le jugement sur son agir ? Comment faire régner la paix et la justice si l'autorité compétente devait en toutes circonstances s'enquérir du for interne pour donner une ligne de conduite ou condamner les actions évidemment mauvaises ? Bien sûr, connaissant la faiblesse humaine que supportent aussi bien le pécheur que son juge, le prochain doit faire preuve d'indulgence parce qu'il est lui-même pécheur et que, la plupart du temps, il ne connaît pas tous les motifs de l'action. L'autorité doit également exercer la clémence afin de « ne pas éteindre la mèche qui fume encore ».

Mais, le « qui suis-je pour juger ? » jette le trouble dans les rangs catholiques et réjouit les ennemis de l'Église parce que, loin d'enrayer le scandale, il le propage à sa manière.

Dans son commentaire de la Somme Théologique de saint Thomas sur la correction fraternelle, le père Noble nous éclaire sur la prudence (et aussi la justice) du chef qui doit savoir distinguer : « Ne serait pas un chef prudent qui ne ferait pas l'exact partage entre les fautes secrètes et sans préjudice pour le bien commun et les délits publics qui, par leur scandale ou par leur nocivité, portent atteinte à ce même bien commun. »

L'exclamation d'un fidèle résumera à merveille notre sujet : « Qui suis-je pour juger ? » « Mais, le pape, Très Saint- Père ! »

Abbé Jehan de Pluvié, prêtre de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X

Sources : Fideliter n° 233 / La Porte Latine du 10 janvier 2017

Note de Christ-Roi. "Qui suis-je pour la juger ? » Tournée en boucle comme un « tube » par les fossoyeurs de la morale catholique, cette courte interrogation du pape François (lors de son retour des Journées mondiales de la jeunesse à Rio le 29 juillet 2013) conduit finalement à remettre en cause une des opérations humaines les plus élémentaires : le jugement moral..."

 

En effet, surtout que pendant que l'Eglise abdique son droit divin de dire le bien et le mal, son droit de juger, de distinguer et d'évaluer, les hommes et le monde, eux, s'arrogent ce droit depuis 1789 ! Une inversion totale. Si donc un laïque a le droit de juger de questions morales, si l'Etat a le droit de dire le bien et le mal en dehors de Dieu, à combien plus forte raison l'homme de Dieu..., à combien plus forte raison l'Eglise ?

 

"L'homme spirituel juge de tout, et il n'est lui-même jugé par personne." (1 Corinthiens 2, 14-15)

Si l’Eglise ne juge pas, ne distingue pas, ne dit plus le bien et le mal, et ne permet pas d’évaluer, quelle est sa fonction ? "Tout ce que vous lierez sur la terre sera lié dans le ciel et tout ce que vous délierez sur la terre sera délié dans le ciel." (Evangile selon S. Matthieu 18,18)

 

Lire : Si l’Eglise ne juge pas, ne distingue pas, ne dit plus le bien et le mal, et ne permet pas d’évaluer, quelle est sa fonction ?

 

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10 janvier 2017 2 10 /01 /janvier /2017 10:32
Si l’Eglise ne juge pas, ne distingue pas, ne dit plus le bien et le mal, et ne permet pas d’évaluer, quelle est sa fonction ?

Si l'Eglise ne juge pas, ne dit plus le bien et le mal, mais le laisse à la conscience, au cas par cas...,

 

Lire : Les problemes moraux de la nouvelle pastorale : "les effets très diviseurs d'Amoris laetitia" (Père Mark A. Pilon)

 

quelle est sa fonction?

 

Le journaliste et écrivain Aldo Maria Valli, lauréat en sciences politiques à l'université catholique du Sacré Cœur de Milan, s'interroge dans le même sens :

Si l’Eglise ne juge pas, ne distingue pas, ne dit plus le bien et le mal, et ne permet pas d’évaluer, quelle est sa fonction ?

« Il n'est pas étonnant, surtout après “Amoris laetitia”, que de nombreux observateurs aient annoncé la naissance d’une nouvelle Eglise, “l’Eglise du Pape François”, une Eglise qui ne juge plus, mais qui dialogue dans le sens où la culture dominante entend le dialogue : c’est-à-dire, une Eglise neutre, privée de la capacité et de la volonté de distinguer, d’évaluer, de porter un jugement.

Mais une question est inévitable : si l’Eglise ne juge pas, ne distingue pas et ne permet pas d’évaluer, quelle est sa fonction ? Le Pape François, avec son paradigme pastoral de la miséricorde, semble répondre que le but de l’Eglise est de consoler et d’accompagner. Mais peut-il y avoir consolation sans évaluation ? Peut-il y avoir accompagnement sans jugement ? Le Pape aurait-il décrété que la façon subjective de vivre une expérience est le seul critère capable d’évaluer la qualité morale de l’expérience elle-même ?

Si, en 1972, Paul VI souffrant arriva à la conclusion que “par quelque fissure la fumée de Satan est entrée dans l’Eglise”, nous pouvons nous demander aujourd’hui : le relativisme est-il aussi entré à travers ces fissures ? » Aldo Maria Valli.

Source: Pro Liturgia, Actualité du mardi 10 janvier 2017

Pendant que l'Eglise abdique son droit divin de dire le bien et le mal, les hommes et le monde s'arrogent, eux, depuis 1789, le droit de dire le bien et le mal (système dans lequel aucune loi divine - pas même naturelle - n'est supérieure au droit positif). Une inversion totale. Inutile de se demander pourquoi le monde bascule dans le totalitarisme et tombe en décadence !

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10 janvier 2017 2 10 /01 /janvier /2017 09:43
"Dans une solution à un seul État, Israël ne peut pas rester simultanément un État juif et une démocratie" (Alain Finkielkraut)

C’est peu dire que l’abstention des États-Unis lors du vote de la résolution 2334 au Conseil de sécurité de l’ONU, résolution condamnant fermement la poursuite des implantations de peuplement en territoire palestinien, a provoqué l’ire d’Israël, gouvernement et opposition réunis, des Français juifs et des amis d’Israël chez nous comme ailleurs. Dans la presse internationale, John Kerry et Barack Obama ont été cloués au pilori et, sur les réseaux sociaux, les accusations d’antisémitisme ont fusé comme des orgues de Staline.

 

[…] Aussi, j’attendais avec une certaine curiosité l’intervention d’Alain Finkielkraut dans l’émission « L’Esprit de l’escalier » sur RCJ à ce sujet. Ô surprise, voilà que le philosophe le plus médiatique de France, prenant tout le monde à contre-pied, nous fit l’éloge de John Kerry et qualifia le discours que le secrétaire d’État avait prononcé pour expliquer le vote américain de rien moins que d’admirable (sic).

 

En prenant cette position risquée, Alain Finkielkraut non seulement fait preuve de courage mais nous ramène à ce qui conditionne la réflexion du philosophe : l’objectivité. En une phrase courte mais capitale tirée du discours de John Kerry, phrase qu’il revendique intégralement, Alain Finkielkraut pose le problème du conflit israélo-palestinien dans sa dimension politique, loin des émotions et du parti pris :

 

« La seule solution viable pour Israël, c’est la solution à deux États ; dans une solution à un seul État, Israël ne peut pas rester simultanément un État juif et une démocratie. »

 

[…] Quant à l’annexion pure et simple, elle impliquerait soit de réserver aux Palestiniens un statut particulier, à les priver d’un certain nombre de droits politiques, en somme à instaurer un régime d’apartheid, soit de leur donner les mêmes droits qu’aux juifs et rapidement, du fait du déséquilibre démographique entre les deux communautés, Israël perdrait son caractère d’État juif, qui est sa raison d’être.

Note de Christ-Roi. "Dans une solution à un seul État, Israël ne peut pas rester simultanément un État juif et une démocratie". Appliqué à la France cela donnerait : dans une solution où l'on garderait le niveau actuel d'immigration, la France ne peut pas rester simultanément un Etat français et une démocratie... Pourquoi ce que l'on peut dire pour Israël sans être traité de raciste, "facho" (garder le "caractère juif d'Israël"), ne le serait-il pas pour nous ? A un moment ou à un autre, les faits étant ce qu'ils sont, il faudra bien aussi un peu d'objectivité pour la France.

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9 janvier 2017 1 09 /01 /janvier /2017 10:29

Les prêtres qui souhaitent célébrer la messe “versus orientem” dans les paroisses ne doivent pas hésiter à le faire sans avoir à se justifier à qui que ce soit, pas même à leur évêque. Il leur faudra préalablement expliquer aux fidèles le bien-fondé de cette pratique en utilisant, si besoin, un argument-choc : le Pape François a lui-même donné l’exemple de la célébration “orientée” à l’occasion de la fête du baptême du Christ...

François célèbre la Messe "versus orientem" à l’occasion de la fête du Baptême du Christ

Source: Pro Liturgia, Actualité du lundi, 9 janvier 2017

Cette Messe "versus orientem" (orientée vers le Seigneur), au début de laquelle le Pape a baptisé des enfants, a été filmée. En voici la video, "Eucharist with Baptism of infants" :

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7 janvier 2017 6 07 /01 /janvier /2017 16:51
https://twitter.com/CardinalNapier/status/816969704489308160

https://twitter.com/CardinalNapier/status/816969704489308160

Le Cardinal Napier, archevêque de Durban (Afrique du Sud), s'est interrogé sur « twitter » jeudi 5 janvier :

 

"Si les Occidentaux en situation irrégulière peuvent recevoir la communion, devons-nous dire à nos polygames et  aux autres ‘personnes en situation irrégulière’ qu'ils sont eux aussi autorisés?"

Cardinal Napier : Communion pour les polygames ?

Source: GloriaTv

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7 janvier 2017 6 07 /01 /janvier /2017 15:50

"L’accentuation des inégalités spatiales montre que le modèle métropolitain (mondialisé Ndlr.) ne favorise pas l’ouverture et la mixité, mais la ségrégation." La séparation de la bobocratie qui se claquemure dans ses métropoles en attendant la création de cités-Etats, se paye par la sécession symétrique et silencieuse de la France périphérique qui veut préserver sa culture, son mode de vie, sa sociabilité, ses institutions… qui sont "menacés par l’immigration que nous subissons depuis quarante ans."

Dans ce double mouvement opposé, "la bobocratie est en perdition du fait du lent processus de désaffiliation sociale et culturelle des classes populaires."

La caste métropolitaine se heurte au problème du maintien de sa domination : "comment assurer l’avenir d’un modèle mondialisé rejeté par une majorité de l’opinion ?’’ ‘’Le discours de la classe dominante n’a plus aucune prise sur le réel, il fait apparaître une France privilégiée mais hors sol, une « France du vide »’’... 

L’oligarchie pourrait "tenter de reprendre la main et de limiter la pratique de la démocratie mais elle ne réussira pas à conserver le pouvoir durablement." Telles sont les grandes lignes du nouveau livre passionnant du géographe Christophe Guilluy., "Le Crépuscule de la France d'en haut" (Flammarion) et qu'un article du site "Breiz Info" présente.

 

 

Le géographe Christophe Guilluy vient de publier Le crépuscule de la France d’en haut (Flammarion), un ouvrage passionnant dans lequel il met en évidence la partition géographique, culturelle et sociale des deux France qui se font désormais face : d’une part, la France des bourgeois-bohêmes (très minoritaires) qui profitent de la mondialisation libérale et qui règnent sans partage sur la quinzaine de métropoles françaises et d’autre part, la France périphérique des perdants (très majoritaires) de cette même mondialisation. L’oligarchie a choisi de concentrer les richesses dans ces quinze métropoles dans lesquelles elle vit à l’écart des ‘’red-necks’’ de la périphérie qui sont supposés être fascistes.

La minorité de privilégiés qui bénéficie des effets de la mondialisation libérale pratique un apartheid qui ne dit pas son nom et utilise les lois du marché qui, du fait de l’augmentation du prix des biens immobiliers dans ces quinze métropoles, permettent de créer une barrière de verre infranchissable sans avoir à utiliser les méthodes habituelles (murs, grillages, forces de l’ordre…).

Une partie de la population de ces métropoles est d’origine immigrée et accepte de vivre dans des zones résiduelles de moindre qualité et désertées par les autochtones qui ne veulent plus vivre au contact de populations aux mœurs par trop différentes des leurs. Cette population immigrée sert d’alibi aux privilégiés qui se veulent ouverts aux autres et leur permet, en fait, de disposer d’une main d’œuvre bon marché dans le domaine des services domestiques et commerciaux (restaurants…).

 

Les bobos sont les bourgeois du XXIème siècle qui se donnent bonne conscience en participant au combat fantasmatique contre le fascisme et le racisme.  Fantasmatique parce que le danger fasciste n’existe pas (Jospin lui-même l’a reconnu) et parce que les Français ne sont pas racistes (seule une très petite minorité l’est) ; ils veulent seulement préserver leur culture, leur mode de vie, leur sociabilité, leurs institutions… qui sont menacés par l’immigration que nous subissons depuis quarante ans.

L’idéologie de la bobocratie est véhiculée par la quasi-totalité des médias mais, malgré cela, les Français ne tiennent plus compte des sermons, des mises en garde, des menaces, des injures, des mensonges qu’ils profèrent à longueur d’année. 90% d’entre eux ne leur font pas confiance (lors d’un sondage fait récemment par une radio très connue, 91% des auditeurs ont répondu que les journalistes sont des menteurs !) et Marine Le Pen a été la personnalité politique préférée par les Français en 2016, devant tous les candidats du système ! La bobocratie est en perdition, en France, comme en Grande-Bretagne, aux Etats-Unis, en Europe centrale et à peu près partout dans le monde occidental.

L’idéologie de la métropole

 L’idéologie de la métropole est celle d’une nouvelle bourgeoisie, libérale-libertaire, dont le modèle est celui de la Silicon Valley californienne. Comme l’a écrit Jean-Claude Michéa, cité par l’auteur, : ‘’Ce modèle repose en effet sur cette idéologie libérale-libertaire qui « constitue depuis des décennies la synthèse la plus accomplie de la cupidité des hommes d’affaires libéraux et de la contre-culture californienne de l’extrême-gauche des sixties »’’. Cette nouvelle bourgeoisie, cool et décontractée, n’en partage pas moins avec la bourgeoisie du passé, un mépris à peine voilé pour les classes populaires : ‘’D’un côté des métropoles embourgeoisées qui travaillent, de l’autre une France périphérique peuplée d’assistés. Une représentation condescendante des classes populaires qui est, à peu de choses près, celle de la bourgeoisie traditionnelle depuis au-moins les Rougon-Macquart !’’. ‘’Bénéficiaires d’un modèle économique et territorial qui assure aussi leur hégémonie politique et culturelle, les classes supérieures métropolitaines sont les gardiennes du temple libéral’’.

Dans ces métropoles désertées par les gros bataillons des autochtones les plus modestes au cours des vingt-cinq dernières années, il y a une population d’origine immigrée qui permet aux privilégiés de disposer d’une main d’œuvre peu exigeante, disponible pour des activités de services domestiques et commerciaux et qui leur donne le sentiment de vivre dans un univers mondialisé et ouvert , ce qui n’est qu’un trompe-l’œil : ‘’Cette présence populaire et immigrée permet aux tenants de la métropolisation de mettre en avant l’image d’une ville ouverte et mixte. La réalité est que la présence de ces catégories ne freine qu’à la marge le processus d’éviction des catégories modestes des métropoles. Par ailleurs, l’accentuation des inégalités spatiales montre que le modèle métropolitain ne favorise pas l’ouverture et la mixité, mais la ségrégation’’.

Les bourgeois-bohêmes ou la nouvelle bourgeoisie

Selon Christophe Guilluy, les bobos ont horreur de cette appellation parce qu’elle contient  le mot « bourgeois ». Ils ne peuvent pas imaginer qu’ils sont les nouveaux privilégiés, ceux qui profitent d’un système économique très dur pour l’immense majorité des Français (ou des Italiens, ou des Anglais…..la situation est la même partout). Pour se donner bonne conscience, le bobo affiche sa solidarité avec les homosexuels, les immigrés et les victimes des guerres. Çà ne lui coûte pas cher ; un tweet de temps en temps et la participation à une manifestation lui donnent l’impression d’être un rebelle. Le bobo vit claquemuré dans sa métropole dont il pense qu’elle est un monde ouvert, à la différence de la France périphérique qui serait, selon lui, intrinsèquement « pétainiste ». En fait, tout cela est faux. Le bobo est le bourgeois du vingt et unième siècle ; un bourgeois hypocrite qui essaie de dissimuler son aisance derrière un look débraillé et un langage branché, « cool ». ‘’Derrière le mythe de la société ouverte et égalitaire des métropoles cosmopolites, nous assistons donc au retour des citadelles médiévales, de la ville fermée, et à la consolidation d’un modèle inégalitaire de type anglo-saxon… Détachée de toute appartenance collective autre que celle de son milieu, la nouvelle bourgeoisie surfe sur la loi du marché pour renforcer sa position de classe, capter les bienfaits de la mondialisation et se constituer un patrimoine immobilier qui rivalisera demain avec celui de l’ancienne bourgeoisie’’.

 L’idéologie des bobos est un libéralisme poussé dans ses plus extrêmes conséquences en matière d’individualisme ; ce qui se traduit par un mondialisme radical, une désaffiliation à l’égard de toute communauté autre que socio-économique, une approbation totale du libéralisme économique et un libertarisme radical en matières de mœurs.

L’antifascisme : une rhétorique qui vise à dissimuler une guerre de classes

Les bobos se donnent bonne conscience en ‘’militant’’ contre le racisme et contre le fascisme, deux maux illusoires dont ‘’Lionel Jospin reconnaîtra plus tard que cette « lutte antifasciste en France n’a été que du théâtre » et même que le « Front National n’a jamais été un parti fasciste »’’. Quant au racisme qui est peu fréquent au sein de la population autochtone, il est surtout le fait des immigrés musulmans dont l’antisémitisme est fréquent et parfois même criminel. ‘’Véritable arme de classe, l’antifascisme présente en effet un intérêt majeur. Il confère une supériorité morale à des élites délégitimées en réduisant toute critique des effets de la mondialisation à une dérive fasciste ou raciste. Mais, pour être durable, cette stratégie nécessite la promotion de l’ « ennemi fasciste » et donc la sur-médiatisation du Front National’’. ‘’La France du repli d’un côté, des ploucs et des ruraux, la France de l’ouverture et de la tolérance de l’autre. Mais qu’on ne s’y trompe pas, cet « antiracisme de salon » ne vise absolument pas à protéger l’ « immigré », le « musulman », les « minorités » face au fascisme qui vient, il s’agit d’abord de défendre des intérêts de classe, ceux de la bourgeoisie’’. Intérêts de classe qui sont dénoncés par la France périphérique qui, elle, ne profite pas de la mondialisation voulue par la nouvelle bourgeoisie et qu’il faut réduire au silence en la méprisant et en l’injuriant.‘’Car le problème est que ce n’est pas le Front National qui influence les classes populaires, mais l’inverse. Le FN n’est qu’un symptôme d’un refus radical des classes populaires du modèle mondialisé. L’antifascisme de salon ne vise pas le FN, mais l’ensemble des classes populaires qu’il convient de fasciser afin de délégitimer leur diagnostic, un « diagnostic d’en bas » qu’on appelle « populisme »’’.

Le séparatisme des bobos

Les bobos ont abandonné toute idée de nation et l’Union européenne n’est, pour eux, qu’une étape vers un monde unifié dont les pôles seraient les métropoles dans lesquelles seraient rassemblées les élites culturelles, financières et techniques. Dans ce monde des métropoles interconnectées, les zones comprises entre elles seraient des zones réservées aux « losers » et seraient ignorées de la caste métropolitaine : ‘’Dans une tribune commune, Anne Hidalgo et Sadiq Khan font l’apologie du dynamisme des villes globales et ouvertes qu’ils opposent à la léthargie des Etats-nations, considérés comme le cadre du repli sur soi. Structurellement minoritaires, les partisans de l’ordre mondialisé prônent donc maintenant l’indépendance de leurs citadelles et l’abandon des périphéries populaires ! Les grands contempteurs de la France ou de l’Angleterre du repli préconisent ainsi le repli territorial de la bourgeoisie. Cependant, en attendant la création de ces cités-Etats, les classes dominantes et supérieures devront se confronter à un problème existentiel : comment assurer l’avenir d’un modèle mondialisé rejeté par une majorité de l’opinion ?’’.

Le mythe d’un monde nomade

L’idée que les bobos se font du monde est celle d’un monde de nomades (l’ineffable Jacques Attali a dit que sa seule patrie était son ordinateur !). Or les études démographiques et sociologiques montrent qu’il en va très différemment.  ‘’ Contrairement à ce que laisse entendre le discours dominant, la majorité des gens sont sédentaires : ils vivent dans les pays, régions ou départements où ils sont nés… en France comme dans le monde, les classes populaires vivent et préfèrent vivre, là où elles sont nées. Si les gens apprécient le « voyage », le tourisme, ils ne choisissent pas le déracinement’’. L’idée d’un monde fluide, atomistique, est celle que tentent de nous imposer les classes dominantes libérales pour lesquelles il n’est de réalité qu’individuelle. ‘’Cette représentation permet d’imposer efficacement l’idée d’une société hors sol, d’individus libérés de toutes attaches, circulant comme les marchandises au gré de l’offre et de la demande, contrairement aux classes populaires réticentes au changement et tentées par le « repli »’’. Les nomades ne sont qu’une toute petite minorité au plan mondial et les sociétés enracinées restent la norme.

Les préoccupations ethnoculturelles de la France d’en bas

 La classe dominante rabat la contestation du système qu’elle impose sur les seuls succès électoraux du Front National mais cette contestation est le fait d’une part beaucoup plus importante du peuple français. Ce sont environ 70% de nos compatriotes qui considèrent qu’il y a trop d’immigrés et 60% qui ne se sentent plus vraiment chez eux. Le Front National a donc une marge de progression énorme s’il n’abandonne pas ce qui a fait son succès : la lutte prioritaire contre l’immigration et pour la préservation de la culture nationale. Christophe Guilluy souligne le fait que ce sont les plus âgés des Français qui continuent de soutenir le système tandis que ce sont les plus jeunes, surtout ceux des milieux populaires, qui, au contraire, le contestent massivement. Un sondage CEVIPOF de mai 2016, ‘’révèle ainsi que 37% des jeunes issus du milieu ouvrier et 60% des primo-votants chômeurs accorderaient leurs suffrages à Marine Le Pen, contre 17% des jeunes issus des catégories cadres et professions intellectuelles supérieures. L’étude souligne que « Marine Le Pen est particulièrement visible au sein des primo-votants issus de l’immigration européenne (Espagne, Italie et Portugal) et crée en cela une fracture politique et électorale au sein même de la population issue de l’immigration »’’. La tendance est donc au renforcement des contingents d’électeurs dits ‘’populistes’’, ce qui est confirmé par Jérôme Fourquet de l’IFOP  qui a dit ‘’que désormais les ressorts électoraux des électeurs populaires sont essentiellement « ethno-culturels »’’ (cité par Christophe Guilluy). ‘’Débarrassées des affiliations politiques traditionnelles, les classes populaires réinvestissent leur capital social et culturel. Ce processus n’est pas le signe d’un repli, mais la réponse à un modèle libéral mondialisé qui détruit les solidarités’’. Les classes populaires de la ‘’périphérie’’ (60% des Français selon Guilluy et non pas les quelques 15 à 20% de ruraux âgés et éloignés de tout dont parlent les statistiques officielles) rejettent désormais la mondialisation libérale et la culture qui lui est associée tout en se raccrochant à la culture nationale (le seul recours disponible puisqu’il n’y a pas de culture européenne et qu’il n’y a plus de cultures régionales dynamiques hormis dans quelques régions) qui lui sert de refuge, ce qui se traduit par un ré-enracinement strictement national qui court-circuite les projets européens du passé. Il semble bien que, comme l’a dit récemment Viktor Orban,  la nation ait de beaux jours devant elle.

Les bobos sont en train de perdre la partie

 ’C’est par ces périphéries que la France d’en haut est en train de perdre le contrôle. Maastricht a été le premier coup de semonce, le référendum de 2005, le deuxième. La déstabilisation ne viendra pas d’un hypothétique « grand soir », mais du lent processus de désaffiliation sociale et culturelle des classes populaires. De la classe politique au monde culturel et intellectuel en passant par les médias, l’ensemble de la classe dominante commence à redouter les conséquences du marronnage des classes populaires. Car il rend visible un conflit de classes, aux soubassements désormais sociaux et identitaires, et dont on a longtemps prétendu qu’il n’existait pas’’.  Désormais, l’antifascisme et l’antiracisme, les deux armes de la bourgeoisie bobo n’impressionnent plus personne. ‘’C’est terminé. Les classes populaires ne parlent plus avec les « mots » de l’intelligentsia. Le « théâtre de la lutte antifasciste » se joue devant des salles vides’’. ‘’Le discours de la classe dominante n’a plus aucune prise sur le réel, il fait apparaître une France privilégiée mais hors sol, une « France du vide »’’.

Des bobos sur la voie du totalitarisme

L’oligarchie commence à comprendre qu’au plan démocratique elle a perdu la partie et qu’elle ne maîtrise plus l’évolution de l’opinion (le Brexit et l’élection de Trump ont montré que, désormais, des changements de fond sont possibles malgré les tirs de barrage de l’oligarchie ; Breitbart et d’autres sites de moindre importance ont permis ces deux victoires électorales qui ont sidéré la bobosphère). Sûre et certaine de détenir la seule et unique vérité, elle réagit en dénonçant les travers de la démocratie et en affirmant de plus en plus clairement sa préférence pour un modèle despotique (forcément « éclairé ») : ‘’Réunie sous la bannière de l’antifascisme, partageant une représentation unique (de la société et des territoires), les bourgeoisies de gauche et de droite sont tentées par le parti unique. « Si les intellectuels sont portés au totalitarisme bien plus que les gens ordinaires » (Simon Leys), une tentation totalitaire semble aussi imprégner de plus en plus une classe dominante délégitimée, et ce d’autant plus qu’elle est en train de perdre la bataille des représentations. Ainsi, quand la fascisation ne suffit plus, la classe dominante n’hésite plus à délégitimer les résultats électoraux lorsqu’ils ne lui sont pas favorables. La tentation d’exclure les catégories modestes du champ de la démocratie devient plus précise’’.

Quand Alain Minc déclare que le Brexit, « c’est la victoire des gens peu formés sur les gens éduqués » ou lorsque Bernard-Henri Lévy insiste sur la « victoire du petit sur le grand et de la crétinerie sur l’esprit », la volonté totalitaire des classes dominantes se fait jour’’. Cette arrogance et ce mépris se sont manifestés à nouveau lors de la victoire électorale de Donald Trump dont l’oligarchie a stigmatisé les électeurs d’en bas forcément abrutis, incultes et alcooliques. L’oligarchie dépitée ne sait plus qu’injurier le peuple ; elle va tenter de reprendre la main et de limiter la pratique de la démocratie mais elle ne réussira pas à conserver le pouvoir durablement. Ironie de l’histoire, cette oligarchie ne sera même plus tentée de se réfugier aux États-Unis qui sont désormais dirigés par un nouveau diable. Prise en sandwich entre Poutine et Trump, désavouée en Grande-Bretagne et en Italie, dénoncée par les leaders politiques d’Europe centrale, rejetée par toutes les périphéries, en France et ailleurs, la bobocratie est en perdition !

Bruno Guillard

Christophe Guilluy – ‘’Le crépuscule de la France d’en haut’’ – Editions Flammarion

Photo : DR
[cc] Breizh-info.com, 2017 Dépêches libres de copie et diffusion sous réserve de mention de la source d’origine

 

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5 janvier 2017 4 05 /01 /janvier /2017 11:53

Charles-Emmanuel de Bourbon-Parme a créé en 2005 l'association "Nouveau Dialogue", une association qui organise des débats sur tous les sujets devant un public élargi, avec des experts des questions en jeu, sur la base de la "liberté d'expression", "afin de préserver cette liberté, si rare aujourd'hui".

 

En fin d'entretien, il condamne ce manichéisme qui avait été en son temps combattu par S. Augustin, et dont Daniel-Rops nous dit qu'aujourd'hui, "il n'est pas sûr qu'on ne puisse repérer encore, jusque dans certains traits de l'âme moderne, des traces de la vieille tentation dualiste" [1]  :

"Quelle que soit la situation, il faut toujours essayer de voir le caractère positif de la chose. Rien n'est jamais perdu, et même lorsqu'il n'y a que de la noirceur devant nous, on doit encore utiliser celle-ci pour grandir en pensant à d'autres voies possibles pour y échapper. Pour cela il ne faut pas hésiter à regarder toutes les solutions, sans a priori, y compris les chemins de traverse." (Charles-Emmanuel de Bourbon-Parme, Entretien à Vexilla-Galliae) [2]

"Il faut toujours essayer de voir le caractère positif de la chose. Rien n'est jamais perdu" (Charles-Emmanuel de Bourbon-Parme)

Sources

 

[1] DANIEL-ROPS, Histoire de l'Eglise du Christ, tome II Les Apôtres et les Martyrs, Librairie Arthème Fayard, Paris 1965, p. 404

[2] Entretien avec le prince Charles-Emmanuel de Bourbon-Parme Publié dans Vie des royalistes, le jeudi 5 janvier 2017 par Gabriel Privat

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5 janvier 2017 4 05 /01 /janvier /2017 11:34
Le prince impérial Andreï Andreïevitch Romanov, l’actuel successeur du trône de Russie

Le prince impérial Andreï Andreïevitch Romanov, l’actuel successeur du trône de Russie

Quand il signa « the boy who would be tsar » (le garçon qui serait tsar), le vieil artiste Andreï Andreïevitch Romanov (aussi connu comme Andrew Andreyevich Romanoff) était, aussi surprenant soit-il, troisième sur la dernièrement chaotique ligne de succession de Russie, bien que plus jeune il n’aurait jamais deviné que ses cousins Nicolas et Dimitri, de la même génération, resteraient sans enfants. Celui qui fut le chef de la maison Romanov pendant vingt ans, Nicolas, mourut en septembre 2014, suivi par son frère Dimitri ce 31 décembre 2016. De fait Dimitri n’a été chef de la maison impériale que le temps de recevoir l’invitation d’Etat à rentrer en Russie, et mourut exactement la veille de cette cruciale année 2017.

 

L’invitation officielle lancée en juin 2015, pour le millénaire de la mort de Saint-Vladimir le baptiseur de la Russie, fut aussi envoyée à Maria Vladimirovna, la soi-disant « grande duchesse » (un titre exclusivement réservé aux enfants et petits-enfants d’un empereur régnant) qui clame la tsarité de Cyrille, le « tsar » autoproclamé en 1924 jamais reconnu par le Zemski Sobor (sorte d’Etats Généraux), ni par la maison impériale (et qui n’a jamais régné). Comme on le comprend aisément, le gouvernement actuel ne peut pas se mêler des disputes dynastiques, mais doit ramener et donner à la Russie ce dont le pays orphelin a besoin. Puisque, selon les vieilles et imparfaites règles de succession de Paul 1er (que seul un empereur en fonction peut amender), personne n’est formellement éligible, la première (prochaine) personne à représenter l’héritage impérial au sein de l’État ne peut être installée que par exception. La Providence règlera alors l’affaire et scellera la transition. Mais il est impossible de faire incarner quoi que ce soit en un fantôme, ou un aspirant in absentia (à l’étranger). La Russie a besoin d’un Romanov en Russie.

 

Parmi les avantages les plus évidents de tout système de succession héréditaire figure le fait que, puisque personne ne choisit l’élu (qui dans l’idéal ne peut pas refuser son devoir), il est totalement indépendant de tout pouvoir de pression. Mais la fortune fait parfois très bien les choses. L’intronisation d’un vieux Nicolas ou Dimitri sans enfants n’aurait pas empêché l’apparition d’une contestation successorale, de la part de la branche de Cyrille, à la mort de Dimitri. L’intronisation d’Andreï Andreïevitch [Photo ci-dessus] signifie la succession automatique de son fils Alexis Andreïevitch, né en 1953, apportant par là une espérance de stabilité (d’après les trois précédents) d’une trentaine d’années, largement suffisante pour assurer et normaliser la fonction avant la question de sa propre succession. La Providence a pourvu. Maintenant les hommes (Andreï et Alexis) doivent répondre à l’appel de leur devoir. Ils y seront nourris.

 

En juin 2015, lorsque la Région de Léningrad a proposé d’héberger officiellement les rapatriés dans une résidence impériale de Saint-Pétersbourg, Vladimir Petrov proposa aussi le palais Livadia en Crimée, s’exprimant donc manifestement au nom de la présidence de la Fédération. La fonction protocolaire serait de représenter et personnifier la dynastie et la nation, et fut alors comparée à la fonction du roi ou de la reine au Royaume-Uni et aux Pays-Bas d’aujourd’hui. Bien sûr le gouvernement ne pourrait passer que l’autorité dont il dispose, constitutionnelle. Du point de vue du droit constitutionnel, et comme pour un empereur, une personnification institutionnellement reconnue de l’histoire impériale (qui est la fonction actuellement proposée par le gouvernement russe) ne peut pas être élevée plus haut par un corps de hiérarchie subalterne, aussi pour aller plus loin la Russie devra recourir aux seuls corps sociaux qui ont une plus grande légitimité historique et sociale que l’Etat constitutionnel actuel, en l’occurrence l’Eglise et la société civile. Cela viendrait plus tard, les peuples russes réalisant de nouveau qu’un grand pays ne peut pas dépendre de la bonne volonté de volontaires intérimaires élus à titre temporaire, mais a au contraire besoin d’une institution stable offrant une direction à long terme quels que soient les mérites, les compétences et la longévité des individus.

 

Pour l’heure, le gouvernement russe est prêt à donner, au sein de l’État, un statut institutionnel permanent à la famille impériale avant les commémorations de la révolution et des assassinats. La Russie doit d’urgence attribuer la présidence honoraire des célébrations réconciliatoires de 2017. Les développements ultérieurs appartiennent à l’Histoire.

 

Puisse Dimitri reposer en paix. Puissent Andreï et Alexis répondre maintenant. (Source Stratdiplo)

 

L’initiative officielle est venue du député Vladimir Petrov du parti présidentiel, « Russie unie », qui a préparé un texte de loi qui devrait entrer en vigueur à l’occasion du centenaire de la chute du Tsar Nicolas II, en 1917. Rappelons que 2017 sera l’année de l’élection présidentielle russe. Vladimir Petrov entend « donner aux membres de la famille impériale un statut spécial » et « accélérer leur retour en Russie ».

 

Alexander Zakharov, directeur de la Maison Impériale des Romanov en Russie, a indiqué que plusieurs représentants de la dynastie étaient prêts à retourner en Russie.

 

Pourquoi maintenant ?

 

Une telle initiative de la part d’un parlementaire du parti présidentiel n’est pas anodine. Le président russe sait que les USA préparent une révolution de palais en Russie et que, à tout moment, une insuffisance gouvernementale peut aboutir à un coup d’état de la part d’oligarques liés à la finance anglaise et américaine. Sur le modèle de ce que firent les Bolcheviques en 1917-1918.

 

Avec en outre des menaces directes émanant des USA quant à leur volonté de démanteler la Russie en une multitude de républiques aisément manipulables, le chef de l’Etat Russe peut voir dans l’option monarchiste un moyen souple et efficace d’unifier le pays sur la base des principes plus que des partis ou des élections.

 

En outre, elle incarnerait le retour à la tradition déjà largement amorcé dans la Fédération de Russie. (source)

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4 janvier 2017 3 04 /01 /janvier /2017 17:16

Alors qu'il y a eu des suicides et que de plus en plus de professeurs démissionnent, le ministère reste silencieux... La "culture du dialogue" magnifiquement illustrée !

Suicides et démissions en série à l'éducation nationale : le ministère reste silencieux

Le nombre d'enseignants titulaires qui démissionnent de l'Éducation nationale a augmenté de 50% en quatre ans, selon un rapport publié en novembre. RMC a rencontré Nora, une professeure des écoles de 27 ans, qui raconte ce qui l'a poussée à quitter l'enseignement.

 

Les enseignants de plus en plus nombreux à claquer la porte de la salle de classe. Selon des données publiées dans un rapport sur le budget de l'Éducation nationale, le nombre de démissions a fortement augmenté depuis 2012, aussi bien chez les enseignants stagiaires que chez les titulaires. En quatre ans, le nombre de démissions d'enseignants stagiaires a triplé dans le primaire et doublé dans le secondaire. Une tendance qui se confirme chez les enseignants titulaires (+ 50% en quatre ans).

 

Le ministère n'a pas fourni d'explications selon l'auteur du rapport, rendu public le 24 novembre dernier. Parmi les explications évoquées: la décrédibilisation du métier d'enseignant et de professeur des écoles, le manque de rémunération ou encore la mauvaise répartition des enseignants dans les académies (les jeunes professeurs sont souvent affectés dans des établissements sensibles).

 

"Les élèves vous insultent et les parents vous traitent de menteur"

 

RMC a rencontré Nora, jeune professeure des écoles de 27 ans, qui a décidé de ne plus retourner en classe et d'abandonner le métier. "L'Éducation nationale, le système actuel, ont réussi à me dégoûter du métier", déclare-t-elle anonymement. Elle raconte: "Un enfant vous lui demandez d'aller se ranger, dans votre dos il va vous insulter. Des insultes qui peuvent être gravissimes. Les parents, vous savez que quand vous les allez les prévenir, ils vont vous traiter de menteur. J'ai eu des moments de bonheur dans mon métier quand même, mais j'ai eu plus de moments de souffrance malheureusement".

 

Nora ne comprenait plus les choix de sa hiérarchie. "On change sans arrêt de méthode d'évaluation, de livrets de note. La façon dont on est formé, la façon dont on nous met dans les classes. Parce qu'on nous met dans une classe… On ne nous confie pas une classe, on nous met dans des classes. Je ne suis pas la seule, j'ai connu beaucoup de collègues qui ont fait des dépressions, qui ont abandonné. C'est ça qui est grave aujourd'hui".

 

"Nous avons eu des suicides"

 

Face à cette situation, Albert-Jean Mougin, vice-président du Syndicat national des lycées et collèges, appelle à un sursaut de l'Éducation Nationale. "Le nombre de gens qui veulent démissionner va croissant, tout comme le nombre de gens qui souffrent. Nous avons eu des suicides. Il faut trouver des solutions maintenant!". Une plateforme en ligne a été créée par le syndicat pour permettre aux enseignants en détresse d'obtenir un accompagnement individuel.

 

P. Gril avec Benoît Ballet

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2 janvier 2017 1 02 /01 /janvier /2017 12:12

Dans un texte publié sur Catholic World Report le 30 décembre 2016, le Père Mark A. Pilon, prêtre du diocèse d'Arlington en Virginie (Etats-Unis), ancien président de la théologie systématique au Séminaire Mount St. Mary, expose les multiples problèmes moraux qui ne manqueront pas de se poser avec le développement de la nouvelle pastorale issue d'Amoris laetitia. Pour commencer, il ne faut pas croire que la solution à base de conscience personnelle va s'arrêter à la question des divorcés civilement et remariés. "Le même principe doit s'appliquer en dernier ressort aux unions homosexuelles, aux couples vivant en concubinage, et même à toute personne sexuellement active en dehors d'une union de mariage valide." Ce qui ne manquera pas de susciter "un torrent de solutions à base de 'for interne de la conscience', solutions à toutes les questions morales contestées".

 

Mais d'autres problèmes moraux ne manqueront pas de se poser des suites du nouveau principe et devraient déplaire cette fois-ci aux novateurs. Qu'en sera-t-il par exemple d'un patron raciste qui en conscience refuserait d'embaucher des personnes d'une autre race, sa raison lui disant que les autres races sont inférieures et moins instruites? Le prêtre accompagnera-t-il ce patron raciste dans son "chemin" et lui donnera-t-il l'absolution ?

 

A la fin, si la conscience devient supérieure à la loi morale de Dieu, c'est la fonction du prêtre et de l'institution Eglise elle-même qui deviendra obsolète. "Comme le dit Henri VIII, qui a besoin d'un prêtre, ou de l'Église, pour lui dire qu'il a péché ou pas péché? N'avons-nous pas tous une conscience?"

 

SOURCE : Catholic World Report

 

Le 30 décembre 2016

 

« Ce à quoi nous assistons aujourd'hui, après la publication de "Amoris Laetitia", est une adoption radicale du principe qui rend absolus les jugements subjectifs de la conscience et de l'interprétation personnelle de toutes les normes morales.

 

[…] En d'autres termes, la conscience personnelle dépasse maintenant le droit canonique de l'Eglise et la loi morale de Dieu. »

Source de l'article original en anglais : Catholic World Report

Les problèmes moraux de la nouvelle pastorale : "les effets très diviseurs d'Amoris laetitia" (Père Mark A. Pilon)

Traduction

 

Une analyse

 

Les crises pastorales et morales qui se posent

 

30 décembre 2016

 

Ce à quoi nous assistons aujourd'hui après la publication de «Amoris Laetitia», est une adoption radicale du principe qui rend absolus les jugements subjectifs de conscience et de l'interprétation personnelle de toutes les normes morales.

 

Fr. Mark A. Pilon

 

Il y a eu une crise morale et pastorale au cours du dernier demi-siècle dans l'Église, mais je pense honnêtement que nous n'avons encore rien vu de semblable à ce qui pourrait arriver. Les 4 cardinaux - j'aime à les appeler "Les Quatre Justiciers" (tiré du roman policier du prolifique Edgar Wallace il y a un siècle "The Four Just Men") - sont allés allés aux racines de cette menace dans leurs cinq questions relatives à l'affaiblissement apparent de la doctrine de l' Église sur les actes intrinsèquement mauvais et la formation de la conscience objective dans le chapitre 8 de Amoris Laetitia (AL). En fait, nous voyons déjà les effets très diviseurs de la confusion de ce document.

 

Par exemple, nous assistons à des mises en œuvre très différentes de l'AL dans différentes Églises locales. Certains continuent de suivre la pratique pastorale traditionnelle de l'Église qui nie la sainte communion aux couples vivant comme époux dans des unions secondaires invalides suite au divorce. D'autres appellent à une résolution cas par cas où les catholiques concernés sont encouragés à décider si cette seconde [adultère] union est la volonté de Dieu pour eux et si ils sont autorisés à recevoir la communion. Ainsi un évêque américain a encouragé les catholiques divorcés et remariés à "utiliser le for interne de la conscience" dans leur décision quant à savoir si ils doivent recevoir la communion ou de ne pas. En d'autres termes, la conscience privée dépasse maintenant le droit canonique de l'Église et la loi morale de Dieu.

 

Une autre division survient quand un évêque américain, maintenant un Cardinal, critique ouvertement les directives de l'archevêque américain en ce qui concerne la communion pour les divorcés remariés comme étant en désaccord avec l'Eglise. Puis il y a eu l'attaque inconvenante du doyen de la Rote romaine, critiquant vivement les 4 cardinaux pour supposée trahison de leur fonction, ce qui exige évidemment qu'ils ne demandent jamais d'éclaircissement à un pape, sans parler de la question des actions d'un pape.

 

À la suite de cet incident favorisant la division, un archevêque australien dénigrait les Quatre cardinaux en affirmant qu'ils cherchent une "fausse clarté qui vient parce que vous ne vous adressez pas à la réalité." Il a poursuivi en disant que au cours du Synode , il a "entendu lui-même des voix très claires et certaines, mais seulement parce qu'ils n'ont jamais abordé la vraie question ou n'ont jamais traité des faits réels."

 

Voilà pour l'intelligence, l'intégrité et l'expérience pastorale de Quatre Cardinaux distingués et de leurs partisans!

 

Dans une autre partie du monde, un archevêque en Irlande a rejoint le concert de critiques avec ce peu de sagesse ecclésiale:

 

"Aucun mariage n'est vécu que dans des réalités noires et blanches claires et abstraites. L'Église doit comprendre les zones grises du succès et des échecs, des joies et des déceptions. Répéter des formulations doctrinales en soi n'est pas la façon d'accompagner les gens sur un chemin difficile. ... Cela s'adresse à certains, et même à des hauts responsables de l'Église; Ils semblent croire que l'affirmation des certitudes d'une manière abstraite et indubitable est la seule voie."

 

Tandis que l'archevêque ne nomme pas directement les cardinaux, la critique est bien évidemment dirigée vers eux. Ils sont présentés en tant que disciples de règles simplistes, qui ne voient les choses qu'en noir ou blanc, étant des répéteurs stupides de formulations doctrinales abstraites ad nauseam (ses mots dans un autre discours) avec peu d' expérience pastorale et encore moins de compassion. C'est là où en est le bloc de l'Eglise libérale aujourd'hui: ici pas d'accompagnement, pas de compassion ici, juste de la critique pure. Les Quatre Cardinaux n'ont jamais eu recours à de telles critiques ad hominem du Pape ou de ceux avec qui ils étaient en désaccord. Cela ressemble davantage à la méchanceté politique américaine qu'à un effort de dialogue sincère.

 

Juste le commencement?

 

Et toute cette rancune et cette division n'est, très probablement, que le début. L'utilisation du "for interne de conscience" telle que présentée aujourd'hui par un nombre croissant d'évêques et de théologiens va venir perturber l'enseignement moral objectif de l'Église et saper toute pratique pastorale basée sur un enseignement aussi objectif. Cela ne peut pas et cela ne s'arrêtera pas avec la communion pour les divorcés et remariés. Si la conscience personnelle dépasse l'enseignement moral objectif et détermine la pratique pastorale des Sacrements, alors tout est en place pour le changement.

 

Pensez-y: comment la résolution des problèmes liés aux pratiques pastorales par la conscience personnelle peut-elle s'arrêter avec la question de la Communion des divorcés vivant dans des unions secondaires invalides? Certes, le même principe doit s'appliquer en dernier ressort aux unions homosexuelles, aux couples vivant en concubinage, et même à toute personne sexuellement active en dehors d'une union de mariage valide. La solution du for interne de la conscience ne peut se limiter logiquement à cette seule question de "communion", et elle n'y sera pas limitée.

 

Ce que nous voyons aujourd'hui, alors, après la publication de Amoris Laetitia, est une adoption radicale du principe d'absolutisation des jugements subjectifs de la conscience et l' interprétation personnelle de toutes les normes morales. Déjà un évêque belge, favorisé par François pour assister au synode (même si non élu), a co-écrit un livre qui suggère l'approbation morale de l'activité homosexuelle, et la reconnaissance du mariage homosexuel:

 

"Il n'y a aucun moyen de continuer à prétendre qu'il ne peut y avoir d'autres formes d'amour que le mariage hétérosexuel. Nous trouvons le même genre d'amour entre un homme et une femme qui vivent ensemble, en couples homosexuels et les couples de lesbiennes ... Ne devrions-nous pas évoluer vers une diversité de rituels dans lesquels nous pouvons reconnaître le rapport d'amour entre homosexuels, et ce du point de vue même de l'Église et de la foi?"

 

C'est là que nous sommes déjà arrivés en juste une année et c'est juste le début. Qu'un lobby homosexuel existe dans les structures de pouvoir internes à l'Église a longtemps été reconnu. Maintenant, ces fossoyeurs de la doctrine morale catholique et de la pratique pastorale sont encouragés à penser qu'ils ont les outils pour atteindre leur objectif, quel qu'en soit le coût. Le langage de l'évêque belge essaie de se montrer "modéré" dans ses buts, c'est-à-dire simplement avoir de la compassion à la recherche de solutions aux zones grises de la vie morale. Mais c'est une ruse.

 

Pour ces néo-réformateurs, la doctrine morale irréformable de l'Eglise n'est juste qu'une abstraction et ne doit plus être considérée comme obligatoire dans la formation d'une conscience correcte. Comme dans le protestantisme libéral de nos jours, l'enseignement moral de l'Église doit être effectivement réduit à l'être, mais parmi les nombreuses considérations égales dans le processus de formation de la conscience. En effet, "une conscience correcte" ne sera plus un concept significatif dans la nouvelle morale émergente. En fin de compte, les normes ne deviendront que des "idéaux" traités avec un certain respect abstrait, mais fondamentalement inutiles sinon largement dépourvus de sens.

 

Le langage des archevêques australien et irlandais nous dit très bien où nous en sommes et où nous nous dirigeons. C'est le chemin de l'antinomie moderne, l'Anglicanisme libéral, et nous devrions être clairs sur ce que cela signifie. Ces deux archevêques géographiquement éloignés parlent en tandem d'"un monde de gris" et de "zones grises", qui est le langage repris d'Amoris Laetitia (cf. AL, 306). L'archevêque irlandais parle de façon "joyeuse" des "idéaux" plutôt que des commandements, ce qui suggère aussi le passage progressif des absolus moraux vers des idées morales souhaitables, mais généralement inaccessibles, du moins pour la grande majorité des gens.

 

À ce jour, l'autorité suprême de l'Église n'a absolument pas donné de directives pratiques sur la manière dont les prêtres ou les évêques locaux doivent "accompagner" les gens dans le processus de "discernement" par lequel les laïcs feront un jugement final de conscience sur la question morale qu'ils traitent et de leur disponibilité spirituelle à recevoir l'Eucharistie. Alors, que pouvons-nous attendre dans ce domaine et dans d'autres domaines de l'activité pastorale? Ainsi, l'évêque américain a fait ce que beaucoup d'autres vont probablement faire dans ces circonstances en passant effectivement le processus entier à la conscience personnelle  et subjective de chaque personne. Comme Henri VIII le dit: "Un homme a-t-il besoin d'un prêtre pour lui dire qu'il a péché?" Et il ne faudra pas longtemps pour que les gens demandent: "Pourquoi du tout s'embêter avec le for interne de la confession?"

 

Confusion morale et équivalence confuse

 

Quels sont les problèmes et la confusion morale qui pourraient surgir ou qui sont déjà nés de l'utilisation de ces nouveaux principes subjectifs pour décider dans des cas de conscience ?

 

En ce qui concerne la confusion morale, je me souviens que le général Eisenhower avait déjà vu des artefacts nazis fabriqués à partir d'humains, y compris un abat-jour, quand il visita Buchenwald, et il en a été vraiment horrifié. Récemment, un archevêque américain, un autre cardinal de l'époque récente, a été également horrifié par la vente de parties du corps de fœtus (bébés avortés), rapporté en 2015. Cependant, il a fait une déclaration assez étonnante qui semblait établir une sorte d'équivalence morale de cette situation avec des questions sociales et morales bien différentes.

 

La confusion morale dans sa déclaration devient assez évidente, si l' on substitue simplement les mots en italique dans la citation ci-après pour sa phrase originale qui est: "Alors que le commerce des restes d'enfants sans défense est particulièrement repoussante ..." :

 

"Cette nouvelle preuve sur le mépris de la valeur de la vie humaine offre également la possibilité de réaffirmer notre engagement en tant que nation à une éthique de la vie cohérente. Tout en faisant des abat-jour et d' autres artefacts à partir de victimes juives assassinées est particulièrement répugnant, nous ne devrions être pas moins consternés par l'indifférence envers les milliers de personnes qui meurent chaque jour par manque de soins médicaux décents; Qui se voient refusés des droits par un système d'immigration brisé et par le racisme; Qui souffrent de la faim, du chômage et du besoin; Qui paient le prix de la violence dans les quartiers saturés d'armes à feu; Ou qui sont exécutés par l'Etat au nom de la justice."

 

Or, voici une question évidente: est-ce que les Juifs qui liront une telle déclaration pensent que l' indifférence envers les maux moraux / sociaux que l'archevêque a énumérés n'est "pas moins repoussante" , ou que les gens devraient être "pas moins consternés" par le fait que certaines personnes souffrent de la faim ou du manque d'emplois, qu'au fait que des millions de personnes ont été exterminées et que leurs parties du corps ont servi de lampes? Une telle comparaison serait prise pour insinuer clairement que ces autres maux sont moralement équivalents à ce qui a été fait aux Juifs par les nazis.

 

Mais le véritable problème n'est-il pas le fait que l'archevêque a simplement "dépassé les bornes" de la question morale la plus importante ici, c'est-à-dire le meurtre de millions d'enfants à naître, qui est sûrement la question morale suprême et devrait être ce qui est le plus répugnant, et devrait nous épouvanter beaucoup plus même que ce qui arrive aux parties du corps après? S'il avait dit que la mort de dizaines de millions d'enfants à naître devrait nous épouvanter, mais que nous devrions également être consternés par la faim, le chômage et le manque de soins médicaux décents, l'absurdité (d'un tel raisonnement) serait mise en évidence immédiatement.

 

Je pense qu'il est évident qu'une telle confusion morale, venant de la part d'un haut fonctionnaire de l'Église, est sans doute causée par (1) l'ignorance effective du grave mal intrinsèque de tels actes moraux, et (2) un recours assez facile à l'abri de la conscience subjective et du relativisme moral. Une telle approche des questions morales sérieuses et des problèmes pastoraux est sur le point de déchaîner un torrent de solutions à base de "for interne de la conscience", solutions à toutes les questions morales contestées. Mais les solutions à certains problèmes peuvent ne pas tous plaire aux guerriers de la justice sociale qui ne semblent donner aucune importance à une morale sexuelle objective.

 

Par exemple, que diriez-vous de ces cas de conscience réglés dans le for interne de la conscience privée?

 

1. Jerry avoue qu'il refuse d'embaucher d'autres races dans son entreprise, et utilise divers subterfuges pour éviter la loi. Sa raison lui dit que les autres races sont certainement inférieures et moins instruites. Sa conscience lui dit que c'est peut-être un péché, mais tout au plus un péché véniel. Alors, le prêtre l'accompagne-t-il tout simplement, et s'il persiste dans ce racisme et cette injustice profondément enracinés, lui dit-il simplement de suivre sa conscience, et puis même l'absout de ses autres péchés d'adultère et du meurtre d'un partenaire dont il est sincèrement repentant?

 

2. Maxime travaille pour la pègre locale en tant que comptable et cache au gouvernement ses gains illégaux de la prostitution, des jeux de hasard, des drogues et des usuriers. Il reconnaît que cela est illégal, et est sincèrement désolé d'avoir à le faire. Cependant, sa conscience lui dit que c'est moralement acceptable parce que sa défection de la pègre causerait presque certainement des dommages et peut-être la mort à sa famille. Le prêtre l'accompagne-t-il simplement en lui disant de suivre sa conscience et de recevoir la communion s'il pense ne pas être coupable d'un péché sérieux?

 

3. Joe mentionne à son confesseur qu'il a détourné des fonds du diocèse, et la somme est très importante au fil des ans. Mais sa conscience ne juge pas que ce soit gravement mal parce qu'il considère cela comme une compensation occulte pour le bas salaire qui est payé. Le prêtre accompagne-t-il simplement son discernement, évite-t-il de lui donner des règles abstraites et conseille-t-il à Joe de suivre sa propre conscience, indépendamment de ce que l'Église enseigne, et de recevoir la communion s'il sent que c'est la volonté de Dieu pour lui? Bien sûr, cela exclurait toute obligation de restitution si Joe demeurait inflexible dans sa fausse conscience.

 

4. Enfin, Pat est un agent de l'IRA (l'Armée républicaine irlandaise) qui se spécialise dans l'explosion des choses, y compris les gens. Il n'est pas content de cela, mais il a l'impression qu'il doit défendre les familles irlandaises, sa propre famille, contre l'oppression des Britanniques et des protestants du Nord. Il est désolé que des gens innocents meurent parfois dans ses efforts pour atteindre l'armée britannique, mais il estime que sa cause est juste et que c'est ce que Dieu veut qu'il fasse de sa vie en ce moment. Sa conscience lui dit que ce qu'il fait est un mal nécessaire mais que c'est un moindre mal - c'est-à-dire que c'est nécessaire pour protéger sa famille et libérer son pays. Son confesseur doit-il simplement l'accompagner et lui assurer que si sa conscience est claire et décidée, il peut aller à la communion?

 

La nouvelle moralité?

 

Les nouveaux "cas de conscience" potentiels sont évidemment multiples, et ils sont maintenant plus susceptibles de survenir en raison des ambiguïtés que les Quatre cardinaux souhaitent désespérément et sincèrement clarifier (et qui évidemment ne le seront pas). Ces bons hommes se rendent compte qu'une fois cette sorte d'inviolabilité de la conscience subjective établie dans la pratique pastorale de l'Église, quelle question morale ne sera finalement pas résolue simplement par un appel à la conscience subjective?

 

Mais le problème majeur ici est vraiment le système moral lui-même qui sous-tend toute cette confusion. Ce que nous semblons traiter aujourd'hui est quelque chose comme un modernisme moral avec ses racines au plus profond d'un dualisme néo-platonicien. Tout comme le modernisme dogmatique pensait que les formulations dogmatiques ne sont que des approximations verbales des vérités divinement révélées, dans cet idéalisme moral les commandements doivent être compris comme des abstractions dans un monde d'idées. Et quand on introduit ces abstractions dans le monde réel, elles doivent être comprises simplement comme des idéaux moraux que nous ne pouvons que commencer seulement à approcher, ou du moins que la plupart des gens ne peuvent que s'efforcer imparfaitement d'atteindre dans leur vie morale.

 

Tout ceci semble résoudre commodément les questions morales difficiles pour les catholiques. Si l'on affirme verbalement la doctrine morale sur les absolus, c'est-à-dire comme de simples idées abstraites, cela suffit pour revendiquer l'orthodoxie. Mais dans le monde pratique, il est nécessaire de traduire ces abstractions en vagues idéaux moraux auxquels les gens aspirent, mais atteignent rarement complètement.

 

Ainsi, la tâche pastorale de l'Église n'est pas tant d'enseigner les Commandements comme commandements, mais simplement comme idéaux, puis de laisser le reste à la conscience privée. Tout sonne bien, le triomphe de la miséricorde et la compassion sur le légalisme moral et la rigidité. Mais à la fin, cela ouvre la voie à d'autres conclusions avec lesquelles ses partisans ne seront probablement pas à l'aise dans l'avenir. Je le répète, cette approche ne peut et ne sera pas limitée aux questions du sixième commandement. Elle s'applique à tous ou à aucun d'entre eux. Ainsi, "Tu ne tueras pas" sera aussi réduit, peut-être à l'idéal de la non-violence, mais peu de gens trouveront possible d'approcher même cet idéal dans le monde réel, et cette nouvelle morale continuera d'éroder l'ordre moral d'une manière qui effraiera même les bons hommes qui avancent avec confiance dans ce nouveau système moral et pastoral.

 

Enfin, un autre effet malheureux de cette approche de l'ordre moral et de la pratique pastorale de l'Église sera certainement que le recours au Sacrement de Pénitence et le recours aux conseils de l'Église deviendront encore plus obsolètes en beaucoup d'endroits qu'ils ne le sont déjà aujourd'hui . Encore une fois, comme le dit Henri VIII, qui a besoin d'un prêtre, ou de l'Église, pour lui dire qu'il a péché ou pas péché? N'avons-nous pas tous une conscience?

 

A propos de l'auteur

 

Père Mark A. Pilon, prêtre du diocèse d'Arlington, en Virginie, a reçu un doctorat en théologie sacrée de l'Université Santa Croce à Rome. Il est l’ancien président de la théologie systématique au Séminaire Mount St. Mary, ancien rédacteur en chef adjoint du magazine Triumph, et professeur retraité et invité à la Notre Dame Graduate School du Christendom College. Il écrit régulièrement à littlemoretracts.wordpress.com.

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31 décembre 2016 6 31 /12 /décembre /2016 10:10

La crise que traverse aujourd’hui l’Occident est due au sentiment qu’il est impossible de connaître la vérité, affirmait le pape Benoît XVI au sanctuaire de Mariazell en Autriche, samedi 8 septembre 2007. "Cette résignation face à la vérité est, selon ma conviction, le cœur de la crise de l'Occident, de l'Europe. [...] De fait, notre foi s'oppose de manière catégorique à la résignation qui considère l'homme incapable de la vérité, comme si celle-ci était trop grande pour lui", expliqua Benoît XVI. [1]

 

Or, cette résignation face à la vérité, est une crise de l'autorité. Et cette crise de l'autorité, on la trouve "aussi" (nous aurions écrit "d'abord"! Ndlr.) dans l'Eglise :

 

Mais c'est le cas aussi, hélas !, dans l'Église. Les autorités ecclésiastiques, qui possèdent pourtant le triple pouvoir législatif, judiciaire et exécutif, au lieu d'éclairer, de commander, de sanctionner quand il le faut, se mettent à la remorque de leurs ouailles voire, ce qui est pire, du monde ennemi de Dieu. « Qui suis-je pour prescrire, pour juger ? », semblent-elles nous dire, alors qu'elles sont tout simplement... des autorités, instituées par Dieu pour cela.

 

[...] Cette déliquescence de l'autorité, un des pires malheurs qui puissent frapper la société humaine, est un châtiment de Dieu, en raison des nombreux crimes dont les hommes se sont souillés devant sa face. Le prophète Isaïe, annonçant les malheurs futurs de Jérusalem, conséquence de ses fautes, déclarait en effet de la part de Dieu : « Je leur donnerai des enfants pour princes » (Is 3, 4). Dire d'une société que son roi est un enfant signifie que le chef est incapable d'exercer pleinement son autorité. Et l'Ecclésiaste nous explique ce qu'il faut penser d'une telle perspective : « Malheur à toi, terre dont le roi est un enfant ! » (Ec 10, 16[2]

La crise de l'autorité dans l'Eglise d'abord

Si en effet, l'Eglise qui a été instituée pour nous dire et nous enseigner la vérité, distinguer le bien et le mal, ne remplit plus son rôle, ne nous dit plus ceci est bien, ceci est mal, si les évêques abdiquent de leur mission, il ne faut pas s'étonner de voir ensuite cette crise de l'autorité se répandre dans le reste de la société. Il ne faut pas s'étonner de la baisse de fréquentation des sacrements. Il n'y a une crise de l'autorité dans la société que parce qu'il y a d'abord une crise de l'autorité dans l'Eglise.

 

"Quant à ceux qui ont reçu l'autorité, conclut l'abbé Christian Bouchacourt, dans l'éditorial de Fideliter n° 234,  ils doivent courageusement et humblement « remplir tous les devoirs de leur ministère », « reprendre, exhorter, menacer, en toute patience et doctrine », même si le temps semble venu où les hommes rejettent la saine doctrine et veulent vivre selon leurs désirs sans supporter aucune autorité (2Tm 4, 1-5)."

 

Sources

 

[1] Benoît XVI : La crise de la vérité est à l’origine de la crise en Occident, Homélie au sanctuaire marial de Mariazell en Autriche, Zenit.org, 10 septembre 2007

[2] Nécessité de l'autorité, Abbé Christian Bouchacourt, Fideliter, Editorial du n° 234

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30 décembre 2016 5 30 /12 /décembre /2016 10:32

Le Samedi 21 janvier 2017, plus que jamais, Paris, 10 heures, Place de la Concorde.

Devant la statue de ROUEN et l'Hôtel CRILLON.

Le jour, à l'heure et sur le lieu du sacrifice, nous invitons les royalistes à rendre hommage au Roi martyr mort pour Dieu, la France et son peuple.

Par une même prière nous demanderons à Louis XVI d'intercéder auprès de Notre-Seigneur afin que la France se souvienne des promesses de son baptême et mérite ainsi le roi que nous espérons.

 

Avec la participation du Choeur Montjoie Saint Denis.

 

org. France Royaliste

 

Venez très nombreux, prier et chanter avec nous pour la résurrection de la France.

Hommage à Louis XVI - 21 janvier 2017 Paris Place de la Concorde 10H
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28 décembre 2016 3 28 /12 /décembre /2016 18:25

Après le coup d'Etat manqué en Turquie qui a visé le président turc Erdogan, celui-ci s'est rapproché de la Russie. Aujourd'hui, il continue de s'éloigner de ses anciens alliés de l'OTAN en accusant les Etats-Unis de soutenir l'Etat islamique, selon Reuters, en disant avoir des preuves, des photos et des videos.

Source: http://www.reuters.com/article/us-mideast-crisis-syria-turkey-idUSKBN14G1EU

Source: http://www.reuters.com/article/us-mideast-crisis-syria-turkey-idUSKBN14G1EU

Erdogan dit que la coalition dirigée par les Etats-Unis soutient des groupes terroristes en Syrie

 

Le président turc Tayyip Erdogan a dit qu'il a des preuves que les forces de la coalition sous commandement américain apportent un soutien à des groupes terroristes, y compris l'État islamique et les groupes militants kurdes YPG et PYD, a-t- il dit mardi (27 décembre Ndlr.).

 

"Ils nous accusaient de soutenir Daesh (Etat islamique)", a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse à Ankara. "Maintenant, ils apportent leur soutien à des groupes terroristes comme Daesh, YPG, PYD. C'est très clair, nous avons des preuves confirmées, avec des photos et des vidéos", a-t-il déclaré.

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28 décembre 2016 3 28 /12 /décembre /2016 17:19

Dans un article paru à l’occasion de la fête de Noël, le magazine allemand “Der Spiegel” se montre très critique à l’encontre du Pape François. D’après ce texte “François semble de plus en plus isolé, démoralisé par l’opposition qu’il rencontre à l’intérieur de la Curie, et par le manque de courage de la base face aux réformes à entreprendre.” Un proche du Pape aurait déclaré que certains ne reconnaissent plus aujourd’hui en François ce Cardinal Bergoglio qu’ils avaient élu en 2013.

Le correspondant du magazine “Der Spiegel” à Rome, Walter Mayr, explique que même les adeptes les plus fidèles de ce Pape commencent à prendre leurs distances.

Toujours d’après ce magazine, on apprend que le nombre de participants aux événements de l’Année Sainte à Rome a été largement en dessous de toutes les prévisions et que les travaux de restructuration de la Curie avancent à tout petits pas. Dans certains dicastères, on fait état d’ambiances chaotiques.

La critique se porte aussi sur la tendance du Pape à une volubilité complaisante : des paroles incessantes par lesquelles il est allé jusqu’à reprocher aux médias et à leur public un penchant pour la coprophagie, c’est-à-dire pour la consommation d’excréments. Même les plus proches de François ont été déstabilisés par de telles accusations et l’emploi d’un vocabulaire déplacé.

D’après le “Spiegel”, il ne reste pas beaucoup de temps à François pour réaliser les changements dont il parle sans cesse : en effet, la période maximale qu’il s’est lui-même fixée, sera bientôt écoulée. Dans son cercle restreint, le Pape François aurait dit : “Il n’est pas exclu que j’entrerai dans l’histoire comme celui qui aura provoqué un schisme dans l’Eglise”.

Le “Spiegel” rapporte aussi une intervention du Cardinal Brandmüller à propos des personnes divorcées-remariées, qui estime que le sujet touche à des thèmes essentiels : il en va du cœur même de notre foi. Le Cardinal reproche au Pape et au Cardinal Kasper d’en arriver à relativiser, à “ramollir” le contenu des articles de la foi catholique et d’en laisser l’interprétation aux communautés locales. Ceci porte atteinte à l’universalité de l’Eglise. Et le Cardinal Brandmüller d’ajouter : “Celui qui pense que la vie maritale au sein d’un couple divorcé-remarié est compatible avec la réception de l’Eucharistie est un hérétique : il favorise l’apparition d’un schisme”. Toujours selon le Cardinal Brandmüller, la Sainte Ecriture n’est pas un self-service : S. Paul dit que nous sommes les gérants des Mystères divins ; nous n’en sommes pas les maîtres.

"Pur chaos" à la Curie : "le Pape François semble de plus en plus isolé" (Der Spiegel)

Source : Kathnet. Trad. MH/APL

Pro Liturgia, Actualité du mercredi, 28 décembre 2016.

 

L'article original en allemand :

"Pur chaos" à la Curie : "le Pape François semble de plus en plus isolé" (Der Spiegel)

Kritik an Franziskus "Der Papst kocht", Spiegel Online, Freitag, 23.12.2016   11:23 Uhr

 

"Chaos pur"

Der erste Eindruck: Ein paar starrsinnige, greise Kardinäle laufen da wieder einmal Sturm gegen den ungebrochen reformfreudigen Papst. Doch diesmal, so scheint es, steht mehr auf dem Spiel. Franziskus wirkt zunehmend einsam, vom Widerstand in der Kurie und vom mangelnden Mut zur Veränderung an der Basis zermürbt. "Den Bergoglio, den sie 2013 gewählt haben, erkennen viele im Franziskus von 2016 nicht wieder", sagt ein Vertrauter des Papstes.

 

Das abgelaufene Heilige Jahr der Barmherzigkeit, "ein Thema, das alles abdeckte, aber auch alles offenließ", sei bei den Besucherzahlen weit hinter den Erwartungen zurückgeblieben. Auch der Umbau der Kurie kommt nur stockend voran - aus einzelnen Ämtern wird "Chaos pur" vermeldet.

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28 décembre 2016 3 28 /12 /décembre /2016 16:35

"Dès que j'ai eu l'honneur et le bonheur de faire la connaissance de Mgr le duc d'Anjou, puis de l'approcher et de m'entretenir longuement avec lui en différentes circonstances, j'ai immédiatement su et compris qu'il existait quelque chose de sacré dans sa personne, toute de lumineuse simplicité. Il y avait en lui ce qui relève de l'origine divine du pouvoir, et si, l'on veut ne pas me suivre là-dessus, au moins cette élévation religieuse de la pensée et du sens moral qui peut seule autoriser un être humain à régir le destin de ses semblables. (...) En France, malheureusement, il n'existe plus la moindre once de sacré dans l'exercice du pouvoir actuel de la république.

C'est vrai que le duc d'Anjou n'avait pas le pouvoir. Mais j'ai la conviction qu'il était dépositaire d'une parcelle de divin. Ce n'est que cela, et rien de plus, la légitimité."

Jean Raspail, interview à Bourbons Magazine, nov-déc 1998 à propos du duc d'Anjou et de Cadix, Alphonse II de Bourbon.

Jean Raspail : la légitimité
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28 décembre 2016 3 28 /12 /décembre /2016 07:41

Mgr Benno Elbs, Evêque de Feldkirch (AU), qui a participé au dernier Synode des évêques à Rome, a déclaré dans une interview au journal “Die Presse” que la doctrine de l’Eglise a été modifiée par “Amoris laetitia” : “L’enseignement est modifié dans la mesure où les fidèle peuvent maintenant décider en conscience de ce qu’ils peuvent faire avec, pour ainsi dire, la bénédiction du Pape..."

 

Comme nous l'écrivions le 2 octobre 2015, soit avant la conclusion du "Synode sur la Famille" et donc la publication d'Amoris laetitia,

 

"Attention, voilà ce qui se prépare au Synode: la permission du divorce et du remariage [...] Au bout c'est la nécessité d'une Eglise fondée par Jésus-Christ qui est annulée. Parce que au final, si c'est la conscience qui nous juge, à quoi bon l'Eglise ? [...]  En clair, les divorcés remariés (et tous les pécheurs, donc tout le monde, même les assassins) font ce qu'ils veulent. Question: qui donc dans l'Eglise a le droit de dire aux pécheurs ce qu'ils doivent faire ? Si personne n'a le droit de dire aux pécheurs ce qu'ils doivent faire, à quoi servent les évêques et les prêtres ? A quoi sert l'Eglise ? Et dans ce cas, pourquoi (en fin de video) ces évêques se plaignent-ils de la baisse du nombre de mariage ? [...] La conscience devient l'élément prépondérant qui présume de la légitimité ou non d'une communion."

 

Les conséquences d'Amoris laetitia sont donc très graves et encore largement non perçues. Cette crainte d'une désagrégation de la foi a été analysée dans un article paru hier en italien sur le site "Corrispondenza Romana" (27 dicembre 2016 - 09:14) titré Amoris Laetitia: la logica dell’eresia, "Amoris Laetitia : la logique de l'hérésie", dont voici une traduction, qui bien qu'imparfaite, apporte une information supplémentaire au sujet des réformes souhaitées par le Pape François.

Amoris Laetitia: la logique de l'hérésie

1. Si nous cédons sur un point, tout explose.

 

En réponse à une question sur la possibilité de permettre l'accès à l'Eucharistie aux divorcés civilement remariés, lors d'une grande conférence tenue à Rome en Novembre 2015 [1], le Cardinal Caffara a déclaré que "ce n'est pas possible" :

 

et ceci parce qu'"une telle admission reviendrait à changer la doctrine de l'Eglise sur le mariage, l'Eucharistie, la confession, la sexualité humaine et aurait une signification pédagogique dévastatrice, parce que devant une telle décision, les jeunes en particulier, pourraient légitimement conclure : - alors il est vrai, un mariage indissoluble n'existe pas - " [2]

Les affirmations de l'archevêque émérite de Bologne, jamais démenties, sont encore plus actuelles, après que les Dubia aient été présentées au pape par le groupe des Quatre cardinaux, dont le même Caffara fait partie.

 

Dans ces notes, nous allons essayer d'expliquer comment le cardinal Caffara a tout à fait raison, et comment la pratique et / ou la possibilité d'admettre à la sainte communion les divorcés civilement remariés conduit effectivement à cette désintégration doctrinale si clairement exposée.

 

2. Les articles de foi ne sont pas indépendants les uns des autres.

 

Les propositions de la foi s'appellent articles, parce qu'ils sont accompagnés et reliés les uns aux autres comme les membres du corps humain seulement réunis par des articulations: en niant une vérité de la foi, on finit logiquement par en nier beaucoup d'autres, sinon toutes.

 

Le Magistère n'est pas resté silencieux sur ce lien entre les déclarations de foi : le concile Vatican I a parlé de lien mysteriorum inter se [3], le concile Vatican II a parlé de hiérarchie des vérités [4], le Catéchisme a repris les deux affirmations, et nous parle de liens mutuels et de la cohérence des dogmes [5].

 

Le Cardinal Schömborn a expliqué que la hiérarchie des vérités ne signifie pas qu'il y en ait (non spécifiées) un groupe de vérités nécessaires de croire et d'autres vérités (toujours non spécifiées) en option pour la foi :

 

«La hiérarchie des vérités signifie [...] "un principe organique structurel", qui ne doit pas être confondu avec le "degré de certitude." Ce principe stipule également que les différentes vérités de la foi sont ordonnés à la fonction d'un centre, à un noyau nucléaire, mais cependant pas que la vérité qui n'est pas placée au centre soit, pour cette raison, pas vraie.» [6]

 

Ce noyau central, indique le Catéchisme de saint Pie X est l'un des deux principaux mystères de la foi (l'unité et la Trinité de Dieu et l'Incarnation, la Passion et la Mort de Notre Seigneur Jésus-Christ) comme "centre organique", comprenant en lui-même - d'une certaine façon - tous les autres mystères.

 

Image:Jesus Resurrection 1778.jpg Prenons un exemple pour expliquer ce concept : de "la résurrection des morts" dépend "le troisième jour il est ressuscité": Saint Paul affirme que si on nie la résurrection des morts, on finit par nier la résurrection du Christ:

 

"si l'on prêche que le Christ est ressuscité des morts, comment quelques-uns parmi vous disent-ils qu'il n'y a point de résurrection des morts? S'il n'y a point de résurrection des morts, le Christ non plus n'est pas ressuscité." [7]

 

Ainsi, la "vie éternelle" dépend du "pain de vie" :

 

"Je suis le pain vivant qui est descendu du ciel. Si quelqu'un mange de ce pain, il vivra éternellement; et le pain que je donnerai est ma chair pour la vie du monde." [8]

 

Donc, vous comprenez comment dans certains endroits, depuis les temps anciens [9], la récitation du Credo a été accompagnée, dans la liturgie, par le signe de croix (encore prescrit, après la récitation du Symbole, sous la forme extra-ordinaire du rite romain) .

 

Le signe de la croix - "signe admirable, qui relie magnifiquement l'expression christologique et la foi rédemptrice à son expression trinitaire" [10] - situé à la fin du Credo, indique que les deux mystères principaux comprennent en eux-mêmes tous les éléments simplement proclamés.

 

Ce lien étroit signifie cependant aussi qu’un seul article non cru reviendrait à faire tomber les deux autres mystères principaux du noyau central de la foi.

 

3. Les dominos.

 

Qu'est-ce implique donc l'admission des divorcés et civilement remariés cohabitant comme mari et femme à la réception de la Sainte Eucharistie?

 

Je vais énumérer les nombreuses erreurs qui en résultent : beaucoup de ces erreurs, si elles sont engagées obstinément, sont de véritables hérésies; Le Canon 751 CIC (Code de droit canon de 1983 Ndlr.) dit:

 

"On appelle hérésie la négation obstinée, après la réception du baptême, d’une vérité qui doit être crue de foi divine et catholique."

 

Le Code de droit canonique décrit ici l'hérésie formelle, en incluant l'obstination, qui est une disposition de l'hérétique: mais une déclaration peut être hérétique matériellement, c'est-à-dire sans tenir compte de ce qu'elle dit mais par la déclaration elle-même.

 

Quand je dis que certaines déclarations sont hérétiques, je ne veux ni dire que François est hérétique, ni dire que Amoris laetitia est hérétique : sont hérétiques certaines affirmations qui peuvent être déduites par l'exhortation elle-même : surtout si, à partir d'Amoris laetitia, vous vouliez contourner les conditions requises par la Congrégation pour la Doctrine de la foi pour l'accès à l'Eucharistie des divorcés et remariés :

 

 

"Cela signifie, en pratique, que quand un homme et une femme [pas mariés sacramentellement], ne peuvent pas satisfaire à l'obligation de se séparer pour des motifs graves - tels que, par exemple, l'éducation des enfants -, ils «prennent l'engagement de vivre dans la continence complète, qui est, par l'abstinence des actes réservés aux conjoints» [S. Jean-Paul II, Homélie pour la clôture de la sixième Synode des Évêques, 25.10.1980, § 7] [11].

 

Ce point a été fait récemment par le cardinal Brandmüller :

 

"Quiconque pense que l'adultère persistant et la réception de la Sainte Communion sont compatibles est un hérétique et favorise le schisme." [12].

 

Voyons maintenant comment si vous essayez de rendre l'adultère compatible avec (l'accès à) l'Eucharistie, cela conduirait à l'effondrement de l'ensemble du bâtiment de notre sainte foi catholique.

 

1ère hérésie : il est permis d'accéder à l'Eucharistie sans être en état de grâce.

 

Que la déclaration ci-dessus soit hérétique, c'est une évidence par le fait qu'elle contredit la vérité constamment proposée par l'Eglise comme fondée sur la Sainte Écriture; S. Jean-Paul II enseignait ainsi :

 

« Je désire donc redire que demeure et demeurera toujours valable dans l'Église la norme par laquelle le Concile de Trente a appliqué concrètement la sévère admonition de l'Apôtre Paul, en affirmant que, pour une digne réception de l'Eucharistie, "si quelqu'un est conscient d'être en état de péché mortel, il doit, auparavant, confesser ses péchés." »[13].

 

« L'Eglise, cependant, réaffirme sa discipline, fondée sur l'Ecriture Sainte, selon laquelle elle ne peut admettre à la communion eucharistique les divorcés remariés. Ils se sont rendus eux-mêmes incapables d'y être admis car leur état et leur condition de vie est en contradiction objective avec la communion d'amour entre le Christ et l'Eglise, telle qu'elle s'exprime et est rendue présente dans l'Eucharistie. »[14]

 

Pour pouvoir admettre à la Sainte Eucharistie les divorcés civilement remariés vivant comme mari et femme sous le même toit, en essayant vainement de ne pas contredire la tradition séculaire de l'Église, il faut soutenir que, dans certains cas, l'adultère n'est pas un péché mortel; mais ce faisant, on risque de tomber dans les deux hérésies suivantes (la 2e et la 3e) :

 

2ème hérésie : il n'y a aucun acte intrinsèquement mauvais (c'est-à-dire des actes qui, commis en pleine conscience et consentement délibéré, sont toujours un grand péché)

 

Au contraire, Saint-Jean-Paul II enseigne:

 

"A la lumière de la Révélation et de l'enseignement constant de l'Eglise, spécialement de celui du Concile Vatican II, [ ...] Chacun de nous sait l'importance de la doctrine qui constitue l'essentiel de l'enseignement de la présente encyclique et qui est rappelée aujourd'hui avec l'autorité du Successeur de Pierre. Chacun de nous peut mesurer la gravité de ce qui est en cause, non seulement pour les individus, mais encore pour la société entière, avec la réaffirmation de l'universalité et de l'immutabilité des commandements moraux, et en particulier de ceux qui proscrivent toujours et sans exception les actes intrinsèquement mauvais.

En reconnaissant ces commandements, le cœur du chrétien et notre charité pastorale entendent l'appel de Celui qui « nous a aimés le premier » (1 Jn 4, 19). Dieu nous demande d'être saints comme lui-même est saint (cf. Lv 19, 2), d'être, dans le Christ, parfaits comme lui-même est parfait (cf. Mt 5, 48) : la fermeté exigeante du commandement se fonde sur l'amour miséricordieux et inépuisable de Dieu (cf. Lc 6, 36), et le commandement a pour but de nous conduire, avec la grâce du Christ, sur le chemin de la plénitude de la vie propre aux fils de Dieu.»[15]

 

Et le Catéchisme déclare:

 

"Il y a des actes qui par eux-mêmes et en eux-mêmes, indépendamment des circonstances et des intentions, sont toujours gravement illicites en raison de leur objet ; ainsi le blasphème et le parjure, l’homicide et l’adultère. Il n’est pas permis de faire le mal pour qu’il en résulte un bien."[16]

 

 

3ème hérésie : la fornication et l'adultère ne sont pas toujours des péchés mortels.

 

Que cette déclaration soit hérétique, cela se déduit en constatant combien elle est contradictoire par rapport par exemple à ce qu'a déclaré  la Congrégation pour la Doctrine de la Foi :

 

"... Selon la tradition chrétienne et la doctrine de l'Eglise, et comme le reconnaît également la droite raison, l'ordre moral de la sexualité implique des valeurs élevées de la vie humaine, et chaque violation directe de cet ordre est grave objectivement"[17] .

 

 

Pour soutenir que la fornication et l'adultère ne sont pas toujours des péchés mortels, vous avez ...

 

a) une utilisation absurde de Gaudium et Spes utilisé pour soutenir que dans certains cas, le péché est bon pour l'amour, en appliquant à une relation adultère le principe selon lequel s'il lui manque certaines expressions d'intimité conjugale, il n'est pas rare que "la fidélité peut courir des risques et le bien des enfants être compromis" (Conc Concile œcuménique Vatican II, Constitution Gaudium et spes, 51;..... cf. Amoris laetitia, note 329) ...

 

... Et ...

 

b) ... 4ème hérésie: les circonstances peuvent rendre bonnes des actions intrinsèquement mauvaises ...

 

... Quand en fait le Catéchisme de l'Eglise catholique déclare:

 

« ...  Les circonstances ne peuvent de soi modifier la qualité morale des actes eux-mêmes ; elles ne peuvent rendre ni bonne, ni juste une action en elle-même mauvaise. »[18].

 

Soutenir que les circonstances peuvent atténuer la culpabilité de la fornication et l'adultère, nous fait tomber dans deux autres hérésies:

 

5ème hérésie : parfois il peut manquer l'aide de Dieu pour ne pas pécher

 

et

 

 

6ème hérésie: il peut y avoir une situation où il n'y a pas d'autre possibilité que de pécher ...

 

... Alors qu'en fait saint Paul dit:

 

"Aucune tentation ne vous est survenue, qui n'ait été humaine; et Dieu, qui est fidèle, ne permettra pas que vous soyez tentés au delà de vos forces; mais, avec la tentation, il ménagera aussi une heureuse issue en vous donnant le pouvoir de la supporter." [19]

 

... Et le Concile de Trente définit:

 

« Nul, alors, bien que justifié, doit se considérer comme libre de l'observance des commandements, personne ne doit prendre ce regard téméraire et interdit par les Pères, sous peine d'excommunication, qu'il est impossible à l'homme d'être justifié en gardant les commandements de Dieu. Dieu en fait ne commande pas l'impossible; mais quand commandant il vous admoneste de faire ce que vous pouvez, et ce que vous ne pouvez pas, et il est pour vous une aide pour que vous le puissiez : Ses commandements ne sont pas pénibles (1 Jn 5,3) Son joug est facile et son poids léger (Mt 11, 30). Pour les hommes qui sont des enfants de Dieu, aiment Christ et ceux qui l'aiment - comme il le dit (Jn 14:23) - observer ses paroles, avec l'aide de Dieu, peut certainement se faire »[20].

Noces de Cana. Miniature grecque XIII° siècle. Aimable concession du centro russia ecumenica à Rome.

Noces de Cana. Miniature grecque XIII° siècle. Aimable concession du centro russia ecumenica à Rome.

Depuis lors à l’approche de la Sainte Communion, ont doit se confesser, alors arrive l'effondrement du sacrement de pénitence, si l'on admet ...

 

la 7ème hérésie : il est possible d'absoudre ceux à qui manquent la résolution de ne plus pécher ...

 

... Alors qu'en fait saint Jean Paul II enseigne:

 

 

«Parmi les actes du pénitent, la contrition occupe la première place. Elle est "la tristesse de l'âme et à la détestation du péché commis, ainsi que la résolution de ne plus pécher" [Concile de Trente : Denz.-Schönm 1676] » (CEC 1451). En outre, «acte essentiel de la pénitence de la part du pénitent, est la contrition, qui est un rejet clair et décisif du péché commis, ainsi que la résolution de ne pas commettre à nouveau, pour l'amour que l'on a pour Dieu et qui renaît avec la repentance. Dans ce sens, la contrition est donc le principe et l'âme de conversion. »[21]

 

En fait, Saint Jean-Paul II rappelle :

 

«... Si cette disposition de l'âme manquait, en réalité il n'y aurait pas de repentir : ceci, en effet, porte sur le mal moral comme tel, et donc ne pas prendre une position opposée à un mal moral possible serait ne pas détester le mal, ne pas avoir de repentir. »[22]

 

Ou avoir à admettre :

 

8ème hérésie: ceux qui sont en état de péché mortel vivent dans la grâce de Dieu ...

 

... Alors qu'en fait, le Catéchisme de l'Eglise catholique affirme que:

 

«Le péché mortel est une possibilité radicale de la liberté humaine comme l’amour lui-même. Il entraîne la perte de la charité et la privation de la grâce sanctifiante, c’est-à-dire de l’état de grâce. » [23]

 

Aussi, devons-nous nous demander ce qui est arrivé du mariage précédent des divorcés et civilement remariés ? Disparaît-il dans les airs, est-ce qu'il reste encore, ou quoi d'autre ? Si il est échoué, le mariage n'y est plus ou il y subsiste encore ?

 

Il devient difficile de maintenir la déclaration suivante du catéchisme :

 

 

«Cette insistance sans équivoque sur l’indissolubilité du lien matrimonial a pu laisser perplexe et apparaître comme une exigence irréalisable (cf. Mt 19, 10). Pourtant Jésus n’a pas chargé les époux d’un fardeau impossible à porter et trop lourd (cf. Mt 11, 29-30), plus pesant que la Loi de Moïse. » [24]

 

4. La conception volontariste de la loi et l'hérésie sur la miséricorde

 

La loi a été conçue - dans l'histoire de la pensée - selon deux paradigmes principaux:

 

a) une conception que nous appelons volontariste, qui peut se résumer dans le verset de Juvenal: “hoc volo, sic iubeo, sit pro ratione voluntas”» ( Je le veux, je l'ordonne ; la raison, c'est ma volonté !) [25]

 

Selon ce principe, une loi a sa raison d'être dans la volonté qui décrète, divine ou humaine.

 

b) Une deuxième vue, que nous pouvons appeler intellectuelle, qui est plutôt basée sur le principe "bonum est secundum rationem esse": qu'il y a un être qui précède la volonté du législateur, à laquelle le législateur lui-même doit s'adapter. Voilà pourquoi saint Jean Paul II pouvait dire que "la fermeté exigeante du commandement se fonde sur l'amour miséricordieux et inépuisable de Dieu (cf. Lc 6, 36)." [26]

 

Si vous considérez l'interdiction pour les divorcés civilement remariés d'approcher l'Eucharistie comme un acte pas miséricordieux ou comme le jet cruel d'une pierre, vous vous appuyez probablement sur la première conception de la loi : selon cette conception, les hommes décident d'imposer une certaine charge ou un certain poids; si ceux-ci ne dépendent que de la volonté du législateur, ils pourraient être insupportables réellement.

 

Mais si la loi est écrite dans chaque personne, et dépend d'un sage projet de Dieu, si le Père, pour créer l'homme, a regardé ce projet, qui est une personne, la Parole ("J'étais à l'oeuvre auprès de lui." Prov 8,30), selon laquelle, et en vue de laquelle ont été créées toutes choses ... alors il ne peut pas être miséricorde d'accorder à l'homme de ne pas être ce qu'il est.

 

 

La loi guide l'homme à vivre selon sa propre nature, qui est comme l'a dit S. Thomas d'Aquin, de réaliser en lui-même l'image de Dieu.[27]

 

 

Satisfaire un acte mauvais revient à dire à l'homme : "comme je suis miséricordieux, je vous accorde de ne pas construire en vous l'image divine" : l'alternative n'est pas seulement l'absence du bon, mais la mort, salaire du péché, le résultat funeste que le diable essaie de cacher: "vous ne mourrez pas!" [28]

 

 

Il ne peut pas être la miséricorde de faire croire à l'homme qu'est bien ce qui est son mal, et d'encourager les deux personnes qui ne sont pas mari et femme à vivre comme si elles étaient.

 

Et il ne peut pas être la miséricorde le fait d'assumer un sacrement qui signifie l'union parfaite avec le Christ par la foi et la charité, quand cette union n'est pas parfaite et en acte, mais est imparfaite en foi et en charité : et donc les espèces consacrées sont supposées être emprisonnées dans un corps, sans pouvoir en aucune façon bénéficier à cette personne qui les reçoit sans les dispositions nécessaires.

 

La conception volontariste de la loi est une sorte de méta-hérésie qui imprègne l'atmosphère ecclésiale aujourd'hui, l'humus dans lequel se développent aujourd'hui l'une, ou tantôt l'autre de ces hérésies.

 

 

Conclusion

 

Nous avons commencé par les déclarations du cardinal Carlo Caffara, selon laquelle l'admission à l'Eucharistie des divorcés et civilement remariés, à moins qu'ils ne vivent plus comme mari et femme, entraîne la décadence de toute la doctrine catholique. Nous avons vu que ces déclarations sont loin d'être une exagération.

 

Lorsque le cardinal a publié ses déclarations, Amoris laetitia n'était pas encore sortie, et il a pu conclure l'interview de cette façon:

 

«Les ouvertures de François sont différentes, ce n'est pas une ouverture pour changer la doctrine, il veut dire avoir une attitude vraie, pastorale envers les personnes, quelle que soit leur condition. » [29]

 

Après Amoris laetitia, sommes-nous sûrs que ces derniers mots de Caffara correspondent à la vérité?

 

Seule une réponse faisant autorité du Magistère, qui réponde aux Dubia des cardinaux, et clarifie les ambiguïtés objectivement présentes dans Amoris laetitia , peut apporter un peu de clarté, dans ce climat de confusion qui a surgi dans l'Église, en particulier depuis les deux derniers synodes sur la famille.

 

* * *

 

Il est vrai que le diable, comme dit Dante, est logique [30], très logique, et plaçant un principe erroné, conclut une longue série d'hérésies, avec une conséquence parfaitement logique.

 

Mais si le diable est logique, Notre-Dame est savante, et sa sagesse qu'elle donne à ses dévots, écrase la tête du serpent hérétique. Que l'attente de la plus certaine victoire puisse être raccourcie.

 

(Don Alfredo Morselli sur Messainlatino.it)

Notes

 

[1] « Rester dans la vérité du Christ», Conférence internationale sur le Synode sur la famille, Rome, 30 Septembre 2015. Pour un compte rendu exhaustif, cf. http://tinyurl.com/hwhbc3b.

[2] Vous pouvez voir l'interview vidéo ici: https://youtu.be/iKRLWE96RCw

[3] « Certes, quand la raison éclairée par la foi cherche assidûment, pieusement et dans des limites dûes, avec l'aide de Dieu, elle obtient une certaine connaissance très féconde des mystères, et par analogie avec ce qu'elle connaît naturellement, soit pour le rapport des mêmes mystères entre eux et avec la fin dernière de l'homme. » ("Ac rapport quidem, fide illustré, cum sedulo pie et quaerit sobre, aliquam Deo dante mysteriorum intelligentiam eamque fructuosissimam assequitur tum ex eorum, quae naturaliter cognoscit, l'analogie et tum mysteriorum ipsorum nexu inter se et cum tard hier hominis ") DS / 26, 3016.

[4] « ... il y a un ordre ou une "hiérarchie" des vérités de la doctrine catholique, en raison de leur rapport différent avec le fondement de la foi chrétienne. » [Concile Œcuménique Vatican II. Vat. II, UR, 11].
[5] CCC § 90: « Les liens mutuels et la cohérence des dogmes peuvent être trouvés dans l'ensemble de la révélation du mystère du Christ » [Cf. Premier Concile du Vatican: Denz.-Schönm, 3016:. "Mysteriorum nexus"; Concile Vatican II, Lumen Gentium, 25].

[6] Joseph Ratzinger, Christoph Schömborn, Brève introduction au Catéchisme de l'Église catholique, Rome 1994, p. 41.

[7] 1 Cor 15, 12-13

[8] Jean 6:51

[9] Cf. par exemple les discours 57, 59 et 60 de Saint Pierre Chrysologue (PL XXXII, 360 D, 365 B, 368 C).

[10] "Signe admirable, ici l'expression de Magnifiquement commune christologie rédemptrice et de la foi à fils Trinitaire expression"; H. de Lubac, La foi chrétienne. Essai sur la structure de du Symbole des Apôtres, Paris: Aubier-Montaigne, 1970/2, p. 91.
[11] Lettre aux évêques de l'Eglise catholique concernant la réception de la Sainte Communion par des fidèles divorcés remariés, 14.09.1994, § 4.

[12] "Wer fortgesetzten Ehebruch und für den Empfang der Heiligen Kommunion Vereinbar hält, Häretiker und ist das treibt Schisma voran", Der Spiegel, 23/12/2016, http://tinyurl.com/hbubhtk.
[13] Lettre encyclique Ecclesia de Eucharistia, 17.04.2003, § 36.

[14] Exhortation apostolique Familiaris consortio, le 22 Novembre 1981, § 84.

[15] Lettre encyclique Veritatis Splendor, 06.08.1993, § 115.

[16] Catéchisme de l'Eglise Catholique (CEC) 1756.

[17] Déclaration sur certaines questions relatives à l'éthique sexuelle - Persona humana, 29 Décembre 1975.

[18] CEC 1754.

[19] 1 Cor 10,13.

[20] Décret sur la justification, 13/01/1547, Sessio VI, chap. 11, DS / 40 1536.

[21] Exhortation apostolique Reconciliatio et paenitentia, 02.12.1984, § 31, III.

[22] Lettre au Card. William W. Baum à l'occasion du cours sur le for interne organisé par la Pénitencerie apostolique, 22.03.1996, § 5.

[23] CEC 1861.

[24] CEC 1615.

[25] Satura VI, 223.

[26] Lettre encyclique Veritatis Splendor, 06.08.1993, § 115.

[27] "... restat consideremus ut de eius imaginer, idest de homine, secundum quod est et ipse suorum operum principium, presque liberum arbitrium habens et suorum operum potestatem":. S. Th Objection pr.

[28] Gen 3.4.

[29] Voir note 1) et 2).

[30] Inferno, XXVII; 123.

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27 décembre 2016 2 27 /12 /décembre /2016 17:56

Mgr Benno Elbs, Evêque de Feldkirch (AU) ayant participé au dernier Synode des évêques à Rome, a déclaré dans une interview au journal “Die Presse” que la doctrine de l’Eglise a été modifiée par “Amoris laetitia”.

 

Selon Mgr Elbs,

 

L’enseignement est modifié dans la mesure où les fidèle peuvent maintenant décider en conscience de ce qu’ils peuvent faire avec, pour ainsi dire, la bénédiction du Pape.”

 

Et d’ajouter :

 

Peu importe ce que dit telle ou telle note de bas de page puisque c’est l’ensemble du document qui permet à chaque personne de faire appel à sa seule conscience pour savoir ce qu’elle peut ou ne pas faire dans une situation donnée. La doctrine a donc bien été modifiée lors du dernier Synode sur la famille.

"Amoris laetitia" : "L’enseignement est modifié dans la mesure où les fidèle peuvent maintenant décider en conscience de ce qu’ils peuvent faire" (Mgr Benno Elbs)
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26 décembre 2016 1 26 /12 /décembre /2016 14:37

Dans son dernier livre Les Cloches sonneront-elles encore demain ? (Albin Michel, Paris 2016), Philippe de Villiers évoque la programmation par l'ONU et l'Union européenne d'une "migration de remplacement" qui en France doit concrétiser l'arrivée de "16 millions de migrants de 2020 à 2040, soit 800 000 personnes par an sur la période."

 

Nous rappellerons simplement que ce remplacement de population a été théorisé dans les loges maçonniques, et qu'il est soutenu par les internationales ploutocratiques anti-patries (CFR, Commission Trilatérale, Groupe Bilderberg) :

 

« En 1948, le Grand Orient de France proposait la réunion d'une Assemblée constituante des peuples du monde. En 1950, il réclamait des organisations législatives, exécutives et judiciaires mondiales, mais le sentiment national s'y opposait encore.

 

En 1959, la Franc-Maçonnerie imagina d'utiliser l'immigration massive comme élément destructeur de l'identité nationale. Apparemment, il s'agissait seulement d'abolir les barrières qui restreignaient les échanges internationaux, mais en réalité, on l'avouait, on voulait déjà "ouvrir les portes à de vastes migrations et en particulier, des pays blancs aux hommes de couleur". Ces "vastes migrations" ont donc été voulues. 

 

En 1982, la revue du G.OF. Humanisme précise : "les notions de races, de frontières, de classes sociales doivent être abolies pour faire place à une intégration globale de l'homme dans un cadre universel." C'est en fait la grande révolution de l'époque contemporaine... dont le Grand Orient veut être acteur. ... "Nos Loges sont le moyen de la réalisation quotidienne de notre volonté d'universalisme." (Revues maçonniques citées par Jacques Ploncard d'Assac in Présent du 19.11. 1986.) »

 

... Derrière le paravent écologiste et humanitaire se cache le dessein d'hégémonie mondiale du Pouvoir occulte dont la main agissante mais peu visible est celle des CFR (Council for Foreign Relations), Bilderberg et Trilatérale, déjà démasquées.

 

Parmi les objectifs du Bilderberg, nous trouvons la liberté d'immigration et d'émigration et la limitation de la souveraienté des Etats, qui serait déléguée à l'ONU ou à tout autre gouvernement supranational." (Jacques Bordiot in Une main cachée, Faits et documents, La Librairie française - DPF 1976, p. 223.) [1]

 

Lire : Génocide par substitution: programmé par le Grand Orient de France, discuté dans les "clubs de réflexion" et loges maçonniques, appliqué par le gouvernement de la "république française"

Philippe de Villiers écrit :

« Mais il y a plus grave : dans cette vision de l'Europe, l'immigration n'est pas seulement tolérée et acceptée. Elle est voulue, programmée.

 

[...] Pendant des années, les élites ont caché aux peuples européens leur plan secret : l'ONU a donné instruction à l'Europe d'appliquer le principe de la "Replacement migration", la migration de remplacement. (Rapport de la Division de la population, département des Affaires économiques et sociales, secrétariat des Nations Unies, 21 mars 2000)

 

[...] La division de la population des Nations Unies établit régulièrement des projections scénarisées qui évaluent les "migrations de remplacement" (SIC Ndlr.) nécessaires pour maintenir un ratio actifs / inactifs convenable, préservant la croissance européenne.

 

Le scenario migratoire qui viserait au maintien du ratio "3 actifs pour 1 retraité"recommande de faire entrer dans l'Union européenne 153,6 millions d'immigrants de 2015 à 2040, au rythme d'une moyenne de 6,1 millions par an au cours de cette période."

 

Quant à la France, le scénario de l'ONU préconise pour elle l'entrée de "16 millions de migrants de 2020 à 2040, soit 800 000 personnes par an sur la période." (Secrétariat des Nations Unies, 21 mars 2000)

La formule onusienne, appliquée par les dirigeants de l'Europe, vient d'être reprise en France, par une note officielle de l'Institut national des études démographiques (Ined). Elle date du 6 avril 2016. Elle préconise ainsi le recours à l'immigration massive : "Alors que la crise économique va passer, la crise démographique va au contraire prendre de l'ampleur et sa résolution prendra du temps. Les migrations de remplacement pourraient faire partie des réponses de l'Europe à sa situation démographique." (Philippe FARGUES, Population et société, avril 2016).

 

Les Nations Unies ont même osé esquisser un scenario dit "numéro 6" visant à maintenir le ratio de 4 actifs pour 1 retraité. Les chiffres bondissent spectaculairement : dans cette hypothèse, l'Union européenne devrait faire venir 701 millions de migrants avant 2050. La France seule devrait en accueillir 93 millions. Il s'agit d'un chamboulement complet de population. L'Europe deviendrait un trou noir.

 

... La démographe Michèle TRIBALAT en conclut que "l'immigration est devenue dans l'esprit des dirigeants de l'Union européenne, la solution pour éviter un déclin démographique et limiter la régression économique et sociale" (Entretien à Atlantico, 17 mars 2016) en l'absence de toute politique familiale. » [2]

Le remplacement de population voulu et programmé

S'agissant de la capacité de nuisance d'un groupe ploutocratique anti-patrie comme le Bilderberg, Philippe de Villiers a évoqué en 2015, lors d’un entretien télévisé pour TV-Libertés, une confidence qui lui avait été faite par François Fillon, participant du Bilderberg 2013 :

 

"Je lui ai dit (à François Fillon): mais pourquoi tu vas au groupe Bilderberg?

 

[...] Dans l'Evangile on dit il ne faut pas mettre la lumière sous le boisseau, cela vaut pour la franc-maçonnerie aussi. Pourquoi ils se cachent ces gens-là ? Pourquoi ils se cachent ?

 

Et il (François Fillon) m'a répondu - incroyable la réponse - il m'a dit : 'que veux-tu, c'est eux qui nous gouvernent !''

 

Elysée 2017 : François Fillon choisi par le groupe Bilderberg comme prochain président de la république ?", François Fillon aurait été choisi sur la base de son discours anti-immigration, comme le meilleur candidat de l'Oligarchie pour tromper les naïfs. C'est un peu comme quand Bush ou Obama nous parlaient de paix et de démocratie quand il faisaient la guerre ou organisaient des coups d'Etat et des révolutions de couleur à l'étranger. Ou bien quand Nicolas Sarkozy nous parlait d'"identité nationale" en avril 2007 pour mieux vanter quatre mois plus tard (une fois élu) leur "nouvel ordre mondial du XXIe siècle" [3] et en décembre 2008 l'"obligation" de "métissage". [4]

Notes

 

[1] Paul CHAUSSEE, Miracle et Message du Saint Suaire, Editions Ulysse, Le Poiré-sur-Vie 1999, p. 155

[2] Philippe de VILLIERS, Les Cloches sonneront-elles encore demain ?, Albin Michel, Paris 2016, p. 77-78

[3] Le ''new deal'' mondial de Nicolas SARKOZY, Le Figaro Mis à jour le 14/10/2007 à 13:29 Publié le 25/09/2007 à 06:00

[4] Nicolas SARKOZY lors d'un discours à l'Ecole Polytechnique (Palaiseau) sur le thème "Egalité des chances et diversité", le 17 décembre 2008

 

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20 décembre 2016 2 20 /12 /décembre /2016 12:25

Dans un entretien exclusif à LifeSiteNews, le cardinal Raymond Burke a donné une indication de la chronologie possible d'une «correction formelle» de François si le pape devait ne pas répondre aux cinq dubia demandant un éclaircissement sur Amoris Laetitia, présentées au Pape par les Quatre cardinaux, dont le cardinal Burke.

 

«Les dubia doivent avoir une réponse parce qu'elles ont à voir avec les fondements même de la vie morale et de l'enseignement constant de l'Eglise à l'égard du bien et du mal, en ce qui concerne diverses réalités sacrées comme le mariage et la sainte communion et ainsi de suite», a déclaré M. Burke lors d'une entrevue téléphonique.

 

«Bien sûr, nous sommes dans les derniers jours, des jours de forte grâce, avant la solennité de la Nativité de Notre Seigneur, et puis nous avons l'Octave de la Solennité et les célébrations au début de la nouvelle année - tout le mystère de La Naissance de Notre-Seigneur et son Epiphanie - ainsi elle aurait probablement lieu quelque temps après. »

 

Le cardinal, qui est le patron de l'Ordre souverain de Malte, a déclaré que le format de la correction serait «très simple».

 

«Il serait direct, de même que les dubia le sont, seulement dans ce cas, il n'y aurait plus à soulever des questions, mais à confronter les déclarations confuses d'Amoris Laetitia avec ce qui a été l'enseignement constant et la pratique de l'Eglise, et corriger ainsi Amoris Laetitia », a-t-il dit.

 

L'exhortation a causé une grande confusion dans l'Église catholique depuis qu'elle a été délivrée en avril, en grande partie à cause de son ambiguïté sur des questions morales importantes. Cela a amené plusieurs évêques ainsi que des conférences épiscopales à interpréter le document, parfois, d'une manière qui est en contradiction avec l'enseignement catholique sur le mariage, la sexualité, la conscience et la réception de la sainte communion. Par exemple, les évêques de Buenos Aires et Mgr Robert McElroy de San Diego ont interprété le document comme permettant les divorcés civilement et remariés catholiques qui vivent dans l'adultère de recevoir la sainte communion dans certains cas. Le pape lui-même a écrit aux évêques de Buenos Aires pour louer leurs lignes directrices, disant qu'il n'y avait " aucune autre interpréation".

 

Le Cardinal Burke, avec les cardinaux Walter Brandmüller, Carlo Caffarra, et Joachim Meisner, a présenté les dubia, cinq questions oui ou non, en septembre cherchant la clarté de François quant à savoir si l'exhortation est conforme à l' enseignement moral catholique. Le pape n'ayant pas émis de réponse au bout de deux mois, les cardinaux ont rendu public les dubia. Ce fut après que le cardinal Burke a révélé qu'un acte formel de correction serait nécessaire si le pape devait refuser de préciser le sens de son exhortation.

 

Si un tel acte de correction formelle est quelque chose de rare dans la vie de l'Église, ce n'est pas sans précédent.

 

Le pape Jean XXII au XIVe siècle a été contesté publiquement par les cardinaux, les évêques et les théologiens laïcs après avoir nié la doctrine selon laquelle les âmes des justes sont admises à la vision béatifique après la mort, enseignant plutôt que le ciel était retardé jusqu'à la résurrection générale à la fin de temps. Le Pape Jean finit par retirer sa position, en partie à cause d'une lettre commune de théologiens de l'Université de Paris qui professait une totale obéissance au pape tout en lui faisant comprendre que son enseignement contredisait la foi catholique.

 

Burke a appelé la procédure de correction de l'erreur d'un pontife «un moyen de sauvegarder sa fonction et son exercice».

 

«Elle est réalisée avec le respect absolu pour la fonction du Successeur de Saint Pierre», a-t-il dit.

Le cardinal Burke suggère une «correction formelle» du pape François en 2017

Source: (Traduction) EXCLUSIVE: Cardinal Burke suggests timeline for ‘formal correction’ of Pope Francis, Life Site,

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20 décembre 2016 2 20 /12 /décembre /2016 11:13
Attentat au camion de Berlin - 19 décembre 2016

Un camion a foncé dans la foule du marché de Noël à Berlin hier soir. [1] Selon un article "en direct" du Figaro, à 06h58, « au moins 12 personnes ont été tuées et 48 autres blessées par le camion. Certaines sont gravement blessées. » RIP.

 

Douze heures plus tard, les autorités allemandes ont confirmé qu'il s'agissait d'un attentat. L'auteur est « un Pakistanais de 23 ans, arrivé en Allemagne entre décembre 2015 et février 2016, en tant que demandeur d'asile. Il aurait, selon le journal Der Spiegel, obtenu un permis de séjour quelques mois plus tard, en juin 2016. »

 

Selon Le Figaro dans le fil "en direct" à 08h42, « il serait entré en Allemagne par Passau, en Bavière, le 31 décembre 2015. Cette ville à la frontière autrichienne avait été l'un des principaux points de passage pour le flux des demandeurs d'asile. »

 

La chancelière Angela Merkel, responsable de la politique d'ouverture des frontières aux migrants a déclaré penser «aux victimes, aux blessés»...

 

«C'est une journée bien difficile, a déploré la chancelière Angela Merkel, vêtue de noir. Je suis bouleversée suite aux événements d'hier soir à Berlin [...] c'est un acte incompréhensible et atroce a privé de leur vie des gens qui préparaient Noël.»

 

Le polonais retrouvé mort dans le camion a été tué par balle. L'information a été donnée par le ministre de l'Intérieur du Brandebourg, Karl-Heinz Schroeter, auprès du magazine Focus. Ce chauffeur routier a bien été victime de l'attentat et ne conduisait pas le camion au moment du drame.

 

Ce marché de Noël est l'un des plus populaires de Berlin: situé près du Ku'Damm et du grand magasin KaDeWe, il se trouve au coeur du centre touristique et commerçant de la ville. L'église du Souvenir et son clocher brisé est un monument symbole de la ville. 

 

« Ce sont les morts de Merkel.» L'accusation est brutale. Elle est signée par Marcus Pretzell, l'un des leaders du parti populiste AfD. Le parti de droite radicale mène campagne depuis des mois contre la politique migratoire de la chancelière, accusée de mettre en danger l'Allemagne.

 

Le 11 juillet 2016, devant des militants chrétiens-démocrates de son parti, la CDU, Angela Merkel avait reconnu que « le flux de réfugiés avait été utilisé pour faire entrer des terroristes [en Europe] ». [2]

Attentat au camion de Berlin - 19 décembre 2016

Comme à Nice le 14 juillet 2016, il n'y avait hier soir aucune protection particulière du marché de Noël, aucune barrière...

 

Ubuesque. La question que posent les journalistes ce matin n'est pas de savoir s'il faut fermer les frontières et interdire l'entrée des "migrants", mais « faut-il interdire les marchés de Noël en France ? » [3]...

Attentat au camion de Berlin - 19 décembre 2016

Add. 20 décembre 2016. Daech revendique l'attentat de Berlin, Par lefigaro.fr avec AFPMis à jour le 20/12/2016 à 20:37 Publié le 20/12/2016 à 20:18

Sources :

 

[1] http://www.spiegel.de/politik/deutschland/berlin-lkw-attacke-am-breitscheidplatz-polizei-geht-von-vorsatz-aus-a-1126660.html

EN DIRECT - Berlin : les autorités allemandes confirment qu'il s'agit d'un «attentat», Le Figaro, Par Julien Licourt Mis à jour le 20/12/2016 à 11:08 Publié le 20/12/2016 à 06:37

[2] Angela Merkel reconnaît que des terroristes se mêlent aux flux de migrants, RT en français, 11 juil. 2016, 21:10

[3] http://www.lefigaro.fr/actualites/2016/12/20/01001-20161220QCMWWW00088-apres-l-attentat-de-berlin-faut-il-interdire-les-marches-de-noel-en-france.php

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15 décembre 2016 4 15 /12 /décembre /2016 20:34

Vendredi, 9 décembre 2016. PLAIDOYER CONTRE UN PAPISME AVEUGLE.

Par le Dr Markus Büning, théologien et juriste à Münster (D)

 

Ces derniers jours on a entendu Mgr Pinto, Doyen de la Rote romaine, vitupérer bruyamment contre les quatre courageux cardinaux qui se sont sentis acculés à publier leur “dubia” concernant le document “Amoris Laetitia”, après l’avoir soumise au Pape François et n’avoir reçu de lui aucune réponse. Mgr Pinto voit dans ce geste une insolence caractérisée et une attitude inadmissible envers le Vicaire du Christ sur la terre. Il va jusqu’à prétendre qu’une ombre est apparue ainsi sur le parcours d’un éminent penseur. Il visait le Cardinal Meissner. Il devient clair que le Doyen de la Rote ne connaît pas le rapport qui existe entre la conscience personnelle et l’obéissance due aux autorités de l’Eglise, rapport pourtant certifié par la Tradition. Mgr Pinto semble être le porte-parole d’une obéissance inconditionnelle et par là, d’un “papisme” mal compris.

En tant que théologien qui travaille depuis plusieurs années sur la vie des saints et ce qu’ils peuvent apporter au monde d’aujourd’hui, il me semble plus que pertinent de se tourner vers deux membres de cette “immense foule” qui pourraient corriger quelque peu la vision de Mgr Pinto : je veux parler de Jeanne d’Orléans (1412-1431) et du Cardinal John Henry Newman (1801-1890). Ces modèles lumineux nous signalent de façon claire et nette que la conscience personnelle – et j’entends par là une conscience éclairée, bien formée, orientée vers la volonté divine – que cette conscience, donc, est toujours prioritaire. Ces éminents personnages nous montrent aussi que le papisme, quelle que soit la forme qu’il prend, n’est tout simplement pas catholique. Car le Pape n’est pas le centre de l’Eglise : il est le “serviteur des serviteurs de Dieu”. Et justement, dans la réalisation de cette charge au service de l’Eglise universelle, il doit se soumettre à la loi divine. S’il était avéré que cette soumission n’est plus acquise de façon claire et nette, alors les chrétiens éclairés de façon claire et nette par leur conscience auraient évidemment le devoir de le faire savoir au Pape. Et c’est cela, et rien d’autre, qu’ont fait nos quatre courageux cardinaux.

Tournons-nous d’abord vers le bienheureux John Henry Newman.

D’origine anglicane, Newman s’est converti au catholicisme romain en 1845 pour des raisons que lui dictait sa conscience. Ce ne fut, certes, pas une décision facile pour ce prêtre fortement enraciné dans la Tradition anglicane, mais par ses recherches théologiques, il fut amené à reconnaître que la véritable Eglise de Jésus-Christ ne pouvait être que l’Eglise catholique romaine.

Que faut-il retenir du parcours de John Newman ? Avant tout le courage d’avoir suivi la voix de sa conscience. Pour preuve, ce passage bien connu et souvent cité tiré de sa “Lettre au Duc de Norfolk” (1874), dans lequel il exprime la primauté de la conscience : “Si je devais porter un toast à la religion, alors je boirais à la santé du Pape. Mais avant cela, je boirais à la santé de la conscience. Ensuite seulement au Pape.”

A première vue, cette boutade de Newman peut nous paraître curieuse. Mais il n’en est rien ; car comme l’a bien remarqué Karl Rahner S.J., elle exprime “une parfaite évidence”. Et Rahner ajouta, lors d’un Congrès international dédié à Newman en 1978 à Freiburg (D) : “Un chrétien catholique dirait les choses ainsi : du plus profond de ma conscience, en une décision vitale, j’accepte et je reconnais l’autorité objective de l’Eglise catholique, comme une norme voulue par Dieu, certes extérieure, mais pleine de sens et qui s’impose à ma conscience. Mais cette reconnaissance d’une norme objective reste bien sûr - j’insiste - une décision de ma conscience personnelle qu’il me faut prendre à mes propres frais. On ne peut jamais déléguer à un autre ses propres décisions en conscience.”

Nous touchons là au point sensible : notre attachement au Pape n’entraîne pas pour nous une soumission inconditionnelle. Il en est ainsi, avant tout, parce que Dieu a donné à chacun de nous une dignité qui nous permet de prendre ce chemin de la reconnaissance d’une autorité supérieure décrite par Karl Rahner. Mais on peut parler aussi de liberté de conscience, d’une conscience bien formée, c’est-à-dire orientée vers la loi divine.

J’émets donc le souhait que le Pape François ait la bonté d’écouter aujourd’hui le conseil de son frère jésuite et de respecter la décision de conscience des quatre cardinaux.

Le Pape Benoit XVI, aujourd’hui Pape émérite, avait apporté une contribution au sujet qui nous occupe lorsqu’en tant que jeune théologien il avait commenté le n° 16 de la Constitution “Gaudium et Spes”.

Mais avant d’aborder ce commentaire, laissons la parole au Concile Vatican II lui-même : “Au fond de sa conscience, l’homme découvre la présence d’une loi qu’il ne s’est pas donnée lui-même, mais à laquelle il est tenu d’obéir. Cette voix, qui ne cesse de le presser d’aimer et d’accomplir le bien et d’éviter le mal, au moment opportun résonne dans l’intimité de son cœur : ‘Fais ceci, évite cela’. Car c’est une loi inscrite par Dieu au cœur de l’homme ; sa dignité est de lui obéir, et c’est elle qui le jugera.”

On en conviendra : c’est précisément de cela qu’il retourne dans ce débat autour d’ “Amoris laetitia”, dans la défense de cette loi inscrite par Dieu dans le cœur de l’homme. Joseph Ratzinger a commenté ce merveilleux texte du Concile d’une façon particulièrement révélatrice, en se référant expressément à l’enseignement de John Newman concernant la notion de conscience : “Au-dessus du Pape, reconnu comme expression du pouvoir d’autorité dans l’Eglise, il y a en outre la conscience personnelle, qu’il convient d’écouter en tout premier lieu, et si nécessaire en opposition aux exigences formulées par l’autorité ecclésiale.”

Vous avez bien entendu : si nécessaire en opposition aux exigences de l’autorité...

Et c’est bien à une telle nécessité que se heurtent les quatre cardinaux aujourd’hui. Ils constatent que la doctrine de l’Eglise concernant l’indissolubilité du mariage et de son caractère sacré a été diluée par le Pape François dans “Amoris laetitia”. Ils ne voient pas comment on pourrait aménager une place dans l’Eglise pour une “éthique de situation”, quelle que soit la façon de la justifier. Non, pour ces hommes une seule chose compte, la loi divine qui dit : “Tu ne dois pas rompre les liens du mariage”. Cette loi est inscrite dans la conscience de ces hommes ; ils l’ont admise sans compromission. Et c’est pourquoi ils parlent ainsi. Ce n’est pas un Monseigneur Pinto qui pourra dire le contraire : s’il le faisait, il ne pourrait plus se prétendre catholique sur ce sujet de la conscience personnelle ! Même lui ne peut s’arroger le droit d’asservir la conscience des fidèles.

En ce qui me concerne, je ne peux pas imaginer que dans toute l’Eglise catholique à travers le monde, il n’y ait que ces quatre cardinaux qui aient osé prendre une telle décision en toute conscience. Alors j’appelle tous les pasteurs qui se sentent ainsi interpelés par leur conscience à se lever, à parler !

 

Source : Kathnet (Trad. MH/APL)

PLAIDOYER CONTRE UN PAPISME AVEUGLE. Par le Dr Markus Büning, théologien et juriste à Münster (D), Pro Liturgia, Vendredi, 9 décembre 2016.

"Amoris Laetitia" : le Dr Markus Büning, théologien et juriste à Münster (D) demande que l'on respecte la liberté de conscience des Quatre Cardinaux en citant le Bx J. H. Newman et le Cardinal Ratzinger
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9 décembre 2016 5 09 /12 /décembre /2016 14:23

Mis à jour le 20/02/2018

Auguste n’a régné que par une pax cruenta, paix dégouttant du sang de ses victimes, et il a fondé une dynastie détestée, qui s’est achevée par le règne bouffon et sanglant de Néron.

Robert Etienne, Le siècle d’Auguste, Armand Collin, Paris 1999, p. 14

Jules César a conquis les Gaules, mais la "pacification" était loin d'être gagnée. Il lui restait à briser les révoltes qui devaient émailler l'histoire des Gaules jusqu'au IIIe siècle. Quelques vingts années seulement après la conquête de la Gaule, Octave Auguste, le successeur de César, préoccupé par les rapports qu'il recevra sur des ferments ou des foyers de résistance en Gaule, entreprendra un voyage chez nous. Il tiendra une assemblée à Narbonne à la fin de l'année 27 av. J.-C., afin d'organiser administrativement la Gaule en la cadastrant, c'est-à-dire en la divisant en trois provinces (Aquitaine, Lyonnaise, Belgique) et en soumettant la Gaule à une occupation armée. Le ressentiment gaulois doit être encore persistant à l'égard des Romains si une telle mesure est prise, alors qu'Auguste se présente comme un souverain pacifique et qu'il fait symboliquement fermer à Rome le temple de Bellone consacré à la guerre. Pour contenir toute velléité de révolte, il crée trois régions militaires qui serviront de territoires tampons pour éviter toute infiltration d'une possible rébellion gauloise en Italie : ainsi naissent les districts des Alpes maritimes, des Alpes Cottiennes et des Alpes Grées, en 15 av. J.-C. Il accélère l'année suivante l'installation de colons dans la Narbonnaise, afin de consolider la présence romaine dans cette province. Dans un rescrit de date inconnue, Auguste interdit aux citoyens romains la religion des druides... [1]

 

Le bilan des huit années de la Guerre de Jules César en Gaule était lourd. Les chiffres avancés par Plutarque sont terrifiants :  un million de morts, un million de prisonniers réduits en esclavage. Certaines contrées furent ravagées de fond en comble, deux et trois fois, voire quatre fois, comme le pays des Carnutes, la Beauce. Les nombreuses villes prises d'assaut furent mises à sac, pillées, incendiées, la population égorgée ou réduite en esclavage.

Le fidèle de César, Hirtius écrivit à ce sujet : « Désespérant de réduire en son pouvoir cet ennemi (Ambiorix) fugitif et tremblant [sic] César crut devoir à sa dignité [sic] de détruire dans les états d'Ambiorix les hommes, le bétail, les édifices, au point que, en horreur à ceux que le hasard aurait épargnés, Ambiorix ne pût jamais rentrer dans un pays où il aurait attiré tant de désastres. » Une curieuse ressemblance dans la méthode avec celle employée sous la Terreur [Cf. Les déclarations des révolutionnaires, dont celle de Turreau : « Il n'y a plus de Vendée. Elle est morte sous notre sabre libre, avec ses femmes et ses enfants. Je viens de l'enterrer dans les marais et dans les bois de Savenay, suivants les ordres que vous m'avez donnés. J'ai écrasé les enfants sous les pieds des chevaux, massacré des femmes, qui au moins pour celles-là n'enfanteront plus de brigands. Je n'ai pas un prisonnier à me reprocher. J'ai tout exterminé... Les routes sont semées de cadavres. Il y en a tant dans plusieurs endroits qu'ils font pyramides. » (Général François-Joseph Westermann, cité in Jean-François CHIAPPE, La Vendée en Armes 1793, tome 1, Librairie Académique Perrin, Paris 1982, p. 455.)]

 

Voilà la « dignité » romaine. « Tout fut détruit, ajoute Hirtius, par le meurtre, le feu et le vol (rapinis). »

 

Suétone dit que César en Gaule « détruisait plus souvent les villes pour le pillage (ob praedam) qu'en punition de quelque tort. »

 

Le vol dans les temples et dans les demeures privées fut organisé méthodiquement, avec une régularité digne de la grande administration romaine. César bourrait les temples romains d'ex-voto volés dans les sanctuaires gaulois.

 

Le proconsul des Gaules était certes un guerroyeur de génie,

 

Paul Déroulède par Le Petit Journal, en 1895. Mais les voleurs n'ont pas de place au Panthéon...

 

Ce vers est de Paul Déroulède. Il ne peut être question d'y laisser Jules César ! [2]

 

Pendant des siècles l'historiographie a décrit l'influence civilisatrice de Rome qui aurait soumis "les Barbares", mais rien n'est plus éloigné de la vérité.

 

La vision simpliste d'une Rome civilisatrice apportant la culture aux Barbares s'est effondrée à la suite des travaux de Camille Jullian, historien, auteur d'une monumentale Histoire de la Gaule écrite fin XIXe, début XXe s., qui a été à la civilisation gauloise et à l'historiographie sur la Gaule ce que Régine Pernoud fut au Moyen Âge. Il a mis fin au cliché répandu par l'école de la IIIe république sur les Gaulois barbares incultes, civilisés par les Romains, qui n'avaient aucune «unité», dont le sol «mal cultivé», avec un territoire où l'on «voyait presque point de routes et pas de villes»,«le contraire des  Romains» (Cf. Le Petit Lavisse d'Ernest Lavisse, dit l'«Instituteur national», dont les «manuels Lavisse» de la IIIe république, constamment réédités jusqu'en 1950..., ont déformé de multiples générations de professeurs, instituteurs et élèves en leur inculquant des contre-vérités historiques, aujourd'hui révolues.

 

Quelles étaient les motivations de César ?

 

« Le projet de César semble avant tout relever du désir de s'illustrer face à ses concurrents, notamment Pompée, rêvant comme lui d'égaler Alexandre le Grand, en cherchant à l'Ouest un empire semblable à celui qu'il avait construit à l'est.

 

D'autres motivations, révélées par les correspondances, montrent à la fois le désir de s'enrichir sur le dos des territoires conquis, et une certaine curiosité pour les régions mystérieuses du Danube et de l'Océan. Les mouvements quasi permanents des Barbares, le souvenir de la menace des Cimbres et des Teutons, les rumeurs concernant les ambitions de Burebitsa au nord-est et d'Arioviste au nord-ouest servent de prétexte pour engager une action contre ce dernier, et contre les Helvètes dont il écrit de façon minutieuse le projet de migration. César présente un récit où il justifie son intervention contre une menace, alors qu'il attaque des populations qui ont déjà des liens étroits avec Rome, mais ne servent pas son parti politique... (Bituriges, Eduens, Séquanes] » (L'Europe celtique à l'Âge du fer (VIIIe-Ier siècles), sous la direction de Olivier BUCHSENSCHUTZ, Nouvelle Clio, PUF, Mayenne 2015, p. 365.)

 

La défaite de Vercingétorix à Alésia (septembre 52 av. J.-C.) ne marque pas la fin de la résistance de Nos ancêtres les Gaulois. De nombreuses tribus refusèrent leur soumission et maintinrent allumés les feux de la "liberté gauloise". César demeura à Bibracte durant l'hiver 52-51 et y consacra cette année à de dures campagnes.

La résistance de Drappès et Luctérios

 

Si les Carnutes et les Bituriges furent assez vite soumis (février 51), il fallut encore cinq mois pour venir à bout des Gaulois Belges Bellovaques (l’un des peuples les plus importants numériquement, ils étaient les premiers des Belgae) des Eburons et des Trévires.

Nos ancêtres les Gaulois - La Gaule après Jules César - Les Origines de la France

Un parti d'irréductibles mené par le sénon Drappès et le cadurque Luctérios, ainsi que le chef des Andes Dumnacos, réunirent leurs forces avec l'intention de libérer la Provincia (Gaule narbonnaise). Ils se réfugièrent dans l'oppidum d'Uxellodunum (Puy d'Issolud, dans le Lot). Les recherches archéologiques ont confirmé que ce site correspondait au théâtre de la dernière grande bataille de la guerre des Gaules. Deux mois d'un siège sévère furent nécessaires à César pour réduite ce dernier bastion.

 

César, fidèle à son habitude, fit trancher la main droite de tous ceux qui parmi les assiégés avaient combattu (BG, VIII, 44).

 

La résistance de Marseille (49 av. J.-C.)

 

En 49 av. J.-C., César fit assiéger Marseille qui s'était révoltée et rangée du côté de Pompée. Il n'en vint à bout qu'après un long siège de plusieurs mois. César, quitta ensuite la Gaule en 49 av. J.-C pour n'y plus revenir qu'en passant. Ses nouveaux ennemis se trouvaient désormais en Orient, en Afrique, et à Rome où débutait la guerre civile.

 

En juin 46, après la mort du sénateur stoïcien Caton (qui en 59 av. J.-C. avait voté contre la mesure qui donnait à César le commandement des Gaules pour cinq ans, disant aux sénateurs qu'ils se décrétaient un tyran pour l'avenir) et de son concurrent Pompée, César put enfin célébrer à Rome son triomphe sur la Gaule, autour du char du triomphateur. Des écriteaux résumaient les actions de César en Gaule : 300 tribus soumises, 800 villes prises, 30 batailles gagnées, 3 millions d'ennemis combattus, 1 million d'esclaves, 1 million de cadavres. La figure de Marseille domptée rappelait aux Romains qu'ils avaient réussi à écarter les Grecs de l'Occident pour se le réserver. Vercingétorix fut ramené dans la prison pour y être exécuté de la main du bourreau: son crime avait été de vouloir, contre Rome, la liberté de la Gaule.

 

Traditions, souvenirs, coutumes, importait peu à César. Briseur de nations et d'hommes, il distribua la civitas romana (la citoyenneté romaine) à tous ceux qui la voulaient. Des Gaulois l'a reçurent. Des milliers de soldats de la Narbonnaise l'obtinrent d'un coup, au moment où il forma la Légion des Alouettes, parfois aussi connue comme Legio Gallica (58/57 av. J.-C.) Il l'accorda même aux officiers celtes qui le suivaient, et moins de dix ans après la fin de l'indépendance de leur nation, les rois et fils de rois de la Gaule s'apprêtaient, comme membres du peuple souverain à exploiter le monde à leur tour... Le conscrit gaulois qui était incorporé dans une légion était fait citoyen romain avant d'y entrer (car il ne pouvait y avoir que des "citoyens" dans une légion...); le conscrit qui servait dans les autres corps de troupes, dits "auxiliaires", recevait le droit de cité en sortant du service.

 

Quelques uns de ces nouveaux citoyens arrivèrent d'emblée à la dignité de sénateurs, et ils furent invités à entrer dans cet étrange sénat créé par César, ramassis d'hommes accourus de tous les points de la terre. On se moquait d'eux à Rome, quand ils demandaient le chemin de la Curie. Sur le passage de César, pendant son triomphe, les soldats chantaient en ricanant : "Il mène les Gaulois derrière son char, mais c'est pour les conduire au Sénat." L'assimilation, c'était rompre du même coup les peuples gaulois (diviser pour régner) mais rompre aussi la patrie romaine, et "remplacer, une cité maîtresse et des nations sujettes en un peuple nouveau embrassant le genre humain" [3], selon la formule de Camille Jullian.

 

Il faudra trois siècles seulement, pour voir le "peuple nouveau" ruiné et dissous avec l'édit de Caracalla de 212 ap. J.-C. ("Constitution Antonine"), qui accordait la citoyenneté romaine à tous les hommes libres de l'empire sans distinction d’origine. La terre entière achevaient de se confondre dans l’égalité des droit. A ce syncrétisme politique se superposait un syncrétisme religieux avec le développement du culte de la divinité unique... Mais naturellement, il ne faut pas voir dans cette mesure un quelconque souci humanitaire du cruel empereur : l'édit de Caracalla visait avant tout à généraliser la perception des lourds impôts dus par les citoyens romains.

Statère d'or à l'astre, cheval à droite frappé par les Bellovaques (80-50 av. J.-C.)

Statère d'or à l'astre, cheval à droite frappé par les Bellovaques (80-50 av. J.-C.)

La révolte des Bellovaques (46 av. J.-C.)

 

En 46 av. J.-C., les Bellovaques (peuple gaulois de la Gaule Belgique) prirent donc les armes. Mais la révolte fut étouffée par Decimus Brutus, qui était alors en Gaule.

 

Peu abordées sous leurs aspects politiques et culturels, voici quelques unes des résistances et des révoltes gauloises celtes après la conquête de Jules César. Cette histoire peu vulgarisée montre pourtant que le souvenir de l'indépendance nationale n'avait pas complètement disparu des pensées de nos ancêtres les Gaulois.

 

En 39 av. J.-C., le successeur de César, Octave, lors d'un déplacement en Gaule échappe de peu à un complot gaulois lors du franchissement des Alpes. Le général Agrippa est chargé de réprimer la révolte de l'Aquitaine et de la Gaule Belgique (39 - 37 av. J.-C.) Dix ans plus tard, Octave doit réprimer une autre révolte en 29 av. J.-C.

 

En 27, lorsque Auguste ordonne le recensement de toutes les Gaules, il vient dans le pays, et s'installe à Narbonne pendant l'opération. Personne ne bouge. Quinze ans plus tard, en 12 av. J.-C., il a à refaire ou à compléter le recensement. Il confie le recensement à son beau-fils, Drusus. Les choses se passent moins bien. Il y a chez les Gaulois des colères et des grondements, mais nul ne se risque dans un acte de rébellion.

 

La révolte de Sacrovir et Florus (21 ap. J.-C.)

 

Peu après la tentative ratée de conquête de la Germanie, la Gaule connait une révolte conduite par deux aristocrates, Julius Sacrovir, chef des éduens, naguère alliés de César, et le prince de la tribu des Trévires, Julius Florus. L'historien romain Tacite explique qu'il faut trouver la "raison" de cette première grande révolte gauloise dans les "lourdes taxes que les Gaulois sont obligés de payer aux gouverneurs romains..." (Annales, III, 40.) Les deux chefs gaulois "tinrent clandestinement des assemblées générales où ils dénonçaient avec virulence les impôts iniques prélevés par Rome, l'énormité de l'usure réclamée par les financiers romains et la cruauté des légats et des gouverneurs qui mettaient les terres et les cités gauloises en coupes réglée." [4]

 

La monarchie romaine est une monarchie administrative. En Occident, l'autonomie des villes est battue en brèche par les gouverneurs. Les impôts levés sur les provinciaux (capitation, impôt foncier sur les propriétaires de terres) relèvent de gouverneurs assistés de leurs procurateurs a rationibus sous Claude (41-54). Le cadastre général de l'Empire commencé sous Agrippa, et comportant des renseignements sur la valeur des terres et la nature des cultures pratiquées, est terminé sous Trajan (98-117). Au milieu du IIe s. ap. J.-C., le nombre des procurateurs sera fortement accru: il passera de 62 à 109 entre 96 et 161.

 

Dans ce contexte de forte centralisation romaine, les assemblées provinciales se réunissent pour une seule session annuelle dans la capitale de la province. L'Assemblée, en Gaule, est créée par Auguste en 12 av. J.-C., autour de l'autel des Trois-Gaules. Vespasien (70-79) osera en créer dans les provinces sénatoriales (Narbonnaise). Ces assemblées sont les héritières des koina de l'époque hellénistique en Asie, en Lycie [5], mais aussi de cette institution récemment confirmée par l'archéologie, l'Assemblée annuelle de toutes les tribus gauloises :

 

« Chaque année, en effet, écrit Jean-Louis Brunaux, un "Conseil de toute la Gaule" (Concilium totius Galliae) se réunissait et les élus de chacun des peuples y accordaient le principat (le leadership) à un peuple-patron. Cette assemblée, dont les pouvoirs paraissent avoir été limités, avait l'avantage de matérialiser un espace dont la nature était avant tout politique. 

 

Très tôt - au moins dès le IIIe siècle avant J.-C. -, les peuples prirent l'habitude de réunir leurs chefs et des délégués des différentes assemblées dans le "Conseil de toute la Gaule"... qui avait pour mission d'accorder à l'un d'entre eux ce que César nomme un "principat".

 

En 52 avant J.-C., c'est lui (César) qui décida la création d'une gigantesque armée confédérale. Mais le contrôle des accords, le respect des prérogatives de chaque population, l'arbitrage des conflits étaient délégués à une autre assemblée annuelle, celle des druides. » [6]

 

Cette Assemblée des Gaules jouera un rôle important dans l'"Assemblée de Reims" en 70 ap. J.-C. lorsqu'il s'agira de choisir entre l'indépendance ou la paix et rester ou non loyal à Rome durant la révolte de Sabinus (Voir plus bas). L'Assemblée des Gaules se réunira jusqu'au Ve siècle (Voir plus bas.)

 

Sacrovir et Florus tentent donc de soulever plusieurs peuples des Gaules, en commençant par le Centre-Ouest, avec les Andécaves et les Turons.

 

Les deux armées s'affrontent dans une première bataille vers la silva Arduenna, et Florus est vaincu. Il se donne la mort afin de ne pas être fait prisonnier.  Ainsi finit la révolte des Trévires. (Tacite, Annales, III, 42.) La révolte des Éduens devait être "plus difficile à réprimer, parce que cette nation était plus puissante", et les forces romaines "plus éloignées" (Tacite, Annales, III, 43.)

"Sacrovir lui-même, entouré des principaux chefs, parcourait les rangs sur un cheval superbe" (Tacite, Annales, III, 45.) Combat de Romains et de Gaulois - Penture de Charles-Évariste-Vital Luminais (19e s.)

"Sacrovir lui-même, entouré des principaux chefs, parcourait les rangs sur un cheval superbe" (Tacite, Annales, III, 45.) Combat de Romains et de Gaulois - Penture de Charles-Évariste-Vital Luminais (19e s.)

"À douze milles d’Augustodunum (Autun), [l'ancienne Bibracte renommée "ville d'Auguste"], on découvrit dans une plaine les troupes de Sacrovir. Il avait mis en première ligne ses hommes bardés de fer, ses cohortes sur les flancs, et par derrière des bandes à moitié armées. Lui-même, entouré des principaux chefs, parcourait les rangs sur un cheval superbe, rappelant les anciennes gloires des Gaulois, les coups terribles qu’ils avaient portés aux Romains, combien la liberté serait belle après la victoire, mais combien, deux fois subjugués, leur servitude serait plus accablante." (Tacite, Annales, III, 45).

 

Sacrovir, vaincu, "se retira d’abord à Augustodunum ; ensuite, craignant d’être livré, il se rendit, avec les plus fidèles de ses amis, à une maison de campagne voisine. Là il se tua de sa propre main." (Tacite, Annales, III, 46.) "Et Les autres chefs s'entre-tuèrent pour ne pas tomber aux mains des Romains, ayant mis le feu à la demeure qui devint leur bûcher de crémation".

 

Bien des usages gaulois disparurent d'eux-mêmes ou du fait des lois. Par exemple, passé le règne de l'empereur Claude (41-54), il n'y a plus trace des anciens titres nationaux qu'avaient conservés jusque-là quelques chefs de cités : au lieu de vergobrets, ils ne s'appelleront plus que préteurs ou duumvirs.

 

"Le droit de cité ne cessa d'être largement octroyé aux Gaulois sous les premiers empereurs, surtout César, Caligula et Claude." [7]

 

Après les règnes d'Auguste (-44 / + 14) et de Tibère (14-37), plus avares du titre de citoyen romain, les portes de la Cité se rouvrirent brusquement à tous les peuples.

 

Claude fit un discours qui nous a été conservé. Long, diffus et incohérent, ce discours d'homme politique n'abandonne pas le projet universaliste de César. Il montre que la loi divine de Rome, depuis son origine, est de faire de tous les peuples une seule patrie... L'aristocratie romaine se plaignit vivement de cette extension.

 

L'empereur Néron (64-68) ignorera la Gaule. Mais il vit néanmoins une révolte celtique en Bretagne insulaire, que nous pouvons aborder ici, bien qu'elle ne concerne pas strictement la "Gaule" dans ses limites géographiques définies par César. Néron vit aussi à la fin de son règne une révolte gauloise menée par Vindex, gouverneur de la Lyonnaise, qui provoquera son renversement.

La révolte de Boudicca en Bretagne (60-63)

 

"Les Celtes ne sont qu'une partie (un tiers) des Gaulois." [8]

 

Et les Gaulois ne résident pas que dans la zone géographique délimitée par César.

Source image : http://www.la-croix.com/Sciences-et-ethique/Sciences/La-carte-de-l-installation-des-Celtes-2016-08-07-1200780564

Source image : http://www.la-croix.com/Sciences-et-ethique/Sciences/La-carte-de-l-installation-des-Celtes-2016-08-07-1200780564

Dans la carte ci-dessus, on voit en rouge la "présence celtique dès le IIIe millénaire avant J.-C. en "Bretagne" (nom antique de l'actuelle Grande-Bretagne).

 

Si après la bataille d'Alésia (52 av. J.-C.), toute la Gaule (en France) fut occupée par les Romains, des tribus celtiques peuplant l'autre rive de la Manche demeuraient libres de vivre selon leurs coutumes. Ils étaient connus sous le nom de Britanni (Bretons ou Brittons).

 

A la période de la Tène (450 av. J.-C. - 25 av. J.-C.) des Gaulois continentaux ont peuplé la Bretagne insulaire, l’Irlande, alors composée d'autres peuples indigènes (dont les Pictes, Calédoniens, Maètes, Attacottes).

 

Au Ier siècle av. J.-C., arrivèrent les Gaulois Belges : Cantii (Durovernum/Canterbury), Regni ou Regnenses (Novomiagus/Chichester), Atrébates (Calleva/Silchester), Belgae (Venta/Winchester), Trinovantes (Camulodunum), Catuvellauni (Verulamium) et les Donubi.

 

Dans le Pays de Galles arrivèrent les Silures (Venta Silurum/Caervent) dont sera issu le roi Arthur au Ve. s. qui vaincra les Saxons.

 

Le centre fut peuplé par les Coritani (Ratae/leicester) et les Cornovii (Virconium/Wroxeter). [9]

Répartition des tribus celtiques en Bretagne insulaire au Ier siècle av. J.C.

Répartition des tribus celtiques en Bretagne insulaire au Ier siècle av. J.C.

La population peut avoir atteint un million d'habitants, dont la moitié vivant dans les cités et les villae rurales du Bassin de Londres.

 

Localisation géographique du mur d'Hadrien dans le nord de l'Angleterre et du mur d'Antonin en Écosse. Les Romains partirent à la conquête des Îles Britanniques, sous l'empereur Claude, en 43 ap. J.-C. La résistance britannique était dirigée par Togodumnos et Caratacos, les fils du roi Cunobelinos des Catuvellauni.

 

Et 17 ans plus tard nous est connue ce qui est restée dans l'histoire comme la révolte celtique de la reine Boudicca.

 

La conquête de l'île ne s'arrêtera qu'en 83 apr. J.-C (Tacite, De vita et moribus Iulii Agricolae 13.) L'empereur Antonin fit construire une muraille, le Mur Antonin, vers 140, qui "doublait" au Nord la fortification du mur d'Hadrien déjà édifiée. Il fut submergé par les invasions "Barbares" pictes (territoire de l'Écosse actuelle) à la fin du IIe siècle.

Carte de la Celtique. Source (image) : Patrice BRUN, Princes et Princesses de la Celtique, Le premier Âge du fer en Europe, 850 – 450 av. J.-C., Collection des Hespérides, Editions Errance, Paris 1987, p. 26

Carte de la Celtique. Source (image) : Patrice BRUN, Princes et Princesses de la Celtique, Le premier Âge du fer en Europe, 850 – 450 av. J.-C., Collection des Hespérides, Editions Errance, Paris 1987, p. 26

Vers 60 ap. J.-C., il y eut en Bretagne une révolte des Icènes de la reine Boudicca : le roi des Icènes, Prasutagus, est mort en laissant comme co-héritier l'empereur romain Néron, et ses propres filles ; le procurateur traita la province comme territoire romain, pillant, évinçant les indigènes, les traitant comme des esclaves, fit fouetter publiquement la reine Boudicca et violer ses filles.

 

La révolte démarra avec les Icènes puis les Trinovantes qui avaient perdu leurs terres au profit des colons de Colchester.

 

Les rebelles détruisirent Camulodunum (Colchester), Verulanium (St Albans) et Londinium (Londres).

Boadicée haranguant les Bretons de John Opie

Boadicée haranguant les Bretons de John Opie

« Grande, terrible à voir et dotée d'une voix puissante. Des cheveux roux flamboyants lui tombaient jusqu'aux genoux, et elle portait un torque d'or décoré, une tunique multicolore et un épais manteau retenu par une broche. Elle était armée d'une longue lance et inspirait la terreur à ceux qui l'apercevaient. » (Dion Cassius, Histoire romaine, 62, 2.)

 

Suetonius Paullinus regroupa ses 10.000 hommes dans les Midlands et livra bataille aux rebelles supérieurs en nombre de Boudicca qui fut battue.

 

La répression romaine fut sans pitié. Suetonius Paullinus extermina les tribus rebelles. La présence d'un Concilium provincial prévu par Claude à Camulodunum (temple de Rome et de l'empereur) n'est plus attestée après la révolte de Boudicca.

 

La fin de la reine  Boudicca varie selon les sources : elle se suicida par empoisonnement, ou elle mourut des suites de ses blessures. Encore aujourd'hui, la révolte de Boudicca est un symbole de courage et de résistance des populations bretonnes contre l'envahisseur romain.

La Bretagne ne fut jamais profondément romanisée: sa conquête avait été trop tardive, inachevée et sa position trop excentrique.

 

La prestigieuse revue Nature nous a réservé une surprise de taille en publiant le 18 mars 2015 une étude sur les origines génétiques de la population britannique, intitulée "The fine-scale genetic structure of the British population". Il s'agit d'une oeuvre d’une solide équipe de chercheurs de l’Université d'Oxford, de l’Université du College London et du Murdoch Childrens Research Institute (Australie) emmenée par le statisticien Stephen Leslie. L'étude repose sur une analyse détaillée de l’ADN de 2 039 britanniques "de souche".

 

Des comparaisons avec des prélèvements provenant de 6 209 personnes de dix pays voisins ont permis de mettre en évidence leurs liens avec d’autres populations européennes. L’étude a montré une relative homogénéité de la population du sud et du centre de l’Angleterre. Cependant, les Saxons représentent moins de la moitié de l’ascendance de cette population – plus probablement entre 10 et 40 %, soit moins qu’on ne le pensait jusque-là compte tenu des bouleversement apportés dans la langue, les noms de lieux et l’agriculture par les invasions saxonnes. Malgré leur longue présence attestée, les Vikings auraient laissé très peu de traces génétiques, sauf dans les Orcades, qui ont fait partie de la Norvège de 875 à 1472 ; et même là, leur place dans le "profil ancestral" des habitants actuels ne dépasse pas 25 %. En revanche, trois groupes de populations européennes ont apporté une contribution spécialement importante au peuplement actuel ; ils se situent en Allemagne de l’ouest, en Flandres et dans le nord-ouest de la France. Ce dernier groupe est spécialement apparenté aux populations du Pays de Galles, d’Irlande du Nord et d’Écosse de l’ouest. Faut-il y voir la trace d’un unique peuplement celtique des deux côtés de la Manche ? Sur ce point, les auteurs de l’étude sont clairs : « nous n’avons constaté aucune évidence d’une population ‘celtique’ générale dans les parties non saxonnes du Royaume-Uni ». De nombreux groupes génétiques distincts voisinent en Irlande du Nord, en Écosse et au Pays de Galles. Les populations galloises apparaissent comme les plus proches des premiers occupants de la Grande-Bretagne installés au Royaume-Uni après la dernière ère glaciaire. Le profil ancestral de la Cornouaille est très différent de ceux du Pays de Galles mais proche de celui du Devon. (Source : L’ADN des Britanniques est moins saxon, moins viking et moins celte qu’on ne croit, Breiz Info)

 

Cette information récente doit être rapportée à ce qu'écrivait Frantz FUNCK-BRENTANO, le disciple de Camille JULLIAN, en 1925 au sujet de la répartition ethnique de la "nation française" :

 

"On dit souvent que la nation française s'est formée d'un alliage de peuples différents où l'élément prépondéral aurait été constitué par les Celtes. Après avoir envahi la Gaule , ces derniers s'y trouvèrent au contraire, en très petite minorité, comparativement aux peuples indigènes; comme les germains qui leur succéderont quelques siècles plus tard (les Francs. Ndlr.)

 

Que s'il fallait, parmi les races diverses dont s'est formée la nation française, chercher un type prédominant, c'est sans aucun doute chez les Ligures qu'il se trouverait et chez les autochtones, en admettant que les Ligures aient été eux-mêmes des immigrants. Pour parler généralement, et d'une manière d'ailleurs trop absolue, il ne faut pas dire que nous sommes des celtes, nous sommes des Ligures.

 

Dans la formation de la nation française seraient entrés 50% d'autochtones, Ligures et Ibères, 20% de Celtes, 5% de Latins, 16% de Germains, en y comprenant l'élément gothique, 4% de Normands et 5% d'éléments divers : Grecs, Basques, Sémites, Syriens, Africains...

 

... La langue des Celtes, pareille au Ligure, avait des rapports étroits avec l'ombro-latin.

 

Des dialectes néo-celtiques se parlent de nos jours encore en notre Bretagne bretonnante, en Irlande, en Pays de Galles, en Haute-Ecosse et dans l'Île de Man, mais ces idiomes n'ont plus que des rapports éloignés avec ce que l'épigraphie a conservé du celte primitif.

 

La nation celtique ne pénétra d'ailleurs pas tout entière en Gaule; une partie en demeura sur la rive droite du Rhin qui se trouva ainsi celtique sur ses deux rives, de même que les deux versants des Alpe étaient ligures, et ibériques les deux versants des Pyrénées."

 

(Frantz FUNCK-BENTANO, Les Origines, Librairie Hachette, 1925, p. 31, 32, 33.) En l'état de nos connaissances, il semble aujourd'hui que les Ligures soient une sous-branche ethnique italo-celtique, un peuple de type protohistorique d'Europe ou Proto-Celtes. Ce qui donnerait une répartition de 70% de Celtes (Ligures et Celtes à proprement dit) pour 16% de Germains (Francs et Goths).

Boadicée a inspiré différents artistes. Henry Purcell (1659-1695) lui a dédié une de ses œuvres en 1695, Bonduca, or the British Heroine (Z. 574).

En 1782, William Cowper lui consacra un des poèmes les plus populaires, Boadicea, an Ode.

 

Enya :

La Statue de Boadicée, ou Boudicca, héroïne de la patrie britannique, érigée à Londres, œuvre de Thomas Thornycroft (1815–1885) :

Nos ancêtres les Gaulois - La Gaule après Jules César - Les Origines de la France

Un péplum britannique "Centurion" sorti en 2010 fut réalisé par Neil Marshall sur le thème de l'héroïne celte et une libre inspiration de la disparition de la neuvième légion romaine en 117 ap. J.-C. au nord de la Bretagne.

La Bande-annonce :

La révolte de Julius Vindex de 68

 

Gaius Julius Vindex est un noble gaulois originaire d'une puissante famille d'Aquitaine et sénateur romain. Il est sans doute légat (gouverneur) de la province de Gaule lyonnaise. Il mène en Gaule une fronde contre Néron en 68 ap. J.-C., qui allait être à l'origine de sa chute, puis de la crise politique qui secouera l'Empire en 69, et qui fut dénommée l'"année des quatre empereurs" (Néron, Galba, Vitellius, Othon).

 

Selon Dion Cassius, il aurait déclaré qu'il ne reconnaissait plus Néron comme empereur, au nom des Gaulois qu'il administrait, et qu'il s'en remettait au peuple romain et à son sénat pour le choix d'un nouvel empereur. Les crimes et les folies de Néron n'étaient pas en effet inconnus des Gaulois, honteux de vivre sous les lois d'un tel dément. En mars 68 ap. J.-C., Caius Julius Vindex, réclame le droit de la province à participer à l'élection de l'empereur. Il dénonce les turpitudes de Néron qu'il veut remplacer par Galba, alors gouverneur de la Tarragonaise (province romaine d'Espagne), un personnage connu en Gaule et estimé : il avait été gouverneur de l'Aquitaine et de la Germanie Supérieure.

 

Les Gaulois répondirent à l'appel de Vindex qui réussit à lever une milice de 100.000 hommes (dont 20.000 en armes) et offrit la direction du mouvement à Galba par l’envoi d’émissaires à Carthagène. L’armée du Rhin de Verginius Rufus, légat de Germanie Supérieure, resta cependant fidèle à Néron. À la nouvelle Révolte de Vindex en Gaule, Néron, alors à Naples, resta d'abord sans réaction. En avril, Galba fut déclaré ennemi public par le Sénat, ses biens confisqués et sa tête mise à prix. Son agent à Rome, Icelus fut arrêté. L. Verginius arriva en hâte du Rhin avec ses légionnaires. Vindex, vaincu aux environs de Vesontio (Besançon), se tua (fin mai 68).

 

Cette révolte n'en a pas moins une importance : les Gaulois ont montré le pouvoir des provinces à élire un empereur non julio-claudien..., une idée alors saugrenue.

 

Au reste, malgré la victoire des légions rhénanes devant Besançon, la cause de Galba l'emporta : l'armée d'Espagne le proclama "Auguste". Néron se tua et Galba traversa la Narbonnaise pour venir à Rome revêtir la pourpre. Durant son règne très court (puisqu'il fut massacré par les prétoriens dès le 28 janvier 69), il avait pu témoigner de sa gratitude à la Gaule celtique, en diminuant le tribut qu'elle payait à l'Empire et en y multipliant le droit de cité... [10]

 

La révolte de Civilis "pour la liberté des Gaulois et des Germains". Sabinus et le premier "empire gaulois" (69-70)

Tacite parle des "prophètes" gaulois, qui en l'an 69 prédisaient la fin de l'empire romain et la domination de Rome par les races transalpines. [11]

 

"Ca et là, quelques druides prédisaient la chute de Rome; mais c'était une prophétesse germaine, Velléda, qui inspirait les chefs." [12] De la nation des Bructères, "elle se dérobait aux regards" des députés du Congrès de Reims, "afin d'inspirer plus de respect". (Tacite, Histoires, IV, 65.)  Elle prédit les succès des Germains et la ruine des légions.(Tacite, Histoires, IV, 61.)

Velléda. Sculpture d’Hippolyte Maindron au jardin du Luxembourg de Paris

Velléda. Sculpture d’Hippolyte Maindron au jardin du Luxembourg de Paris

Fin décembre 69, la révolte du batave Civilis et du mouvement national gaulois est donc appuyé par les druides de Gaule, les Trévires (peuple celte du groupe belge), et les Lingons (un des plus anciens peuples gaulois). Civilis veut fonder un Empire des Gaules (Imperium Galliarum). Les insurgés s'emparèrent de Cologne.

 

Les Bataves étaient un peuple germanique détaché des Chattes, proches des Gaulois Belges. Julius Civilis et son frère Paulus avait combattu dans l'armée romaine et reçu la citoyenneté avant d'être accusés, à tort, de trahison sous Néron. Paulus avait été exécuté tandis que son frère Julius était délivré par Galba, pour être mis en cause de nouveau sous Vitellius. Aussi Julius Civilis décida-t-il cette fois de se révolter réellement. Il commença par feindre d'accepter les propositions des vespasianistes (partisan de Vespasien). Il gagna l'appui des Germains de la rive droite (les Bructères). La guerre se déroula avec en arrière-plan la guerre en Italie où Primus Antonius affrontait Vitellius pour le compte de Vespasien.

Révolte des Bataves conduite par Iulius Civilis, en 69 sur le Rhin. Huile sur bois d'Otto van Veen, 1613

Révolte des Bataves conduite par Iulius Civilis, en 69 sur le Rhin. Huile sur bois d'Otto van Veen, 1613

Maricc, le "libérateur des Gaulois". La révolte de Maricus et des Boïens contre l'empereur Vitellius (69)

 

En Gaule, sous l'empereur Vitellius (en 69), un boïen (habitant du pagus des Boïens sur le territoire des Eduens) dénommé Maricc (ou Mariccus), est issu de la plèbe; Il tente de lever les Boïens et les Éduens pour l'indépendance de la Gaule. Il parcourt la Gaule, se prétendant être "le champion des Gaules", un prophète envoyé des dieux et le "libérateur des Gaulois". Les Boïens est l'un des plus anciens peuples gaulois qui avaient participé à la prise de Rome en 390 av. J.-C.

« Le jour espéré et prévu par les amis de Vindex et par le prophète Maricc était enfin arrivé. Les prêtres et les devins des campagnes, derniers héritiers de l'Eglise druidique, prédirent aussitôt la chute de Rome et la ruine de l'Empire : le feu du temple romain était, chantaient-ils, le flambeau allumé par les dieux pour servir de présage à la gloire d'un empire nouveau, celui des Gaules. » (Camille Jullian, La Gaule dans l'Empire romain, Editions du Trident, Paris 2013, p. 36)

 

Il y avait 120 ans, depuis Vercingétorix, que ce mot d'"empire gaulois" n'avait plus été prononcé. Mais ni le temps de ce long siècle ni les ouvrages des empereurs n'avaient suffi pour l'effacer de la mémoire. Le groupement de chefs autour de Vindex, Galba et Othon, leurs mystérieux serments en face de Vitellius, prouvaient que les cités celtiques n'avaient renoncé à aucun de leurs rêves d'entente et de liberté.

 

Le complot s'ébaucha partout pendant que les armées du Rhin et du Danube se disputaient l'Italie et Rome. Des résolutions furent discutées à Cologne et arrêtées par les chefs gaulois qui commandaient des troupes auxiliaires. Julius Classicus et Julius Tutor chez les Trévires, Julius Sabinus chez les Lingons, rejoignirent Civilis avec les corps placés sous leurs ordres et d'autres qu'ils entraînèrent.

 

Civilis s'empara de Vetera, les Gaulois prirent Cologne et Mayence. Le titre de citoyens romains qu'ils portaient tous, n'étaient pour eux qu'une apparence.

 

Sabinus portant le manteau de pourpre d'un imperator romain, entra dans le camp des légions, monta sur l'estrade du légat, et, lut la formule du serment que tous devaient prêter à l'"Empire des Gaules" et s’autoproclama "César" de l'Imperium Galliarum. (Tacite, Histoires, IV, 67)

 

La rébellion s'étendit sur une grande partie de la Belgique et de la Germanie romaine. Elle reçut le renfort de Germains transrhénans (Usipètes, Mattiaques et Chattes).

 

Cependant, Civilis n'avait pas prêté serment à l'Empire des Gaules et prétendait lui imposer son autorité en s'appuyant sur les tribus germaniques. Le mouvement ne tarda pas à s'essouffler, alors qu'arrivait la préparation par Vespasien d'une grande expédition placée sous les ordres de Petillus Cerialis pour réprimer la révolte.

 

L'Assemblée des Gaules à Reims (janvier 70 ap. J.-C.)

 

Les cités répondirent à l'appel des Rèmes qui proposèrent de réunir à Reims une Assemblée des Gaules pour choisir entre l'indépendance ou la paix. Les délégués, examinant la situation, pesèrent toutes les conséquence d'une sécession qui loin de déboucher sur une possible indépendance, se traduirait par une domination germanique, dont la perspective rendait préférable la tutelle romaine. Finalement, la plupart des cités résolurent de rester fidèles à Rome (Tacite, Histoires, IV, 68-69.) 

 

 

Le général romain Cerialis tint alors aux Trévires et aux Lingons (Tacite, Histoires, IV, 73-74) un véritable discours politique moderne que ne répudierait nos actuels républicains. Ce discours empruntait à la tactique de Jules César en Gaule du diviser pour régner, ainsi qu'au lexique du chantage à la "paix" ou à la "guerre universelle". Il rappela la menace que les les tribus germaniques avait fait pesée sur les Gaulois, avant d'exploiter habilement nos divisions ancestrales.

 

La campagne du romain Cérialis écrasa Civilis à l’embouchure du Rhin à Trèves. Civilis finit par traiter avec les Romains et devint leur allié à la fin de 70... Cependant, tandis que Cerialis soumettait les Trévires, le général romain Appius Annius Gallus fit face aux Lingons toujours insurgés et conduits par Julius Sabinus († 78 apr. J.-C.)

 

Sabinus fut finalement défait par les légions assistées des Séquanes (peuple gaulois de l'est de la Gaule, versant ouest du jura). La cité de Trèves fut réduite au rang de ville tributaire, mais la répression fut relativement modérée.

Sabinus, simulant un suicide et brûlant sa maison, prit la fuite. Il passa neuf ans en clandestinité se cachant dans une grotte que la tradition situe aux sources de la Marne, avant d'être trahi et découvert. Il fut mis à mort malgré les supplications d'Éponine, sa femme devenue chrétienne avec qui il avait eu deux enfants. L'histoire d'Éponine est émouvante et montre la fidélité de la gauloise à son mari. Elle fit semblant de porter le deuil le jour, mais rejoignait Sabinus la nuit.

 

Eponine et Sabinus devant Vespasien, peinture par Alexandre Menjaud (1802 Paris, Ecole Nationale Supérieure des Beaux-Arts) Sabinus finit par être découvert et conduit devant Vespasien. Éponine plaida pour obtenir la grâce de son mari ; elle finit par demander à mourir avec lui (Plutarque). Elle  fut exécutée après son mari, en 79. Elle fut béatifiée sous le nom de Sainte-Eponine. Elle est fêtée le 1er novembre. De leurs deux enfants, l’un fut tué en Égypte ; le second, portant le même cognomen que son père, serait passé par Delphes.

 

Sabinus faisait partie des personnages les plus importants de Gaule de cette époque, aussi bien par sa réputation que par sa fortune, comme les autres commanditaires de l’insurrection. Tout comme eux, il était également citoyen romain : comme son gentilice l’indique, il fait partie de la gens Julia ; un de ses ancêtres avait dû obtenir la citoyenneté de Caius Julius César ou de son fils adoptif Auguste.

 

Depuis la "Renaissance", l’histoire d’Éponine et Sabinus a connu un grand succès en tant que sujet pour de nombreuses œuvres d’arts : poèmes, nouvelles, romans, pièces, peintures, sculptures ou gravures (Jacques-Remi Dahan, Éponine & Sabinus, Dominique Guéniot, 2011). Une vingtaine de pièces de théâtre ont été consacrées à Sabinus et à sa femme, ainsi qu'une trentaine de tableaux, et environ huit opéras. Mais à partir du XIXe siècle, on ne trouve presque plus de représentations de cette histoire, les artistes leur préférant au couple les figures d’autres gaulois : Brennus, Ambiorix, Camulogène et surtout Vercingétorix. Sabinus s’effaça ainsi peu à peu de notre mémoire populaire : c’est la figure du chef arverne qui le remplaça dans Le Tour de la France par deux enfants de G. Bruno, alors que Sabinus apparaissait encore en 1876 dans l’Histoire de France de Guizot.

Eponine - par Nicolas André Monsiaux (19e s.)

Eponine - par Nicolas André Monsiaux (19e s.)

Vespasien (69-79) restaure l'autorité impériale que ses fils Titus (79-81) et Domitien (81-96) mèneront à bien. Trajan (98-117) combattra Daces et Parthes; il ne séjournera pas en Gaule, non plus qu'Hadrien (138-161). Sous Marc-Aurèle (161-180), la frontière du Danube sera en danger : la Gaule en subit le contrecoup sur le Rhin, qu'il faut défendre (166), cependant que de graves désordres éclatent chez les Séquanes. C'est l'époque où les cultes orientaux s'installent livrement dans les Gaules. C'est aussi le moment où le christianisme pénétra dans les Gaules. (Cf. S. Pothin et Ste Blandine martyrs en 177)

 

À l’époque de l’empereur Commode, entre 185 et 188 ap. J.-C., le brigandage sévit en Gaule : une bande de soldats déserteurs et de brigands gaulois commandée par un simple soldat déserteur, Maternus. Celui-ci ravage le sud de la Gaule et le nord de l'Espagne en ralliant à sa cause les oubliés de la prospérité économique, les Gaulois couverts de dette, les paysans soumis aux impôts et aux tributs romains. [13]

 

Mais apparaît alors pour la première fois un prêtre catholique qui soit vraiment conducteur d'hommes et chef d'église : à Lyon, après une terrible persécution qui vit périr sainte Blandine, saint Pothin, et les suppliciés de 177, S. Irénée de Lyon monta sur le siège épiscopal de Lyon (178), et reconstitua cette église dévastée. Le Christianisme s'apprêtait à continuer l'oeuvre de l'Empire, à propager, comme lui, la culture gréco-latine, et à en prendre la succession (Cf. S. Léon Ier Pape, héraut de la Romanitas † 461)

 

En 197, on vit arriver les premiers prétendant au trône d'origine non-romaine. Deux prétendants africains s'opposaient : Septime Sévère, de Tripolitaine (premier empereur romain d'origine africaine, qui règne de 193 à 211) et Clodius Albinus, d'Hadrumète en Bizacène (Afrique proconsulaire, actuelle Tunisie).

 

D'origine punique et à l'accent carthaginois, Sévère voulait retirer à l'oligarchie sénatoriale romaine ce qui lui restait d'autorité..., achever l'assimilation de toutes les provinces de l'Empire à l'Italie, en enlevant à Rome et au Sénat des Romains leur suprématie. C'était la destruction de l'ancienne conception augustéenne, romano-centrée. Celle-ci trouva un défenseur en la personne de Clodius Albinus, alors chef des légions de Grande-Bretagne. Albinus vint s'installer à Lyon. Sévère accourut avec ses troupes campées dans la région du Danube. La Gaule fut le théâtre de cette étrange lutte où deux non-romains prétendaient au trône d'un empire "romain". Une bataille furieuse, où 150.000 hommes furent engagés aux portes de Lyon : cognant, se culbutant, les combattants entrèrent pêle-mêle dans la ville qui fut incendiée. Sévère remporta la victoire. Albinus se tua. Aurelius Antonicus, dit Caracalla, le fils et successeur de Sévère (211-217), admirateur d'Alexandre le Grand, accentuera la politique de son père, par l'édit qui étendait à tous les sujets nés libres de l'immense empire, le titre et les droits de citoyens romains.

 

La carrière militaire dans les auxilia et les légions, tremplin vers l'acquisition de la citoyenneté en perdait son principal avantage. Les empereurs du IVe siècle tenteront d'y remédier en rendant le métier militaire héréditaire et d'une hérédité que l'on ne pouvait récuser : Valentinien (365) décidera que les fils de soldats seront soldats; mais la contrainte donna les résultats faciles à prévoir : les réfractaires recoururent à tous les moyens pour échapper au service. Ils désertèrent. Poursuivis, traqués dans leurs repaires, on les rechercha et on condamna ceux qui leur avaient donné asile. Des jeunes gens se coupèrent le pouce de la main droite pour se mettre dans l'incapacité de tenir une épée. La pénurie de soldats devint si grande que l'Empire en vint à interdire aux centurions de donner des congés à leurs hommes...

Nos ancêtres les Gaulois - La Gaule après Jules César - Les Origines de la France

Le IIIe siècle sera le siècle de l'Anarchie militaire (235-284), une période où l'Empire romain subit sa première grande crise politique de son histoire avec 43 empereurs en cinquante ans, et plusieurs usurpateurs, dont la plupart ne dépassèrent pas un an de "règne". Tous les empereurs, ainsi que les usurpateurs moururent de mort violente, tués au combat, assassinés ou contraints au suicide. Un seul mourut naturellement, de la peste.

 

Les empereurs du IIIe siècle, aux prises avec de graves difficultés extérieures redoutèrent la rupture de l'unité morale, condition de la survie de l'Empire.

 

Cette rupture de l'unité morale était en fait virtuellement inscrite dans la politique de Jules César, donnant la citoyenneté romaine aux Gaulois de Cisalpine (49 av. J.-C.). La surenchère dans l'universalité (hormis sous un Octave Auguste ou un Tibère) ne s'arrêta plus.

 

Rappelons qu'au Ier siècle, dans un discours qui nous a été conservé, l'empereur historien Claude (41-54), davantage soucieux de l'intérêt de l'humanité tout entière, montra que la loi divine de Rome, depuis son origine, était de faire de tous les peuples une seule patrie...[14]

 

Claude accorda à son tour le droit de cité à des peuples alpins, les Anaunes (Anauni) et leurs voisins de la région de Trente, qui à vrai dire, croyaient l'avoir de bonne foi et servaient même dans les cohortes prétoriennes. Lors de sa censure en 47-48, il demanda au Sénat d'admettre en son sein les notables de la Gaule chevelue (les Trois-Gaules) par un discours que nous a restitué la Table claudienne de Lyon, corroborant le résumé mieux composé de Tacite (Annales, XI ,23-25), et qui souleva des oppositions. [15]

 

Les portes de la patrie s'ouvrirent brusquement... jusqu'à ce qu'un roi franc (Clovis), cinq siècles plus tard vienne rétablir l'unité et l'indépendance de la Gaule, à son profit.

En 260, la Gaule fait sécession sous la conduite de Postumus.

 

En Orient, Palmyre (Syrie) fait de même avec Odénat, l'époux de la reine Zénobie qui parvint à réunir sous son autorité les provinces de Syrie, Arabie, Egypte et commença la conquête des provinces d'Asie mineure.

 

Ce IIIe siècle est celui d'une pression fiscale ressentie plus lourdement que l'inflation, d'une crise démographique (dépopulation : de 70 millions d'habitants au Ier siècle, la population tombe à 50 millions dans la seconde moitié du IIIe siècle), et d'une crise urbaine (ruralisation).

La révolte de Posthumus (260), le "libérateur de la Gaule". Le second "Empire gaulois (260-274)", l'Empire romain disloqué

 

En 253, les deux co-empereurs Valérien et son fils Gallien combattent les Perses de Sapor qui ont rompu la trêve et annexé l'Arménie jusque-là protectorat romain).

 

Gallien est envoyé sur les bords du Rhin pour faire face à l'invasion germanique. C'est la première division historique de l'Empire entre deux princes, un régnant en Orient (Valérien), l'autre en Occident (Gallien). Les deux sont engagés dans des guerres très éloignées. Les Francs participent entre 253 et 256 à un premier raid qui les conduit jusqu'en Espagne et en Afrique. L'empire est disloqué.

 

Les deux Augustes luttèrent contre les Goths qui déferlaient également sur les régions côtières d’Asie Mineure, dans les Balkans, en Dacie, en Mésie, en Thrace, en Macédoine même; contre Germains et Saxons qui menaçaient le littoral de la mer du Nord et de la Manche; contre les Berbères qui se soulevaient en Numidie et Maurétanie (Afrique) et contre les Perses en Arménie, en Mésopotamie, mais encore en Syrie où ils s’étaient carrément installés à Antioche avec la ferme intention de s'approprier définitivement tout l'Orient romain...

Empire romain jusqu'en 260 - Invasions germaniques au IIIe siècle

Empire romain jusqu'en 260 - Invasions germaniques au IIIe siècle

Après avoir été refoulés et cantonnés dans un territoire par Aurélien (270-275), Francs et Alamans franchissent une seconde fois, massivement, le Rhin, pillent et ravagent la Gaule de fond en comble (275-280).

 

C'est dans ce contexte désastreux qu'entre 260 et 274 se réalise la sécession de l’"Empire gaulois".

 

Des deux grandes vagues d'invasion au III et Ve s.,  celle des années 270, a probablement été, comme le soulignait Camille Jullian (Histoire de la Gaule, Paris, Hachette, 1908-1926, 8 vol.) - ce que semblent confirmer les travaux récents -, la plus terrible et la plus meurtrière: les premiers barbares et les empereurs, notamment Aurélien, qui disposent de troupes aguerries, sont encore capables de se défendre et de rejeter les envahisseurs au-delà des frontières. Mais les combats sont très violents et les ravages souvent effroyables (Pierre Chaunu, Éric Mension-Rigau, Baptême de Clovis, baptême de la France, De la religion d'État à la laïcité d'État, Éditions Balland, Paris 1996, p. 64).

 

En 256, l'empereur Gallien fit une campagne sur le Rhin à la suite de laquelle il s'attribua le titre de "restaurateur des Gaules" : il est bien probable qu'il dut ce titre aux victoires de ses lieutenants en Gaule, Aurélien et Postume.

 

Gibbon précise que tandis que que Gallien) et Salonin, son fils, encore enfant, "déployaient dans le cour de trèves toute la majesté du trône, les armées se signalèrent sous le commandement de Posthume. Quoique cet habile général trahît par la suite la famille de Valérien (co-empereur), il fut toujours fidèle à la cause importante de la monarchie. Le langage perfide des panégyriques et des médailles parle obscurément d'une longue suite de victoires; des titres, des trophées attestent, si l'on peut ajouter foi à un pareil témoignage, la réputation de Posthume, qui est souvent appelé le vainqueur des germains et le libérateur de la Gaule." [16]

 

Gallien partit pour le Danube, laissant dans le pays son fils aîné, le jeune César Valérien. Celui-ci n'était qu'un adolescent et l'autorité réelle sur ses soldats et les provinces de Gaule resta confiée à l'excellent officier, Postume, "duc de la frontière du Rhin" (257).

Ces mots de Gaule et d'Empire, cet accord entre les armées et les cités de l'Occident celtique, l'unité morale et politique de cette grande contrée rappelaient les temps d'avant César, ceux de Bituit, de Celtill et de Vercingétorix. Pour la première fois depuis les rois arvernes, le pays était maître de ses destinées.

 

En 258, Postume et le prince se brouillèrent. Des légions refusèrent d'obéir au jeune Valérien, rompirent la foi due à Gallien, et acclamèrent leur général comme "Auguste" des Gaules, des Bretagnes, des Germanies et de Rhétie (260).

 

Une inscription de l'été 260, découverte à Augsbourg, a montré que l'usurpation de Postume fut liée à la capture de Valérien à Edesse et mis à mort par les Perses (260). [17]

 

Jusque-là rien que de très banal : c'est une armée d'Occident qui donne la pourpre à son chef, et Postume ne fait d'abord que ressembler à Clodius Albinus (193-197) ou à Vitellius (69).

 

Mais par la suite les choses changèrent. Reconnu par l'Occident, Postume, appelé en Gaule le "vainqueur des Germains" et le "libérateur de la Gaule", se contente d'y régner. Et ceux qui lui succéderont, jusqu'au dernier, se refuseront également à toute ambition universelle, comme si la proclamation de 258 avait avait eu pour objet de fonder un Empire romain des Gaules. Ces "empereurs" des Gaules restaient dans l'obédience romaine, sans pouvoir aller s'imposer à Rome. Il s'agissait surtout d'une prise en main des provinces gauloises. [18] Le titre de "restaurateur des Gaules" reparut comme épithète des empereurs. [19]

 

Posthume résidait près de la frontière à Mayence, Cologne ou Trèves. Trèves surtout devenait une vraie capitale des Gaules. Aussi Postume fut-il fort populaire dans les pays qu'il gouverna. Il commandait la plus grande force militaire du monde. L'empire des Gaules s'agrandissait en "Empire d'Occident".

 

« Le monde lui-même profita tout entier à cette création d'un empire gaulois. Un historien officiel de la fin du IIIe siècle a caractérisé en ces termes l'oeuvre des cinq empereurs gaulois : "Ils ont été de vrais défenseurs du nom romain. ... Sans eux, les Germains franchissaient le Rhin et foulaient le sol romain. Or, en ces temps-là, Perses et Goths étaient répandus dans l'empire: que serait-il arrivé si tous ces barbares s'étaient rejoints. Certes, c'en était fait du nom de l'empire romain." » [20]

 

Les vertus sévères de Posthume furent la cause de sa perte : après la chute d'un compétiteur qui avait pris la pourpre à Mayence, il refusa d'abandonner à ses troupes le pillage de la ville rebelle. Leur avarice trompée par son compétiteur Lélien (ou Lollien) les rendit furieuses; elles massacrèrent Posthume dans la septième année de son règne (269).

 

Les empereurs des Gaules, au nombre de 7, sont connus par les monnaies qu'ils émirent. La chronologie proposée en 1964 par Jean Lafaurie (La chronologie des empereurs gaulois, Revue numismatique, 6e série, vol. 6,‎ 1964) à partir de ses analyses numismatiques est la suivante :

 

Postumus été 260 – 269

Lélien juin/juillet 268

Marius 269

Victorinus 269 - 271

Domitianus 271

Tetricus Ier 271 - printemps 274

Tetricus II 271 - 273

Empire des Gaules à son apogée sous Tétricus en 271 apr. J.-C, Empire romain et Empire de Palmyre

Empire des Gaules à son apogée sous Tétricus en 271 apr. J.-C, Empire romain et Empire de Palmyre

Maître de la Gaule, de l'Espagne et de la Bretagne, "à la différence de ses prédécesseurs, Tetricus n'était pas un général de l'armée du Rhin; c'était un aristocrate gallo-romain, pacifique, dépourvu d'ambition.

 

On ne sait pas grand-chose de son avènement, ni de son règne : est-ce sous Victorinus (269) ou sous Tetricus en 271-272 que fut saccagée Autun par des soldats furieux de la fidélité persistante de la ville à l'empereur de Rome ?

 

Dès son retour d'Orient, Aurélien marcha contre lui. Courant 273, alors qu'Aurélien se trouvait déjà Châlons-sur-Marne, Tetricus qui disposait pourtant des légions de Germanie et de Bretagne, ne fit rien pour s'opposer à li. Mieux, il écrivit pour lui demander de le délivrer de son fardeau.

 

Des soldats l'obligèrent à combattre, il passa dans le camp romain. Exhibé dans le cortège triomphal d'Aurélien, il retrouva son siège au sénat et reçut un poste officiel en Italie du Sud, comme corrector de Lucanie. Ainsi prit fin l'Empire gaulois. Fruit d'un mouvement plus provincialiste que séparatiste, il n'en avait pas moins montré pendant près de quinze ans la fragilité maintenant évidente de l'Empire." [21]

 

"Les soldats rebelles, quoiqu'en désordre et consternés de la désertion inattendue de leur chef, se défendirent longtemps avec le courage du désespoir. Ils furent enfin taillés en pièces, presque jusqu'au dernier, dans cette bataille sanglante et mémorable qui se donna près de Châlons en Champagne. Un nombreux corps d'auxiliaires, composé de Francs et de Bataves, repassa la Rhin à la persuasion du vainqueur, ou forcé par la terreur de ses armes. Leur retraite rétablit la puissance d'Aurélien, depuis le mur d'Antonin jusqu'aux colonnes d'hercule. ... Lyon avait résisté avec la plus grande opiniâtreté aux armes d'Aurélien." (Gibbon, Histoire du Déclin et de la Chute de l'Empire romain, Rome de 96 à 582, Robert Laffont, Malesherbes 1984, p. 224.)

L'Anarchie militaire du IIIe siècle et les "grandes invasions" de 275-280

En 276, le nouvel empereur, d'origine illyrienne, M. Aurelius Probus, accourut d'Orient où il avait été proclamé par les légions. Il s'efforça de réoccuper le secteur du Rhin. Son biographe de l'Histoire Auguste parle de 400.000 Barbares tués tant sur le Rhin qu'à l'intérieur des Gaules. ... A la mort de Probus en 282, les Gaules sont ruinées. Son successeur, M. Aurelius Carus, proclamé par les soldats, confia les provinces gauloises à son fils aîné, Carinus, avec le titre de César. A la mort de Carus, Dioclétien fut nommé Auguste par ses troupes (284). (Marcel Le Glay, Rome, tome II. Grandeur et chute de l'Empire, ibid., p. 408.)

Les coups d'Etat du IVe siècle

 

Au IVe siècle encore, de toutes les contrées de l'Empire, c'est la Gaule qui connaît le plus de coups d'Etat et qui produit le plus de prétendants : Magnence (350-353), Sylvain (355), Julien (357-363), Maxime (383-388), Eugène (392-394), Marcus (407), Gratien (407), Constantin III (407-411), Jovin (411-413), Sebastianus (412-413), Avitus, noble arverne devenu empereur romain (455-456). Chaque génération de Gaulois a son jour de révolte et sa crise politique.

 

Survivance du parler celtique au IVe siècle

 

Il ne faudrait pas croire à une romanisation profonde du pays. La grande masse de la nation parlera encore le celte quand se formeront les premiers royaumes germains. A Bordeaux par exemple, où la culture des lettres latines brille alors du plus vif éclat, la famille d'Ausone, le plus grand poète en langue latine de l'époque, se sert familièrement de la langue celtique (IVe s.)

 

Les Trévires, descendants des révoltés de l'an 69 qui avaient proclamé le premier "empire gaulois", passaient pour l'une des peuplades les plus romanisées. Pourtant, leur cité, Trèves, était devenue une manière de seconde capitale latine où les Trévirois parlent encore le celte à la fin du IVe siècle, au témoignage de S. Jérôme, et les Arvernes le parleront encore au Ve siècle, sous les Wisigoths.

 

La Gaule subjugue son farouche vainqueur

 

Constantin avait déjà allégé les impôts de la province de Gaule. Les empereurs qui se succéderont après la mort de Constance II (361), témoigneront envers cette province d'une particulière attention et d'une singulière bienveillance. La proclamation en 358 de Julien comme empereur dans la ville même des Parisiens, à Lutèce, qui devait prendre le nom de Paris, est plus qu'un signe, le symbole, le clin d'oeil de l'Histoire. Elle est particulièrement appréciée par les habitants de la Gaule. Une véritable renaissance de la Gaule, certes précaire, certes provisoire, mais reconnue par tous les historiens anciens et contemporains, a permis aux villes de se repeupler et de prospérer, aux champs d'être à nouveau cultivés et à la démographie de rebondir. Une politique fiscale beaucoup moins lourde à libéré l'économie de la Gaule.

La Gaule sans cesse vaincue au cours de son histoire conflictuelle et millénaire avec Rome finit par séduire son vainqueur. À Vienne, dans l'Isère, l'empereur Julien en 362 célèbre ses cinq années de son pouvoir au milieu d'un grand concours de fierté générale d'une Gaule tout heureuse d'avoir "fait" un empereur. Vienne, théâtre de tant de batailles d'autrefois, de tant de martyres qui se sont déroulés dans son amphithéâtre et qui a vu Julien, encore simple général, la défendre (contre les invasions franques), tout comme Autun, Auxerre, Troyes, Sens, Strasbourg, la Gaule considère Julien comme l'un des siens. [21]

L'usurpation en Gaule de Constantin III (407-411)

 

En 406, arrivant de l'extrémité septentrionale de la Germanie, le goth païen Radagaise, à la tête d'une armée de 150.000 hommes composée de Goths, de Vandales, d'Alamans et d'Alains, et de Burgondes, franchit le Danube puis était entré en Italie par les Alpes.

 

Balayant les défenses frontalières, Radagaise pilla et ravagea la plaine du Pô. Un grand nombre de villes de l'Italie furent détruites. Se dirigeant vers le sud, il fut arrêté près de Florence par le général romain Stilicon commandant une armée romaine de 30 ou 40.000 hommes, considérablement renforcée de contingents barbares, et est sévèrement battu près de Fiesole. Le courage des citoyens de Florence fut soutenu par l'autorité de S. Ambroise  († 397) qui était apparu en songe pour leur annoncer une prompte délivrance (Paulin, in Vitâ Ambrosii, c. 50.) Peu de jours après, ils aperçurent du haut de leurs murs, les étendards de Stilichon, qui avançait, à la tête de toutes ses forces réunies, au secours de cette ville fidèle, et qui fit bientôt de ses environs le tombeau de l'armée barbare.. Orose et S. Augustin attribuent cette victoire miraculeuse à une protection du ciel, plutôt qu'à la valeur des hommes. Stilicon informa l'empereur Honorius (395-423), fils de Théodose, et mérita le titre de "libérateur de l'Italie".

 

Cependant, Stilicon sauva l'Italie en sacrifiant la Gaule. Orose et S. Jérôme l'accusent d'avoir suscité l'invasion de la Gaule qui fut exécutée par les restes de l'armée de Radagaise. Les Francs (alliés de Rome) firent briller leur valeur et leur zèle pour la défense de l'empire. Ils attaquèrent avec impétuosité les Vandales, qui, oubliant les leçons de l'adversité, s'étaient encore séparés de leurs alliés. Ils payèrent cher leur imprudence ; Godigisclus (Godégisel), leur roi, et vingt mille guerriers furent tués sur le champ de bataille. Toute leur nation aurait probablement été détruite par les Francs qui défendirent seuls la Gaule, si les escadrons des Alains, accourant à leurs secours, n'eussent passé sur le corps de l'infanterie des Francs. Ceux-ci après une honorable résistance furent contraints d'abandonner un combat inégal. Les envahisseurs continuèrent leur route ; et le dernier jour de l'année (31 décembre 406), ils entrèrent sans opposition dans les provinces désarmées de la Gaule.

 

"Ce passage mémorable des Suèves, des Vandales, des Alains et des Burgondes, qui ne se retirèrent plus, peut être considéré comme la chute de l'Empire romain dans les pays-audelà des Alpes ; et, dès ce moment, les barrières qui avaient séparé si longtemps les peuples sauvages des nations civilisées furent anéanties pour toujours." (Gibbon, Histoire du Déclin et de la Chute de l'Empire romain, Rome de 96 à 582, Robert Laffont, Malesherbes 1984, p. 888-889.)

 

En 407, d'autres Barbares venus de Germanie détruisirent la Gaule. Sur les bords du Rhin, Mayence fut surprise et détruite. "Des milliers de chrétiens furent inhumainement égorgés dans l'église", écrit Gibbon. "Worms succomba après un siège long et opiniâtre; Strasbourg, Spire, Reims, Tournai, Arras, Amiens subirent, en gémissant, le joug des cruels Germains; et le feu dévorant de la guerre s'étendit dans la plus grande partie des 17 provinces de la Gaule. Les Barbares se répandirent dans cette vaste et opulente contrée jusqu'à l'Océan, aux Alpes et aux Pyrénées, chassant devant eux la multitude confuse des évêques, des sénateurs, des femmes, des filles, tous chargés des dépouilles de leurs maisons et de leurs autels. ... En moins de deux ans, les bandes séparées des sauvages de la mer Baltique, pénétrèrent sans combattre jusqu'au pied des Pyrénées." (Gibbon, Histoire du Déclin et de la Chute de l'Empire romain, ibidi., p. 889)

 

Révolte de l'armée bretonne: Marcus "empereur de la Bretagne et de l'Occident" (407-411)

 

Lorsque quelque légionnaire breton obtenait la liberté de revenir de l'expédition d'Italie, ce qu'il racontait de la cour et du caractère d'Honorius devait naturellement affaiblir le sentiment du respect et de la soumission, et enflammer le caractère séditieux de l'armée bretonne.

 

Devant le déferlement des Barbares, comme dans une sorte de résurrection du second empire gaulois de Postume, Marcus fut le premier que l'armée de Bretagne plaça sur le trône comme légitime "empereur de la Bretagne et de l'Occident" (407). Celui-ci ne régna que quelques jours. Les soldats violèrent bientôt le serment de fidélité qu'ils avaient prononcé, en lui donnant la mort. Gratien fut le second qu'ils décorèrent de la pourpre et du diadème; quatre mois après, celui-ci éprouva le même sort que son prédécesseur.

 

C'est dans ce conteste d'invasions germaniques, que l'armée de Bretagne éleva ensuite leur troisième empereur, Constantin III qui régna un peu plus longtemps (407-411).

 

Revêtu de la pourpre par les légions bretonnes, Constantin III quitta la Bretagne avec toutes ses troupes, laissant celle-ci sans défense, pour aller défendre la Gaule envahie par les Barbares. Fin 409, il ne put arrêter l’invasion des Vandales, des Alains et des Suèves, qui s’installèrent en Espagne. En 410, il se rendit en Italie pour secourir Rome des invasions barbares ou pour y asseoir son autorité, accompagné de son fils Constant, qu’il fit César dès 408. Sa puissance était reconnue depuis le mur d'Antonin aux colonnes d'Hercule.

 

En 411, il fut capturé par l’armée d'Honorius, dirigée par le général Constance (futur Constance III). Livré à Honorius, celui-ci le fait exécuter en novembre 411. Pour marquer les esprits, l'empereur d'Orient Théodose II (408-450) ordonna un châtiment cruel pour le sort de Constantin III : il fut trainé par un char dans les rues d'Arles. Crucifié pendant 15 jours à l'entrée de la ville, son son corps fut ensuite jeté dans le Rhône. Le message était terrible, il dissuadera l'émergence d'autres usurpateurs bretons.

 

Révolte de la Bretagne et de l'Armorique (409)

 

Tandis que les Goths ravageaient l'Italie et que de faibles usurpateurs bretons défendaient la Gaule, l'ïle de la Bretagne abandonnée sans défense aux pirates Saxons, la Bretagne cessa de compter sur les secours inexistants d'une monarchie expirante. La Bretagne secoua le joug du gouverneur romain. 349 ans après la révolte de Boudicca, les Bretons prirent les armes une nouvelle fois... Et ils repoussèrent les Barbares. C'est Zozime (Ve siècle), historien païen grec qui raconte, en peu de mots, la révolte de la Bretagne et de l'Armorique. Le même courage anima l'Armorique (provinces maritimes de la Gaule entre la Seine et la Loire). Les habitants chassèrent eux-mêmes les magistrats romains qui commandaient sous l'autorité de l'usurpateur Constantin III et établirent un gouvernement libre "chez un peuple qui obéissait depuis si longtemps au despotisme d'un maître" (Gibbon, Histoire du Déclin et de la Chute de l'Empire romain, ibid., p. 949.)

 

L'empereur d'Occident Honorius (395-423) confirmera bientôt l'indépendance de la Bretagne et de l'Armorique. Les lettres que le fils de Théodose écrivit à ses nouveaux états, et dans lesquelles il les abandonnait à leur propre défense, peuvent être considérées comme une renonciation formelle aux droits et à l'exercice de la souveraineté." (Gibbon, Histoire du Déclin et de la Chute de l'Empire romain, ibid., p. 949.)

 

Ainsi se vérifie ce qu'a pu écrire Frantz Funck-Brentano :

 

"On répète que Rome a sauvé la Gaule des invasions germaniques, écrit Camille Jullian. Ce n'est point vrai. Tant que les proconsuls du Sénat ne se sont point présentés au delà des Alpes pour affaiblir et diviser les peuples, la Gaule d'Ambigat et de Bituit n'eut rien à craindre des Barbares d'Outre-Rhin. C'est Rome, à la fin, qui nous a livrés à eux, par la sottise criminelle de ses discordes, par la puérilité de ses rêves pacifiques, l'impéritie de son service aux frontières..." ( Frantz FUNCK-BENTANO, Les Origines, Librairie Hachette, 1925, p. 119.)

 

Le moine lettré anglo-saxon Bède le Vénérable a lui-même convenu (Hist. gent. anglic., I, 12) que les Romains abandonnèrent tout à fait la Bretagne sous le règne d'Honorius. (Gibbon, Histoire du Déclin et de la Chute de l'Empire romain, ibid., p. 949, note 6.)

 

Pendant 40 ans, la Bretagne se gouverna, jusqu'à la Descente des Saxons (449), sous l'autorité du clergé, des nobles et des villes municipales. (Gibbon, Histoire du Déclin et de la Chute de l'Empire romain, ibid., p. 950.)

 

"Environ quarante ans après la dissolution du gouvernement romain, Vortigern (en gallois moderne Gwrtheyrn) roi légendaire de la matière de Bretagne (on le retrouve associé à la légende arthurienne), paraît avoir obtenu le commandement suprême, mais précaire, des princes et des villes de la Bretagne. (Gibbon, Histoire du Déclin et de la Chute de l'Empire romain, ibid., p. 1142.) 

 

Selon les sources, Vortigern est souverain de toute l’île, vers 425, roi des Brittons-romains du Kent (le Cantium antique), vers 450. Le nom Vortigern est indiscutablement brittonique : composé de Uor-, gwr-, grand, superieur et tigern, traduit prince, son nom signifie donc "Grand Souverain".

 

Hengist, originaire du Jutland (Danemark) put espérer d'achever la conquête de la Bretagne, mais durant un règne de 35 ans, tout le succès de ses entreprises se borna à la possession du royaume de Kent, et la nombreuse colonie qu'il avait placée dans le nord fut exterminée par la valeur des Bretons.

 

Vortigern s'était laissé convaincre par le rusé Barbare Hengist qu'il lui serait avantageux d'établir une colonie d'alliés fidèles dans le voisinage des Pictes. Cette alliance avec des envahisseurs germaniques lui conféra une réputation de traître dans le monde celtique. Les Bretons regrettèrent des récompenses dont la libéralité n'avait pu satisfaire l'avarice de ces orgueilleux mercenaires.

 

Vortigern aurait été destitué par son peuple au profit de son fils Vortimer (en gallois Gwerthefyr), et se serait réfugié au Pays de Galles, où, selon la légende, il aurait rencontré Merlin l'Enchanteur. Il aurait ensuite assassiné son fils afin de récupérer le trône.

 

"Les colonies, qui, dans l'espace d'un siècle, sortirent successivement de l'embouchure de l'Elbe, du Weser et du Rhin, pour s'établir dans la Bretagne, étaient principalement composées des trois plus vaillantes tribus de Germanie.

Les Jutes, qui suivaient particulièrement le drapeau d'Hengist, s'attribuèrent l'honneur d'avoir conduit leurs compatriotes à la gloire de Kent, le premier royaume indépendant.

Les Saxons primitifs eurent toute la gloire de l'entreprise; et l'on donna aux lois et au langage des conquérants le nom du peuple qui produisit au bout de quatre siècles les premiers souverains de la Bretagne méridionale.

Les Angles, eurent l'honneur de donner leur nom au pays dont ils occupaient la plus vaste partie.

L'Europe centrale au Ve siècle. Les Saxons sont localisés sur les deux zones ocre jaune : au Nord de l'Allemagne et sud de l'Angleterre.

L'Europe centrale au Ve siècle. Les Saxons sont localisés sur les deux zones ocre jaune : au Nord de l'Allemagne et sud de l'Angleterre.

... La Bretagne, seule et sans recours, soutint longtemps avec vigueur une guerre dans laquelle il fallut à la fin céder. Les villes avaient été fortifiées avec intelligence et se défendirent avec résolution. Et les défaites des Saxons se trouvent attestées d'une manière peu douteuse par le silence prudent de leurs annalistes." (Gibbon, Histoire du Déclin et de la Chute de l'Empire romain, ibid., p. 1145.)

 

La tombe de Vortimer, fils de Vortigern, fut élevée sur les bords de la mer comme une borne formidable aux Saxons, qu'il avait vaincu trois fois dans les plaines de Kent. Mais l'illustre Arthur, prince des Silures, au sud de la province de Galles, et roi élu par la nation, efface les noms les plus célèbres de la Bretagne. Au rapport des écrivains les plus modérés, celui-ci vainquit les Angles du nord et les Saxons de l'Occident, dans douze batailles successives. Durant l'espace de 500 ans, la tradition de ses exploits fut transmise d'âge en âge et grossièrement embellie par les fictions obscures des bardes du pays de Galles et de l'Armorique. Au reste, l'orgueil et la curiosité des conquérants normands leur firent examiner l'ancienne histoire de la Bretagne. Ils adoptèrent avidement le conte d'Arthur, et prodiguèrent des louanges au mérite d'un prince qui avait triomphé des Saxons, leurs ennemis communs.

 

Un savant et ingénieux antiquaire prétend que les chefs des tribus bretonnes continuèrent toujours de régner, quoique avec un pouvoir subordonné, depuis le règne de Claude jusqu'à celui d'Honorius. (Cf. Histoire de Manchester, par Whitaker, vol. 1, p. 247-257.)

 

 

L'Assemblée des Gaules au Ve siècle

 

Ces assemblées ont duré jusque dans les derniers temps de l'empire, et il ne semble pas que leur autorité ait diminué. Au milieu du IVe siècle, elles cessèrent d'être des corps religieux; mais elles subsistèrent comme conseils politiques.

 

La révolte de la Bretagne et de l'Armorique en 409 a eu une conséquence en Gaule avec la convocation annuelle par l'empereur Honorius (395-423) d'une "Assemblée des sept provinces de la Gaule" (418).

 

En pleine invasion, Honorius réunissait à Arles les représentants de toutes les villes du Midi et donnait à cette réunion les plus grands pouvoirs. (Camille JULLIAN, Gallia, Tableau sommaire de la Gaule sous la domination romaine, ibid., p. 69.)

 

Cette assemblée, réunie à Arles, durant 28 jours, depuis le 15 août jusqu'au 13 septembre, était composée du préfet du prétoire des Gaules, de sept gouverneurs de provinces, un consulaire et six présidents, des magistrats et peut-être des évêques d'environ soixante villes, et d'un nombre suffisant, mais indéterminé, des plus considérables et des plus opulents propriétaires des terres, qu'on pouvait regarder comme les représentants de leur nation. Ils étaient autorisés à interpréter et communiquer les lois du souverain, à exposer les griefs et les demandes de leurs constituants, à modérer ou à répartir également les impôts, et à délibérer sur tous les sujets d'intérêt local ou national qui pouvaient tendre à maintenir la paix et la prospérité des sept provinces.

 

L'empereur Honorius s'étonna de la répugnance avec laquelle les provinces acceptaient un privilège qu'elles auraient dû solliciter; il fut obligé d'imposer une amende de trois et même cinq livres pesant d'or aux représentants qui s'absenteraient de l'Assemblée, et il paraît qu'il regardèrent ce présent imaginaire d'une constitution libre, comme la dernière et la plus cruelle insulte de leurs oppresseurs !" (Gibbon, Histoire du Déclin et de la Chute de l'Empire romain, ibid., p. 951-952.)

 

Au milieu du Ve siècle, ces assemblées en arrivèrent à jouer un rôle dans la politique générale: c'est un Conseil de notables gaulois qui en 455 donna la pourpre à l'empereur Avitus, un noble arverne qui sera empereur d'Occident en 455-456.

La Francia dans la "Table de Peutinger", oeuvre médiévale du XIIIe siècle, copie d'une ancienne carte romaine, faisant partie du patrimoine mondial de l'UNESCO, où figurent les routes et les villes principales de l'Empire romain. L'original est actuellement conservé à la Bibliothèque nationale autrichienne à Vienne. Source image: Christian GOUDINEAU, Par Toutatis ! Que reste-t-il de la Gaule, L'Avenir du Passé, Seuil, Lonrai 2002, p. 60-61.

La Francia dans la "Table de Peutinger", oeuvre médiévale du XIIIe siècle, copie d'une ancienne carte romaine, faisant partie du patrimoine mondial de l'UNESCO, où figurent les routes et les villes principales de l'Empire romain. L'original est actuellement conservé à la Bibliothèque nationale autrichienne à Vienne. Source image: Christian GOUDINEAU, Par Toutatis ! Que reste-t-il de la Gaule, L'Avenir du Passé, Seuil, Lonrai 2002, p. 60-61.

Les Francs en Gaule sous les rois mérovingiens (420-451)

 

Vers 450, la monarchie franque était encore renfermée dans les environs du Bas-Rhin. On élevait les princes sur un bouclier, symbole du commandement militaire.

 

Nos ancêtres les Gaulois - La Gaule, les origines de la France

 

Leurs longs cheveux étaient la marque de leur naissance et de leur dignité royale.

 

Ces belliqueux Barbares apprenaient dès l'enfance à courir, à sauter, à nager, à lancer avec une justesse surprenante le javelot ou la hâche d'armes.

 

Mérovée, fils de Clodion fut reçu par Valentinien III (425-455) comme son allié et le fils adoptif du patrice Aetius.

Sainte Geneviève sauve Lutèce (Paris) et repousse les Huns

 

Geneviève est la fille d'un officier franc, Severus, converti au christianisme nicéen (catholicisme), qui a servi dans l'armée romaine en Gaule et d'une gauloise, Gerontia, fille de Gerontius, maître de cavalerie et ami personnel de Constantin III, qui tentait de préserver une partie de la Gaule de l'installation des Germains. Ils possédaient des terres cultivables du côté de Melun et de Meaux où poussait le blé.

En 451, une grande peur s'empara de Lutèce (Parisà la nouvelle de l'arrivée imminente des Huns, menés par Attila, dont l'armée est grossie des Gépides, menés par Ardaric, des Ostrogoths de Valamer, des Rugues, des Skires, des Hérules, des Quades (Souabes), des Thuringiens, de dissidents burgondes, et de Francs ripuaires. Geneviève qui siège au conseil de Lutèce, apprend l'annonce du conflit imminent avec les Huns. Ces Barbares passent pour être sans foi ni loi à côté desquels les Wisigoths et les Vandales paraissent de paisibles concitoyens. L'armée d'Attila a pénétré en Moravie et en Bohême, puis en Hess, dans le Würtemberg, en remontant le Danube. Elle fonce vers le Rhin, le franchit à Mayence, après avoir bousculé les contingents gallo-romains et francs fédérés. Elle passe par Trèves et s'empare de Metz le samedi saint 7 avril 451, puis parvient à Tongres sur la Meuse, et se répand jusqu'à Tournai sur l'Escaut, dans le but d'aider un des fils de Clodion, roi des Francs ripuaires, à s'établir à nouveau au nord de la Gaule. Attila descend les rives de l'Aisne et passe non loin de Soissons, à une centaine de kilomètres de Lutèce.

Les personnes âgées, celles qui ont dépassé la cinquantaine et ont vu déferler en 406 la grande invasion gothique, puis ont assisté aux massacres perpétrés par les Barbares sur les populations désarmées de la rive gauche de la Seine, rendent pour ainsi dire des oracles affolant la population. Comme toujours au temps des grandes peurs, des femmes vaticinent et prédisent des périodes de sang et de mort. Les pratiques superstitieuses ressurgissent. On en voit plus d'un se livrer à des actes de dévotion envers les anciens dieux de la Gaule, comme Teutatès, Esus ou Epona.

Les bruits les plus fous, les descriptions les plus affreuses au sujet des Huns se nourrissent de témoignages vrais ou imaginaires.

Le Conseil municipal se réunit pour débattre de l'évacuation de la ville. Geneviève s'y oppose. Des gens insultent la jeune femme.Elle ne parvient pas à se faire entendre:

 

"Ayez confiance, priez et Dieu vous écoutera"

 

Mais on ne l'écoute pas. Les prêtres eux-mêmes se détournent d'elle et commencent à entasser les trésors de l'église S. Etienne sur des barques que les nautes ont amarrées au port et où magistrats, marchands, artisans, commerçants commencent à s'installer avec leurs biens. Les hommes pressent leurs épouses et leurs enfants de partir avec eux. Sur des chariots sont amassés des meubles, de l'argent, des vivres, des troupeaux, des animaux domestiques. Tout le monde veut s'échapper de Lutèce, fuir par le fleuve, par les routes et les sentiers. On part, on quitte Lutèce, on abandonne les toits. Geneviève court alors d'un endroit à un autre de l'Île, et même traverse à plusieurs reprises le pont pour tenter d'arrêter le flot des exilés. Elle ose sur le port s'adresser aux hommes et elle les exhorte à ne pas abandonner leur ville. Comme ils profèrent des injures et finissent par la bousculer, elle fait appel à leur patriotisme gaulois. Elle évoque l'antique cité lorsqu'elle était habitée par des hommes farouches et libres avant l'occupation romaine... et la défaite de Camulogène devant Labienus, lieutenant de César. Elle parle de ces précédentes invasions auxquelles toute la population de la cité a su résister en s'enfermant dans l'Île, en fortifiant les plus vastes de ses monuments. Elle s'étonnent que soudain ils abdiquent, alors que leurs pères et leurs aïeux leur ont donné tant d'exemples de courage et d'abnégation.

Sainte Geneviève - jardin du Luxembourg

Sainte Geneviève - jardin du Luxembourg

Geneviève se réfugie dans le baptistère S. Jean-en-Rond et là, au cours de la journée, bon nombre d'épouses, de mères ou de jeunes filles viennent la rejoindre pour soutenir son action. Elles finissent par se retrouver nombreuses dans le baptistère et par s'y enfermer à l'abri des imprécations de leurs époux qui n'osent quitter la ville sans elles. Elles s'agenouillent avec Geneviève et commencent des prières, des suppliques, pour demander à Dieu d'écarter Attila du chemin de Lutèce. Après avoir pris Orléans, Attila décide de lever le siège d'Orléans et de rebrousser chemin en direction de Troyes. L'affrontement des armées eu lieu aux Champs Catalauniques (451). Attila défait, Geneviève est rassurée en apprenant qu'il franchit les Alpes et s'apprête à entreprendre la conquête de l'Italie: ne l'avait-t-elle pas prédit ? Elle ne doute pas que le Hun se perdra dans cette nouvelle aventure après la défaite qu'il venait d'essuyer. [22]

 

Une sorte de royauté rétablie en Gaule par les Romains Aegidius et Syagrius, le Regnum francorum et la symbiose gallo-franque

 

Aegidius se rendit indépendant du pouvoir impérial en Gaule. Sous ses ordres, les Francs avaient longtemps combattu (Grégoire de Tours II, 27). Il (456-464) avait été nommé Magister militum des Gaules en 457 par le wisigoth Ricimer , lui-même Magister militum (456), avec le soutien de Majorien qui devait devenir peu après "empereur d'Occident" (457-461).

 

En 455, suite au second sac de Rome par Genséric, roi des Vandales (le premier sac avait été réalisé par Alaric en 410), et la mort de Maxime Pétrone, le roi wisigoth Theodoric II, roi des Wisigoths, s'arroge le droit de nommer l'"empereur d'Occident", Flavius Avitus (455-456), un gaulois natif de Clermont, issu d'une famille aristocratique d'administrateurs gaulois, qui a servi sous Aetius lors de l'invasion d'Attila (451), dans le Norique et en Gaule dans les années 430.

Avitus a laissé Aegidius surveiller la frontière rhénane. Il a fortifié le littoral de la mer du Nord et mis un terme aux raids des pirates saxons.

Depuis 455, les empereurs d'Occident seront désignés par des chefs barbares... Ricimer (456-472), général d'origine wisigothe et suève, Patrice des Romains, sera lui-même le "faiseur  de rois", une sorte d'"empereur bis" ou de régent. Il installera les empereurs sur le trône, n’hésitant pas à renverser et assassiner ceux qui, comme Avitus (456) Majorien (461) ou Anthémius (472), firent preuve d’indépendance.

 

En Gaule, le chroniqueur Grégoire de Tours qualifia Aegidius de "roi des Romains" (Jean de Sismondi, Histoire des Français, volume 1, 1821, p. 179. ) Il était par sa mère, le petit-fis du wisigoth troisième successeur d'Alaric, Wallia. Ses pairs, les rois des Francs, rois des Burgondes, faisaient eux-mêmes référence à lui comme le "roi des Romains"... Son fils, Syagrius, lui succédera en 464.

 

Les Romains rétablirent ainsi eux-mêmes une sorte de royauté de fait en Gaule, au profit d'eux-mêmes, avec le titre héréditaire de "maître des milices" en Gaule (Magister militum).

 

Childéric, père de Clovis, aidera Aegidius et les Bretons d'Armorique à vaincre les wisigoths de Frédéric, frère du roi Théodoric II, près d'Orléans en 463. En contrepartie, Aegidius reconnaît au roi des Francs Saliens les pouvoirs civils et militaires dans la Belgique seconde, avec Tournai pour capitale.

Le royaume romain de Syagrius (471-486). Au nord se trouve le royaume franc, au sud-est le royaume burgonde et au sud-ouest le royaume wisigothique

Le royaume romain de Syagrius (471-486). Au nord se trouve le royaume franc, au sud-est le royaume burgonde et au sud-ouest le royaume wisigothique

La bataille de Soissons, fin du dernier vestige du pouvoir romain en Gaule (486)

 

En 486, le réduit romain qui n'était plus défendu depuis longtemps que par les Gaulois et les Francs eux-mêmes (Francs du Comitatus de l'armée romaine en Gaule) fut renversé par d'autres Francs (bataille de Soissons), conduits par Clovis, fils de Childéric, auxquels depuis 481 s'étaient ralliés les Gaulois.

 

Cette bataille de Soissons inaugure la symbiose gallo-franque qui marqua la naissance de la nation française.

Bataille de Soissons (486) - Siège de Soissons. Maître de la Cité des dames. Grandes Chroniques de France (1410-1412)

Bataille de Soissons (486) - Siège de Soissons. Maître de la Cité des dames. Grandes Chroniques de France (1410-1412)

Le ralliement des Gaulois catholiques au roi franc devint encore plus manifeste après le mariage de Clovis avec la nièce catholique de Gondebaud, magister militum en Gaule et roi des Burgondes (470-516), Clotilde (493).

Clovis fut considéré par Grégoire de Tours comme le fondateur d'un ordre nouveau, alors que le Regnum francorum ne faisait que ressusciter une Gaule unifiée que l'on n'avait pas vu depuis 538 ans, et dont le souvenir de l'unité et de l'indépendance n'avait pas disparu. Ce royaume gallo-franc durera jusqu'en 1792, moment où la "république" dite "française", opérera en divisant les Français, tel César en Gaule.

 

Lorsque Charlemagne lui-même restaurera l'Empire d'Occident, ce ne sera pas sous sa forme d'un Etat centralisé.

 

Et lorsque la royauté capétienne aura érigé une autorité, ce ne sera jamais que celle du premier entre ses pairs (adage qui définissait la relation entre le roi et les nobles d'épée jusqu'à la fin du XVIIIe siècle) d'un seigneur possédant comme les autres son domaine propre et chargé entre tous les autres de faire respecter les coutumes existantes.

 

Le Regnum Francorum englobait l'ensemble des territoires sous le contrôle du premier entre ses pairs, signifiait encore que chaque entité géographique était désignée par son intégration dans un regnum poirtant le nom de celui qui présidait à sa destinée. Unité du royaume et égalité des différents reges francorum.

Conclusion

 

"La romanisation de la Gaule [...] ne fut pas toujours un succès, devint même un mythe, lié à celui de la paix romaine, et [...] elle se heurta assez souvent à des refus gaulois, qui au cours des siècles, prirent la forme de révoltes larvées, de rébellions organisées, de soulèvements paysans et même de sécessions." [23]

"Si les Augustes romains, fils ou héritiers de Théodose, avaient compris ces sentiments humains, ces leçons de l'histoire, ces lois de la nature, s'ils avaient laissé grandir la patrie gauloise à l'ombre de l'Empire, ils auraient peut-être procuré à cet Empire de nouveaux siècles de durée. Ils ne l'ont point fait, ils ont méconnu l'existence ou la vitalité de la nation, ils ont refusé de s'appuyer sur elle; et ils ont ainsi rapproché le jour de la chute suprême. Mais la Gaule échappera à la ruine du monde impérial, elle trouvera son salut dans les Francs de sa frontière, et c'est à eux que reviendra la tâche de reprendre et de continuer son unité nationale. Quand les empereurs de Rome n'écouteront plus les voix de la Gaule, un roi des Francs sera près d'elle pour répondre à son appel."[24]

Sources

 

[1] Joël SCHMIDT, Les Gaulois contre les Romains, Perrin Collection Tempus, Millau 2017, p. 286 -291

[2] Frantz FUNCK-BENTANO, Les Origines, Librairie Hachette, 1925, p. 96; 100; 118

[3] Camille JULLIAN, La Gaule dans l'Empire romain, Editions du Trident, Paris 2013, p. 15-16

[4] Joël SCHMIDT, Les Gaulois contre les Romains, ibid., p. 292

[5] Paul PETIT, Histoire générale de l'Empire romain I. Le Haut-Empire (27 av. J.-C. - 161 ap. J.-C.), Points Histoire, Editions du Seuil, 1974, p. 187188; 197-198

[6] Jean-Louis BRUNAUX, La Gaule, une Redécouverte, Histoire Documentation photographique, La Documentation française, mai - juin 2015, p. 07, 11

[7] Camille JULLIAN, Gallia, Tableau sommaire de la Gaule sous la domination romaine, Librairie Hachette, Paris 1902, p. 55

[8] Jean-Louis BRUNAUX, La Gaule, une Redécouverte, ibid., p. 58

[9] Paul PETIT, Histoire générale de l'Empire romain I. Le Haut-Empire, ibid., p. 260-261

[10] Frantz FUNCK-BENTANO, Les Origines, ibid., p. 131

[11] Régine PERNOUD, Les Gaulois, 1957, Seuil, Collection Le Temps qui court, rééd. Editions du Seuil, Paris 1980, p. 45

[12] Camille JULLIAN, Gallia, Tableau sommaire de la Gaule sous la domination romaine, ibid., p. 44

[13] Joël SCHMIDT, Les Gaulois contre les Romains, ibid., p. 344

[14] Camille JULLIAN, La Gaule dans l'Empire romain, ibid., p. 33

[14] Paul PETIT, Histoire générale de l'Empire romain I. Le Haut-Empire (27 av. J.-C. - 161 ap. J.-C.), ibid., p. 93

[15] GIBBON, Histoire du Déclin et de la Chute de l'Empire romain, Rome de 96 à 582, Robert Laffont, Malesherbes 1984, p. 191

[16] Odile WATTEL, Petit Atlas historique de l'Antiquité romaine, Armand Collin, Paris 1998, p. 142

[17] Camille JULLIAN, La Gaule dans l'Empire romain, ibid., p. 81

[18] Marcel LE GLAY, Rome, tome II. Grandeur et chute de l'Empire, Tempus, La Flèche 2005, p. 405-406

[19] Camille JULLIAN, Gallia, Tableau sommaire de la Gaule sous la domination romaine, ibid., p. 49-50

[20] Frantz FUNCK-BRENTANO, Les Origines, ibid., p. 121

[21] Joël SCHMIDT, Les Gaulois contre les Romains, ibid., p. 390-392

[22] Joël SCHMIDT, Sainte Geneviève, La Fin de la Gaule romaine, Perrin, Mesnil-sur-l'Estrée 1997 

[23] Joël SCHMIDT, Les Gaulois contre les Romains, ibid., p. 285

[24] Camille JULLIAN, La Gaule dans l'Empire romain, ibid., p. 326

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9 décembre 2016 5 09 /12 /décembre /2016 07:44
"Une sorte de schisme existe déjà dans l'Eglise" (Mgr Athanasius Schneider)

Mgr Athanasius Schneider, évêque auxiliaire de l'archidiocése d'Astana (Kazakhstan), vient d'apporter son soutien aux Dubia présentées au Pape au sujet d'"Amoris Laetitia", par les cardinaux Burke, Brandmüller, Caffara et Meisner. Dans un entretien à TV-Libertés (Terres de mission n°10 le 4.12.2016) Son Excellence a expliqué qu'"une certaine forme de schisme existe déjà dans l'Eglise"

 

"Des schismatiques à l'intérieur de l'Eglise usent de la calomnie pour faire taire la voix de la vérité, en projetant de manière absurde leur propre état schismatique intérieur, aux ecclésiastiques, qui indépendamment des louanges ou des blâmes défendent la divine vérité."

Extrait :

 

"Mes interrogations au sujet d'Amoris Laëtitia concerne d'abord la question très concrète de l'admission des divorcés dits remariés à la sainte Communion.

 

En fait, pendant les deux derniers synodes sur la famille et après la publication d'Amoris Laëtitia, une lutte ardue éclata et qui perdure jusqu'à ce jour sur cette question concrète. Tous ces ecclésiastiques qui veulent un autre Evangile, c'est-à-dire un évangile du droit au divorce, un évangile de la liberté sexuelle, en résumé un évangile sans le 6e commandement de Dieu. Ces ecclésiastiques utilisent de tous les mauvais moyens. C'est-à-dire qu'ils usent de ruses, de tromperies, arguments de rhétoriques et de dialectique et même la tactique de l'intimidation et de la violence morale afin d'atteindre leur objectif de l'admission des divorcés dits remariés à la sainte communion, sans que ceux-ci remplissent la condition de vivre en continence parfaite. Une condition demandée par la loi divine. Une fois cet objectif atteint, même limités aux cas dit de 'discernement exceptionnel', la porte est ouverte à l'introduction de l'évangile du divorce, de l'évangile sans le 6e commandement. Et ceci ne sera plus l'Evangile de Jésus, mais un anti-évangile, un évangile selon ce monde. Même si un tel évangile est embelli d'une cosmétique de paroles comme 'miséricorde', 'sollicitude maternelle', ou 'accompagnement'. Dans ce contexte, nous devons rappeler une exhortation apostolique, celle de S. Paul :

Quand nous-mêmes, quand un ange venu du ciel vous annoncerait un autre Evangile que celui que nous vous avons annoncé, qu'il soit anathème!

Lettre aux Galates, 1, 8

Interrogé sur la question de savoir si ce type d'évènement s'est déjà produit dans l'Eglise, Mgr Athanasius Schneider a répondu :

 

"Au sujet de la doctrine et de la pratique concernant le sacrement du mariage, et de la validité pérenne de la loi morale, nous assistons de nos jours à une ambiguïté dont l'ampleur est comparable seulement à la confusion générale de la crise arienne du IVe siècle.

 

... Il n'y a pas seulement un risque de schisme, mais une sorte de schisme existe déjà dans l'Eglise."

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