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15 janvier 2019 2 15 /01 /janvier /2019 11:16

Après Patrick Buisson au sujet de "la fin du cycle ouvert par les Lumières", la "fin des mythes", Marion Sigaut au sujet de la "fin de deux siècles de dictature totale de la bourgeoisie",  un autre spécialiste de la Révolution dite française, issu de la gauche, Éric Hazan, auteur d'une Histoire de la Révolution française (2012), annonce à son tour que "ce système (de démocratie "représentative" et de "régime parlementaire") vit ses derniers temps." 

Éric Hazan : «Ce système vit ses derniers temps»

Fondateur de la Maison d'édition La Fabrique et auteur d'ouvrages historiques, Éric Hazan a accordé un entretien à RT France. Il a notamment fourni un éclairage historique sur le mouvement des Gilets jaunes. Pour lui, «c'est sans précédent». (Source)

 

Dans un entretien accordé à RT France, Éric Hazan, à la fois fondateur de la Maison d'édition La Fabrique et auteur, notamment d'ouvrages historiques tels que Une histoire de la Révolution française, paru en 2012, analyse le mouvement des Gilets jaunes en le replaçant dans une perspective historique. Pour lui, ce qui se passe actuellement est «sans précédent». Il souhaite que les Gilets jaunes ne cherchent pas à reproduire une formule, qu'ils restent autonomes, afin que surgisse un peuple qui s'organise en un grand nombre de communes à la fois autonomes et connectées.

À propos de la comparaison faite par Jean-Luc Mélenchon du mouvement des "Gilets jaunes" avec la Révolution dite française, Éric Hazan explique que :

« Le schéma de la Révolution française c'est plein de choses très différentes les unes des autres puisque entre la prise de la Bastille, le procès du roi, la guerre, je ne sais pas s'il n'est pas un peu artificiel d'essayer à toute force de trouver des antécédents historiques avec ce qui se passe en ce moment. Il me semble que c'est sans précédent. Il me semble qu'un mouvement aussi massif, aussi national, aussi étendu dans le pays, pas parisien, cela c'est vraiment important : jusqu'à présent les "révolutions", c'était Paris. On n'entend pas parler de la "Révolution à Bourges", un peu Marseille, parce que c'était la "Marseillaise". C'est un peu artificiel de lui trouver des antécédents historiques. [...] On a la chance de vivre des moments historiques. Je ne pensais pas que je vivrai assez vieux pour voire cela. Et je suis ravi. »

 

La journaliste de RT explique qu'on a beaucoup dit que parmi les Gilets jaunes il y avait beaucoup de gens affiliés à l'extrême-droite » :

 

« Les médias et le gouvernement - c'est de bonne guerre, ils défendent leur camp, leur bifteck, explique Éric Hazan. Donc les "Gilets jaunes", ils les accusent de tout, et en particulier d'être noyautés par des fascistes. J'ai pas mal marché, promené, parlé, je n'en ai pas vu. Mais admettons que cela soit sans valeur parce que c'est un témoignage très partiel. Mais les médias et le gouvernement les accusent de tous les maux au fond. »

 

Le clivage gauche - droite qui prévaut en France depuis de nombreuses années n'était pas un obstacle à la révolution, demande la journaliste ?

 

« C'est de cette époque là (1789) que date le clivage droite-gauche. les montagnards étaient à gauche et les Girondins et les bourgeois étaient à droite du président (d'assemblée). Donc on disait la gauche, la droite, déjà.

 

Avec ce système-là, quand la droite était au pouvoir, on (les gens de gauche) disait toujours: "aux prochaines élections, on va les gagner et à ce moment-là on va voir ce qu'on va voir." Mais là on peut dire vraiment que l'épisode Hollande a été là-dessus une clarification formidable. On l'a vu, la gauche l'emporte largement, très largement, très majoritaire partout, et... politique de droite. Je pense que l'épisode Hollande, il est très important pour cela, d'avoir cassé l'idée que la gauche au pouvoir allait changer quoi que ce soit, pour les gens qui y croyait encore. Je pense que cela a été un moment important. Et ce que l'on vit en ce moment, c'est clairement consécutif à cela. Les gens, il ne faut plus leur bourrer le mou en leur disant "les prochaines élections on va les gagner." On ne peut plus dire cela. Donc, les gens, le peuple qui n'est pas content doit trouver d'autres manières d'exprimer son mécontentement que des échéances électorales. 

 

D'une certaine manière, cela consacre, cela manifeste clairement que ce système-là (de démocratie représentative et de démocratie parlementaire) ne fonctionne plus. On a tendance à considérer que le système parlementaire a toujours existé et qu'il n'y a pas d'autres systèmes. En fait, ce n'est pas très ancien, cela des débuts de la IIIe république, de la fin du XIXe siècle, le XXe siècle et un début de XXIe siècle. Pas plus. Avant, en France, il n'y avait pas de régime parlementaire avant la Révolution française. L'Ancien Régime n'était pas du tout un régime parlementaire, il n'y avait pas d'élections, tout simplement [NdCR. Il y avait de nombreuses élections au niveau régional et local, rarement au niveau national avec les États généraux où les députés étaient désignés par poids dans les corps intermédiaires et non élus par tête - suffrage actuel -, et les députés aux États généraux avaient un mandat direct, alors que le mandat aujourd'hui est indirect depuis 1791 et le début de la démocratie dite "représentative". Lire : Le self-government rural ou la "démocratie" et des élections à la pluralité des voix dans chaque village (F. Funck-Brentano, La société d'Ancien Régime)] Donc je pense que ce qui se passe en ce moment, c'est la fin de la crédibilité du système parlementaire. Et c'est très bien. »  

 

« Justement, demande la journaliste, les "Gilets jaunes" ont une défiance vis-à-vis de la "représentation" et de la "représentation politique",  vous avez dit dans un autre média, que vous considérez que ce que nous vivons actuellement avec les "Gilets jaunes", "un évènement historique irréversible", qu'est-ce que vous vouliez dire par là ? »

 

« On ne reviendra pas à un système parlementaire paisible. [...] Oui, je pense que ce système vit ses derniers temps. Il vit sa fin, il vit son agonie. Je pense que les gens n'en veulent plus. Ils veulent avoir directement accès à la formation et à l'application des lois, à leur échelle. [...] Quand est-ce que vous avez influé en quoi que ce soit concernant l'évolution de votre quartier ? Jamais. »

 

« Avez-vous un souhait ? »

 

« Un souhait négatif d'abord. Je ne souhaite pas du tout qu'ils (les Gilets jaunes) se structurent. Je pense justement que ce côté désorganisé qu'on leur reproche - on leur reproche de ne pas avoir de leaders -, mais c'est tant mieux qu'ils ne soient pas organisés, qu'ils n'aient pas de leaders. Les partis organisés avec des leaders, on connaît, on a payé ! Là, c'est quelque chose de neuf, de sans précédent. Et mon souhait c'est que cela évolue dans ce sens, dans le sens non pas d'une fragmentation, parce qu'ils sont très conscients - je ne veux pas me faire le porte-parole des Gilets jaunes - de faire partie d'un ensemble. Cet ensemble ne doit pas se désagréger, s'émietter, mais il ne doit pas non plus qu'ils se structure, qu'il cherche à reproduire une formule - on dit qu'ils vont participer aux élections européennes, j'espère que non -. Mon souhait, c'est qu'ils évoluent dans le sens de l'autonomie, de l'indépendance d'esprit [importance du libre-arbitre. NdCR], et d'une action à la fois fragmentée et cohérente. À terme, on aura un système où l'idée d'une "gouvernance", comme vous dites, sera une idée obsolète, une idée caduque. Et où la société - je n'aime pas tellement ce mot -, où le peuple, s'organisera en un grand nombre de communes à la fois autonomes et connectées. » 

Note du blog Christ-Roi. Comme on l'a vu sur ce blog, il est erroné de dire que les Gilets jaunes sont apolitiques , ils sont apartisans, mais ils sont éminemment politiques. Beaucoup sont royalistes, parce que dans un sens bien compris, la monarchie héréditaire, est le système où le roi gouverne par la grâce de Dieu sans chercher à diriger, sans chercher à être un leader ou un chef, un guide... (il a déjà le pouvoir). Ce système reste le meilleur des gouvernements (Cf. Le roi libérateur). Les Gilets jaunes tiennent leur vie d'une manière autonome, ils sont un contre-pouvoir qui vit par lui-même, en dehors de l'Exécutif, qui ne leur donne pas la vie ni l'action... Ne parlons pas du "législatif" puisque les Gilets jaunes savent, à présent, que la loi leur appartient, en dehors de tout représentant et autres leaders ou guides. Aux Français à trouver, à présent, la meilleure façon d'allier autonomie et efficacité politique.

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