Source: Valeurs Actuelles - n°4343 du 20 au 26 février 2020, pp. 26-35.
Un rapport accablant démontre la mainmise du réseau d'ONG du milliardaire sur la CEDH, qui impose à l'Europe son idéologie de la "société ouverte". Révélations exclusives.
L'Autriche, la Grèce et l'Italie sont forcées de légaliser les unions homosexuelles; la Pologne est sommée de favoriser le droit à l'avortement; la France est obligée d'autoriser le changement de sexe "sur le papier"; la Hongrie est contrainte d'abolir la prison à vie; la Russie est sanctionnée pour avoir condamné les activistes féministes punks des Pussy Riot; l'Autriche doit légaliser l'adoption par les couples homosexuels; l'application de la Charia en Grèce est validée. Des affaires sans lien entre elles? Au contraire. Chaque fois, c'est la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) qui dicte sa loi à un pays européen. Chaque fois, une ONG liée au réseau de l'Open Society Foundations (OSF) est impliquée dans l'affaire. Chaque fois, l'un des magistrats qui prononcent le jugement est un ancien collaborateur de l'OSF ou de ses affiliées. Chaque fois, la sentence porte la marque de Gorge Soros.
GRANDES ENQUÊTES
George Soros. Le milliardaire dépense en Europe 90 millions de dollars par an, soit 20 millions de plus que le budget de la CEDH.
Chapitre 1 - Aux sources d'une nequête dans les arcanes du Palais des droits de l'homme
Il est "celui-dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom". En mai 2018, Valeurs actuelles consacrait un dossier au milliardaire américain d'origine hongroise, qui, écrivions-nous, "est passé maître dans l'art de désordonner le monde sous couvert d'altruisme". En dévoilant "la machination Soros", notre journal recevait, comme tous ceux qui voient en lui autre chose qu'une philanthrope désintéressé, l'infamant label "complotiste". Critiquer ses desseins, son idéologie et ses méthodes, c'est la certitude d'être rangé dans la case "fachosphère", populiste ou antisémite - ce qui prête à sourir quand on sait que Benyamin Nétanyahou, le Premier ministre israélien, est un virulent anti-Soros. Si le front d'opposition au milliardaire est aussi large, de Viktor Orban à Donald Trump en passant par Vladmirir Poutine, c'est que l'idéologie qu'il diffuse à travers son Open Society Foundations et sa myriade d'ONG a pour but de mettre fin aux nations et d'imposer à l'Occident son idéal de "société ouverte" et sans frontières, chère au philosophe Karl Popper dont il fut le disciple. Deux ans après la publication de cette enquête, un rapport accablant, que Valeurs actuelles révèle en exclusivité, vient éclairer la manière dont George Soros a infiltré la Coeur européenne des droits de l'homme.
Tout commence à Strasbourg dans les arcanes du Palais des droits de l'homme, emblématique siège de la CEDH conçu par l'architecte britannique lord Richard Rogers. Parmi les nombreuses ONG évoluant ici, le European Center For Law and Justice (ECLJ) participe depuis plus de vingt ans au jeu d'influence et de lobbying qui se noue auprès des magistrats. Son directeur, Grégor Puppinck, intervient à la Cour dans de nombreuses affaires et entretient de bonnes relations avec la plupart de ses membres. Un jour il entend l'un d'entre eux évoquer l'existence à la Cour de "juges Soros" : on lui indique le cas du hongrois Andras Sajo. L'universitaire est l'un des fondateurs de l'Université d'Europe centrale de George Soros, dont il est par ailleurs un ami de longue date. Lié à l'OSF depuis 1988, il a siégé notamment au Conseil d'administration de l'Open Society Justice Initiative de New York, de 2001 à 2007. C'est au cours de ces années qu'il joue un rôle déterminant dans l'"affaire des crucifix".
Flash back. Jeudi 27 juillet 2006 : Soile Lautsi, une mère de famille italienne, saisit la CEDH pour contester la présence de crucifix dans les écoles publiques de la péninsule. Trois ans plus tard, Sajo siège dans la chambre qui condamne l'Italie, considérant que "l'exposition obligatoire d'un symbole d'une confession donnée dans l'exercice de la fonction publique [...] restreint le droit des parents d'éduquer leurs enfants selon leurs convictions." Les crucifix doivent disparaître.
Lire : Affaire du crucifix : le pluralisme religieux, un "argument pour imposer le sécularisme" (Grégor Puppinck)
Le gouvernement italien confie alors à ... Grégor Puppinck la direction de la stratégie pour obtenir le renvoi en grande chambre. Cette dernière, où Andras Sajo ne siège pas, renverse en 2011 le jugement et donne raison à l'Italie contre la plaignante. Après cette victoire, le juriste est fait cavaliere della Republica par le gouvernement, l'équivalent italien de la Légion d'honneur.
Puppinck est aux premières loges, mais il ne soupçonne pas à l'époque l'existence d'une phénomène plus global.
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Son attention est toutefois attirée, au fil des années, par la recrudescence de jurisprudences plus idéologiques qu'auparavant. La Cour, qui avait l'habitude de rendre des jugements sur le terrain de la justice, se prononce désormais de plus en plus souvent sur ceux de "la tolérance et l'esprit d'ouverture, sans lesquels il n'est pas de 'société démocratique'", et se fait un devoir de "garantir les conditions du 'vivre ensemble' en tant qu'élément de la "protection des droits et libertés d'autrui". Dans les domaines de la liberté d'expression et de la liberté religieuse, ses décisions appuient systématiquement l'idée que "la diversité et le multiculturalisme sont - et doivent rester - des valeurs européennes essentielles." L'idéologie de l'Open Society Foundations est de plus en plus visible. Dans l'esprit de Puppinck, il devient clair que les affaires 'sociétales' "font l'objet d'un traitement spécial, toujours progressiste". En 2018, il entreprend d'analyser l'histoire et la jurisprudence de la Cour sur ce terrain, pour en exposer les ressorts idéologiques - cela donne naissance au livre Les Droits de l'homme dénaturé (Les Éditions du Cerf). Mais c'est un épisode récent qui qui achève de le convaincre de la nécessité de se pencher cette fois-ci sur le fonctionnement interne de la Cour. Alors que la France vit l'épilogue de l'affaire Vincent Lambert, l'ECLJ travaille encore aux recours internationaux déposés au nom des parents du patient en état pauci-relationnel. Les Nations unies acceptent ce recours, de même que la cour d'appel de Paris. Mais la CEDH les rejette tous, "d'un revers de la main, sans examen sur le fond", se souvient Puppinck. Manifestement c'est jugé d'avance.
Soros aime à se présenter comme "un chef d'État sans État". Il n'a en effet nul besoin d'Etat pour mener à bien son projet... Les 47 pays signataires de la Convention européenne des droits de l'homme sont dans l'obligation de mettre leurs législations nationales en conformité avec la jurisprudence établie par la Cour. Pourquoi donc tenter d'influencer 47 Etats différents quand on peu directement leur dicter ce qu'ils doivent faire par l'intermédiaire d'une juridiction supranationale ? L'affaire des crucifix trotte dans la tête de Grégor Puppinck, qui a assisté, depuis, à plusieurs situations dans lesquelles les liens d'un juge avec une organisation pouvaient affecter un jugement. Le docteur en droit entreprend alors un premier travail de fourmi : passer au crible les curriculum vitae des 100 juges ayant siégé depuis 2009 pour identifier leurs liens avec les ONG actives auprès de la CEDH. Il épluche méticuleusement toutes les données publiques mises à disposition par l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe. Cette recension le mène beaucoup plus loin que ce à quoi il s'attendait. Six mois de recherche méthodique plus tard, il en tire une enquête fouillée appuyée par près de 200 pages d'annexes. Son travail dévoile un système qui a permis au réseau d'ONG de George Soros d'étendre son influence sur la Cour européenne des droits de l'homme et de la convertir progressivement à son idéologie.
Chapitre 2 - ONG, juges et rideau de fer.. les raisons d'une accointance
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À l'époque du rideau de fer, la Cour fut pensée en opposition au pouvoir des États : chaque citoyen victime d'une oppression dans son pays peut présenter son cas à l'institution et espérer qu'elle lui donne raison contre son pays d'origine. Les ONG jouent un rôle central dans ce dispositif, car elles sont censées être indépendantes des gouvernements. Bien souvent, les requêtes sont déposées au nom d'un particulier par une ONG. Celle-ci peut également intervenir au cours de procès dans lesquels elle n'est pas requérante, par l'intermédiaire de la "tierce-intervention", procédé qui permet de soumettre aux juges des éléments d'appréciation dans une affaire.
Dans certains pays, notamment les petits pays d'Europe de l'Est, il peut s'avérer très utile de "piocher" dans les ONG des juristes à la fois expérimentés en matière de droits de l'homme et indépendants à l'égard du gouvernement, ce qui n'est pas forcément le cas des hauts magistrats. "Avoir des juges issus d'ONG n'est pas gênant en soi, explique Puppinck, à condition que certaines ONG ne soient pas surreprésentées." C'est là tout le problème : les dix années passées au microcosme par Puppinck montrent qu'il existe un très net déséquilibre en faveur de candidats issus de l'Open Society et de son réseau.
Chapitre 3 - Quand les "juges Soros" investissent la Cour des droits de l'homme
Soros, combien de divisions ? Entre 2009 et 2019, sept ONG - toutes liées à l'Open Society - ont 'envoyé' certains de leurs collaborateurs à la Cour pour qu'ils y deviennent juge permanent. Parmi les 100 juges ayant siégé au cours de cette période, 22 ont un lien direct avec l'une de ces ONG, "que ce soit comme dirigeant, bénéficiaire de leurs financements ou comme participant notable et régulier à leurs activités", précise le compte rendu du rapport. Pour des raisons méthodologiques, Puppinck ne prend en compte dans son analyse que les juges dont le lien avec l'une de ces sept ONG est direct, mais si l'on prend en compte des liens plus indirects (l'OSF finance des centaines d'organisation et d'institutions), le nombre monte bien au-delà... [...] toutes sont financées parfois très largement par l'organisation dans laquelle George Soros a investi 32 milliards de dollars depuis 1984. Comment imaginer par exemple que Human Rights Watch puisse ne pas rendre de comptes à l'OSF, qui lui a versé 100 milliards de dollars américains depuis 2010 ? Ou les comités Helsinki, dont 40% du budget en 2017 était issu des ressources du milliardaire et de sa fondation ? La même année, la Commission internationale des juristes recevait 650 000 dollars, Amnesty International 300 000 dollars en 2016. Pour se convaincre de la convergence des intérêts de ces différentes organisations, il suffit de citer l'Open Society, qui revendique sur son son site Internet le fait que le lien établi avec ses bénéficiaires ne soit pas seulement financier mais vise à mettre en place de véritables "alliances pour atteindre des objectifs stratégiques du programme de l'open society". L'OSF et les ONG qu'elle finance partagent donc, selon la première citée, les mêmes visées.
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Dans les discours, ce soft power exercé par l'OSF prend la forme de la défense des droits de l'homme, des libertés individuelles, de la démocratie ou de la lutte contre le réchauffement climatique; dans les faits, elle se concrétise par l'action en faveur de la disparition des frontières, l'apologie de l'immigration, la promotion de l'euthanasie et de l'avortement ou la dépénalisation de la drogue et de la prostitution.
Chapitre 4 - Où se dessine le portrait d'un milliardaire militant... et intéressé
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Dans ce contexte, "l'influence de la tournure d'esprit du juge, de ses idées et de sa formation, est considérable, explique Puppinck. Les droits de l'homme sont une discipline par nature fortement idéologique : on peut faire dire à la Convention une chose et son contraire. Si un juge estime que la légalisation de la GPA s'impose au nom de la liberté, ou si, au contraire, il la condamne au nom de la dignité, il pourra faire dire les deux au même texte."
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Ce constat est d'autant plus dommageable que les juges européens sont sélectionnés selon des critères principalement politiques - l'instance chargée de les élire, l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, est elle-même éminemment politique. Il suffit pour s'en convaincre de constater qu'il est de bon ton à la CEDH d'arborer autour du cou un cordon de badge aux couleurs de l'arc-en-ciel - fourni par le Conseil de l'Europe -, ou de voir que les juges ont renoncé depuis plus de dix ans à l'emploi des expressions "Madame" et "Monsieur", trop 'genrées' selon eux. Aux États-Unis, personne ne prétend que les membres de la Cour suprême n'ont pas d'opinion politique; ils sont choisis selon ces critères. Mais en Europe, l'illusion de la neutralité politique des juges persiste et ce fantasme ne fait que renforcer le poids de leurs décisions.
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Chapitre 8 - Le dilemmne moral d'un lanceur d'alerte face à l'implacable machine Soros
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Si son ONG, le European Center for law and Justice participe à ce système, c'est qu'il (Puppinck) estime utile et nécessaire l'existence d'une telle institution. Mais continuer à y œuvrer en ayant connaissance de la situation serait selon lui hypocrite : "Pourquoi jouer un jeu dont on sait que les règles sont faussées ? Si on n'arrête pas ce phénomène, la CEDH va perdre son indépendance. Or, celle-ci doit être préservée à l'égard non seulement des États, mais aussi des ONG, en particulier l'Open Society."
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En septembre 2018, l'OSF de Hongrie et le Comité Helsinki du même pays déposaient des requêtes à la Cour européenne des droits de l'homme contre la loi hongroise "Stop Soros", dont l'objectif consiste à limiter l'influence du "philanthrope" dans le pays, notamment en matière d'immigration. Le commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe et la Commission de Venise ont déjà donné leur avis: selon eux, la nouvelle disposition de la loi hongroise qui introduit l'infraction de "facilitation de l'immigration irrégulière" est illégale et devrait être abrogée. Quelle sera l'attitude des juges liés à l'Open Society dans cette affaire ? La Hongrie a-t-elle une chance d'obtenir justice alors que l'attaque provient de la main même qui nourrit certains magistrats européens ? Ceux qui croient dans le projet européen et tiennent à l'idée même d'une Cour des droits de l'homme ne peuvent plus détourner le regard.