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1 juillet 2015 3 01 /07 /juillet /2015 12:27

"A beaucoup d'égards, le bilan (des destructions sous les Guerres de religion) a été bien pire que celui de la Révolution française."

Philippe Conrad

Pour faire écho à une actualité brûlante, le thème de l'iconoclasme protestant et des destructions opérées pendant les guerres de religion a été abordé par Tv-Libertés dans l'émission "Passé Présent", présentée par Philippe Conrad et Catherine Gourin. Il s'agit d'"une époque extrêmement sombre de notre histoire où une partie de la noblesse trouva dans la 'Réforme' l'occasion et l'opportunité de s'opposer à l'autorité royale, une époque riche en violences" dont des évènements comparables se sont reproduits sous la Révolution et face auxquels les actuels islamistes, destructeurs d'objets culturels pré-islamiques, font office d'amateurs.

L'iconoclasme protestant pendant les guerres de religion
 

01:37 - L'iconoclasme protestant pendant les guerres de religion.

 

Extrait :

 

"On a pas mal oublié ce qui s'est passé au XVIe siècle à la faveur des guerres de religion. Et là, à beaucoup d'égards, le bilan a été bien pire que celui de la Révolution française. De quoi s'agit-il au départ ? D'une lecture littérale de certains passages de la Bible tirés du Livre de l'Exode ou du Deutéronome qui justifiaient en quelque sorte la destruction des idoles.

 

Ce phénomène n'est manifesté d'abord en Allemagne et en Suisse, qui ont été les terres d'orine de la Réforme protestante dans les années 1520-1530. Zürich, Bâle, Strasbourg sont aussi concernés."

 

L'iconoclasme protestant pendant les guerres de religion

Cela prendra encore une forme plus extrême quand la secte des Anabaptistes de Münster va occuper cette ville en 1534-1535.

 

Et puis la France va être touchée aussi à l'été 1528 où une statue de la Vierge va être décapitée à Paris, à l'angle de la rue des Rosiers et de la rue des Juifs. Et ce sacrilège va considérablement indigner la population. Le Roi François Ier en personne va participer à la procession expiatoire qui sera organisée à la suite de tout cela.

Dans la nuit du 31 mai au 1er Juin 1528, une statue de pierre de la Vierge est mutilée dans le quartier dit ''des juifs'', dans le Marais. La niche contenant la statue se trouve à l'angle de la rue du Roi de Sicile et de la rue des Juifs (rue des Rosiers) . La tête de la vierge et celle de l'enfant Jesus sont décapitées. Cet évènement est aussitôt mis en relation avec d'autres manifestations d'iconoclastie menées par les partisans de la Réforme et de LUTHER pour qui le culte des Saints, et de la Vierge Marie en particulier, sont contraires au véritable sens de la Foi. Bientôt l'information circule dans tout Paris. L'émotion de la population est grande car le culte de Marie est extrêmement populaire et répandu. " Lors le Roi étant à Paris, de ce averti, fut si courroucé et marri qu'on dit qu'il en pleura très fort" (in :Journal d'un bourgeois de Paris). Source:  http://www.renaissance-france.org/rabelais/pages/15282.html

Dans la nuit du 31 mai au 1er Juin 1528, une statue de pierre de la Vierge est mutilée dans le quartier dit ''des juifs'', dans le Marais. La niche contenant la statue se trouve à l'angle de la rue du Roi de Sicile et de la rue des Juifs (rue des Rosiers) . La tête de la vierge et celle de l'enfant Jesus sont décapitées. Cet évènement est aussitôt mis en relation avec d'autres manifestations d'iconoclastie menées par les partisans de la Réforme et de LUTHER pour qui le culte des Saints, et de la Vierge Marie en particulier, sont contraires au véritable sens de la Foi. Bientôt l'information circule dans tout Paris. L'émotion de la population est grande car le culte de Marie est extrêmement populaire et répandu. " Lors le Roi étant à Paris, de ce averti, fut si courroucé et marri qu'on dit qu'il en pleura très fort" (in :Journal d'un bourgeois de Paris). Source: http://www.renaissance-france.org/rabelais/pages/15282.html

Et puis les choses vont vraiment en France se développer dans la seconde moitié du XVIe siècle.

 

Dès 1550, des statues et du portail de la cathédrale de Toulouse sont mutilées. Il en va de même en 1561 à Saint-Médard à Paris. Mais c'est surtout avec le début des Guerres de religion après le "Massacre de Vassy" (le 1er mars 1562 NDLR.) Il y aura huit guerres civiles qui vont se succédées. C'est là que vous avez les grandes vagues iconoclastes. Principalement en 1561-1562, et puis 1567-1570 pour les périodes les plus violentes, les plus radicales.

"Massacre de Vassy" (1er mars 1562) par des soldats du duc de Guise, contre 200 Huguenots qui célèbraient le culte dans une grange. "Or, il (le massacre de Vassy) fut précédé de massacres de catholiques et d'excès de toutes sortes commis sur plusieurs points du territoires par les huguenots. Excitées par "les appels sauvages" de leurs pamphlétaires, les passions protestantes 'faisaient rage dès 1560.' Dans les provinces du Midi surtout, il y avait des prêches en armes, des pillages, saccagements d'églises, des courses, des combats entre les bandes huguenotes et les troupes royales. … En 1561, les huguenots avaient saccagé l'église saint-Médard et plusieurs autres. Dans un certain nombre de villes du Languedoc, ils s'étaient emparés à main armée de plusieurs églises : à Montauban, Béziers, Castres, Nîmes, ils avaient interdit tout culte catholique, arraché les religieuses de leurs couvents et forcé ces innocentes victimes à assister aux prêches; à Montauban, il y avaient poussé le peuple à coups de fouet et de nerfs de bœufs. Ceux qui avaient essayé de résister avaient été mis en prison et fouettés jusqu'au sang; plusieurs mêmes avaient expiré sous les coups. Le 20 octobre 1561, à Montpellier, les huguenots avaient pris les armes, s’étaient rués à l'improviste sur les catholiques, avaient tué, avec le gardien des Cordeliers, près de quarante personnes et pillé plus de soixante églises ou chapelles…" [Source: Jean Guiraud, Histoire partiale histoire vraie, tome I Des origines à Jeanne d'Arc, neuvième édition, Gabriel Beauchesne & Cie Editeurs, Paris 1911, p. 70-71.] .... "Il n'y eut pas à Vassy un massacre de protestants; mais […] une bagarre sanglante, une échauffourrée où il y eut des morts des deux côtés, Guise lui-même étant blessé par les protestants." [ibid. p. 403.]  … Les guerres de religion étaient déjà commencées avant le massacre de Vassy. …On vit des bandes ou plus exactement de vraies armées protestantes organisées, dès 1559, 1560, 1561, c'est-à-dire un an, deux ans, trois ans auparavant, dans toute l'étendue du territoire, occupant de force les églises, saccageant les villes, promenant la dévastation dans les campagnes. … Qu'étaient-ce donc que ces émeutes suscitées délibérément par les protestants, ces rixes et ces batailles sinon des guerres de religion ? … Et le tableau que Ronsard (Discours des misères de ce temps adressé à la reine régente Catherine de Médicis) et Mézeray nous ont tracé de la France en 1562, nous montre qu'elle était livrée depuis longtemps aux luttes à main armées des factions politiques et religieuses." [ibid., p. 404.]

"Massacre de Vassy" (1er mars 1562) par des soldats du duc de Guise, contre 200 Huguenots qui célèbraient le culte dans une grange. "Or, il (le massacre de Vassy) fut précédé de massacres de catholiques et d'excès de toutes sortes commis sur plusieurs points du territoires par les huguenots. Excitées par "les appels sauvages" de leurs pamphlétaires, les passions protestantes 'faisaient rage dès 1560.' Dans les provinces du Midi surtout, il y avait des prêches en armes, des pillages, saccagements d'églises, des courses, des combats entre les bandes huguenotes et les troupes royales. … En 1561, les huguenots avaient saccagé l'église saint-Médard et plusieurs autres. Dans un certain nombre de villes du Languedoc, ils s'étaient emparés à main armée de plusieurs églises : à Montauban, Béziers, Castres, Nîmes, ils avaient interdit tout culte catholique, arraché les religieuses de leurs couvents et forcé ces innocentes victimes à assister aux prêches; à Montauban, il y avaient poussé le peuple à coups de fouet et de nerfs de bœufs. Ceux qui avaient essayé de résister avaient été mis en prison et fouettés jusqu'au sang; plusieurs mêmes avaient expiré sous les coups. Le 20 octobre 1561, à Montpellier, les huguenots avaient pris les armes, s’étaient rués à l'improviste sur les catholiques, avaient tué, avec le gardien des Cordeliers, près de quarante personnes et pillé plus de soixante églises ou chapelles…" [Source: Jean Guiraud, Histoire partiale histoire vraie, tome I Des origines à Jeanne d'Arc, neuvième édition, Gabriel Beauchesne & Cie Editeurs, Paris 1911, p. 70-71.] .... "Il n'y eut pas à Vassy un massacre de protestants; mais […] une bagarre sanglante, une échauffourrée où il y eut des morts des deux côtés, Guise lui-même étant blessé par les protestants." [ibid. p. 403.] … Les guerres de religion étaient déjà commencées avant le massacre de Vassy. …On vit des bandes ou plus exactement de vraies armées protestantes organisées, dès 1559, 1560, 1561, c'est-à-dire un an, deux ans, trois ans auparavant, dans toute l'étendue du territoire, occupant de force les églises, saccageant les villes, promenant la dévastation dans les campagnes. … Qu'étaient-ce donc que ces émeutes suscitées délibérément par les protestants, ces rixes et ces batailles sinon des guerres de religion ? … Et le tableau que Ronsard (Discours des misères de ce temps adressé à la reine régente Catherine de Médicis) et Mézeray nous ont tracé de la France en 1562, nous montre qu'elle était livrée depuis longtemps aux luttes à main armées des factions politiques et religieuses." [ibid., p. 404.]

Le phénomène (de la violence protestante NDLR.), on le retrouve à d'autres périodes mais de manière plus isolée.

 

On en constate un retour en 1620 quand Louis XIII va engager la lutte avec les Protestants et qui se terminera par l'"édit de grâce d'Alès" en 1629 [qui  met un terme au soulèvement protestant, confirme la liberté de culte et l’égalité civile accordée aux protestants par l’édit de Nantes (1598), mais ceux-ci perdent leurs places fortes et leurs privilèges militaires. Véritable fin des guerres de religion. L’année 1629 marqua la défaite finale du protestantisme comme parti politique et comme État dans l’État. NDLR.]

 

Quel est le sens de tout cela ? C'est le refus pour les protestants du pouvoir miraculeux qui est traditionnellement attribué aux statues et aux reliques. Il s'agit pour eux de désacraliser pour eux ce qu'ils considèrent comme des idoles. Et l'iconoclasme pour eux est un acte sanctifiant. Ils sont prêts même à subir le martyre pour avoir commis ce genre d'actes.

L'iconoclasme pour les protestants est un acte sanctifiant

L'iconoclasme pour les protestants est un acte sanctifiant

Cela peut prendre des formes un petit peu différentes. Olivier Christin qui est un des grands historiens du phénomène et qui s'est intéressé surtout au cas de la ville du Mans, distingue bien entre un iconoclasme populaire qui concerne les masses populaires en général, pour lesquelles c'est une forme de carnaval excessif de renversement des valeurs qui fait qu'on va casser ces statues et un certain nombre de symboles, et une certaine couche sociale protestante supérieure qui va préméditer, organiser et instrumentaliser à son profit le rejet des 'idoles' parce que c'est ensuite un élément de pouvoir.

L'iconoclasme protestant pendant les guerres de religion

Pour les catholiques ces choses sont inadmissibles. Pourquoi ? Parce que l'univers des images qui les entourent est porteur de signes qui témoignent de la présence de Dieu au monde. S'attaquer aux statues, aux réprésentations du Christ, de la Vierge ou des Saints remet en question le caractère immanent de la présence divine. Et ce type de sacrilèges ne peut que dresser contre les tenants de ce protestantisme la majorité de la population demeurée attachée à la foi traditionnelle.

 

Donc cet iconoclasme va être évidemment porteur de réactions et porteur de violences. Il prend une ampleur considérable. C'est perçu ainsi par les contemporains. L'humaniste Etienne Pasquier par exemple, constate que:

 

"là où le huguenot est maître, il ruine toutes les images, démolit les sépulcres, enlève tous les biens sacrés voués aux églises."

 

Et l'ambassadeur de Venise témoigne:

 

"Les novateurs (c'est ainsi qu'il désigne les 'Réformés') ont détruit les temples ou édifices sacrés en si grand nombre que dix années de revenus de la Couronne ne suffirait pas pour les rebâtir !"

 

Donc un vandalisme massif, généralisé (on va voir comment les choses se répartissent par provinces); un vandalisme unilatéral, puisque du côté du camp catholique il n'y a rien à détruire. Et les protestants n'ont pas d'édifices du culte consacrés, ils se réunissent généralement en plein air ou dans des granges à l'époque. Donc c'est vandalisme qui concerne essentiellement les édifices ou le patrimoine catholique.

 

Le bilan est accablant, mais il est inégal selon les régions.

 

La Bretagne par exemple est relativement épargnée. C'est une terre profondément catholique et qui le demeure, qui connaît à peine la 'Réforme', et qui va même rester pendant très longtemps un bastion de la Ligue (le duc de Mercoeur va continuer la lutte jusqu'à la conclusion de l'édit de Nantes en 1598 dans cette région).

 

Donc la Bretagne est largement épargnée. On peut en dire autant globalement de l'Île de France. Paris est une ville ligueuse. On sait comment Henri III a dû la quitter sous la pression du peuple monté sur les barricades. On sait comment Henri IV sera obligé de l'assiéger et devra se convertir avant de pouvoir en finir avec cette résistance. Donc l'Île de France est relativement peu touchée avec quelques exceptions notables quand même : la cathédrale de Meaux en 1562, la Collégiale Notre-Dame de Poissy (pour la petite histoire il faut rappeler qu'au mois de mai il y a eu un évènement dont la presse a très peu parlé, un acte de vandalisme comparable dans la Collégiale de Poissy, là où a été baptisé Saint-Louis: la statue de Saint-Louis a été démolie lundi 27 avril.)

 

 

 

L'iconoclasme protestant pendant les guerres de religion

En dehors de ces deux régions, tout le reste du pays va être touché à des degrés divers. Certes des restaurations interviendront ensuite. Les Bénédictins de Saint-Maur au XVIIe surtout et au XVIIIe siècle vont y contribuer dans une large mesure. Puis ensuite au XIXe siècle, Viollet-le-Duc dont on a dit beaucoup de mal pour ses restaurations parfois un peu aventurées, mais qui a eu le mérite de remettre sur pieds un patrimoine essentiel.

 

En tous les cas, beaucoup a été perdu. Et à la fin du XVIe siècle la France apparaît comme un gigantesque champ de ruines. La Normandie a été spécialement touchée. La cathédrale de Rouen, l'Abbaye de Saint-Ouen, les Monastères de Saint-Wandrille, de Jumièges, de Sainte-Honorine de Graville, l'église Saint-Jacques de Dieppe, les églises Saint-Etienne et de la Trinité de Caen (dite Abbaye-Aux-Dames) avec la violation des sépultures de Guillaume le Conquérant et de la reine Mathilde; la Cathédrale de Bayeux avec les tombeaux des évêques qui sont violés, leurs ossements jetés aux chiens. Et il faut ajouter la Cathédrale de Coutances, les sanctuaires de Valogne (voir ici et ), de Falaise, de Vire. Seul en Normandie le Mont Saint-Michel a été épargné. Il avait résisté aux assauts anglais à la fin de la Guerre de Cent Ans, il a résisté à la violence dévastatrice des huguenots pendant les Guerres de religion.

 

 

Abbaye de Jumièges, démolie par les Réformés le 8 mai 1562

Abbaye de Jumièges, démolie par les Réformés le 8 mai 1562

Avec un point particulier qu'il est intéressant de signaler. Dans le patrimoine architectural parce que c'était plus facile à détruire, ce sont les jubés qui ont particulièrement souffert - ces structures séparant le choeur liturgique de la nef de l'église -. Celui qui était extrêmement riche était celui de l'église Saint-Etienne du Mont à Paris. Il y en avait des dizaines comme cela en France. C'est ce qui était généralement détruit en premier par les casseurs de l'époque.  

L'iconoclasme protestant pendant les guerres de religion

Puis (dans les autres régions), les sanctuaires de Soissons, d'Auxerre, l'Abbaye de Cluny dévastée et pillée à trois reprises en 1562, 1567, 1575 (sa bibliothèque, dont on imagine la richesse, a été complètement dévastée et a été en grande partie perdue); le trésor de l'Abbaye de Paray-le-Monial disparaît; l'église de la Charité-sur-Loire est détruite; la Madeleine de Vézelay est transformée en écurie, l'église de Guérande, pour sa part, en porcherie, Saint Philibert de Tournus, magnifique sanctuaire roman parmi les plus anciens en France, est saccagé. Les sanctuaires d'Orléans subissent un sort comparable avec des fonts baptismaux transformés en chaises percées. Notre-Dame de Cléry, où se trouvait le tombeau de Louis XI, est également pillé et le tombeau profané (le 2 avril 1562, durant les guerres de Religion, le tombeau du roi et la statue de la Vierge sont détruits par les protestants à la suite de la prise de la ville d’Orléans par les armées du prince de Condé.) Même situation au Couvent des Annonciades de Bourges en 1562 (où les hugenots dévastent la chapelle, profanent le tombeau de Sainte Jeanne de France, fille de Louis XI, fondatrice à Bourges en 1501 de l'Ordre des moniales contemplatives de l'Annonciation de la Vierge Marie, dites sœurs de l'Annonciade, font brûler ses restes, dispersant ses cendres.NDLR.) Et la châsse de Saint-Benoît, qui se trouvait à l'Abbaye de Saint-Benoît sur Loire est fondue pour que Cologny, le chef protestant, puisse payer ses troupes. 

Chartreuse du Liget, monastère de moines-ermites chartreux fondé en 1178 par Henri II Plantagenêt en Touraine - Portail du monastère ruiné par les Guerres de religion

Chartreuse du Liget, monastère de moines-ermites chartreux fondé en 1178 par Henri II Plantagenêt en Touraine - Portail du monastère ruiné par les Guerres de religion

La liste continue. Blois, la cathédrale de Bourges. Dans la région de Touraine, Saint-Martin de Tours (Apôtre des Gaules...), Marmoutiers, l'un des hauts lieux spirituels de la région, la Chartreuse du Liget; plus à l'Ouest, la Cathédrale d'Angers, mise à sac; l'Abbaye de Fontevraud en Anjou (l'une des plus grandes cités monastiques d'Europe) où se trouvaient les tombeaux d'Henri II et d'Aliénor d'Aquitaine et celui de leur fils, Richard Coeur de Lion. Les destructions et pillages sont intervenus, mais on a pu récupérer quand même leurs gisants.

 

Gisant-d-Henri-II-Plantagenet-et-d-Alienor-d-Aquitaine.-A.JPG

Gisant des parents de Richard Coeur de Lion (Henri II et Aliénor d'Aquitaine). Abbaye de Fontevraud (Anjou)

Gisant-de-Richard-Coeur-de-Lion--vers-1199--abbaye-de-Fonte.jpg

Gisant de Richard Cœur de Lion (vers 1199, abbaye de Fontevraud)

Il y a des dégâts considérables en Poitou, en Saintonge, où les Guerres de religion ont été extrêmement présentes.

En Isère, la Grande Chartreuse est pillée; c'est la région où sévit le fameux Baron des Adrets, célèbre pour sa cruauté.

L'Abbaye de la Chaise-Dieu en Haute-Loire est pillée également. Le tombeau du Pape Clément VI, Pape d'Avignon, qui était l'un des chefs d'oeuvres de la sculpture funéraire du XIVe siècle est détruit. On a des destructions comparables à Aurillac, à Mende, à Villefranche-de-Rouergue, à Conques, à Rocamadour, à Périgueux, à Souillac, à Albi. A la cathédrale Sainte-Cécile d'Albi, les dégâts sont tels que l'un des chefs protestants, Montgommery, va être surnommé l'"Attila huguenot". Ce qui est en soi tout un programme.

Toulouse va échapper à la destruction. Monluc, le fameux chef de guerre catholique va réussir à sauver Toulouse que les protestants voulaient tout simplement raser. On trouve des projets tout à fait comparables à ceux que l'on verra mis en oeuvre en 1793 ou 94 quand les révolutionnaires et les Montagnards de Paris imaginaient de détruire Lyon, changer son nom pour en faire une ville affranchie.

 

Les dégâts sont tout aussi importants dans le Midi languedocien et provençal, à Montpellier, à Embrun, à Avignon, à Arles.

Dans le Dauphiné, la quasi totalité du patrimoine artistique médiéval a complètement disparu.

 

A l'issue de cette période particulièrement sombre, certains prélats vont faire les comptes. L'évêque d'Agen, Nicolas de Villars, qui va occuper le siège épiscopal de 1592 à 1608, juste à la fin des Guerres de religion, constate que sur 427 églises de son diocèse, seules 24 sont restées intactes.

L'évêque de Toulouse de son côté constate que sur 337 églises de son diocèse, 139 ont été incendiées et ont disparu.

En tout, approximativement, 20.000 sanctuaires dans l'ensemble du Royaume ont été endommagés ou détruits. Ce qui est un chiffre évidemment absolument énorme.

Alors, Calvin, au début, condamne les excès de l'iconoclasme mais "jamais Dieu n'a commandé d'abattre les idoles sinon chacun en sa maison, et en public, à ceux qui arment d'autorité". C'est-à-dire que les autorités constituées, si elles le décident, elles peuvent le faire. Il ne faut pas que cela soit un phénomène spontané et anarchique.

Théodore de Bèze, son successeur à Genève, tient des propos comparables. Il est pour un iconoclasme organisé et qui s'opère dans l'ordre. Il donne d'ailleurs des conseils à Jeanne d'Albret, la mère d'Henri IV à ce sujet.

 

Du côté catholique, le phénomène n'est pas comparable. On verra tout de même une destruction du temple de La Rochelle en 1628, après la prise de La Rochelle assiégée par Richelieu. Et en 1685, au moment de la révocation de l'édit de Nantes, le temple de Charenton subira le même sort. Mais on comprend bien à l'évocation de toutes ces destructions et en imaginant ce qu'a été la mémoire de ce conflit sanglant qui a duré plusieurs décennies, dans une France où les Protestants étaient tout à fait minoritaires, il faut le rappeler, et y compris au XVIe siècle, on comprend bien quel soutien l'opinion populaire a apporté en 1685 à la révocation de l'édit de Nantes, décidé par l'édit de Fontainebleau de Louis XIV. Les gens n'avaient pas oublié.

Suite de l'émission de Tv-Libertés :


19:44 - L’ambitieux chimiste Claude Louis Berthollet, inventeur de l'eau de javel, proche de Lavoisier mais aussi de Napoléon.
31:29 - Comment l'éducation nationale influence idéologiquement les élèves via les programmes d'histoire, avec en invité Vincent Badré, auteur de "L'Histoire fabriquée ?– ce qu'on ne vous dit pas à l'école".

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29 juin 2015 1 29 /06 /juin /2015 12:03
Nikolay Starikov explique la différence entre les civilisations russe et anglo-saxonne

Nikolay Starikov explique la différence entre les civilisations russe et anglo-saxonne :

 

"Les Russes considèrent tous les peuples comme égaux, pas comme des gens de seconde classe. Les Anglo-saxons se considèrent différents. Les Indiens n'étaient pour eux que des insectes qui les empêchaient d'occuper les territoires. C'est pourquoi ils les dressaient les uns contre les autres; des Indiens avec les Français, d'autres avec les Anglais, etc. Ensuite, les Français ont vendu leur colonie aux Anglais, qui ont simplement exterminé les Indiens."

 

Pour prolonger ce que dit Nikolay Starikov à propos des Indiens exterminés par les Anglais et de la différence entre Français et Anglais dans la manière de traiter les autres peuples, lire "Francophonie et frères d’Alliance" et "Des causes principales du mal qui ronge la France et le monde depuis 1789".

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15 juin 2015 1 15 /06 /juin /2015 09:37

Jean-Pierre Aussant sur les Croisades et l'Inquisition. Un peu vif mais plein de vérités :

Les Croisades:

Les Croisades ont été déclenchées par l'invasion de Jérusalem par les troupes musulmanes. Les musulmans ont envahi Jérusalem et, en réaction, effectivement, les rois chrétiens européens ont engagé les Croisés et les Croisades. C'est une réaction. Action-réaction.

Jean-Pierre Aussant

L'Inquisition:

Les personnes qui ont été tuées par l'Inquisition c'est cinq mille personnes pour tout le Moyen Âge et plusieurs siècles. Cinq mille personnes: c'est le nombre de tués en deux jours pendant la Terreur révolutionnaire des républicains français en 1793.

Jean-Pierre Aussant

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11 juin 2015 4 11 /06 /juin /2015 21:40
Jean-Pierre Le Mat : "Je ne pense pas que les tenants d’une dictature républicaine apprécieront mon livre"

Les éditions Yoran Embanner publient un livre particulièrement polémique écrit par Jean-Pierre Le Mat. Il est un des portes-paroles des Bonnets rouges, mais également chef d’entreprise et écrivain. Intitulé « ils ont fait la France, contre enquête de Clovis à Charles De Gaulle », l’ouvrage entreprend de faire tomber le mythe de la République française pacifique et tolérante, fervente partisane de l’amitié et du rapprochement entre les peuples.

 

Durant tout le livre, Jean-Pierre Le Mat déconstruit certains mythes Français, de Voltaire à Michelet en passant par Jules Ferry, Charles De Gaulle ou encore Louis Aragon.

 

... [C]e travail précis et documenté de recherche historique fait tomber définitivement le mythe républicain français.

 

Entretien avec Jean-Pierre Le Mat.

 

Breizh-info.com : pourquoi avoir décider d’écrire l »ouvrage « ils ont fait la France » ?

 

Jean-Pierre Le Mat : J’avais déjà publié ces études historiques, et bien d’autres, sur mon site contreculture.org. Plusieurs éditeurs m’ont proposé d’en faire un livre. Aujourd’hui c’est fait, avec Yoran Embanner.

 

Breizh-info.com : vous vous attachez à démonter certains mythes fondateurs de la France mais aussi et surtout de la République française. Est-ce une forme de vengeance que vous entendez mener ?

 

Jean-Pierre Le Mat : Pas du tout. Pour me venger de quoi ? Non, la démythification est une activité saine, sportive, accessible à tous. Elle devient jubilatoire quand il s’agit des mythes fondateurs français.

 

Breizh-info.com : Comment avez vous sélectionné vos personnages ?

 

Jean-Pierre Le Mat : J’ai choisi les personnages les plus symboliques. Ils sont vénérés par ceux qui sont fiers d’être Français. Et les mêmes peuvent en avoir le plus honte. Mélanger l’excès de fierté et de honte produit une matière explosive.

 

Breizh-info.com : Néanmoins, ne tombez vous pas vous même dans le politiquement correct et dans l’anachronisme, en traquant ici et là les propos racistes dans l’histoire, les prises de position antisémite, ce qui constitue une bonne partie de votre ouvrage ? Est-ce que, à l’heure ou le mot République est utilisé partout, à l’heure où la lutte contre le racisme est devenue une priorité d’Etat, vous ne donnez finalement pas du grain à moudre aux tenants d’une dictature de la République antiraciste, mémoricide, et quasi dictatoriale ?

 

Jean-Pierre Le Mat : Laissons l’appellation de « politiquement incorrect » aux intellectuels mondains qui passent à la télévision. Je n’en fait pas partie.

 

En France, pour refuser toute légitimité aux revendications bretonnes, on trouve tout à fait normal d’évoquer les Chouans et Breiz Atao, bref de faire de l’anachronisme. Je trouverais malvenu que l’on m’accuse de brandir un miroir. Mon livre rapporte des paroles authentiques et des faits avérés ; il ne porte pas de jugement.

Je ne pense pas que les tenants d’une dictature républicaine apprécieront mon livre. Je m’attends à des réactions. Les citations racistes ou antisémites des grands hommes français sont révélatrices. Mais les censurer est (et sera) encore plus révélateur.

 

Breizh-info.com : N’y a t-il pas, derrière l’ouvrage, une énième thèse victimaire, qui supposerait que les Bretons soient les éternels vaincus de l’histoire de France , les éternels colonisés, quitte à les comparer à des peuples qui n’ont à voir ni de près ni de loin avec eux (des Indiens d’Amérique aux Algériens ) ?

 

Jean-Pierre Le Mat : C’est exactement le contraire. J’ai été très impressionné par l’efficacité de la méthode mise au point par une intellectuelle bien connue pour attaquer l’identité bretonne : un mélange d’humour, de citations authentiques bien choisies, et d’explications logiques.

 

Retourner le jeu de massacre identitaire contre l’identité française, c’est passer du statut de victime à celui d’attaquant. Parce que la France dispose d’un Etat, d’une police et d’une Education nationale, on a cru que le jeu ne pouvait fonctionner que dans un seul sens. C’est faux et j’espère que d’autres joueurs viendront se joindre à moi. Mon livre aurait pu s’intituler : « La France, le point de vue breton ». Pourquoi pas, à suivre « La France, le point de vue algérien, russe, alsacien, corse, sénégalais » ?

 

Breizh-info.com : Les régionales arrivent en Bretagne. La liste d’Union Troadec – UDB qui pourrait se profiler n’est-elle pas une nouvelle répétition d’une histoire qui a conduit le mouvement Breton à l’échec permanent ? Quel est le point commun entre un Bonnet rouge canal historique et un militant de l’UDB, de gauche humaniste avant d’être Breton ?

 

Jean-Pierre Le Mat : Les hommes et les femmes sont toujours plus intéressants que leurs étiquettes. Ils valent mieux que les institutions ou les partis auxquels ils se rattachent. Je suis incapable de haïr quelqu’un. De plus, nous vivons dans une révolution permanente, à la fois technologique, économique et politique. Dans un tel environnement, une guerre de tranchées n’a aucun sens. L’objectif est de saisir des opportunités pour la Bretagne, pas de défendre un mythe.

 

Breizh-info.com : comment avez vous vécu les déclarations de l’ancien Ministre Luc Ferry qui reconnait enfin le génocide brito-vendéen ?

Jean-Pierre Le Mat : Je n’y porte aucune attention.

 

Breizh-info.com : que deviennent les Bonnets rouges ?

 

Jean-Pierre Le Mat : Ils sont comme les tremblements de terre. Ils grondent sous la surface. On sait qu’ils vont revenir. Mais nul ne peut dire quand cela adviendra, ni comment.

 

Source

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28 mai 2015 4 28 /05 /mai /2015 12:29
L'histoire vraie de l'Ukraine par un prince russe et catholique

L'histoire vraie de l'Ukraine par un prince russe et catholique

 

Sputniknews

19:18 27.05.2015(mis à jour 20:05 27.05.2015)

 

Dimitri de Kochko

 

On entend souvent qu'il est bien difficile de s'y retrouver dans la crise ukrainienne actuelle. C'est à la fois une des causes et une conséquence des mensonges et dissimu lations massifs véhiculés par la presse dominante.

 

Dans le cas de l'Ukraine, un ouvrage d'histoire paru récemment en français, permet d'aller aux racines du mal.

 

Le livre est paru en 1920, donc en aucun cas pour surfer sur la vague du «Maidan» actuel. Intitulé: «Ukraine, la vérité historique», il est d'une surprenante actualité. Par son existence même, la date de sa publication et la polèmique historique qu'il entame au moment même où se créent les mythes et thématiques qui aujourd'hui sont invoqués, sur fond de guerre civile, dont ils sont une des causes.

 

L'auteur Alexandre Volkonski, est un prince de la lignée des Rurik, premiers souverains russes à Kiev. Mais il est devenu à la fin de sa vie prêtre greco-catholique («uniate» — catholique de rite oriental), qui le rend pour le moins compréhensif et sensible aux Ukrainiens de l'ouest, devenus catholiques sous la domination polonaise. Ils sont aujourd'hui les plus influencés par un nationalisme exacerbé, hostiles à leurs concitoyens russes ou même russophones. Ce n'est pas le cas de Volkonski.

 

UN SEUL PEUPLE

 

Il montre en effet par son rappel historique détaillé et documenté que les peuples russes et ukrainiens ne sont en fait qu'un seul et même peuple. Que leurs territoires ont été morcelés et divisés par l'histoire et que les conquérants successifs ont cherché à les diviser. Souvent en tentant de réécrire l'histoire, parfois contre toute évidence.

 

Comme chacun sait aujourd'hui, la Rus' urbaine, c'est à dire la Russie, est née à Kiev et Novgorod, environ au IX ème siècle. Le grand Prince, premier entre ses pairs (et frères) qui règnaient sur les autres cités russes était à Kiev. Cela provoquait des guerres interminables au moment des successions.

 

C'est là que le Grand Prince Vladimir a «baptisé» la Russie en 988 au rite chrétien byzantin. Celà reste une référence commune fondatrice pour tous les Russes, y compris ceux d'Ukraine. La langue d'alors, le vieux russe, était commune à tous. L'ukrainien, issus d'au moins trois dialectes essentiellement galiciens, et qui fut un élément identitaire lors de la domination autrichienne ou polonaise, n'a été fixé qu'au XIXème siècle.

 

Mais Kiev fut détruite en 1240 par les Tatares. Et la steppe vers l'est resta quasi déserte durant près de 300 ans. Elle se repeupla peu à peu de cosaques, composés essentiellement de fugitifs (servage, persécutions religieuses, évasions…) de diverses nationalités. Quant à l'autre partie, celle de l'ouest, elle fut conquise par les Lituaniens unis ensuite aux Polonais dans le royaume «unissant les deux mers» (de la mer Baltique à la mer Noire). Ce royaume historique hante encore aujourd'hui l'esprit nostalgique de nombreux nationalistes polonais. ET il est l'un des objectifs de géopoliticiens américains.

 

Jamais avant 1918, écrit Volkonski, l'Ukraine n'a été un état indépendant, contrairement à ce que prétend la propagande ukrainophile. Cette dernière se réfère à un «état cosaque» aux XVI ème et XVII ème siècle. Or, écrit Volkonski, «durant ces siècles, l'Ukraine n'était qu'une partie de l'état polonais…. C'est lui qui fixe le nombre des cosaques: 60,000 hommes en 1575, 6.000 en 1627, 1.200 en 1638. Il introduit le servage et y soumet une partie des cosaques, la liberté de conscience octroyée à la population petite-russe (nom d'une partie de l'Ukraine) est telle que le métropolite orthodoxe de Kiev prie (en 1625) le tsar de Moscou de prendre l'Ukraine sous sa souveraineté….. Les Ukrainiens de l'époque ne se considéraient pas comme libres et, durant tout un siècle, ils ont avec ténacité sacrifié leurs vies dans le vain espoir de secouer le joug étranger». En 1654, sous le commandement du hetman Bogdan Hmelnitski, l'Ukraine et la Russie unissent à nouveau leurs destins. C'est la célébration du tricentenaire de ce Traité de Pereïslav qui servit de pretexte à Nikita Khrouchtchev pour offrir la Crimée (sans Sébastopol) à l'Ukraine soviétique en 1954.

 

UNE CREATION AUTRICHIENNE APPLIQUEE PAR LES BOLCHEVIKS

 

L'ouvrage de Volkonski est œuvre d'historien. Très précis et détaillé, il vise à répondre aux thèses et aux contre-vérités historiques véhiculées par une des pères fondateurs du nationalisme ukrainien, Mikhail Hrouszewski, historien et homme politique qui fut le premier président de la Rada (parlement) fondée à Kiev après la révolution bolchévique, avant de devenir sous le pouvoir stalinien, membre de l'Académie des sciences de l'URSS pour favoriser «l'ukrainisation» de l'Ukraine… Car cette dernière n'allait pas du tout de soi. Et Volkonski démonte les nombreux subterfuges de Hrouszewski pour tenter de créer une Ukraine historique qui n'existe guère. Hrouszewski décrit par exemple une dynastie de princes ukrainiens d'avant les Tatares, en oubliant tout simplement ceux qui ont régné par rotation dans les autres villes russes. Il recourt à la création autrichienne des Ruthènes, en fait des Russes pour la plupart, pour tenter de justifier l'existence d'un peuple différent des autres Russes…

 

Pour résumer, on peut dire que ce sont les bolcheviks communistes qui ont appliqué sur le terrain une création austro-allemande, reprise par les polonais en s'appuyant sur quelques intellectuels galiciens (Région de Lvov dominée par l'Autriche jusqu'en 1918, puis polonaise avant de devenir soviétique en 1939 puis en 1945). Pour les Autrichiens et les Prussiens ensuite (Volkonski cite des cartes trouvées au début de la première guerre mondiale sur des officiers allemands montrant une petite Pologne et une grande Ukraine), il s'agissait bien sûr d'affaiblir la Russie en la divisant. Comme c'est ce que visent aujourd'hui les USA, ils ont repris l'idée avec tous leurs moyens. Pour l'Allemagne, les choses ont changé mais le poids de ses choix historiques en diplomatie explique en partie ses positions ambigües sur la question ukrainienne et vis-àvis de la Russie.

 

Il est pour le moins paradoxal que les nationalistes ukrainiens au pouvoir aujourd'hui à Kiev, qui ont il est vrai ajouté à leur Panthéon, où figure Hrouszewski, des collaborateurs des Allemands durant la deuxième guerre mondiale, accusent les communistes de tous les maux de l'Ukraine, alors que ces derniers sont eux qui ont créé l'Ukraine et tenté de la rendre viable.

Aujourd'hui encore, la diversité du pays et le refus d'en tenir compte, font que la partie n'est toujours pas gagnée. Et même si aujourd'hui, après tant de décennies, une nationalité ukrainienne s'est formée, est-il vraiment dans l'intérêt des autres européens d'encourager les discours de haine pour continuer à jouer la division entre peuples russes historiques? Elle fut imaginée à Vienne, Berlin et Varsovie en des temps qui ont mené à la catastrophe européenne de la première guerre mondiale. Veut-on à ce point que l'histoire se répète?

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20 mai 2015 3 20 /05 /mai /2015 09:38

Etonnante déclaration venant de la part de celui qui a moins heureusement déclaré en 2013 que "la démocratie, c'est la déconstruction des repères traditionnels" (et donc la loi morale)... pour se féliciter (dans le débat sur la soit-disant loi sur le "mariage" gay) que beaucoup de gens soient laissés en manque de repères les plus élémentaires, dont la filiation qui ne représentait plus rien pour le Législateur.

Le 18 mai 2015 sur iTELE, Luc Ferry a dénoncé "la guerre de Vendée" comme "le premier grand génocide dans l'Histoire de l'Europe". 

Précisons tout de suite que ce génocide a précisément permis aux génocideurs de mettre en place sa "démocratie-déconstruction des repères traditionnels". Comme quoi on en revient toujours à la nécessité de la loi naturelle et du droit divin transcendant pour ne pas tomber dans la tyrannie.

 

"Quand nous avons fait nous, notre Révolution française, vous savez la guerre de Vendée, cela n'a pas été beau, c'est le premier grand génocide dans l'histoire de l'Europe. Il y a eu 500.000 morts", a déclaré Luc Ferry.

Luc Ferry dénonce "la guerre de Vendée" comme "le premier grand génocide dans l'Histoire de l'Europe"

Interrompu par le journaliste sur le terme employé de "génocide", le philosophe a répondu:

 

"Génocide, bien sûr. Bien évidemment, Pierre Chaunu avait bien évidemment raison. D'ailleurs plus aucun historien ne le conteste aujourd'hui. On prenait les gamins par les bras et les jambes et on leur cassait la tête sur les murs des chateaux. On jetait les gens sur des hallebardes. Enfin, tout cela a été absolument abominable, sans compter le vandalisme dont on parlait tout à l'heure."

Les bourreaux républicains faisaient mourir les Vendéens de la façon la plus horrible possible que les pires islamistes de l’État islamique n’ont même pas imitée. Outre les têtes fracassées contre des murs, les républicains enfermaient les gens dans des églises et les faisaient brûler vifs comme le 28 février 1794 aux Lucs ; ils faisaient brûler vifs femmes et enfants dans les "fours de la république"... L'un des chefs républicains, Amey, s'esclaffait : "C'est ainsi que la 'République' doit faire cuire son pain!"

 

 

Source: http://www.minute-hebdo.fr/tout-minute/actualites/730-brules-vifs-dans-les-fours-de-la-republique

Source: http://www.minute-hebdo.fr/tout-minute/actualites/730-brules-vifs-dans-les-fours-de-la-republique

Luc Ferry dénonce "la guerre de Vendée" comme "le premier grand génocide dans l'Histoire de l'Europe"

Les républicains éventraient des femmes enceintes et jouaient au ballon avec les corps des enfants à naître. Ils jetaient dans les puits des enfants vivants, achevaient au sabre les rares survivants de la sinistre virée de Galerne, liaient entre eux prêtres et religieuses avant de les jeter dans la Loire alourdis de pierre... Source: Le génocide arménien, bravo M. le Président ! Mais le vendéen ? Par Floris de Bonneville.

Près de 80% des personnes guillotinées sous la Révolution étaient des petites gens. Les ouvriers ont été envoyés par charrettes entières à la guillotine.

Video (âmes sensibles s'abstenir), bon voyage dans le temps :

 

Génocide arménien : Hollande demande à la Turquie d'utiliser le mot "génocide", mais oublie le génocide vendéen

Refaisons l'addition des pertes dues à la Révolution et à l'Empire:

 

400 000 morts pour les guerres jusqu'en 1800; un million pour les guerres napoléoniennes, 600 000 pour les guerres intestines et l'échafaud pour mémoire. Voilà nos deux millions de morts

(René Sédillot, Le coût de la Révolution française, Vérités et Légendes, Perrin Mesnil-sur-l'Estrée 1987, p. 24-28).

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20 mai 2015 3 20 /05 /mai /2015 06:34

En 1923, Joseph Barthélemy, député du Gers, remit à l'ordre du jour la question du vote des femmes devant le "Parlement". Il égréna les "objections fantaisistes" des bonnes consciences républicaines qui freinaient des quatre fers pour ne pas voter cette avancée égalitaire et les contredit :

 

Pour rappel, au Moyen Âge et sous l'Ancien Régime, les femmes votaient... L'exclusion des femmes ne date pas des "siècles obscurs" mais vient plus tard, de la modernité.

D'après « L'Intransigeant », paru en 1923

 

De 1919 à 1940, des propositions de loi en faveur du vote des femmes sont adoptées, mais refusées par le Sénat. Le 22 novembre 1922, ce dernier avait, sur cette question du vote des femmes, refusé par 156 voix contre 134, de passer à la discussion des articles, les intentions de la Haute Assemblée étant nettes : l'enterrement.

 

Quelques mois plus tard, Joseph Barthélemy, député du Gers qui en est rapporteur, remet à l'ordre du jour la question devant le Parlement. Ne pouvant soumettre de nouveau, en vertu de l'article 110 de la Chambre, des propositions identiques rejetées quelques mois plus tôt par le Sénat, il suggéra de fixer à trente ans l'âge de l'accession des femmes aux droits politiques.

 

Vote-Femmes.jpgIl rétorqua en outre aux détracteurs du projet : « Voyons maintenant les objections qui ont été formulées. On a dit que les femmes ne désiraient pas le vote et qu'elles en négligeraient l'exercice Mais, en 1848, les hommes non plus ne désiraient par le vote, on le leur a donné par justice.

 

« On dit encore que la femme serait inférieure. La femme n'est pas inférieure, elle est seulement différente et complémentaire. La vérité, qu'il faut bien reconnaître, c'est que le génie, dans ses manifestations les plus sublimes, est le privilège du sexe masculin. Mais le génie n'est pas nécessaire pour voter, ni même pour être élu ! Tout cela ne tient pas. Toutes ces objections sont fantaisistes. Il en est de même quand on dit que la femme admise aux droits politiques émettrait des votes extrémistes ou réactionnaires. C'est là une pure affirmation contredite par l'expérience.

 

« On objecte aussi : La femme ne fait pas de service militaire. Sans doute, elle n'est pas soldat, mais elle fait des soldats, et pour celles qui n'ont pas d'enfant, combien parmi les électeurs et même les élus n'ont pas fait de service militaire !

Enfin, le grand argument, c'est : la femme est faite pour le foyer ! C'est bien notre avis, mais ce n'est pas la participation aux comices qui éloignera la femme de son foyer, elle n'en sera pas plus éloignée que par sa participation à un marché ou à une foire, et puis enfin les conditions actuelles ont jeté dans la lutte pour la vie des milliers de femmes, il est juste qu'elles puissent défendre leurs intérêts tant par leurs bulletins de vote qu'au sein des assemblées politiques. »

 

Le député Barthélemy songea un instant, puis reprit : « Ce qu'il faut surtout que l'on sache, c'est le fait que la France tend à devenir une exception en restant masculine. » Et de rappeler qu' « en Europe, les pays masculins sont une exception qui se rétrécit chaque année davantage. Les femmes votent en Suède, en Norvège, au Danemark, en Finlande, en Estonie, en Lituanie, en Lettonie, en Tchécoslovaquie, en Pologne, en Autriche, en Allemagne, en Hongrie, en Belgique ; elles participent aux élections locales et un certain nombre d'entre elles aux élections législatives. »

 

En France, le droit de vote sera accordé aux femmes le 21 avril 1944 par le Comité français de la Libération nationale, et mis en oeuvre pour la première fois le 29 avril 1945 lors d'élections municipales, puis en octobre 1945 lors des élections à l’Assemblée constituante.

 

Source: http://www.france-pittoresque.org/article-droit-de-vote-des-femmes-le-senat-freine-des-quatre-fers-90908614.html

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19 mai 2015 2 19 /05 /mai /2015 10:08
La Convention a repoussé la mort du Roi Louis XVI par 13 voix de majorité, c'est un pouvoir occulte qui l'a condamné à mort par falsification du scrutin (Maurice Talmeyr)

Le site Royalistes.net a enregistré en livre audio l'ouvrage de Maurice Talmeyr, La franc-maçonnerie et la Révolution française (1904), disponible gratuitement.

 

La mise à mort de Louis XVI a été décidée, dix ans d’avance, dans la tenue illuministe de Wilhelmsbad.

La trahison, elle était partout à la Cour de Louis XVI. Dans cet ordre d’idées, M. Maurice Talmeyr établit sur des documents irrécusables que le Roi n’a jamais donné, au 10 août 1792 cet ordre de cesser le feu, qui perdit la monarchie et qui fut donné cependant au nom du Roi.

Il prouve de même que ni l’assemblée législative n’a voté l’emprisonnement de Louis XVI au Temple, ni la Convention n’a voté la mort du Roi. L’assemblée législative a voté que le Roi logerait au palais du Temple, mais non pas dans la Tour du Temple, qui était une prison.

Et quant à la Convention, elle a réellement repoussé la mort du Roi par 13 voix de majorité. C’est un pouvoir occulte qui a emprisonné le Roi et qui l’a condamné à mort par falsification de scrutin. Et ce pouvoir occulte, c’est la franc-maçonnerie. Ce n’est pas là, évidemment, ce que nous ont appris les historiens de la Révolution..., et M. Maurice Talmeyr semble conclure à bon droit :

Si la Révolution, que personne ne confond avec l’évolution, n’est pas le grand mouvement humain auquel beaucoup d’honnêtes gens ont cru et croient encore, si elle n’est pas ce grand fait social provenant naturellement d’intérêts et de besoins profonds, et si, au contraire, elle n’a jamais été qu’un bluff immense, dirigé et lancé contre le Christianisme universel, tous nos malaises moraux, toutes nos perturbations, se comprennent et s’expliquent. Sinon, ils ne se comprennent pas, et ne peuvent sérieusement se déduire de rien.

 

Source

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25 avril 2015 6 25 /04 /avril /2015 09:06
Génocide arménien : Hollande demande à la Turquie d'utiliser le mot "génocide", mais oublie le génocide vendéen

Joli rappel de Floris de Bonneville sur Boulevard Voltaire : Hollande demande à la Turquie d'utiliser le mot "génocide", mais oublie le génocide vendéen, génocide censuré.

Génocide arménien : Hollande demande à la Turquie d'utiliser le mot "génocide", mais oublie le génocide vendéen

[...] À Erevan (Arménie, NDLR.) vendredi (24 avril NDLR.), François Hollande, présent comme de nombreux autres chefs d’État pour se souvenir d’un génocide perpétré il y a cent ans par la Turquie contre les populations arméniennes chrétiennes, a été parfait. Il a été jusqu’à oser demander à la Turquie islamiste d’Erdoğan d’utiliser le mot exact de « génocide ». 

C’est rendre hommage à ces 1.200.000 Arméniens qui ont péri sur les ordres des « Jeunes-Turcs », le parti alors au pouvoir dans cet Empire ottoman très islamisé. Déportation et massacres se sont succédé dans le but de rayer de la population turque ces descendants d’émigrés venus en voisins vivre et travailler en Anatolie et Arménie occidentale.



Merci, M. le Président, à qui j’adresse de très rares félicitations.

Mais, car mais il y a. C’est très bien d’aller à l’autre bout de l’Europe pour se souvenir de ces massacres organisés par un état souverain.


Mais, à votre porte, il y a un génocide aussi réel que celui des Arméniens, que la République française n’a jamais voulu reconnaître en tant que tel : celui des Vendéens, massacrés sur ordre du pouvoir révolutionnaire, sur ordre de la République, par des généraux sanguinaires avides de sang dont l’un d’entre eux (Westermann pour le nommer) se faisait tailler des culottes dans la peau de ses victimes, sans oublier les colonnes infernales du général Turreau.



Des victimes françaises. Des paysans pour la plupart, une poignée d’aristocrates, des femmes, des enfants tués de la façon la plus horrible possible que les pires bourreaux de l’État islamique n’ont même pas (encore) imitée : éventrer des femmes enceintes et jouer au ballon avec les corps des enfants à naître, jeter dans les puits des enfants vivants, achever au sabre les rares survivants de la sinistre virée de Galerne, lier entre eux prêtres et religieuses avant de les jeter dans la Loire alourdis de pierre. Et, comble de l’horreur, enfermer 564 villageois de 2 à 85 ans dans l’église des Lucs-sur-Boulogne et y mettre le feu. Les nazis n’allaient pas faire mieux 150 ans plus tard à Oradour-sur-Glane.

Lucs-sur-Boulogne, 28 février 1794 : 564 villageois (dont 110 enfants de moins de 7 ans) enfermés dans une église et brûlés vifs

Lucs-sur-Boulogne, 28 février 1794 : 564 villageois (dont 110 enfants de moins de 7 ans) enfermés dans une église et brûlés vifs

Alors, oui, M. le Président, il serait temps que la France s’honore en déclarant que la République française est née d’un génocide, de la volonté d’un pouvoir de se débarrasser d’une région entière, en assassinant sa population et en brûlant fermes et champs pour la transformer en terre infertile.

Les chiffres de ce génocide varient entre 200.000 et 500.000 morts.

Tout concorde pour que cette guerre de Vendée ait le droit à ce terme que vous avez réclamé au président Erdoğan.

 Peut-être devriez-vous aller visiter le parc du Puy du Fou dont Philippe de Villiers a voulu faire un hommage-souvenir à ces Vendéens massacrés pour Dieu et pour le Roy, pour vous donner quelque idée de ce que fut l’impitoyable massacre de tant d’innocents français.




 

Source: http://www.bvoltaire.fr/florisdebonneville/le-genocide-armenien-bravo-m-le-president-mais-le-vendeen,172916

Outre Westermann, un autre barbare révolutionnaire s'est fait taillé une culotte de peau humaine : Saint-Just, dit l'"Archange de la Terreur". Un autre encore, Jean-Baptiste Carrier, voulait "faire empoisonner les sources d'eau" à l'arsenic, devenant ainsi le concepteur de la guerre chimique en 1793 pour éliminer les Vendéens. "Nous ferons de la France un cimetière, plutôt que de ne pas la régénérer à notre manière" [1], disait-il.

Notes

 

[1] Jean-Baptiste Carrier cité in Mgr Delassus, La Conjuration antichrétienne, Le Temple maçonnique voulant s'élever sur les ruines de l'Eglise catholique, 1910, Réed. Expéditions pamphiliennes 1999, p. 288.

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22 avril 2015 3 22 /04 /avril /2015 22:33
22 avril 1889. 50 000 fermiers blancs s'approprient une réserve indienne de l'Oklahoma

22 avril 1889. 50 000 fermiers blancs s'approprient une réserve indienne de l'Oklahoma.

 

Le Point - Publié le 22/04/2012 à 00:01 - Modifié le 22/04/2015 à 00:01

Washington autorise chaque colon à s'emparer de 64 hectares. Au signal, c'est une furieuse ruée. The Land Run !

 

Le 22 avril 1889 est le jour de l'une des plus grandes spoliations de terre jamais organisées légalement. Ce jour-là, 50 000 fermiers, employés, maquereaux, bandits, cordonniers, crève-la-faim, cow-boys, spéculateurs... s'abattent comme un vol de sauterelles sur un territoire indien ancestral avec la bénédiction du gouvernement des États-Unis. Plusieurs westerns hollywoodiens évoquent cette première distribution gratuite de terres concernant deux millions d'acres (800 000 hectares) généreusement offertes par l'État américain.

 

Quand ils s'élancent à bride abattue, ces milliers d'hommes et de femmes poussés par la pauvreté et l'espérance d'une vie meilleure n'auront pas une pensée pour les Indiens qu'ils s'apprêtent à dépouiller de leur territoire. Ils n'ont qu'un seul objectif en tête : mettre la main sur un lopin de terre pour nourrir leur famille. Le principe du Land Run est simple : les premiers arrivés seront les premiers servis. Chacun a le droit de s'emparer d'un carré de terre de 160 acres (64 hectares).

Les amis n'existent plus

 

Quand, sept semaines plus tôt, le président américain signe le décret autorisant l'opération, des milliers d'hommes en chariot, en train, à cheval et même à pied convergent vers le territoire de l'Oklahoma. Ils viennent du Nord, du Sud, de l'Est et de l'Ouest pour s'entasser en bordure de la terre promise dans l'attente du signal. À Fort Reno, les soldats font mettre sur une même ligne quelque 10 000 colons qui s'élancent droit devant eux quand le coup de canon retentit à midi.

 

Même dans les territoires occupés de Palestine, on n'a pas vu une telle ruée. C'est une mêlée indescriptible. Des centaines de fouets claquent simultanément pour stimuler les chevaux attelés aux buggys et aux chariots. Les cavaliers pressent leurs éperons contre le ventre de leur monture. Ceux qui n'ont que leurs pieds pour avancer se motivent mentalement. La journée sera dure.

 

Les centaines de chariots bâchés d'une toile blanche soulèvent un nuage de poussière rose qui enveloppe la masse grouillante. Fini, les sourires, chacun est tendu vers son eldorado. Les amis n'existent plus, il faut avancer, c'est une question de vie ou de mort. Parmi les conducteurs de chariots, quelques femmes se sont glissées, ce ne sont pas les moins déterminées. On aperçoit également quelques Noirs, mais très peu. Cette même ruée frénétique observée à Fort Reno se répète tout autour du territoire.

Cité fantôme

 

À Caldwell, c'est aussi dix mille pionniers qui s'élancent avec avidité. Oublié, l'atmosphère de franche camaraderie de la veille. Dans le camp improvisé, on avait organisé des parties de base-ball, d'autres se défiaient à la course à pied. Certains préféraient assister à un service religieux organisé par des pasteurs. Durant toute la nuit, on avait bu et chanté autour des feux de camp "Oh, Joe, here's your mule".

 

Aujourd'hui, on tuerait père et mère pour s'emparer d'un coin de terre afin d'y faire pousser des haricots ou paître un troupeau de vaches. Le 18 mai, le journaliste William Willard Howard publie un article relatant avec enthousiasme cette journée : "Avec son aspect pittoresque, la ruée sur la frontière à midi, le jour de l'ouverture, devrait rester dans l'histoire comme l'un des événements les plus marquants de la civilisation occidentale." Il ajoute avec une immense fierté : "La dernière barrière de la sauvagerie aux États-Unis a été pulvérisée." On voit que le coco n'a pas connu Wall Street.

 

Tous ne veulent pas se faire fermiers, beaucoup guignent un emplacement dans les futures villes. Ils veulent un terrain pour ouvrir un bar, fonder une banque, créer un magasin général. Ils rêvent de devenir shérif, barbier, pute ou encore journaliste. Ils plantent donc leurs jalons dans les sites réservés. Ainsi, la ville de Guthrie surgit du néant en un après-midi. Les rues sont tracées, les lots sont revendiqués et une municipalité est même désignée. Quand la nuit s'abat sur la cité fantôme, dix mille feux s'allument, représentant autant de foyers. Il en va ainsi à Norman, Oklahoma City et Kingfisher.

Tricheurs

 

Tous n'ont pas attendu le signal pour s'élancer dans la réserve. Un grand nombre de tricheurs se planquent sur place depuis plusieurs jours en tentant d'échapper aux ratissages des soldats. On les appelle les "sooners", un surnom qui restera aux habitants de l'Oklahoma. La confrontation entre les "boomers" (ceux qui sont partis au signal) et les "sooners" (ceux qui ont précédé le signal) déclenchera nombre de bagarres et de procès.

 

Les centaines de chariots bâchés d'une toile blanche soulèvent un nuage de poussière rose qui enveloppe la masse grouillante. Fini, les sourires, chacun est tendu vers son eldorado. Les amis n'existent plus, il faut avancer, c'est une question de vie ou de mort. Parmi les conducteurs de chariots, quelques femmes se sont glissées, ce ne sont pas les moins déterminées. On aperçoit également quelques Noirs, mais très peu. Cette même ruée frénétique observée à Fort Reno se répète tout autour du territoire.

Cité fantôme

 

À Caldwell, c'est aussi dix mille pionniers qui s'élancent avec avidité. Oublié, l'atmosphère de franche camaraderie de la veille. Dans le camp improvisé, on avait organisé des parties de base-ball, d'autres se défiaient à la course à pied. Certains préféraient assister à un service religieux organisé par des pasteurs. Durant toute la nuit, on avait bu et chanté autour des feux de camp "Oh, Joe, here's your mule".

 

Aujourd'hui, on tuerait père et mère pour s'emparer d'un coin de terre afin d'y faire pousser des haricots ou paître un troupeau de vaches. Le 18 mai, le journaliste William Willard Howard publie un article relatant avec enthousiasme cette journée : "Avec son aspect pittoresque, la ruée sur la frontière à midi, le jour de l'ouverture, devrait rester dans l'histoire comme l'un des événements les plus marquants de la civilisation occidentale." Il ajoute avec une immense fierté : "La dernière barrière de la sauvagerie aux États-Unis a été pulvérisée." On voit que le coco n'a pas connu Wall Street.

 

Tous ne veulent pas se faire fermiers, beaucoup guignent un emplacement dans les futures villes. Ils veulent un terrain pour ouvrir un bar, fonder une banque, créer un magasin général. Ils rêvent de devenir shérif, barbier, pute ou encore journaliste. Ils plantent donc leurs jalons dans les sites réservés. Ainsi, la ville de Guthrie surgit du néant en un après-midi. Les rues sont tracées, les lots sont revendiqués et une municipalité est même désignée. Quand la nuit s'abat sur la cité fantôme, dix mille feux s'allument, représentant autant de foyers. Il en va ainsi à Norman, Oklahoma City et Kingfisher.

Tricheurs

 

Tous n'ont pas attendu le signal pour s'élancer dans la réserve. Un grand nombre de tricheurs se planquent sur place depuis plusieurs jours en tentant d'échapper aux ratissages des soldats. On les appelle les "sooners", un surnom qui restera aux habitants de l'Oklahoma. La confrontation entre les "boomers" (ceux qui sont partis au signal) et les "sooners" (ceux qui ont précédé le signal) déclenchera nombre de bagarres et de procès.

 

Au cours des années suivantes, cinq autres ruées sont organisées par le gouvernement américain, poursuivant le dépeçage de cette réserve indienne où trente tribus (cherokee, creek, cheyenne, comanche, apache, chickasaw, choctaw, séminole...) chassées du reste du continent nord-américain avaient trouvé refuge depuis 1817. En 1905, les Blancs se sont emparés de la quasi-majorité des terres. Deux ans plus tard, le 16 novembre 1907, le territoire de l'Oklahoma entre dans l'union en tant que 46e État. Aujourd'hui, quand l'Amérique donne des leçons de démocratie au reste du monde, elle sait de quoi elle parle. Pour l'avoir vécu dans ses tripes....

 

Source: http://www.lepoint.fr/c-est-arrive-aujourd-hui/22-avril-1889-le-jour-ou-les-fermiers-americains-volent-l-oklahoma-aux-indiens-22-04-2012-1453856_494.php

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22 avril 2015 3 22 /04 /avril /2015 22:12

La destruction de notre histoire, la déséducation et l'abrutissement des jeunes continue :

INFOGRAPHIE - Le Conseil supérieur des programmes trace des lignes directrices mais a décidé de laisser aux enseignants d'histoire-géographie une part de liberté pour simplifier des programmes jugés trop encyclopédiques.

 

Ce serait la fin du «roman national fédérateur». Les critiques fusent sur les futurs programmes d'histoire, qui évinceraient notamment l'étude de la chrétienté médiévale. Une polémique inévitable tant il s'agit d'une discipline sensible, reflet de notre identité nationale. Chaque baguette de mikado retirée suscite un vif débat. Certains historiens jugent que les nouveaux programmes du collège laissent trop de liberté aux enseignants, leur permettant de faire l'impasse sur la période des Lumières ou sur l'Empire byzantin.

 

En effet, le Conseil supérieur des programmes trace des lignes directrices mais a décidé de laisser aux enseignants d'histoire-géographie une part de liberté pour simplifier des programmes jugés trop ...

 

Source: Réforme du collège : en histoire, la chrétienté médiévale rendue facultative, Le Figaro, Par Marie-Estelle Pech , Service infographie du Figaro Mis à jour le 22/04/2015 à 21:13 Publié le 22/04/2015 à 18:43

 

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21 avril 2015 2 21 /04 /avril /2015 09:50

Mis à jour le 03-03-2022

Xavier Moreau - les origines du nationalisme ukrainien

Dans cet entretien réalisé début avril 2015, Xavier Moreau fait état de ses recherches sur l'origine historique de l'Ukraine et du nationalisme ukrainien.

Extrait :

 

"Il faut savoir qu'entre le moment où la Rus' de Kiev a existé, c'est-à-dire (de 860 environ NDLR.) jusqu'en gros 1230-1240 (invasions "tartares" ou "invasions mongoles". Cf. Empire mongol) et 1922 (l'époque où Lénine fonde la "République socialiste d'Ukraine") il n'y a plus eu d'Etat avec Kiev comme capitale. Cela est quelque chose de fondamental. Parce que quand je discute souvent avec des Français et des Occidentaux, ils ont l'impression que l'Ukraine a toujours existé et qu'elle a été tantôt envahie par les Polonais, tantôt par les Russes, tantôt par les Allemands. Or, non, à partir des invasions mongoles (XIIIe siècle), Kiev n'est plus jamais la capitale d'un État.

 

[Ndlr. "La principauté de Kiev au IXe siècle a pour capitale Kiev vers 882 sous Oleg, fils de Riourik d'origine varègue (scandinave), dont le nom déformé aurait servi à baptiser le peuple sur lequel il régnait (rous : russe). Vassalisant de proche en proche de nouvelles tribus, Combattant les peuples voisins (Khazars, Bulgares de la Volga et des Balkans, Polonais), l'autorité de Oleg et de ses héritiers s'étend sur l'ensemble des Slaves orientaux. Ils imposent leur alliance à Byzance dont ils adoptent la foi vers 988, puis les institutions. La Principauté de Kiev est à son  apogée en 1054.

Au XIV et XVe siècles, les Jagellons Polonais catholiques, Grands-ducs héréditaires de Lituanie (1377/1392 et 1440/1572) étendent leur autorité sur un immense empire constitué aux dépens de l'Eglise orthodoxe et des chevaliers Teutoniques défaits à Grunwald (Tannenberg) en 1410.

Les Tatars effectuent des raids depuis le Khanat de Crimée, mais leur puissance s'avère fragile.]

 

[...] Il faut ajouter que la Crimée n'a jamais fait partie de la Rus'.

Mais qu'en revanche, lorsque le prince Vladimir (980-1015) choisit le christianisme oriental (988 ap. J.-C.), c'est en Crimée. Et donc c'est ce lien fondamental entre la Rus', la russité et l'orthodoxie. C'est pour cela que les historiens, - les idéologues ouest-ukrainiens, ou polonais, peuvent manipuler ce qu'ils veulent - : la Rus', la russité est orthodoxe, profondément orthodoxe

Carte tirée de Christian GRATALOUP, Introduction de Patrick BOUCHERON, Atlas Historique mondial, Les Arènes - L'Histoire, Paris 2019, p. 123.

Carte tirée de Christian GRATALOUP, Introduction de Patrick BOUCHERON, Atlas Historique mondial, Les Arènes - L'Histoire, Paris 2019, p. 123.

Principauté de la Rus de Kiev (1054-1132) [La carte de fond est une carte moderne de l'Europe montrant les frontières nationales actuelles, ainsi que les voies d'eau artificielles et les réservoirs modernes en Russie.] https://fr.wikipedia.org/wiki/Rus'_de_Kiev

Principauté de la Rus de Kiev (1054-1132) [La carte de fond est une carte moderne de l'Europe montrant les frontières nationales actuelles, ainsi que les voies d'eau artificielles et les réservoirs modernes en Russie.] https://fr.wikipedia.org/wiki/Rus'_de_Kiev

Rus de Kiev en 1237 avant les invasions mongoles et la prise de Kiev en 1240, qui précède l'invasion mongole de l'Europe jusqu'en Autriche. https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/b/bd/Kievan_Rus_in_1237_pt.svg

Rus de Kiev en 1237 avant les invasions mongoles et la prise de Kiev en 1240, qui précède l'invasion mongole de l'Europe jusqu'en Autriche. https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/b/bd/Kievan_Rus_in_1237_pt.svg

"À partir du moment où les Lithuaniens ou ouest-Ukrainiens abandonnent l'orthodoxie, même si c'est contraints - comme c'est le cas des Uniates qui ont été contraints -, malgré tout ils perdent cette part d'héritage qui est fondamentale dans l'héritage de la Rus', qui est l'orthodoxie. 

 

"...Pour revenir aux Uniates, une grande faute politique des Polonais, c'est qu'ils ont utilisé le catholicisme pour consolider leur mainmise sur cette région de la Galicie (région de l'Ouest de l'Ukraine NDLR.), et surtout ils ont créé un système qui ressemble exactement à celui que les Turcs faisaient, par exemple en Serbie. C'est-à-dire que si vous ne voulez pas être un sous-citoyen, si vous ne voulez pas que votre fils se fasse enlever pour servir comme janissaire ou payer des impôts particuliers, etc., vous devez vous convertir à l'islam. Les Polonais ont mis le même système en Ukraine de l'Ouest. [...] À ce moment-là, il n'y a pas d'Ukraine. Personne ne parle de l'Ukraine.

 

"En revanche, il y a un affrontement permanent et une volonté d'expansion permanente de la Pologne, des Polonais lithuaniens qui arrivent même jusqu'à la Mer Noire et qui essaient en permanence de pousser vers l'Est jusque vers cette date fondamentale de 1654 où les Cosaques Zaporogues (dans cette zone de l'Ukraine centrale), finalement, décident de s'allier avec les Russes, et pas avec les Polonais. Ce qui consolide la présence de l'état russe dans l''Ukraine' actuelle. Et c'est un échec pour la Pologne elle-même qui n'a pas su tiré à elle ces populations.

 

[Le tsar de Russie Ivan III, exploitant le déclin de la Horde d'Or (Tatars), reconquiert en 1503 le tiers des terres russes du Grand-duché.

Ivan IV poursuit la reconquête, annexe Kazan en 1552, Astrakhan en 1556, tandis que ses alliés Cosaques du Don attaquent Azov en 1559. Il prend Polock en 1564. Toutefois la Crimée vassale des Ottomans reste redoutable (raid contre Moscou en 1571).

Au XVIIe siècle les Romanov au début du règne de Pierre le Grand (1682-1725) reprennent Smolensk, l'Ukraine orientale et Kiev (Traité d'Androussovo).

Catherine II (1762-1796) poursuit son oeuvre. Elle contraint la Pologne à accepter le premier partage en 1772 (Russie Blanche, Biélorussie) tandis que Frédéric II unit la Poméranie à la Prusse et que Marie-Thérèse d'Autriche occupe la Galicie; elle lui impose le deuxième et troisième partage en 1793 et 1795 (larges territoires à l'Ouest de Kiev, Volhynie, Podolie). Pour 123 ans, jusqu'en 1918, la Pologne n'est plus un Etat indépendant. La Turquie perd les côtes de la Mer noire où est édifié le port de Sébastopol et celui d'Odessa. Atlas historique Duby, Toute l'histoire du monde en 300 cartes, Larousse, 2019, p. 95, 170, 203, 204, 207.

Poussant vers le Sud, Catherine II conquiert le Khanat de Crimée et la Russie annexe tout le territoire septentrional de la Mer noire entre 1783 et 1830. (Christian GRATALOUP, Introduction de Patrick BOUCHERON, Atlas Historique mondial, Les Arènes - L'Histoire, Paris 2019, p. 289).]

Territoires annexés à l'empire russe 1762-1795. Carte tirée de de Christian GRATALOUP, Introduction de Patrick BOUCHERON, Atlas Historique mondial, Les Arènes - L'Histoire, Paris 2019, p. 321.

Territoires annexés à l'empire russe 1762-1795. Carte tirée de de Christian GRATALOUP, Introduction de Patrick BOUCHERON, Atlas Historique mondial, Les Arènes - L'Histoire, Paris 2019, p. 321.

"L'évènement fondamental qui est le suivant, c'est le partage de la Pologne. En fait, les partages de la Pologne; et surtout le troisième partage en 1795 où, finalement, la Pologne est dépecée. La partie d'Ukraine de l'Ouest - la Galicie - est rattachée à l'Autriche-Hongrie, et la partie nord de la Pologne est rattachée à la Russie. Et à partir de ce moment-là, les intellectuels polonais nationalistes qui veulent recréer leur état, de manière tout à fait légitime à mon avis, réfléchissent à la manière dont ils vont pouvoir recréer non seulement la Pologne, mais une grande Pologne qui s'étendrait jusqu'à l'Ukraine. Or, ils ont compris que les peuples qui correspondaient à l'ancienne zone de la Rus, sont quand même linguistiquement, et notamment religieusement - puisque ce qui joue beaucoup en 1654 c'est Tarass Boulba -, il faut en faire une entité qui soit autre que la Russie; donc il faut convaincre ces gens-là qu'ils ne font pas partie du peuple russe. Et donc les premiers qui utilisent le terme 'Ukrain', c'est des nationalistes polonais, dont Yann Podoski, officier de l'armée polonaise, cosmopolite assez typique de cette élite de la fin du XVIIIe, début XIXe siècle, franc-maçon, occultiste. Et toute cette idéologie est reprise par des intellectuels polonais, et notamment les intellectuels polonais qui ont été intégrés à l'empire russe. Puisque notamment sous Alexandre Ier (Tsar 1801-1825), il y a un certain complexe des Russes vis-à-vis de l'Occident, qu'on a retrouvé - moins maintenant - dans les années 90 et 2000. Et Alexandre Ier se dit que forcément les Polonais sont plus cultivés que nous, et il leur donne des places très importantes que ce soit au ministère des Affaires étrangères ou dans l'Education; il nomme des Polonais russophobes pour s'occuper de l'enseignement dans ce que l'on appelle la 'petite Russie". Et les Russes vont contribuer à créer au coeur de la Russie cette différence entre soit-disant un peuple qui existerait en Ukraine et le reste de la Russie. Mais malgré ce soutien donnée aux Polonais, l'idéologie avance très peu : cela concerne des intellectuels, [...] et cela s'inscrit dans le mouvement des 'nationalités' du XIXe siècle : tout le monde devant avoir sa 'nationalité'. Mais cela n'avait aucune assise populaire. Et tout de même, les différentes révoltes polonaises vont mettre un coup à la popularité des élites polonaises au sein de l'empire russe. Et dans les années 1860, les Russes prennent certaines mesures pour limiter la propagande polonaise, notamment sur l''Ukraine' qui aurait existé depuis toujours, etc.

 

"Il y a un autre endroit où l'ukrainisation se poursuit, c'est dans la partie occidentale de l'Ukraine - la Galicie - qui a été rattachée à l'Autriche-Hongrie. À ce moment-là, les élites de Galicie vivent des heures plutôt confortables puisque Vienne utilise les Galiciens contre les Polonais. C'est un peu utiliser les anciens colonisés contre les anciens colonisateurs... Et comme les Polonais en Autriche, comme en Prusse comme en Russie, veulent recréer leur état, ils se révoltent, ils sont un lobby très puissant à l'intérieur de l'Autriche; et Vienne s'appuie sur les Galiciens contre les Polonais.

 

"[...] Vienne se méfie des Galiciens parce qu'elle sait que la langue qu'on parle en Galicie est très proche du russe et cela, notamment, les Galiciens s'en aperçoivent quand en 1849, au moment à Vienne des soulèvements des nationalités, la Russie au nom de la Sainte-Alliance envoie des troupes. Et ces troupes repartent par la Galicie. Et là, les Galiciens qui sont des descendants de la Rus' s'aperçoivent qu'ils comprennent parfaitement ce que disent les soldats russes. Et à partir de cette époque-là naît une presse commune et une partie des élites galiciennes se dit notre peuple c'est les Russes et donc il faut qu'on aille avec eux. L'Autriche qui a très peur de cela favorise l'apparition d'une ukrainisation de l'élite ukrainienne, lui donne une 'rada rus' (elle l'appelle comme cela) où elle peut gérer ses problèmes, etc. Elle favorise l'apparition d'une langue totalement artificielle qui était tirée d'un dialecte ukrainien parlée sur les bords du Dniepr mais qui en fait s'écrivait en russe. Un intellectuel a donc donné un alphabet pour être utilisé (par les Galiciens).

 

"[...] Un fait tout à fait intéressant, en 1914, un aide à la communication, un lexique, est donné aux soldats de l'armée autrichienne pour qu'ils puissent se comprendre (puisqu'il s'agit d'une armée multinationale). Ce lexique est fait en six langues : l'allemand, le hongrois, le polonais, le tchèque, le croate et le russe. Et pas l'ukrainien. Parce que personne ne parle l'ukrainien et que c'est une création purement artificielle à des buts de propagande. [En aparté, c'est aussi le projet de l'Archiduc qui se fait assassiné à Sarajevo - en 1914 - qui avait compris que l'état (monarchique NDLR.) multiethnique austro-hongrois fonctionnait bien et en accordant un même niveau d'autorités et de compétences dans la double monarchie, il voulait faire la même chose avec les peuples slaves qui, finalement, avaient toujours été - que ce soit les Croates ou les Galitiens - parfaitement loyaux vis-à-vis de Vienne. C'était un projet tout à fait viable mais qui allait contre le projet de la Yougoslavie qui voulait, lui, réunir tous les Slaves du Sud.]

 

Empire d'Autriche-Hongrie multiethnique en 1910

 

"Donc, jusqu'à présent [en 1914] il faut bien voir que l'Ukraine n'existe pas. C'est un terme inventé par les nationalistes polonais pour pouvoir dominer l'Ukraine et non pas pour la libérer. Et le terme est repris par l'intelligentsia au profit des Polonais puis le projet est repris par les Autrichiens qui soutiennent des mouvements nationalistes d'Ukrainiens de l'Ouest. Et c'est comme cela que naît le nationalisme ukrainien.

 

"Tout cela nous amène au début du XIXe siècle où les premiers théoriciens du nationalisme ukrainien apparaissent. Et c'est là où le nationalisme ukrainien devient un système de suprématie raciale, notamment par la reprise d'un thème qui avait été développé par les Polonais : les Russes envahis par les Tartares ont été mâtinés de sang asiatique, donc ils sont impurs, et les vrais slaves purs sont les Ukrainiens de l'Ouest. Et donc les trois races impures dont il faut se débarrasser, c'est les Hongrois, les Juifs (parce qu'il y a énormément de Juifs dans la zone ukrainienne) et les Russes. Et cela, c'est dès l'époque de la première Guerre mondiale. Cette idéologie permettra une parfaite convergence avec le national-socialisme et la notion de suprématie d'une race sur une autre.

 

"[...] C'est les Allemands qui vont reprendre le mythe ukrainien créé par les Polonais et repris par les Autrichiens qui vont l'utiliser pour envahir (mars 1918), en fait, ce qui correspond à l'Ukraine. En 1919, les Allemands ont échoué à créer l'Ukraine contre la Russie. Ils s'aperçoivent que ce n'est pas possible. 'Tôt ou tard, l'Ukraine reviendra boire le lait de la Mère-Russie'. C'était les mots de l'Etat-major allemand. En 1921 (Paix de Riga), la Pologne récupère l'Ukraine occidentale, et l'Union soviétique récupère le reste. Et jusque-là, l'Ukraine occidentale n'a toujours pas été rattachée au reste de l'Ukraine, mais on peut commencer à parler à partir de ce moment-là (1922) de l''Ukraine'.

 

"Et on peut parler du grand fondateur de l'Ukraine, qui est le père de tous les nationalistes ukrainiens, Lénine, qui en 1922 décide de créer l'Ukraine, par idéologie des nationalités. Et le Commissaire chargé des nationalités, c'est Staline. Staline qui est donc le deuxième grand fondateur de l'Ukraine moderne, qui à son origine a sa capitale à Kharkov. Le troisième grand fondateur de l'Ukraine est Kaganovitch qui mène l'ukrainisation. Et une des raisons pour laquelle les Bolchéviques créent l'Ukraine et développent le nationalisme ukrainien au sein de l'URSS, c'est un moyen de contrer la Russie (Lénine écrivait qu'il haïssait la Russie...). La grande peur des Bolchéviques, c'est que la Russie prenne trop de place - démographiquement - au sein de l'URSS, il faut donc l'équilibrer. Et donc, pour la première fois en 1923, la langue ukrainienne - qui n'est pas parlée - des élites intellectuelles est normée, l'alphabet est stabilisé par les Bolchéviques, des millions d'articles sont écrits en ukrainien, il y a une littérature en ukrainien."

 

Xavier Moreau est un analyste installé en Russie depuis 14 ans. Il est l'auteur de la "Nouvelle Grande Russie" et l'un des intervenants principaux du site d'analyses politico-stratégiques stratpol.com.

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11 avril 2015 6 11 /04 /avril /2015 06:18

Ancien membre du Comité de sûreté générale sous la Révolution et chargé en cette qualité de la police de Paris pendant quelque temps, Jean-Baptiste Harmand rapporte un fait singulier dans ses Anecdotes relatives à la Révolution (le récit fut censuré en 1814, année de la première édition, et figurera dans l’édition de 1820).

 

Une demoiselle jeune, grande et bien faite, s'était refusée aux recherches de Louis de Saint-Just, surnommé, l’Archange de la Terreur, député de l'Aisne élu à 25 ans en 1792 et soutien indéfectible de Robespierre (il sera guillotiné le même jour que ce dernier, le 28 juillet 1794). Saint-Just la fit conduire à l'échafaud. Après l'exécution, il voulut qu'on lui représentât le cadavre, et que la peau fût levée. Quand ces odieux outrages furent commis, il la fit préparer par un chamoiseur et la porta en culotte.

 

 

Louis de Saint-Just

 

Je tiens ce fait révoltant de celui même qui a été chargé de tous les préparatifs et qui a satisfait le monstre, poursuit Harmand ; il me l'a raconté, avec des détails accessoires que je ne peux pas répéter, dans mon cabinet au Comité de sûreté générale, en présence de deux autres personnes qui vivent encore.

 

 

Il y a plus : c'est que d'après ce fait, d'autres monstres, à l'exemple de Saint-Just, s'occupèrent des moyens d'utiliser la peau des morts, et de la mettre dans le commerce. Ce dernier fait est encore constant. Il ne l'est pas moins que, il y a environ trois ans, on mit aussi dans le commerce de l'huile tirée des cadavres humains : on la vendait pour la lampe des émailleurs.

 

 

D’après « Anecdotes relatives à quelques personnes, et à plusieurs événements de la Révolution », édition de 1820.

 

Source: http://www.france-pittoresque.org/2014/06/saint-just-et-sa-culotte-de-peau-humaine.html

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20 mars 2015 5 20 /03 /mars /2015 18:30

Le Congrès de Vienne de 1814 avait restauré les Bourbons sur le trône (Louis XVIII, frère cadet de Louis XVI), mais Napoléon tenta de revenir par un coup d'Etat, le 19 mars 1815. Voici l'histoire méconnue des raisons de la tranquillité de l'armée ("émoluments gargantuesques" versés par l'empereur), la diffusion d'une légende édifiée par la presse de l'époque "remise sous sa coupe après le 20 mars" . Par Daniel de Montplaisir :

 

Il y a deux cents ans, Napoléon réussissait le coup d’État parfait

Il y a deux cents ans, Napoléon réussissait le coup d’État parfait

 

Le 20 mars 1815, Napoléon réussissait le coup d’État parfait

 

Chacun sait que, malgré la mythologie des romans policiers, le crime parfait existe : chaque année un nombre substantiel de meurtres vient grossir le stock de ceux qu’on n’a jamais élucidés. Il en va différemment des coups d’État : ceux qui jalonnent l’Histoire depuis la plus haute Antiquité connue ont tous laissé leur lot de morts, de fractures politiques, de divisions des hommes, de frustrations et de plaies qui mirent souvent bien du temps à cicatriser. Sauf dans un cas, celui du 20 mars 1815. Louis-Joseph Marchand, valet de chambre de Napoléon, qu’il avait suivi à l’île d’Elbe et revenait avec lui aux Tuileries, a justement noté dans ses Mémoires : « la reprise du pouvoir sans qu’un coup de feu ait été tiré, une goutte de sang répandue et sans aucune conspiration intérieure, sera toujours au nombre des évènements merveilleux dont l’histoire des nations n’offre point d’exemple. » Faisant écho à la fameuse formule de Chateaubriand : « la conquête de la France par un seul homme. »

 

Bonaparte, le haï, le conspué tout au long de sa route un an plus tôt, et toujours très impopulaire selon la doctrine officielle, avait en vingt jours totalement inversé la situation, étrange phénomène que résuma parfaitement un pamphlet anonyme de l’époque : « Le Monstre a quitté l’île d’Elbe ; le Brigand a débarqué dans le golfe de Cannes ; l’Usurpateur est entré à Grenoble ; le Corse a reçu les autorités à Lyon ; Bonaparte a reçu le concours du maréchal Ney ; le Rival des Bourbons a revu Fontainebleau ; Sa Majesté impériale couchera ce soir aux Tuileries. »

 

Voilà deux cents ans que publicistes puis historiens se cassent le nez sur l’impossibilité de trouver une explication satisfaisante au phénomène. D’autant que bonapartistes et royalistes sont allés, chacun de leur côté, rechercher leur propre explication : l’appel du peuple pour les premiers, le sombre complot pour les seconds. On sait aujourd’hui qu’aucune des deux ne tient la route.

 

La légende d’un appel du peuple fut entièrement forgée par Napoléon lui-même et, bien sûr, a posteriori. D’abord édifiée par la presse remise sous sa coupe après le 20 mars, elle fut amplifiée par le Mémorial de Sainte-Hélène et reprise par les historiens bonapartistes dont le dernier fut Dominique de Villepin dans son ouvrage halluciné consacré aux Cent-Jours. Tous les témoins, tous les rapports administratifs de l’époque, attestent au contraire soit d’une hostilité populaire, notamment dans les régions du nord, de l’ouest et du sud-est (en dépit du débarquement surprise à Golfe Juan), soit d’une indifférence et d’un attentisme, souvent alimentés par la passivité royale, soit enfin d’une ignorance des évènements ayant précédé le 20 mars. Certes, des acclamations plus ou moins nourries fusèrent sur le passage de l’aventurier mais devant quelle puissance empanachée une foule ne se prosterne-t-elle pas ? Il suffit de revoir le film d’André Harris produit en 1972, Français si vous saviez pour s’en convaincre.

 

Même l’entrée aux Tuileries, le soir du 19 mars, ne fut guère triomphale. La ville était « amorphe » nous dit Louis Madelin ; « sans regret, sans espoir mais non sans inquiétude » ajoute le duc de Broglie ; « morne, inquiète et très peu bienveillante » confirme La Fayette ; observation confortée par le pourtant bonapartiste Lavalette : « l’indifférence semblait dominer tous les esprits. »

 

Emmanuel de Waresquiel a donc parfaitement résumé les choses en écrivant que le 20 mars 1815 fut « une révolution très particulière, sans le peuple, par le vide et par l’effondrement plus que par l’insurrection ».

 

C’est précisément pour camoufler ou pour justifier cet inexplicable effondrement du gouvernement de Louis XVIII que les royalistes forgèrent de leur côté la thèse du complot. Or les très nombreux historiens qui, depuis lors, se sont penchés sur la question n’ont trouvé aucune preuve, non de tentatives de complot – elle furent même très nombreuses à cette époque encore troublée - mais de complot ourdi en liaison le départ de l’île d’Elbe tel que décidé par Napoléon. Comme l’a sagement fait remarquer le toujours lucide François Guizot, « la fatuité des faiseurs de conspirations est infinie ». Et Dieu sait que tout au long de l’Histoire, cette manie explicative ne s’est jamais relâchée, ses tenants trouvant trop de bénéfices personnels à jouer les grands initiés. La thèse du complot fut, par exemple, soutenue par la comtesse de Boigne dans ses Mémoires d’une tante, tissu de fariboles sur la Restauration, hélas parfois utilisé par des historiens, et rédigé, non par l’auteur apparent mais par Alfred Cuvillier-Fleury, le précepteur du duc d’Aumale. La négritude en littérature ne date pas d’hier.

 

Comme souvent, ce sont des historiens anglo-saxons qui ont le plus fouillé les évènements et leurs conclusions concordent toutes. Ainsi le professeur de Cambridge John Cam Hobhouse, en outre alors présent à Paris, a écrit : « J’ai pris beaucoup de peine à m’assurer des faits et je suis persuadé, avec la généralité de ceux qui ont la réputation d’être les mieux informés, qu’il n’y eut aucun plan concerté (…) et que tout le projet et son exécution ne doivent être attribués qu’à la résolution hardie de Napoléon de retrouver sa couronne. » Rejoignant l’observation de Mme de Staël : « une des plus grandes conceptions de l’audace que l’on puisse citer dans l’histoire. »

 

Est-ce suffisant ? Encore aujourd’hui, on reste sceptique devant la facilité avec laquelle Louis XVIII abandonna son trône et celle avec laquelle Napoléon s’en empara.

 

Après avoir retourné les évènements comme les témoignages et les archives, on en arrive à la conclusion, partiellement satisfaisante, que si la Restauration, en mars 1815, n’avait pas vraiment d’ennemis, elle n’avait surtout pas vraiment de défenseurs, notamment dans l’armée.

 

A la différence des pronunciamientos, ce n’est pas l’armée qui, en 1815, renversa le gouvernement royal mais ce fut bien l’armée qui assura le succès du coup d’État. Non seulement sans tirer un seul coup de feu mais, par dessus-tout, sans avoir eu besoin de menacer personne, simplement en accompagnant le mouvement et provoquant son effet « boule de neige ».

 

Ce fut certainement la plus grande erreur de Louis XVIII et de son gouvernement d’avoir mal traité l’armée de Napoléon, non pas psychologiquement – car les discours de confiance ne lui manquèrent pas et les maréchaux d’empire furent bien mieux traités que les nobles campagnards demeurés fidèles à la légitimité pendant la période révolutionnaire - mais, tout bêtement, sur le plan matériel : les maréchaux conservèrent leurs titres mais leurs émoluments gargantuesques furent ramenés à un niveau plus décent ; quant aux demi-soldes, ils ne purent jamais comprendre que les finances publiques ne permettaient plus d’en assumer la charge. Toutes mesures parfaitement raisonnables mais frappant des esprits qui avaient désappris à l’être.

 

S’était ainsi formé un foyer de mécontentement, foyer éteint mais plein de braises et qu’un rien pourrait rallumer. Ce rien, ce fut un homme débarquant presque seul d’un bateau. Thierry Lentz a bien analysé le problème : « à tort ou à raison, la majorité des militaires considérait que celui qui les avait (…) portés si haut dans le respect de leurs concitoyens et dans les honneurs sauraient restaurer leurs « droits » dans une société en paix. » Dès lors, ils ne complotèrent pas en sa faveur, ils ne s’attaquèrent pas au pouvoir en place, ils ne braquèrent aucun canon contre quiconque ; ils se contentèrent simplement d’être là, quand personne n’y était plus.

 

Daniel de Montplaisir

 

Source: http://www.vexilla-galliae.fr/civilisation/histoire/1282-il-y-a-deux-cents-ans-napoleon-reussissait-le-coup-d-etat-parfait

 

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17 mars 2015 2 17 /03 /mars /2015 19:42

Suite du documentaire Les Rois de France (Merapi productions, AB productions, La Bibliothèque nationale de France)

(6) Les Rois de France - Philippe Auguste

Les Capétiens qui se succèdent sur le trône de France depuis 987 anticipe le sacre de leur fils aîné (de leur vivant) afin d'assurer leur succession. Le sacre légitime l'intronisation en la faisant correspondre à la concrétisation projet divin.

 

Philippe Auguste, la première Guerre de Cent Ans

 

Depuis le partage de l'empire de Charlemagne, la puissance publique ne cesse de s'émietter en France. Uen multitude de petits seigneurs contrôlent d'infîmes territoires, affaiblissant l'autorité centrale. Certains grands féodaux arrivent à canaliser ces forces centrifuges menaçant le pouvoir du Capétien, mais la logique de la pyramide féodale donne la possibilité au roi des Francs de fiefs en fiefs, de grands vassaux en grands vassaux, de faire remonter la réalité du pouvoir jusqu'à lui.

Pyramide féodale

Pyramide féodale

Deux évènements majeurs dans la deuxième moitié du XIe siècle changent la donne. La Première Croisade voit de Grands féodaux français créer des Etats latins en Terre sainte.

États latins d’Orient au XIIe siècle

États latins d’Orient au XIIe siècle

Et en 1066, le duc de Normandie, Guillaume le Conquérant, descendant des Vikings installés en Normandie, envahit l'Angleterre et déplace du même coup Outre-Manche la pyramide féodale en cours d'élaboration. C'est important parce que les héritiers de Guillaume vont s'associer aux fameux Plantagenêts. Cet évènement est à l'origine des deux guerres de Cent Ans, dont la première débute au milieu du XIIe siècle, et dont les hérauts s'appellent Aliénor d'Aquitaine, Louis VII le Pieux, Henri II Plantagenêt, son fils Richard Coeur de Lion, et Philippe II de France, dit Philippe Auguste.

Associé au trône dès 1101, le règne de Louis VI le Gros (1108-1137) ne débute réellement qu'en 1108, à la mort de son père Philippe Ier.

 

L'invasion germanique (1124) repousée par Louis VI est la "preuve la plus convaincante de l'existence du sentiment national" (Régine Pernoud).

 

Louis VI s'appuie sur un conseiller prudent et habile, l'abbé de Saint-Denis, Suger.

 

En 1124, Louis VI résiste à une coalition anglo-germanique: tous ses vassaux se mobilisent pour sauvegarder le pouvoir du Roi. Le duc de Bourgogne, le Comte de Champagne, le Comte de Flandre, le Comte d'Anjou, le duc de Bretagne, et le duc d'Aquitaine réponde à l'appel du Capétien. Et cela pour la première fois depuis l'avènement de la dynastie.

[En juillet 1124, l'invasion de l'empereur germanique Henri V (qui voulant aider son beau-père Henri Ier d'Angleterre, plus jeune fils de Guillaume le Conquérant, dans le conflit qui l'opposait au roi de France Louis VI pour la succession dans le duché de Normandie, envahit la France et avança jusqu'à Reims avec une puissante armée), vit  le capétien Louis VI faire appel à l’ost, lever en hâte une armée et convoquer les grands vassaux du royaume, qui tous envoyèrent des contingents.

 

Pour l'historienne Régine Pernoud, cette levée en masse est « la preuve la plus convaincante de l'existence du sentiment national. [O]n assiste alors à une levée d'armes générale dans tout le royaume; les barons les plus turbulents, parmi lesquels un Thibaut de Chartres, alors en pleine révolte, oublient leurs querelles pour venir se ranger sous l'étendard royal, le célèbre oriflamme rouge frangé de vert que Louis VI avait pris sur l'autel de Saint-Denis. La notion de patrie était donc, dès cette époque, assez ancrée pour provoquer une coalition générale, et l'on avait, à travers la diversité et l'émiettement des fiefs, conscience de faire partie d'un tout. Cette notion devait s'affirmer encore avec éclat, un siècles plus tard, à Bouvines. »

 

Source: Régine. Pernoud, Lumière du Moyen Âge, Grasset, Poitiers 1981, p. 29; et Régine Pernoud, Pour en finir avec le Moyen Âge, 1977, Points Histoire, Mayenne 2001, p. 97.]

C'est vers le duché d'Aquitaine, et l'héritière la plus puissante d'Europe - Aliénor d'Aquitaine - que se tourne Louis VI à la fin de son règne. En effet, le duc d'Aquitaine est mort sans héritier mâle. Il laisse le duché à Aliénor (il n'y a pas de loi salique en Aquitaine comme chez les Francs saliens où c'est l'homme qui hérite). Toujours animé par la clairvoyance de l'abbé Suger, le roi de France Louis VI scelle pour plus de Cent Ans le destin de son royaume en mariant son fils aîné à Aliénor le 25 juillet 1137. Aliénor n'a encore que treize ans et devient Reine de France à la mort de Louis VI le 1er août 1137.

 

Louis VII n'était pas destiné à régner. La mort de son frère aîné six ans plus tôt l'a sorti du cloître Notre-Dame où il a été élevé. Il en gardera le surnom de Louis VII le Pieux ou "le Jeune" (Roi de France 1137-1180), ainsi qu'un état d'esprit tourné vers la sobriété.

La Seconde Croisade

 

Elle est prêchée par saint Bernard de Clervaux, premier unificateur de l'Europe, à Vézelay en 1146. Les Turcs ont pros possession d'un état latin en possession des Chrétiens depuis 1098.

(6) Les Rois de France - Philippe Auguste

Louis VII part en Croisade, accompagné de son épouse, Aliénor. Vindicative, prompte, courageuse, Aliénor n'a pas le même tempérament que Louis, qui lui est plus prudent, et souhaite aller à Jérusalem avant tout. La Croisade qu'ils entrepennent ensemble va maquer un tournant dans

Deuxième Croisade - Itinéraire de Louis VII et Aliénor

Deuxième Croisade - Itinéraire de Louis VII et Aliénor

Or le couple s'est arrêté à Antioche en mars 1148, hébergé par un oncle d'Aliénor, jeune prince franc du royaume d'Antioche, Raymond de Poitiers.

 

Après avoir séjourné à Constantinople, une autre Cour d'Orient offre à Aliénor une vision plus proche de ses idéaux que celle de Paris, moins austère et plus ambitieuse aussi. Raymond compte sur l'aide de Louis pour regagner du terrain face aux Infidèles. Echaudé par des déboires subis plus au Nord, Louis veut éviter l'affrontement pour l'instant et donne la priorité à un pélerinage à Jérusalem. Les rumeurs et les railleries vont bon train quand on évoque le temps que passe ensemble Louis et Aliénor. Le départ pour Jérusalem est avancé mais Aliénor refuse de suivre Louis. Devant son insistance et le rappel des devoirs d'une femme, Aliénor demande l'annulation du mariage pour cause de consanguinité, menace reposant effectivement sur des éléments avérés tant les relations de la pyramide féodale sont étroites. Louis est tenté d'accepter par dignité, mais par stratégie politique il suit les conseils de ses barons et enlève Aliénor afin de l'emmener avec lui à Jérusalem. Le pélerinage est effectué mais les tentatives de reconquête en Terre sainte ont échoué. Le couple rentre de Croisade dans deux navires différents (juin 1148). Leur route passe par Rome où semble-t-il le Pape Eugène III réussit à les réconclier. Si réconciliation il y a eu, elle dura deux ans, le temps d'un autre enfant, une fille encore.

Le bilan de la Croisade est catastrophique : Louis a perdu beaucoup d'hommes, de l'argent, et sentimentalement parlant il a perdu son épouse. Et territorialement, comme elle garde l'Aquitaine qu'elle ne veut pas lui donner, il n'a plus rien à gagner.

 

En mars 1152 Louis répudie Aliénor qui est contrainte de laisser ses deux filles sous la protection de leur père. En mai, elle épouse dans la cathédrale de Poitiers Henri Plantagenêt, fils de Geoffroy le Bel, duc d'Anjou, du Maine et de Normandie qui portait toujours un brin de genêt à son chapeau (d'où son surnom "Plantagenêt") et de Mathilde, fille d'Henri Ier d'Angleterre, dit Beaucler (plus jeune fils de Guillaume le Conquérant) et qui deviendra roi d'Angleterre sous le nom d'Henri II Plantagenêt à la mort d'Etienne de Blois en 1154 (fils d'Adèle, soeur d'Henri Ier).

 

Généalogie des Plantagenêts

Généalogie des Plantagenêts

(6) Les Rois de France - Philippe Auguste

Aliénor est donc une deuxième fois reine, mais cette fois-ci Reine d'Angleterre.  Elle a quatre fils avec Henri, dont deux meurent, Henri le Jeune (en 1183) et Geoffroy (1186). Les deux autres deviendront Richard Coeur de Lion (1189-1199) et Jean sans Terre (1199-1216).

Empire angevin ou Plantagenêt suite au mariage d'Henri Plantagenêt et d'Aliénor d'Aquitaine (1152)

Empire angevin ou Plantagenêt suite au mariage d'Henri Plantagenêt et d'Aliénor d'Aquitaine (1152)

Les fils d'Aliénor grandissent et la Reine est une épouse délaissée, Henri vivant une liaison adultère au grand jour. Henri est puissant, si puissant qu'il pense alors pouvoir se passer de l'aide de Dieu et surtout du pouvoir spirituel qu'il représente sur terre. Si puissant qu'il ne consent qu'à ne déléguer que de manière fictive le pouvoir à ses fils. Si puissant qu'il pense pouvoir se passer de l'aide d'Aliénor.

 

Or, Aliénor d'Aquitaine va prendre position pour ses enfants. En 1173, après avoir obtenu l'alliance de son premier époux (Louis VII), Aliénor et ses fils déclenchent une insurrection qui se propage dans tout l'empire. La ripose d'Henri est foudroyante, il repousse les français, mate la rebellion et tandis qu'il choisit de pardonner à ses fils il capture Aliénor qu'il emprisonne en Angleterre dans la Tour de Salisbury pendant près de quinze ans (1174-1189). 

 

La pacification de l'Aquitaine est menée par Richard lui-même qui est pourtant à l'origine du soulèvement.

Richard pacifie l'Aquitaine (1173). Il y gagne le surnom de "Coeur de Lion"

Richard pacifie l'Aquitaine (1173). Il y gagne le surnom de "Coeur de Lion"

Une prophétie faite par Merlin inquiète pourtant Henri. Elle évoque la libération d'un aigle à deux têtes par sa troisième nichée.

Entre 1164 et 1185 est écrite une série d'ouvrages qui est considérée comme la génèse de la littérature française. L'auteur s'appelle Chrétien et est originaire de Troyes. Il est le protégé de la comtesse de Champagne, Marie, fille aînée d'Aliénor d'Aquitaine et de Louis VII.

Sceau de Marie de Champagne

Sceau de Marie de Champagne

L'oeuvre de Chrétien s'articule essentiellement autour de la légende d'Arthur et les Chevaliers de la Table ronde, qu'il va participer à transformer en mythe.

Arthur et les Chevaliers de la Table ronde

Arthur et les Chevaliers de la Table ronde

(6) Les Rois de France - Philippe Auguste

L'influence de l'Amour courtois, en remontant vers le Nord, rencontre le modèle du Roi-Chevalier. Et Chrétien invente le Roman de chevalerie.

 

Influencé par les aventures d'Arthur et de ses chevaliers (guerriers celtes des Îles britanniques qui fin Ve - début VIe siècle luttèrent contre les envahisseurs Saxons en Angleterre NDLR.), ironie de l'histoire, les Plantagenêts (descendants des vikings normands par Guillaume le Conquérant, NDLR.) vont influencer les romans des siècles à venir en reprenant à leur compte la légende celtique. Tout comme les Capétiens se réclament les descendants de Charlemagne, les Plantagenêts se disent - d'une manière tout à fait mythique - prolonger la ligne d'Arthur (Cf. Les Plantagenêt et l'influence française en Angleterre). Chevalier aussi émérite que Lancelot du Lac, Richard punit ses barons rebelles avec la même brutalité que s'il s'agissait d'envoyés de Satan.

Lancelot du Lac et Guenièvre

Lancelot du Lac et Guenièvre

(6) Les Rois de France - Philippe Auguste
(6) Les Rois de France - Philippe Auguste
(6) Les Rois de France - Philippe Auguste
Lancelot et Arthur (Film Excalibur de John Boorman, 1981)

Lancelot et Arthur (Film Excalibur de John Boorman, 1981)

Tandis que les naissances se succèdent chez les Plantagenêts, le Capétien Louis attend toujours un fils. Après la mort de sa seconde épouse Constance de Castille (en 1160) en mettant au monde sa quatrième fille, Louis se ramarie le 13 novembre 1160 avec Adèle de Champagne (Reine des Francs 1160-1180, morte à Paris en 1206). En 1165, Louis vit en rêve le fils tant attendu. Il tient un calice rempli de sang qu'il donne à boire aux Grands du royaume. Le miracle a bien lieu. Louis a enfin un fils le 21 août 1165, qu'il prénomme Philippe, que l'on surnomme "Dieudonné et qui deviendra plus tard "Philippe Auguste". Louis s'éteint en 1180.

Philippe Dieudonné offert par le Ciel à ses parents (Grandes Chroniques de France, v.1270), Paris, Bibliothèque Sainte-Geneviève.

Philippe Dieudonné offert par le Ciel à ses parents (Grandes Chroniques de France, v.1270), Paris, Bibliothèque Sainte-Geneviève.

Philippe II Auguste

Philippe II Auguste

(6) Les Rois de France - Philippe Auguste

Dès sa première entrevue avec le nouveau roi de France, le vieux Plantagenêt (Henri) est impressionné par sa prudence et son assurance, qualités que doit avoir un Roi-Chevalier, mais qu'il ne retrouve pas chez ses fils. Après la mort brutale de deux d'entre eux, Richard n'a plus qu'un frère, le Prince Jean.

Mais on apprend en 1187 une terrible nouvelle venue d'Orient. Le Sultan d'Egypte Saladin s'est emparé de Jérusalem.

 

Alors que tous nos héros vont voeu de croisade à l'exception de Jean, pendant ses préparatifs les combats reprennent et la prophétie de Merlin de s'accomplir. Parce qu'à l'origine, Philippe et Richard étaient très liés et amis, le roi Philippe Auguste va l'aider dans sa lutte contre son père et faciliter son accession au pouvoir. C'est le Traité d'Azay-le-Rideau qui a précédé de quelques jours la mort d'Henri II Plantagenêt, pourchassé par le Philippe et Rcihard. On dit que ce traité est une "paix honteuse" pour Henri qui prend connaissance de la trahison de son dernier fils, Jean sans Terre. Et ce traité prévoit un certain nombre de territoires au roi de France (Henri prête hommage à son suzerain le roi de France pour tous ses fiefs sur le continent), ainsi que le mariage de Richard avec la demi-soeur du roi de France, Alix. Vaincu, Henri se soumet pour la première fois de son existence qui s'achève. Il meurt seul à Chinon, le 6 juillet 1189.

 

Aliénor est libre (6 juillet 1189), Ricard est Roi d'Angleterre et interdit à son frère Jean d'y retourner jusqu'à son retour de Croisade.

Définition de la fonction d'Etat comme oeuvrant pour le Bien public

 

Philippe lance la construction de l'enceinte du Louvre à Paris. Il rédige un testament où pour la première fois est définie la fonction monarchique comme la fonction d'état, c'est-à-dire oeuvrant pour le Bien public. Il délègue ses pouvoirs non pas à des Grands du royaume mais à des représentants de l'Etat, eux-mêmes contrôlés par un Conseil de notables. C'est cette organisation qui finira par faire la différence.

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La Troisième croisade. Les Armes de France sont rouges (l'oriflamme hissé sur le champ de bataille était rouge frangé de vert), celles d'Angleterre, blanches

 

Après la défaite d'Hattin (4 juillet 1187) et la prise de Jérusalem, de leurs vastes territoires du début du XIIe s., les Francs ne conservent plus en Terre-Sainte que tyr, Tripoli, Antioche et quelques forteresses isolées comme le krak des chevaliers.

 

Le 21 janvier 1188, une réunion solennelle entre Gisors et Trie de Richard et Philippe décide de lever une dîme spéciale dans toutes les églises de France et d'Angleterre (la "Dîme saladine") pour une prise d'arme générale. Rois et barons prirent la croix avec des couleurs différentes selon les régions: celles de France étaient rouges, celles d'Angleterre, blanches, et vertes celles de Flandre. Tous étaient solennellement exhortés à faire cesser leurs querelles afin d'avoir pour première préoccupation le bien de la Chrétienté, c'est-à-dire, la reconquête de Jérusalem.

(Source: Régine Pernoud, Richard Cœur de Lion, Fayard, Mesnil-sur-l'Estrée 1988, p. 68-69).

 

Les deux rois Richard et Philippe partent pour la Troisième Croisade ensemble le 4 juillet 1190. Alors que Philippe est partisan de la négociation afin de stabiliser la situation, Richard en fait un problème personnel qu'il faut régler avec panache. Il décide de ramener l'ordre à sa manière en mettant à sac Méssine (Italie) (4 octobre 1190), mais surtout en plantant sur la ville ses étendards. La fierté du Roi de France est éprouvée. Tandis que Philippe traverse la Méditerranée pour rejoindre Saint Jean d'Acre, Richard passe par Chypre, île dépendant de l'empire bizantin et dont le prince, Tancrède de Lecce, à la recherche d'autonomie collabore avec Saladin. L'occasion est belle pour Richard de rajouter une ligne à la liste de ses exploits. Chypre est conquise. Et le 21 mai 1191, Richard fait prisonnier Isaac Doukas Comnène, empereur usurpateur de de Chypre (1184 à 1191). Il peut maintenant rejoindre Saint Jean d'Acre où Philippe peine à prendre la ville. Le 7 juin 1191, nouvel éclat, Richard s'empare d'un vaisseau transportant 1500 Sarrasins envoyés au secours d'Acre assiégée et défendue par le Sultan Saladin lui-même. Avec Richard, la ville tombe (12 juillet 1191). 

 

"On vit les croix et les drapeaux se dresser sur les murs de la ville", écrit un chroniqueur arabe, Abou-Shama. De son côté, le chroniqueur Ambroise rappelle triomphalement ce qui s'est passé quand les Sarrasins avaient fait la conquête d'Acre: "Il y avait quatre ans que les Sarrasins avaient conquis Acre, et je me rappelle nettement qu'elle nous fut rendue le lendemain de la fête de saint Benoît malgré leur race maudite. Il fallait voir alors les églises qui étaient restées dans la ville, comme ils avaient mutilé et effacé les peintures, renversé les autels, massacré les croix et les crucifix par mépris de notre foi pour satisfaire leur incroyance et faire place à leurs mahomeries (mosquées)…" Les troupes de Saladin s'éloignèrent, non sans transformer la région en désert sur leurs passages. Jusqu'à Caïpha, les vignes, les arbres fruitiers furent coupés, les forteresses ou cités, petites ou grandes, détruites… Parcourant les anciennes églises d'Acre qui avaient été converties en mosquées, l'évêque de Vérone, Alard, l'archevêque de Tyr, les autres évêques, de Chartres, de Beauvais, de Pise, et généralement tous ceux qui avaient été présents, se mettaient en devoir de purifier les sanctuaires et de rétablir partout le culte chrétien. Des messes solennelles furent célébrées dans les églises réconciliées, tandis que l'armée s'employait à réparer les murs et à relever les maisons détruites. Il fut décidé que tous ceux qui pouvaient prouver que telle ou telle maison leur avait appartenu se la verrait restituer; d'autre part ils y hébergeraient les chevaliers qui avaient combattu pendant tout le temps où ceux-ci demeureraient au service de la Terre sainte" (Source: Régine Pernoud, Richard Cœur de Lion, Fayard, Mesnil-sur-l'Estrée 1988, p. 147-149).

L'historien Joshua Prawer a bien mis l'accent sur l'importance de la prise d'Acre qui allait rester la capitale de ce qu'on a persisté à appeler le Royaume de Jérusalem pendant un siècle exactement: de 1191 à la chute définitive en 1291.

 

Les deux bannières française et anglaise flottent cette fois-ci ensemble. Le duc d'Autriche, Leopold V, veut aussi planter son étendard. Richard lui refuse ce droit et traîne sa bannière dans la boue. Très rapidement on va s'apercevoir de la mésentente entre Richard et son "ami" Philippe Auguste, une amitié dont il faut se méfier. Parce que Philippe Auguste veut, lui, combattre absolument Saladin, gagner Saint Jean d'Acre, et Richard arrive en retard, on sent que si l'un est conquérant, l'autre est hésitant. Et Philippe Auguste va dire que dans ces conditions il rentre. La prochaine étape est Jérusalem. Cela sera sans Philippe, malade, préoccupé par les affaires de son Royaume. Il décide de rentrer en France le 31 juillet 1191. Il s'arrête à Rome pour obtenir du Pape l'absolution, en disant qu'il quitte la Croisade. Et pendant ce temps-là Richard va rester et se battre, parfois même comme un soudard, parce qu'il massacre à tours de bras.

 

Le 20 août 1191, Richard massacre 2.700 prisonniers Sarrasins, qu'il fit décapiter, suite à l'échec des négociations avec Saladin.

"On attendait la remise des prisonniers pour le 9 août suivant, selon les accords passés avec l'armée assiégée au moment de sa reddition… On attendait que soit rendue la Vraie Croix (perdue à Hâttin en 1187) et effectuée l'échange des prisonniers. Mais ce jour-là, Saladin manda aux Chrétiens qu'ils lui donnassent un autre jour, car il n'avait pas encore préparé ce qu'il devait. Nos gens qui avaient grand désir d'avoir la sainte Croix et de voir délivrer les prisonniers, le lui accordèrent. Qaund vint au jour qui fut désigné entre eux, les rois et la chevalerie et toutes les gens d'armes furent préparés… Les prêtres et les clercs et les gens de religion furent revêtus et tous déchaux [pieds nus] sortirent de la cité en grande dévotion et vinrent au lieu que Saladin avait désigné. Qaund ils furent là et crurent que Saladin allait leur rendre la Sainte Croix, il revint sur la promesse qu'il leur avait faite. Ceux qui virent cela se tinrent moult engignés [se considérèrent comme dupés]. Grande douleur il y eut entre les chrétiens et maintes larmes y furent ce jour répandues. Une seconde date, le 20 août, avait été fixée pour l'échange des prisonniers et la reddition de la Vraie Croix. Une rencontre avait été projetée entre Richard et le frère de Saladin. Or, le roi, ce jour-là, avec quelques compagnons, sortit sur les fossés, mais attendit inutilement le porte-parole annoncé. La tension et l'impatience de Richard avaient atteint leur limite; sans parler de la charge que représentaient la nourriture et la surveillance des prisonniers… "Il commanda qu'on lui amenât les Sarrasins qu'il avait pris en sa partie dit le Continuateur de Guilluame de Tyr. Comme on les lui amenait, il les fit mener entre les deux armées des chrétiens et des sarrasins. Et ils étaient si près que les sarrasins les pouvaient bien voir. Le roi commanda aussitôt qu'on leur dût couper les têtes hardiment. Ils y mirent mains et les occirent à la vue des sarrasins. Un affreux massacre. Benoît de Peterborough raconte que Saladin en avait fait autant aux esclaves chrétiens et il est certain, au témoignage des chroniqueurs arabes, qu'il avait assisté en personne au massacre des prisonniers chrétiens après Hâttin, notamment des templiers, tous décapités. On évalue à 2700 le nombre de prisonniers ainsi exécutés.

(Source: Régine Pernoud, Richard Cœur de Lion, Fayard, Mesnil-sur-l'Estrée 1988, p. 160-161).

 

Le 7 septembre 1191, Richard défait Saladin dans la Palmeraie d'Arsouf. Il dirige alors son armée sur Jaffa. dont "la place et le port avaient été complètement démantelées sur l'ordre de Saladin". "Jaffa devait être, par la suite, le port d'embarquement le plus utilisé par les Croisés, et l'on sait comment Tel-Aviv, qui fait suite immédiatement à la vieille ville, reste aujourd'hui, le point par lequel on aborde normalement en Israël, à proximité de Lod, où a été établie l'aéroport, qui se trouve donc proche de l'antique cité de Lydda: un point d'accès qui semble redevenu traditionnel aujourd'hui comme aux XIIe et XIIIe s. Les travaux de reconstruction allaient être lents et occuper l'armée plus de deux mois. Il est vrai que les ouvriers qui y travaillaient demeuraient sur le qui-vive, et que la surveillance devait être incessante. Vers la fin d'octobre 1191, Jaffa était à peu près reconstruite. Une partie de cette cité des Croisés subsiste aujourd'hui encore. Il est vrai qu'elle allait être à nouveau fortifiée par Saint-Louis, un demi-siècle plus tard."

 

(Source: Régine Pernoud, Richard Cœur de Lion, Fayard, Mesnil-sur-l'Estrée 1988, p. 174-175).

 

Richard réussit à arbitrer les conflits politiques qui divisaient les Francs en reconnaissant Henri de Champagne comme roi de Jérusalem et en donnant, en compensation, Chypre au roi déchu Guy de Lusignan (qui avait été défait à Hattin en 1187). Richard réussit à reprendre la quasi-totalité du littoral mais il lui fallut renoncer à Jérusalem. Une trêve fut conclue avec Saladin.

 

Chronologie :

 

Le 28 avril 1192, Conrad de Montferrat, roi consort de Jérusalem, était assassiné par deux membres de la secte des Assassins. Le 5 mai 1192, Henri de Champagne épousa Isabelle, veuve de Conrad de Montferrat, et prit la couronne de Jérusalem. En Mai 1192 Guy de Lusignan rachèta à Richard l'île de Chypre et s'y installa, désigné comme roi de l'île. Le 4 juillet 1192, Richard renonça à marcher sur Jérusalem. Le 6 juillet, Saladin attaqua Jaffa, le 5 août 1192, il y était défait.

 

"Sachant que Richard n'avait guère avec lui que deux milles hommes, dont seulement une cinquantaine de chevaliers – sans chevaux, puisqu'en se portant sur Jaffa, on n'avait pas pris le temps de les faire embarquer – , il résolut de prendre sa revanche… Au petit matin, un Génois de la flotte de secours, s'étant un peu éloigné du campement, vit au loin, à la lueur indécise de l'aube, briller des armures; il donna l'alarme. Richard, réveillé en sursaut, disposa en hâte sa petite troupe, tout en jurant de décapiter de ses mains le premier qu'il verrait céder; il les fit placer en alternant piquiers et arbalétriers, chacun de ceux-ci aidé d'un sergent qui rechargeait une seconde arbalète tandis qu'on tirait la première. La charge des cavaliers ennemis se brisait sur les piques; tandis qu'ils se repliaient pour une seconde charge, la pluie de traits d'arbalètes s'abattait dru, tuant les chevaux et les hommes. "La bravoure des Francs était telle que nos troupes, découragées par leur résistance, se contentaient de les tenir cernés, mais distance". En vain Saladin lui-même tentait-il de les encourager. Richard lui-même se lança alors à l'attaque, frappant tant, et de tels coups, déclara Ambroise, que la peau des mains lui creva… Lorsqu'il en revint, "sa personne, son cheval et son caparaçon étaient si couverts de flèches qu'il ressemblait à un hérisson"… Au soir de ce 5 août, Saladin et les restes de son armée se replièrent sur Yazour, puis sur Latroun, plus que jamais découragés; ils avaient été battus à plus de dix contre un" (Source: Régine Pernoud, Richard Cœur de Lion, Fayard, Mesnil-sur-l'Estrée 1988, p. 191)

 

Le 2 septembre 1192 est conclue la Paix de Jaffa entre Saladin et Richard. Cette paix scelle une trêve de trois ans; elle 

- accorde aux chrétiens la possession de la bande côtière, depuis le nord de Tyr jusqu'au sud de Jaffa; cette cité si vaillamment défendue allait demeurer à travers le temps le lieu normal de débarquement des pèlerins: encore aux XIVe et XVe s., quand la Terre sainte aura été perdue, on y voyait arriver des pèlerinages dont les membres s'abritaient dans les grottes de la côte en attendant d'obtenir les sauf-conduits nécessaires pour pouvoir s'engager sur la route de Ramla, puis de Jérusalem.

- autorise dorénavant les Francs et tous les Chrétiens à rendre librement visite aux Lieux saints sans avoir à payer taxes ou droits de douanes quelconques. (Source: Régine Pernoud, Richard Cœur de Lion, Fayard, Mesnil-sur-l'Estrée 1988, p. 192) Mais Jérusalem est laissée aux musulmans.

- "La capitale du 'royaume de Jérusalem' était désormais Acre, tandis qu'un autre royaume franc était établi à Chypre, conquise sur les Byzantins par Richard Cœur de Lion. Successivement, Henri de Champagne (1192-1197), Amaury de Lusignan (1197-1205), Jean de Brienne (1210-1225), portèrent le titre de Roi de Jérusalem, que prit ensuite Frédéric II, roi de Sicile, lui-même débarqué à Acre en 1228, qui réussit par le traité de Jaffa de 1229, à se faire restituer les trois villes saintes de Jérusalem, Bethléem et Nazareth, mais sa présence en Terre sainte avait aussi été un ferment de guerre civile qui éclata aussitôt après son départ: entre 1229 et 1243 l'histoire de la Syrie franque est celle des luttes entre Francs et Impériaux. En 1244, Jérusalem était définitivement reprise par les Turcs.

De 1260 à 1277 le sultan Baïbars devait finir d'enlever les principales places fortes: Césarée (1265), Jaffa (1268), Antioche (1268), puis le krak des chevaliers (1271). Après lui, le sultan Qalaoun, en 1289, s'emparait de Tripoli, et son fils et successeur, Al-Ashraf, d'Acre (28 mai 1291), mettant fin, définitivement, au royaume franc de Syrie." (Source:Régine Pernoud, Les hommes de la Croisade, Taillandier, Mayenne 1977, p. 13-14).

"Il semble certain que, n'eût été la défection du roi de France, la Ville sainte de Jérusalem fût retombée entre les mains des chrétiens, et le sort du monde en eût été changé. On peut, au moins en partie, attribuer l'hésitation du roi d'Angleterre, au fait qu'il s'est senti seul. Pour agir, il lui fallait être sûr de la victoire. Pour agir, mais non pour combattre, puisque dans toutes les rencontres, ses forces étaient inférieures à celles de Saladin – largement inférieures même, lors de la dernière bataille, celle qui sauva Jaffa, laquelle à peine reconquise, allait être perdue. En cette circonstance d'ailleurs, sa tactique avait tenu du génie, non seulement en raison du sang-froid dont elle témoigna, mais aussi parce qu'elle présentait une parade parfaite aux escadrons turcs dont il connaissait à fond les méthodes. Mais – et Richard en était conscient – la prise de Jérusalem représentait un exploit si exceptionnel qu'il fallait être sûr du succès, et d'un succès durable; ce qui impliquait des forces d'occupation nombreuses, dont il se trouva privé par suite de la défection des Français.

La reconquête d'Acre et de Jaffa était inestimable; si le royaume franc de Terre sainte a pu survivre à lui-même pendant un siècle exactement – de 1191 à 1291 – , c'est bien grâce aux exploits qui l'ont permise. Certes, ces cent ans de survie ne comportent pas que des pages glorieuses; du moins voit-on s'esquisser une Méditerranée chrétienne, permettant les voyages et les échanges, prolongeant les capacités de résistance des populations menacées par l'avance turque et retardant ainsi les grandes destructions". Que l'on songe à la grande basilique Sainte-Sophie de Constantinople, "parmi les nombreux touristes qui la visitent aujourd'hui, très peu ont la curiosité d'emprunter la longue rampe en plan incliné qui conduit jusque sous la coupole; là, on s'arrête, stupéfait, devant la soudaine apparition de Saint Michel, ou plutôt de la mosaïque qui le représente: c'est la seule demeurée intacte ou à peu près. Les envahisseurs ottomans l'ont respectée: l'archange était nommé dans le Coran, il e eu le droit de survivre. [...] et l'on pense à ces tonnes de smaltes d'or et d'émaux, à ce morceaux de 'tesselles', martelés avec opiniâtreté pour être déversés Dieu sait où ! Deux siècles et demi de survie pour une telle merveille, c'est déjà beaucoup dans l'histoire de l'humanité…

La geste de Richard Cœur de Lion aura permis cette survie et beaucoup d'autres. En fait ni lui ni les croisés qui marchaient à sa suite ne sont les vrais responsables des troubles qui durant le XIIIe s., allaient affaiblir et parfois même ensanglanter le précaire royaume franc. Les fauteurs de désordres ont été les négociants dont les rivalités mercantiles ont allumé des discordes, voire des guerres, en cette même cité de Saint-Jean d'Acre si durement conquise et où les chevaliers de l'Hôpital élevèrent un splendide château qui n'aura été dégagé qu'en notre temps. "Guerre, commerce et piraterie / Font une trinité indivisible", disait Goethe. Et c'est cette néfaste trinité-là qui devait épuiser les restes du royaume, proie facile pour les Mamlouks à la fin du XIIIe s. L'action de Richard, reprise et consolidée par Saint-Louis aura valu ce répit aux arabes chrétiens, aux Libanais, aux Arméniens, aux Grecs eux-mêmes, en dépit de la prise de Constantinople par les latins en 1204."

(Source: Régine Pernoud, Richard Cœur de Lion, Fayard, Mesnil-sur-l'Estrée 1988, p. 193-195).

 

De 1192 à 1291, "on pourrait croire que l'existence de la Syrie franque, minuscule royaume enchâssé dans l'immense territoire musulman qui va de l'Iran au Maroc, des bords de la Caspienne à ceux de l'Atlantique, s'est déroulée dans des combats incessants; pourtant Jean Richard a fait remarquer qu'en près d'un siècle (1192-1291) le royaume de Syrie compta quatre-vingt ans de paix (Le royaume latin de Jérusalem, p. 161, cité in Régine Pernoud, Les hommes de la Croisade, Taillandier, Mayenne 1977, p. 246).

Le 9 octobre 1192, Richard rembarque à Chypre.

Le 28 février 1193, Saladin meurt à Damas.

 

 

 

Richard Coeur de Lyon rembarque à Chypre en octobre 1192. Une tempête l'oblige à changer d'itinéraire. Il doit traverser le duché d'Autrice où le duc ne l'a pas oublié. Malgré son déguisement, Richard est capturé et vendu à l'empereur germanique que Philippe a eu tout loisir de ranger de son côté.

Richard Coeur de Lyon rembarque à Chypre en octobre 1192. Une tempête l'oblige à changer d'itinéraire. Il doit traverser le duché d'Autrice où le duc ne l'a pas oublié. Malgré son déguisement, Richard est capturé et vendu à l'empereur germanique que Philippe a eu tout loisir de ranger de son côté.

Maintenant que Richard n'est plus croisé mais toujours absent, Philippe complote avec le Prince Jean qui se proclame Roi. Mais Jean ne peut atteindre son nouveau royaume: l'île est défendue par les Barons fidèles à Richard. C'est Aliénor qui veille. Le projet d'un débarquement en Angleterre est repoussé.

 

Aliénor obtient en février 1194 la libération de Richard. Déchaîné, il l'est dans tous les sens du terme. Jean demande immédiatement pardon et fait massacrer la garde française protégeant Evreux en signe de repentance. Sitôt débarqué en Angleterre où il est accueilli par les acclamations de la foule qui chante et danse, Richard punit les partisans de Jean. C'est le lendemain de la prise de Nottingham qu'il découvre la forêt de Sherwood,

 

 

(6) Les Rois de France - Philippe Auguste
Bouleaux de la Forêt de Sherwood

Bouleaux de la Forêt de Sherwood

Quand Richard est libéré grâce à la rançon versée par Aliénor d'Aquitaine, il constate immédiatement le comportement de son frère Jean sans Terre, Jean Lackland comme on l'appelait à Londres, qui a failli lui usurper la Couronne. Donc évidemment il va le punir en l'emprisonnant mais il lui pardonnera très rapidement.

 

Mais les affaires l'appellent sur le continent. Le 12 mai 1194 Richard quitte l'Angleterre qu'il ne reverra jamais. Le premier affontement entre Philippe et Richard a lieu entre Normandie et Anjou à Freteval et voit la déroute de l'armée française, la perte du Trésor royal ainsi que de nombreux documents indispensables à l'organisation du royaume. Philippe décide de mettre fin à cette tradition d'une administration itinérante et fonde la même année les Archives royales qui seront désormais conservées dans le Donjon du Louvre. Il est le premier à redécouvrir le rôle fondamental de l'écrit dans la gestion d'un Etat afin de mettre chacun devant ses responsabilités.

 

Pour asseoir son autorité, Richard préfère la pierre au papier et érige en vallée de Seine afin de protéger la Normandie un chateau qu'il veut imprenable Château Gaillard.

(6) Les Rois de France - Philippe Auguste
(6) Les Rois de France - Philippe Auguste

Philippe Auguste n'a qu'une idée en tête, récupérer la Normandie. Il va lancer quelques attaques sur la frontière de l'Île de France et de la Normandie. Richard va couvrir la frontière de fortifications (Verneuil-sur-Avre, Ivry-la-Bataille, Gisors, et surtout Château-Gaillard les Andelys). En un an de temps, Château-Gaillard a jailli de la falaise et constatant cette réalisation, Richard eut cette expression : "Quel est belle ma fille d'un an, quel château gaillard !"

 

Le 26 mars 1199, Richard assiège le château de Châlus Chabrol16,17 possession du vicomte Adémar de Limoges, dit Boson. Il est atteint par un carreau d'arbalète tiré par un chevalier de petite noblesse limousine, Pierre Basile. La flèche est retirée mais la gangrène s'installe. Richard meurt le 6 avril 1199, onze jours après sa blessure. Son corps est enterré en l’abbaye de Fontevraud (située non loin de Saumur), son cœur embaumé est enfermé dans un reliquaire et enterré dans un tombeau surmonté d'un gisant à son effigie en la cathédrale de Rouen. C'est en « remembrance d'amour pour la Normandie » qu'il en avait fait don à cette ville, et ses entrailles sont déposées en l'église (actuellement ruinée) du château de Châlus Chabrol. Jean succède à Richard sur le trône d’Angleterre. Cependant les territoires continentaux le rejettent, au début, lui préférant leur neveu Arthur de Bretagne, fils de leur frère Geoffroy, dont les droits sont techniquement meilleurs que les siens.

Gisant de Richard, à l’abbaye de Fontevraud (Anjou)

Gisant de Richard, à l’abbaye de Fontevraud (Anjou)

Gisants exposés dans l'abbatiale. Au premier plan, Isabelle d'Angoulême et Richard Cœur de Lion, au second plan, Aliénor d'Aquitaine et Henri II

Gisants exposés dans l'abbatiale. Au premier plan, Isabelle d'Angoulême et Richard Cœur de Lion, au second plan, Aliénor d'Aquitaine et Henri II

Jean se déclare vassal de Philippe.

 

Le Pape frappe le royaume de France d'interdit en excommuniant Philippe pour faire respecter les droits d'épouse d'Isambour (Ingeburge de Danemark) que Philippe a répudié. Plus aucun sacrement ne pouvait être célébré sur le territoire, ni messe ni baptême. Le royaume était paralysé.

Relevé de la plaque en bronze d'Isambour qui a été fondu sous la Révolution

Relevé de la plaque en bronze d'Isambour qui a été fondu sous la Révolution

Si consciencieux dans la structuration d'un Etat, Philippe l'a mit en péril en oubliant la raison. Il feint alors de reprendre Ingeburge comme épouse légitime.

Le mariage de Jean avec Isabelle, comtesse d'Angoulême alors que celle-ci était promise au comte de la Marche. Ce rapt d'une fiancée entraîne la convocation de Jean devant la Cour du Roi de France dans un procès féodal entre les deux féodaux. Mais le roi d'Angleterre n'honore pas le procès de sa présence. Il se voit confisqué de tous ses fiefs de France pour rupture du lien féodal en 1202. Il devient Jean sans Terre. Seule la justice de Dieu est au-dessus de la justice du Roi. C'est aussi une déclaration de guerre et Jean n'est pas Richard. Pendant six mois, Philippe assiège Château-Gaillard qui finti par céder le 6 mars 1204. La porte de la Normandie est grande ouverte et le Capétien prend possession de tous les territoires Plantagenêt au Nord de la Loire.

Seule l'Aquitaine reste encore hors de contrôle, mais Aliénor, elle, a tout donné, elle meurt à 80 ans le 1er avril 1204.

 

Quant à Philippe, il lui reste une dernière bataille pour qu'il prenne le nom du premier César et devienne Philippe Auguste.

Après avoir renversé le rapport de force avec le Plantagenêt, l'ambition de Philippe fait peur. Certains ont pris l'habitude de l'autonomie et voient d'un mauvais oeil le projet du Capétien, faire respecter la justice et le droit, créer un état monarchique et agrandir son territoire.

Malgré les efforts de l'Eglise et d'hommes comme Bernard de Clervaux, malgré les romans de Chrétien de Troyes, les Grands du Royaume n'agissent pas tous en fonction du Bien commun mais bien par ambition.

Philippe avait fait en sorte que son ami d'enfance, Renaud, soit à la tête du comté de Boulogne, fief stratégique. Pourtant celui-ci se range au côté du Plantagenêt. Jean sans Terre va aussi pouvoir compter sur le nouvel empereur germanique, Otton IV, son neveu.

Philippe Auguste envisage en 1204 d'envahir l'Angleterre comme l'avait fait Guillaume le Conquérant, l'ancêtre des Plantagenêt, Jules César au Ier s. av. J.-C. [et les Saxons au Ve]. Mais cela ne plaît pas aux Européens. Il va y avoir une coalition entre l'empereur germanique, le roi d'Angleterre et le comte de Flandre. Leur stratégie est de prendre l'armée française en tenaille. Jean débarque à la Rochelle et remonte vers le Nord tandis que des Flandres descendent les effectifs coalisés.

 

(6) Les Rois de France - Philippe Auguste

Philippe envoie son fils Louis VIII à la rencontre du roi d'Angleterre qui choisit la fuite à La Roche-Aux-Moines le 2 juillet 1214 (d'où l'expression il "file à l'anglaise"). L'important était de diviser les troupes royales. L'armée de Philippe est composée des fidèles, mais ils sont à un contre trois.

Le dimanche 27 juillet 1214, à Bouvines, malgré l'interdiction de combattre un dimanche, l'empereur décide d'engager le combat. Philippe décide de ne pas refuser le combat. La bataille s'engage à midi. Au centre du front, le roi s'expose. Un coup mortel est paré grâce au sacrifice d'un chevalier. Le flanc gauche de l'empereur cède en premier. Les Français se regroupent alors au centre. Otton échappe à la capture de justesse et réussit à fuir en laissant sa bannière à terre. Renaud reste le dernier, enchaînant sorties et replis derrière ses piétons armés de piques. Il veut combattre jusqu'à la mort mais son cheval est abattu. Grâce à un noyau dur de fidèles, la victoire du roi de France est totale, alors qu'il avait moins de soldats que l'ennemi. Renaud mourra treize ans plus tard dans la prison dans laquelle il fut jeté le lendemain de Bouvines.

(6) Les Rois de France - Philippe Auguste

Le Capétien incarne une notion qui est en train de naître : la Patrie. L’annonce de la victoire provoqua un tel "mouvement d’enthousiasme populaire", une si grande allégresse, qu’on y pourra lire la "naissance d’une nation" (Jacques Bainville, Histoire de France), la "naissance de la nation et de la royauté réunies" (Georges Duby, Le dimanche de Bouvines), "le premier sentiment de la nation France" (Max Gallo).  C'est après sa mort que, grâce aux romans de chevalerie, Richard exercera le même pouvoir en Angleterre.

 

[En juillet dernier, la célébration du 800e anniversaire de Bouvines a embarassé l'Oligarchie à tel point que le Premier ministre Manuel Valls s'est désisté au dernier moment, alors que plusieurs descendants de Philippe Auguste ont été réunis pour l'occasion.]

Philippe Auguste est le dernier "roi des Francs" et le premier "Roi de Fance".

 

Sous bien des aspects, ce n'est plus un roi féodal mais un roi moderne.

 

Il a fallu attendre des travaux assez poussés notamment au XXe siècle avec l'historien américain Baldwin, pour découvrir la personnalité de Philippe Auguste, qui était quelqu'un d'assez angoissé, d'assez émotif, ce qui ne l'a pas empêché d'être un grand roi. C'est une personnalité un peu paradoxale. C'est-à-dire que c'est quelqu'un qui n'est jamais serein et qui est quand même un bon gouvernant, un très bon chef, un chef militaire. Et c'est aussi quelqu'un qui a une vision administrative, ce qui fera la force des rois de France. Grâce à sa clairvoyance et à son formidable sens de l'organisation, il a renforcé les finances royales, et a pu superposer au réseau administratif féodal un réseau administratif d'Etat qui s'appuie sur le développement de l'écrit, face aux traditions orales. C'est tout le symbolisme du sacre et de l'hommage qui se concrétise sur le papier. Le Capétien représente la puissance publique.

 

[La mission de maintenir la paix et la justice

 

Philippe Auguste a doté le royaume d'instruments de compatabilité. Ceux-ci concernent essentiellement le domaine. Et s'il n'existe pas d'institution spécialisée - le Trésor est confié au temple -, la nécessité d'une administration raisonnée des finances publiques est reconnue et admise par tout l'entourage royal.

Philippe Auguste aurait donné d'autres conseils à ses fils. Ils ont pour mission de maintenir la paix et la justice, sans considération de rang, de statut ou de position. La justice a précisément été une des forces du souverain mourant. [...] Son jugement personnel se révélait rapide et droit, ce qui était, pour un seigneur justicier, une qualité hautement appréciée et faisait que les parties s'en rapportaient volontiers à lui.

L'institution des baillis, qu'il créa afin d'assurer les jugements en appel, et le succès qu'elle rencontra du fait de son efficacité renforcèrent le prestige du roi, en mesure d'exercer effectivement ses prérogatives souveraines sur une partie très importante du royaume.

Source: Les Derniers Jours des Rois, Sous la Direction de Patrice Gueniffey, Perrin, Le Figaro Histoire, Paris 2014, p. 75)]

 

Philippe Auguste meurt le 14 juillet 1223 après 43 ans de règne.

 

Philippe canalise les passions autour de la Patrie et l'amour de celle-ci. Il est le dernier roi à être sacré du vivant de son père. Sans Philippe, Saint-Louis, sont petit-fils, n'aurait sans doute pas pu rentrer de la manière dont il est rentré dans ces mêmes livres d'histoire.

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14 mars 2015 6 14 /03 /mars /2015 10:00
Commémorations du 19 mars 1962 - La République universelle signe son crime : ci-gît la mort de la France

La République ne célèbre pas Waterloo. Elle vient de refuser la pièce de deux euros destinée à commémorer le bicentenaire de Waterloo frappée par la Belgique [1]. Pourtant elle célèbre le 19 mars 1962 [2], ce cessez-le-feu unilatéral qui sur le papier est une défaite française contre l'Algérie alors que l'armée française était victorieuse sur le terrain, et qui a donné permission à nos ennemis d’assassiner des militaires et des civils français en toute impunité. On sait aujourd'hui que les tueries, enlèvements, assassinats et massacres ont continué avec encore plus de violence après le 19 mars 1962. Dès le jour même, le 19 mars et les suivants, 18 jeunes soldats français ont été assassinés par le FLN et 39 ont été blessés qui, pour la plupart, décèderont dans les jours qui suivent. 90 autres ont disparu et les 239 qui étaient retenus prisonniers par l’ALN ne nous ont jamais été rendus. Nous sommes toujours, 53 ans plus tard, sans aucune nouvelle de ces jeunes militaires français, morts pour qui ? Pour quoi ? Morts pour rien ! Enterrés nulle part ! Honorés par personne ! Regrettés et pleurés que par leurs proches !

Depuis ce 19 mars 1962, la France a abandonné une grande partie de son territoire et de ses richesses, trois départements, plus le Sahara, et l’armée française a [je le sais par un officier qui l'a vécu et me l'a raconté. NDLR] connu la plus ignoble forfaiture de son histoire : être restée l’arme au pied et avoir laissé assassiner sous ses yeux, et par ordre, des dizaines de milliers de pieds-noirs et de harkis.

Des rapports officiels révélés récemment apportent la preuve qu’après le 19 mars 1962, des centaines d’êtres humains ont été réduits à l’esclavage dans les mines de fer de Miliana et de nombreuses femmes livrées comme chair à soldat dans les bordels militaires. Ce samedi 14 mars, Robert Ménard, maire de Béziers, débaptise la rue du 19 mars 1962 [3] et la rebaptise rue Hélie Denoix de Saint-Marc, ce commandant qui en avril 1961, choisit de protester contre la politique algérienne du Général De Gaulle d'aller vers l'indépendance de l'Algérie et tenta de renverser la République "française" (putsch des généraux). Sorti de prison en 1966, l'homme devint un écrivain à succès, estimé par de grands intellectuels dont Jean d'Ormesson. [4]

D'un côté la République se refuse donc à célébrer la défaite de Napoléon à Waterloo qui pourtant fermait le cycle infernal des guerres de la Révolution, ouvrait "un siècle relativement pacifique" qui a duré jusqu'en 1914 (P. Gueniffey) [5], allait permettre aux Européens de souffler un peu et de se reposer du messianisme révolutionnaire, et aurait donc, à ce titre, droit à des commémorations. De l'autre, elle célèbre la défaite de 1962, qui mettait fin à la Guerre d'Algérie (1954-1962). Cette guerre d'Algérie, engagée par un gouvernement de gauche en 1954 [6] et terminée par un gouvernement de droite en 1962 [7], fermait le cycle de la colonisation initiée par la république elle-même et un gouvernement de gauche dans les années 1880 ("le droit et même le devoir à civiliser les races inférieures" selon le mot du franc-maçon Jules Ferry, auquel François Hollande élu président de la République rendit hommage en mai 2012) allait ouvrir le cycle de l'immigration "chance pour la France" et de l'"enrichissement multiculturel".

Comment expliquer le refus d'un côté à commémorer la défaite de 1815 et de l'autre l'empressement à célébrer la défaite de 1962 ?

Il n'y a qu'une seule explication envisageable : la métamorphose de la chenille révolutionnaire de 1789 en papillon sous l'influence du communisme internationaliste trotskyste dans les années 1960, a vu la république changer d'aspect en passant d'une république encore relativement "française" (en 1815) - république qu'il s'agit donc de proscrire dans l'esprit des mondialistes en l'ensevelissant dans l'oubli - à une république universelle et internationale après 1962, objet de toutes les commémorations et attentions. C'est cette métamorphose qui est célébrée et rien d'autre.

La Tabula rasa de 1789, intrinsèquement négatrice de l'identité chrétienne de la France, le renversement de la table ayant fait son oeuvre, la république pouvait laisser de côté la république encore relativement "française" de 1815, se transformer en République universelle après 1962, selon le voeu pieux de la franc-maçonnerie, et se consacrer aujourd'hui à ne célébrer que cette métamorphose.

Commémorations du 19 mars 1962 - La République universelle signe son crime : ci-gît la mort de la France

Le greffon révolutionnaire qui entretemps, tel un vampire, se sera nourri du sang et de la vie de millions de soldats non pas "morts pour la France", mais "morts pour rien" (!), comme en Algérie, se sera assez développé pour se permettre enfin de se débarrasser de son hôte et signer son crime : ci-gît la mort de la France.

 

Notes

 

 

[1] Discrètement, la diplomatie française s'est arrangée pour que la Belgique renonce à sa pièce de deux euros commémorative du bicentenaire de la bataille de Waterloo qui s'est soldée par une cuisante défaite de la République face à une coalition européenne et la mort de 55 000 personnes en une journée. Près de 180.000 pièces avaient déjà été fabriquées. En privé, un diplomate explique que Bercy a approché le ministère belge des finances pour manifester son «manque d'enthousiasme» à l'idée que soit célébrée, par le biais de la monnaie commune, l'une des plus grandes défaites militaires de la France. La Belgique, comme souvent est partagée. Le royaume n'existait pas encore en 1815. Mais à Waterloo, ses futurs citoyens ont combattu des deux côtés. La commémoration de la bataille de Waterloo y est prévue durant quatre jours à partir du 18 juin prochain et devrait attirer environ 200.000 personnes d'après les organisateurs. Le budget total pour l'organisation des évènements avoisinera 5 millions d'euros. Sources: La France refuse la pièce frappée par la Belgique pour le bicentenaire de Waterloo, 7sur7.be, 12/03/2015 ; Waterloo sur une pièce de 2 euros, la France étrille l’idée de la Belgique, L'Avenir.net, 11/03/2015 ; Comment la France a enterré la nouvelle pièce de 2 euros belge, La Tribune.fr, 13/03/2015 ; Waterloo continue de diviser les Européens, Le Figaro, 12/03/2015.

[2] La commémoration du 19 mars 1962 adoptée par le Sénat, Le Figaro, Par Guillaume Perrault, Mis à jour le 08/11/2012 à 22:08 Publié le 08/11/2012 à 20:55. La proposition de loi du PS consacre une journée nationale du souvenir «des victimes civiles et militaires de la guerre d'Algérie».

[3] La France n’a pas à célébrer le 19 mars 1962 ! Boulevard Voltaire, Par Manuel Gomez

[4] Béziers : Manuel Valls fustige «la nostalgie de l'Algérie française», Le Figaro, Publié le 14/03/2015 à 12:12

[5] Gueniffey : la France, Waterloo et les pièces de deux euros, Le Figaro, 13/03/2015

[6] Président du Conseil depuis le 18 juin 1954, le Radical-Socialiste Pierre Mendès France affirme que "l'on ne transige pas quand il s'agit de défendre la paix intérieure de la nation, l'unité et l'intégrité de la République". Son ministre de l'Intérieur, François Mitterrand, en visite en Algérie le 12 novembre 1954, juste après le début de l’insurrection armée, réagit brutalement à son arrivée: "l’Algérie, c’est la France !, la négociation avec les rebelles c'est la guerre." (La Toussaint rouge, Historia Guerre d'Algérie Magazine, 22 septembre 1972.)

[7] Gouvernement du général de Gaulle.

 

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11 mars 2015 3 11 /03 /mars /2015 15:47
830e anniversaire de la naissance au Ciel du Roi Baudouin IV de Jérusalem (1161-1185)

 

Mars 1185 - Mars 2015 : la France honore Baudouin IV de Jérusalem

 

L'Association Oriflamme fête le 830ème anniversaire du rappel à Dieu du Roi Baudouin IV de Jérusalem (1161-1185), surnommé "le Roi lépreux", par une messe de Requiem qui aura lieu samedi 14 mars 2015 à 10h en l'église Saint Eugène à Paris, 4 rue Sainte-Cécile dans le 9ème arrondissement.

Baudouin IV est un modèle de courage et de dévouement. Roi de terre Sainte frappé par l'épreuve de la maladie, il nous rappelle, par l'exemple de sa vie, les vertus de dévouement pour le bien commun et de courage face aux épreuves. Le souvenir de son oeuvre, loin de constituer une nostalgie désuète, est un témoignage vivant d'espérance et de volonté face aux défis de notre temps.

L'association Oriflamme, née en 2012, met en place des commémorations et conférences portant sur les grands personnages qui ont fait notre histoire chrétienne, en se référant essentiellement à la période du Moyen Age. Exemple : la procession du samedi 17 mai 2014 en l'honneur de Saint Louis a ainsi réuni, de l'église Saint-Eugène à la cathédrale Notre-Dame de Paris, près de 2000 personnes. Attestant ainsi sa raison d'être.

Eric Muth

 

Source: http://www.vexilla-galliae.fr/royaute/vie-des-royalistes/1265-mars-1185-mars-2015-la-france-honore-baudouin-iv-de-jerusalem

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11 mars 2015 3 11 /03 /mars /2015 08:57

Suite du documentaire Les Rois de France (Merapi productions, AB productions, La Bibliothèque nationale de France)

La passation de pouvoir entre Carolingiens et Capétiens s'est passée sur deux siècles.

 

Les Capétiens vont régner de 987 à 1848.

 

L'avènement du Capétien

 

Un nouvel empereur va succéder à Charlemagne en 814. Aux morts successives de ses fils aînés, le Grand Charles répond par la nomination de son dernier fils, Louis, au titre impérial dès 813, mais le premier Louis de l'histoire de France, va rechercher une légitimité sans délégation: il organise son sacre trois ans plus tard (5 octobre 816) en faisant venir le Pape à Reims. Il devient ainsi le premier monarque sacré à Reims.

Louis Ier dit le Pieux (parfois "le Débonnaire"), Rois des Francs et Empereur d'Occident est le premier monarque français à être sacré à Reims (816). Louis est un nom qui dérive de la latinisation du nom franc, Clovis [Chlodowig, l''Illustre guerrier", c'est la signification du nom de Cholodo-wig. (C. GUENOT, Le Fils aîné de l'Eglise, Epopées de l'histoire de France, Vve H. Casterman, Tournai 1883, p. 15.)]

Louis Ier dit le Pieux (parfois "le Débonnaire"), Rois des Francs et Empereur d'Occident est le premier monarque français à être sacré à Reims (816). Louis est un nom qui dérive de la latinisation du nom franc, Clovis [Chlodowig, l''Illustre guerrier", c'est la signification du nom de Cholodo-wig. (C. GUENOT, Le Fils aîné de l'Eglise, Epopées de l'histoire de France, Vve H. Casterman, Tournai 1883, p. 15.)]

Louis Ier le Pieux, Carolingien, est donc ainsi directement rattaché au premier mérovingien, premier roi du peuple franc unifié. 

Généalogie des Carolingiens

Généalogie des Carolingiens

Les Carolingiens du maire du Palais Pépin de Landen (640) à Louis V le Fainéant (986-987)

Les Carolingiens du maire du Palais Pépin de Landen (640) à Louis V le Fainéant (986-987)

Invasions vikings

Charles II le Chauve (Roi de Francie occidentale 843-877)

Charles II le Chauve (Roi de Francie occidentale 843-877)

Au traité de Verdun (843) qui fut le partage de l'état franc entre les trois fils survivants de Louis le Pieux, petits-fils de Charlemagne, Charles II le Chauve reçut la Francia occidentalis, Francie occidentale (France), Lothaire la Francia media, France médiane (Frise, Lotharingie, Bourgogne, Provence, Lombardie) et le titre impérial; Louis le germanique reçut la Francia orientalis, Francie orientale (Germanie: Saxe, Austrasie, Thuringie, Alémanie, Bavière).

Le traité fut un compromis qui affaiblissait considérablement la portée de l'idée impériale. L'identité qui avait existé sous Charlemagne et Louis le Pieux entre l'Empire et l’État franc disparaissait. L'unité impériale ne subsistait plus qu'en théorie ; son universalité cessait de correspondre à la réalité puisque l'empereur ne gouvernait plus en fait que le tiers de la chrétienté occidentale.

Après l'effritement de l'empire carolingien, une nouvelle dynastie va s'installer durablement sur le trône de la partie occidentale de l'état créé par Charlemagne.

La consolidation du pouvoir des capétiens se fera durant un 11e siècle marqué par deux évènements qui vont influencer durablement la société du Moyen Âge : la conquête de l'Angleterre par Guillaume le Conquérant (1066) et la première croisade (1095).

 

L'héritage de Charlemagne ne peut s'étendre davantage, il manque de dynamisme. Tout l'Occident est chrétien, le seul défi est de défendre les acquis.

 

Invasions vikings (IXe-Xe siècle)

Invasions vikings (IXe-Xe siècle)

Défendre les acquis. Car des embarcations légères, très profilées, dont le fond permet de naviguer en eau douce comme d'affronter des lames de fonds, commencent à apparaître régulièrement sur tout le pourtour du littoral de la terre des Francs. Des monstres en guide de proues, ces navires sont manoeuvrés par des hommes qui cherchent à survivre. Ce sont les Vikings.

On va voir surgir des embarcations rapides, nerveuses, légères, que l'on va nommer à tord les "drakkars", parce que le drakkar n'est que la tête du dragon qui est à l'avant. A bord de ces bateaux il y a des géants blonds, des marchands devenus pillards, remarquables marins, des païens qui cèdent à la tentation de toutes les richesses, qui s'accumulent dans les monastères de Grande-Bretagne et de Francie. Ils adorent Odin.

 

Expansion viking au Xe siècle en Francie. Source image : https://fr.wikipedia.org/wiki/Expansion_viking#/media/Fichier:Viking_Expansion.svg

Dans le royaume de Charles II le Chauve, un parti d'aristocrates se forme autour de Robert le Fort, [ancêtre d'Hugues Capet] comte de Tours et d'Angers, maître d'abbaye considérable, et grand chef de guerre. En 864, en échange de sa fidélité, Charles le Chauve lui confie le comté de Paris. Robert meurt deux ans plus tard en combattant les Normands, mais Robert aura une descendance.

Raids musulmans en Méditerranée

 

Le jour de Noël 875, à Rome, 75 ans exactement après le couronnement de Charlemagne, Charles le Chauve est couronné empereur par le Pape. Ce dernier l'appelle au secours deux ans plus tard afin de défendre Rome contre la menace des Musulmans (877). Si les raids des Vikings affectent le Nord de l'Europe et tout le littoral atlantique, la Méditerranée est sous la menace permanente des raids musulmans.

 

Les Sarrasins en Provence (889-975)

 

Vingt pirates partis d'Espagne sur un frêle bâtiment, et se dirigeant sur les côtes de Provence, furent poussés par la tempête dans le golfe de Grimaud, autrement appelé le golfe de Saint-Tropez, et débarquèrent au fond du golfe sans être aperçus. Autour de ce bras de mer s'étendait au loin une forêt qui subsiste en partie, et qui était tellement épaisse que les hommes les plus hardis avaient de la peine à y pénétrer. Vers le nord était une suite de montagnes s'élevant les unes au-dessus des autres, et qui, arrivées à une distance de quelques lieues, dominaient une grande partie de la basse Provence.

Les Sarrasins envahirent pendant la nuit le village le plus rapproché de la côte, et, massacrant les habitants, se répandirent dans les environs. Quand ils furent arrivés sur les hauteurs qui couronnent le golfe du côté du nord, et que de là, leur regard s'étendit d'un côté vers la mer et de l'autre vers les Alpes, ils comprirent tout de suite la facilité qu'un tel tel lieu devait leur offrir pour un établissement fixe. La mer leur ouvrait son sein pour recevoir tous les secours dont ils auraient besoin; la terre leur livrait passage dans des contrées qui n'avaient pas encore été pillées et où il n'avait été pris aucune mesure de défense. L'immense forêt qui environnait les hauteurs et le golfe leur assurait une retraite au besoin.

Les pirates firent un appel à tous leurs compagnons qui parcouraient les parages voisins; ils envoyèrent demander du secours en Espagne et en Afrique; en même temps ils se mirent à l'ouvrage, et en peu d'années les hauteurs furent couvertes de châteaux et de forteresses. Le principal de ces châteaux est nommé par les écrivains du temps Fraxinetum, du nom des frênes qui probablement occupaient les environs. On croit que Fraxinetum répond au village actuel de la Garde-Frainet, qui est situé au pied de la montagne la plus avancée du côtée des Alpes... Quand les travaux furent terminés, les Sarrasins commencèrent à faire des courses dans le voisinage. Ils n'eurent garde d'abord de s'éloigner du centre de leurs forces; mais bientôt les seigneurs les associèrent à leurs querelles particulières. Ils aidèrent à abattre les hommes puissants; ensuite, se débarrassant de ceux qui les avaient appelés, ils se déclarèrent les maîtres du pays; en peu de temps une grande partie de la Provence se trouva exposée à leurs ravages. La terreur devint bientôt générale; le plat pays étant dévasté, les Sarrasins s'avancèrent vers le chaîne des Alpes.

Les Sarrasins occupèrent le mont Cenis et le mont Saint-Bernard, devinrent les maîtres de tous les passages des Alppes, et de là pillèrent le Dauphiné, le Piémont, le Montferrat, le Valais, la Suisse, les Grisons, la Savoie, la Maurienne, la Ligurie. Ils prirent et saccagèrent Turin, Marseille, Aix, Sisteron, Gap, Embrun, Gênes, Fréjus, Toulon, Grenoble, etc., égorgeant vifs les habitants, et dévastant tellement le pays, que les loups en devinrent à peu près les maîtres.

Hugues, devenu comte de Provence, s'était rendu en Italie pour y disputer la couronne du royaume de Lombardie. Les cris de ses sujets l'ayant enfin rappelé de côté des Alpes, il annonça l'intention de chasser entièrement les Sarrasins. Il s'agissait de s'emparer d'abord du château Fraxinet, à l'aide duquel les Sarrasins se maintenaient en relation avec l'Espagne et l'Afrique et d'où ils dirigeaient leurs expéditions dans l'intérieur des terres. Comme il fallait que ce château fut attaqué par la mer et par terre, Hugues envoya demander une flotte à l'empereur de Constantinople, son beau-frère; il demandait aussi du feu grégeois, l'arme alors la plus efficace pour combattre les flottes sarrasines.

En 942, la flotte grecque jeta l'ancre dans le golfe de Saint-Tropez; en même temps Hugues accourut avec une armée. Les Sarrasins furent attaqués avec la plus grande vigueur; leurs navires et tous leurs ouvrages du côté de la mer furent détruits par les Grecs. De son côté, Hugues força l'entrée du château et obligea les barbares à se retirer sur les hauteurs voisines. C'en était fait de la puissance des Sarrasins en France; mais tout à coup Hugues apprit que Béranger, son rival à la couronne d'Italie, qui s'était enfui en Allemagne, se disposait à lui disputer le trône. Alors, ne songeant plus aux maux qui pesaient sur ses malheureux sujets, il renvoya la flotte grecque, et maintint les Sarrasins dans toutes les positions qu'ils occupaient, à la seule condition que, s'établissant au haut du grand Saint-Bernard et sur les principaux sommets des Alpes, ils fermeraient le passage de l'Italie à son rival... Dès ce moment les Sarrasins montrèrent encore plus de hardiesse qu'auparavant, et l'on dut croire qu'ils étaient établis pour toujours dans le coeur de l'Europe. Non seulement ils épousèrent les femmes du pays, mais ils commencèrent à s'adonner à la culture des terres. Les princes de la contrée se contentèrent d'exiger d'eux un léger tribut; ils les recherchaient même quelquefois. Quant à ceux qui occupaient les hauteurs, ils donnaient la mort aux voyageurs qui leur déplaisaient, et exigeaient des autres une forte rançon. "Le nombre des chrétiens qu'ils tuèrent fut si grand, dit Liutprand, que celui-là seul peut s'en faire une idée, qui a inscrit leurs noms dans le livre de vie."...

Vers l'an 960, les Sarrasins furent chassés du mont Saint-Bernard. L'histoire ne nous a pas conservé les détails de cet évènement... En 965, ils furent chassé du diocèse de Grenoble. Les évêques de cette ville s'étaient retirés à Saint-Donat, du côté de Valence. Cette année, Isarn, impatient de reprendre possession de son siège, fit appel aux nobles, aux guerriers et aux paysans de la contrée; et, comme les Sarrasins occupaient les cantons les plus fertiles et les plus riches, il fut convenu que chaque guerrier aurait sa part des terres conquises, à proportion de sa bravoure et de ses services. Après l'expulsion des Sarrasins de Grenoble et de la vallée du Graisivaudan, le partage eut lieu, et certaines familles du Dauphiné, telles que celle des Aynard ou Montaynard, font remonter l'origine de leur fortune à cette espèce de croisade.... Tous ces succès annonçaient que les affaires des Sarrasins allaient en déclinant, et ne faisaient que qu'irriter davantage le désir qui se manifestait de tous les côtés d'en être tout à fait délivré.

En 936, l'empereur Othon annonça l'intention de se dévouer à une entreprise si patriotique; mais il mourut sans avoir rempli sa promesse, et il fallut que les Sarrasins se portassent à un nouvel attentat, pour que les peuples se décidassent à en faire eux-mêmes justice.

Un homme s'était rencontré, qui jouissait d'une considération universelle; il suffisait de le nomme pour attirer le respect des nations et des rois. C'est saint Mayeul, abbé de Cluny, en Bourgogne. Telle était la réputation qu'il avait acquise par ses vertus, qu'on songea un moment à le faire pape. Mayeul s'était rendu à Rome pour satisfaire sa dévotion aux églises des saints et pour visiter quelques couvents de son ordre. A son retour, il s'avança par le Piémont et résolut de rentrer dans son monastère par le mont Genèvre et les vallées du Dauphiné. En ce moment, les Sarrasins étaient établis entre Gap et Embrun, sur une hauteur qui domine la vallée du Drac, en face du pont d'Orcières. A l'arrivée du saint au pied de la chaîne des Alpes, un grand nombre de pélerins et de voyageurs, qui depuis longtemps attendaient une occasion favorable pour franchir le passage, curent qu'il ne pouvait pas s'en présenter de plus heureuse. La caravane se met donc en route; mais, parvenue sur les bords du Drac, dans un lieu resserré entre la rivière et les montagnes, les barbares, au nombre de mille, qui occupaient les hauteurs, lui lance une grêle de traits. En vain les chrétiens, pressés de toutes parts, essaient de fuir; la plupart sont pris, entre autres le saint; celui-ci est même blessé à la main en voulant garantir la personne d'un de ses compagnons. Les prisonniers furent conduits dans un lieu écarté; la plupart étant de pauvres pélerins, les barbares s'adressèrent au saint, comme au personnage le plus important, et lui demandèrent quels étaient ses moyens de fortune. Le saint répondit ingénument que, bien que né de parents forts riches, il ne possédait rien en propre, parce qu'il avait abandonné toutes ses possessions pour se vouer au service de Dieu; mais qu'il était abbé d'un monastère qui avait dans sa dépendance des terres et des biens considérables. Là-dessus, les Sarrasins, qui voulaient avoir chacun leur part, fixèrent la rançon de lui et du reste des prisonniers à 1 000 livres d'argent, ce qui faisait environ 80 000 francs de notre monnaie actuelle. En même temps, le saint fut invité à envoyer le moine qui l'accompagnait à Cluny, pour apporter la somme convenue. Ils fixèrent un terme passé lequel tous les prisonniers seraient mis à mort.

 

Au départ du moine, le saint lui remit une lettre commençant par ces mots :

 

"Aux Seigneurs et aux frères de Cluny, Mayeul, malheureusement captif et chargé de chaînes; les torrents de Bélial m'ont entouré, et les lacets de la mort m'ont saisi." (Rois, 22, 5.)

 

A la lecture de cette lettre, toute l'abbaye fondit en larmes. On se hâta de recueillir l'argent qui se trouvait dans le monastère; on dépouilla l'église du couvent de ses ornements; enfin l'on fit un appel à la générosité des personnes pieuses du pays, et on parvint à réunir la somme exigée. Elle fut remise aux barbares un peu avant le terme fixé, et tous les prisonniers furent mis en liberté.... La prise de saint Mayeul a eu lieu en 972. Cet évènement causa une sensation extaordinaire; de toutes parts les chrétiens, grands et petits, se levèrent pour demander vengeance d'un pareil attentat.

Il y avait alors aux environs de Sisteron, dans le village des Noyers, un gentihomme appelé Bobon ou Beuvon, qui déjà plus d'une fois avait signalé son zèle pour l'affranchissement du pays. Profitant de l'enthousiasme général, et ralliant à lui les paysans, les bourgeois, en un mot tous les hommes amis de la religion et de la patrie, qui voulaient prendre part à la gloire de l'entreprise, il fit construire non loin de Sisteron, un château situé en face d'une forteresse occupée par les Sarrasins. Son intention était d'observer de là leurs mouvements et de profiter de la première occasion pour les exterminer. Dans l'ardeur de son zèle pieux, il avait fait voeu à Dieu, s'il venait à bout de chasser les barbares, de consacrer le reste de sa vie  àla défense des veuves et des orphelins. En vain les Sarrasins essayèrent de le troubler dans ses efforts; toutes leurs tentatives furent inutiles. La montagne où s'élevait le château occupé par les Sarrasins se nommait Petra impia, et s'appelle encore dans le langage du pays Peyro impio. Peu de temps après, le chef des Sarrasins de la forteresse ayant enlevé la femme de l'homme préposé à la garde de la porte, celui-ci, pour se venger, offrit à Bobon de leui en faciliter l'entrée. Une nuit, Bobon se présenta avec ses guerriers et entra sans obstacle. Tous les Sarrasins qui voulurent résister, furent passés au fil de l'épée; les autres, y compris le chef, demandèrent le baptême....

 

Le Dauphiné était libre; la Provence ne pouvait tarder de l'être aussi. Il est bien à regretter que l'histoire ne nous ait presque rien transmis sur un évènement aussi intéressant. On sait seulement qu'à la tête de l'entreprise était Guillaume, comte de Provence.... Guillaume se faisait chérir de ses sujets par son amour de la justice et de la religion. Faisant un appel aux guerriers de la Provence, du Bas-Dauphiné et du Comté de Nice, il se disposa à attaquer les Sarrasins qui se voyaient poursuivis dans leurs derniers retranchements, réunirent toutes leurs forces et descendirent de leurs montagnes en bataillons serrés. Il paraît qu'un premier combat fut livré aux environs de Draguignan, dans le lieu appelé Tourtour, là où il existe encore une tour qu'on dit avoir été élevée en mémoire de la bataille. Les Sarrasins ayant été battus, se réfugièrent dans le château fort. Les chrétiens se mirent à leur poursuite. En vain les barbares opposèrent la plus vive résistance; les chrétiens renversèrent tous les obstacles. A la fin, les barbares, étant pressés de toutes parts, sortirent du château pendant la nuit et essayèrent de se sauver dans la forêt voisine. Poursuivis avec vigueur, la plupart furent tués ou faits prisonniers, le reste mit bas les armes.

 

(Reinaud, Invasions des Sarrasins en France, p. 158, en lecture libre sur Gallica, le site de la Bibliothèque nationale de France. In L'Histoire de France racontée par les contemporains, Extraits des chroniques, des mémoires et des documents originaux, L. DUSSIEUX, Firmin Didiot Frères, Fils et Cie Libraires, tome second, Paris 1861, p., 71-78.)

(5) Les Rois de France - Hugues Capet

Charles le Chauve est couronné empereur en 875, mais il meurt deux ans plus tard en voulant défendre un territoire qu'il ne peut plus contrôler. L'Etat auquel on donne le nom de Francie s'est réorganisé non plus autour d'Aix-la-Chapelle (l'ancienne capitale de l'empire de Charlemagne), mais autour de Reims, de Paris et de Saint-Denis : c'est là que Robert le Fort s'est implanté solidement, et que ses successeurs Capétiens sauront faire fructifier l'héritage.

Hugues Capet, c'est celui qui a été choisi, celui qui a été élu par les Grands pour devenir Roi en 987. Il est de la famille des Robertiens. Son ancêtre remonte au milieu du IXe siècle, à Robert le Fort, qui avait lutté contre les Normands, est mort victorieux (en 866), et est considéré comme un martyr. Ce Robert le Fort est le vrai fondateur de la dynastie capétienne. Ses fils ont régné sur le royaume, car la royauté était alors élective [Eudes, fils aîné de Robert, est élu roi des Francs par les Grands en 888 à Compiègne. Il comprit que tous les Grands n'étaient pas mûrs pour: il faudra encore attendre cent ans pour qu'un autre robertien, un autre duc de France, devienne roi. Une opposition légitimiste subsistait dans l'Est, un descendant de Charlemagne la ralliait (Charles III le Simple, Roi des Francs (898-922).] Robert le Fort est le premier des Robertiens (Capétiens) qui, le premier, va avoir l'idée de la supériorité des ducs "de France" - c'est-à-dire on pourrait dire d'Île-de-France -, qui sont au centre du royaume, et qui sont en quelque sorte, candidats à la création d'une monarchie française qui sera héritière à la fois de la Gaule romaine et des royaumes francs. Et tout cela va créer véritablement la "monarchie française". La Francie ne sera jamais, elle, morcellée, elle aura toujours un unique souverain

 

 

Eudes (Roi des Francs 888-898) - Couronnement du roi Eudes (enluminure des Grandes Chroniques de France)

Eudes (Roi des Francs 888-898) - Couronnement du roi Eudes (enluminure des Grandes Chroniques de France)

Denier de Toulouse sous Eudes de France

Denier de Toulouse sous Eudes de France

Le sacre d'Hugues Capet

 

Les années qui suivent la mort de Charles le Chauve (877) sont celles où les Vikings lancent leur campagnes les plus dévastatrices.

 

Les descendants de Charles le Chauve se succède rapidement jusqu'à Charles le Gros (Roi de Francie, 884-888), fils de Louis le Germanique.

 

Si le Carolingien défait quelques fois les Vikings, il essaie de trouver un compromis quand ils menacent Paris.

 

 

Eudes, Comte de Paris, Fils de Robert le Fort, sauve Paris des Vikings en 885

Eudes, Comte de Paris, Fils de Robert le Fort, sauve Paris des Vikings en 885

C'est Eudes, Comte de Paris et fils de Robert le Fort qui résiste à l'envahisseur viking en 885 et sauve la ville de Paris du péril normand. Face à la menace païenne, le peuple chrétien ne semble plus pouvoir compter sur les Carolingiens. Si ces Vikings peuvent être considérés comme une punition divine, les descendants de Charlemagne ne passent pas le test avec succès. A la mort de Charles le Gros en 888, c'est Eudes, que les Grands du Royaume choisissent pour Roi, alléguant que l'héritier carolingien, Charles V, est trop jeune pour régner. Eudes est sacré roi des Francs à Compiègne, puis de nouveau couronné à Reims le 13 novembre.

(5) Les Rois de France - Hugues Capet

Eudes est enseveli à Saint-Denis en 888.

 

C'est un carolingien, Charles le Simple, qui en 911 règle le problème viking en cédant à leur chef, Rollon, une partie de son territoire: Rouen. En échange, Rollon devient Robert en se baptisant et en rendant hommage au roi de France. Les Vikings installés à Rouen deviendront les "Normands" et cette région (l'ancienne "Neustrie"), la "Normandie". Les Normands, selon la grande tradition voulant que les conquérants soient conquis, sont devenus ensuite tellement gallo-romains qu'ils envisageaient des extensions du royaume franc en Angleterre.

En 922, le carolingien Charles III le Simple est purement déposé. Ce qui permet un retour rapide sur le trône de Roi des Francs du Comte de Paris Robert Ier frère de Eudes. Dès 923, celui-ci descendant sans héritier en âge de gouverner, on préfère même faire passer la Couronne sur la tête du duc de Bourgogne, Raoul (923-936), plutôt que sur un carolingien capable d'incarner le pouvoir à l'échelle de la Francie. Finalement, la Couronne revient à un carolingien, Louis IV d'Outremer (en 936). Les trois derniers carolingiens à se succéder vont renforcer le pouvoir royal. L'ordre de Cluny prospère, apportant des réponses au chaos de ce siècle.

(5) Les Rois de France - Hugues Capet

A l'est du Rhin apparaît un empereur germanique. Otton Ier dit Otton le Grand est élu par ses troupes et couronné empereur des Romains par le pape en 962.

 

Pendant ce temps, les Normands ont appris le français et ne parlent plus que cette langue. L'administration du duché est exemplaire. Ce territoire est en paix.

 

Le dernier carolingien, Louis V, meurt à 20 ans d'une mauvaise chute de cheval, le 22 mai 987. Une dernière fois plutôt que d'élire son oncle carolingien qui aurait pu devenir puissant, les Grands se tournent vers le duc de France, Hugues, que l'on surnomme Capet, en raison de la cape qu'il aime porter.

Hugues Capet. La dynastie des Capétiens (987-1848) doit son nom à Hugues Capet élu roi des Francs en 987. Capet parce qu'il portait toujours une cape. C'était son surnom. Surnom qui restera jusqu'à la Révolution, puisque les révolutionnaires diront à Louis XVI "monsieur Capet".

Hugues Capet. La dynastie des Capétiens (987-1848) doit son nom à Hugues Capet élu roi des Francs en 987. Capet parce qu'il portait toujours une cape. C'était son surnom. Surnom qui restera jusqu'à la Révolution, puisque les révolutionnaires diront à Louis XVI "monsieur Capet".

Hugues Capet est élu roi parce qu'il semble plus facilement manipulable et moins puissant. Son royaume se cantonne à l'Île de France. Le roi est le duc de France, le chef d'une famille noble un peu plus prestigieuse que les autres, mais à peine plus prestigieuse. On est loin de la grande organisation carolingienne. Avec les Capétiens, on arrive dans cette époque de la suprématie des seigneurs, les uns par rapport aux autres.

Francie et domaine royal sous Hugues Capet en 987

Francie et domaine royal sous Hugues Capet en 987

Le roi se cantonne à ce que l'on appelle son domaine, le domaine royal, c'est-à-dire l'ensemble des terres et des droits sur lesquels il exerce son pouvoir directement. C'est sa principauté, mais autour il y en a d'autres. Autrement dit on a un royaume qui est composé d'une mosaïque de principautés, et ces principautés fonctionnent exactement de la même façon que la principauté royale, d'est-à-dire qu'on y a institué des princes qui s'y transmettent le pouvoir de façon désormais héréditaire, à partir du XI siècle. Ces princes connaissent une structure de nature féodo-vassalique. Ils concèdent une partie de leur territoire à des seigneurs qui sont inférieurs dans le rang de l'aristocratie. Ils leur concèdent des fiefs avec un droit de justice, un château.

 

 

Les principautés à l'intérieur du Royaume d'Hugues Capet en 987.

Les principautés à l'intérieur du Royaume d'Hugues Capet en 987.

Comment gouverne le roi ?

 

Le roi ne gouverne pas par des actes législatifs, mais par des chartes ponctuelles données à tel ou tel seigneur laïque ou ecclésiastique. Ces chartes sont le fruit d'une requête, le plus souvent et la charte comporte le plus souvent un don. C'est-à-dire que l'acte politique du roi est d'abord un acte de générosité, octroyé par le roi. Cela implique que la Cour du roi ait un réceptacle de demandes, de requêtes, venant de la part essentiellement des aristocrates, mais la Cour des Capétiens, des premiers Capétiens surtout, est un lieu assez libre d'accès pour la personne royale.

 

Le roi va s'entourer petit à petit d'un Chancelier pour ses écritures, d'un connétable, d'un sénéchal, de bouteillers. Ces offices mêlent intimement le privé et le public. Ce sont des offices de maison.

 

Des Capétiens directs, puis aux Valois et aux Bourbons, pendant huit siècles ce royaume allait s'agrandir en ayant à sa tête un représentant de la même famille, celle dont le représentant avait été choisi parce qu'il semblait faible. Les Capétiens vont régner jusqu'en 1848 avec Louis-Philippe (Orléans). Cette dynastie capétienne durera très longtemps. Elle est le fruit du passage de la Gaule romane à la gaule franque. C'est là que se construit la France. Et en 987, avec Hugues Capet, on peut parler de France.

 

Mais plutôt que conquérir comme Clovis et Charlemagne, Hugues avait choisi de durer. Il instaure dès Noël 987, la règle de la promogéniture mâle, en associant au trône son fils aîné, Robert II. Pendant plus de deux siècles, les successeurs d'Hugues Capet utiliseront cette stratégie afin de stabiliser le pouvoir et de pérenniser la dynastie. Ils feront sacrer de leur vivant leur fils aîné. Et ainsi vont correspondre pour les siècles à venir, deux idées, l'idée de la France et l'idée du sacre.

Hugues Capet, duc des français, désormais Rex francorum, fait sacrer à Reims, son fils Robert II, également bénéficiaire d’une élection, en qualité de Roi associé. Hugues inaugure ainsi une tradition qui perdurera 2 siècles, le principe héréditaire. Cette conquête inaperçue des contemporains allait permettre de refaire la France. Seulement il aura fallu attendre plus de 500 ans pour que l’usage absurde des partages francs à la mort du roi fût abandonné, et il fallut encore deux siècles avant que le principe héréditaire triomphât du principe électif, car en droit, à ce moment l’élection du roi ne le cédait en rien à l’hérédité. En fait, le sacre six fois répété de l’aîné (sur six générations), du vivant du roi régnant, allait affaiblir le principe électif, jusqu’au jour où la légitimité capétienne n’aurait plus d’autre fondement que le fait dynastique sous Philippe II Auguste 1180-1223, le principe de l’hérédité de la Couronne étant alors acquis.

Hugues Capet, duc des français, désormais Rex francorum, fait sacrer à Reims, son fils Robert II, également bénéficiaire d’une élection, en qualité de Roi associé. Hugues inaugure ainsi une tradition qui perdurera 2 siècles, le principe héréditaire. Cette conquête inaperçue des contemporains allait permettre de refaire la France. Seulement il aura fallu attendre plus de 500 ans pour que l’usage absurde des partages francs à la mort du roi fût abandonné, et il fallut encore deux siècles avant que le principe héréditaire triomphât du principe électif, car en droit, à ce moment l’élection du roi ne le cédait en rien à l’hérédité. En fait, le sacre six fois répété de l’aîné (sur six générations), du vivant du roi régnant, allait affaiblir le principe électif, jusqu’au jour où la légitimité capétienne n’aurait plus d’autre fondement que le fait dynastique sous Philippe II Auguste 1180-1223, le principe de l’hérédité de la Couronne étant alors acquis.

[Il semble que les Capétiens, réalistes, aient eu devant les yeux les fautes de leur prédécesseurs pour ne pas les recommencer. Les descendants de Charlemagne s’étaient épuisés à reconstituer l’empire. Ce fut également la manie des empereurs germaniques. Les Capétiens se rendirent compte de leur force exacte et se gardèrent à leurs débuts d’inquiéter personne. Car à ce stade le pouvoir du roi de France apparaît bien limité : il n’a aucun pouvoir au sud de la Loire (le domaine royal se limite à une dizaine de comtés : Paris, Etampes, Melun, Compiègne, Montreuil- sur Mer, Senlis, Orléans, Dreux…), et il est étroitement dépendant de l’Eglise et des grands féodaux qui l’ont élu; au comte de Périgord qui s’était emparé de sa ville de Tours, Hugues ayant fait demander par un héraut : « Qui t’a fait comte ? » s’entendit répondre : « Qui t’a fait roi ? ». Le territoire national morcelé, il faudra des siècles pour le reprendre aux souverainetés locales.

Comme chef féodal et duc de France, le roi avait pour vassaux directs les comtes de Blois, Anjou, Maine, et les comtes bretons du Mans et de Rennes pour arrière-vassaux. Huit grands fiefs relevant nominalement de la Couronne, indépendants en fait se partageaient le reste du territoire : Flandre, Normandie, Bourgogne, Guyenne, Gascogne, Toulouse, Gothie (Narbonne et Nîmes) et Barcelone : la suzeraineté capétienne sur ces duchés et ces marches venait de l’héritage de Charlemagne. Cette suzeraineté était un titre juridique qui rester à réaliser, les grands vassaux étant maîtres chez eux. La dignité royale et l’onction du sacre (alliance de l’Eglise) et une vague tradition d’unité personnifiée par le roi, c’était toute la supériorité des Capétiens. Ainsi, le roi comptait peu, même pour ses vassaux directs, tel la Maison d’Anjou d’où devait sortir la funeste dynastie des Plantagenêt 1154-1485 qui un jour, mettrait la France en danger.]

 

 

Vue des tombeaux de la nécropole royale de la Basilique Saint-Denis

Vue des tombeaux de la nécropole royale de la Basilique Saint-Denis

En 996, "sitôt refroidie, la dépouille du roi Hugues fut transportée à Saint-Denis dont il avait été abbé laïque. Son cercueil fut placé devant l'autel de la Trinité, tout contre celui de son grand-oncle le roi Eudes, qui le premier de la famille avait porté la Couronne.

A une exception près, tous ses descendants et successeurs le rejoignirent dans la nécropole royale.

A la Révolution, alors que Louis XVI était affublé du surnom de son ancêtre - Louis Capet -, son gisant fut détruit" (Les Derniers Jours des Rois, Sous la Direction de Patrice Gueniffey, Perrin, Le Figaro Histoire, Paris 2014, p. 61.)

Les principaux autres tombeaux de la Nécropole détruits par les Barbares iconoclastes de la Révolution furent ceux d'Arégonde épouse de Clotaire Ier, Charles II le Chauve (843-877), Eudes (888-898) que l'on a pourtant vu sauver Paris des Vikings en 885, Hugues Capet (987-996), Jeanne de Bourgogne première épouse de Philippe VI, Charles VII le Victorieux (1422-1461) et son épouse Marie d'Anjou, Charles VIII l'Affable (1483-1498), François II (1559-1560), Charles IX (1560-1574), Henri III (1574-1589) et son épouse Louise de Lorraine-Vaudémont, Henri IV le Grand (1589-1610) et ses épouses Marguerite de Valois et Marie de Médicis, Louis XIII le Juste (1610-1643) et son épouse Anne d'Autriche, Louis XIV le Grand (1643-1715) et son épouse Marie-Thérèse d'Autriche, Louis XV le Bien-Aimé (1715-1774) et son épouse Marie Leszczyńska.

 

 

La Paix de Dieu, Paix du Roi

 

Il convient, dans un premier temps, de maîtriser la violence, de cette société féodale. L'ordre de Cluny va permettre avec l'épiscopat le développement de ce que l'on appelle la Paix de Dieu, qui va devenir d'ailleurs à la fin du XIe siècle et le début du XIIe siècle, la Paix du roi.

 

C'est l'idée qu'il y a des violences qui ne doivent pas être commises quand elles sont destinées par exemple contre les clercs, contre les biens des clercs (sacrilèges), les marchands, les femmes mariées et les pucelles (défense de la femme), les maisons et les incendies.

 

Outre l'aspect religieux, c'est la mise en place d'un code de ce qui est licite et de ce qui est illicite comme délit. Et ce cela donne aux délits un caractère public.

 

Le mouvement de la Paix de Dieu s'officialise à Charroux en 989. Il propose une organisation sociale reposant sur trois ordres. Le rôle des chevaliers (bellatores ou milites) est de protéger ceux dont les rôles sociaux sont de travailler et de prier (oratores).

 

L'église s'est aperçue que cette idée d'avoir des gens élevés selon un code éthique, comme on le dirait de nos jours, qui se seraient à la fois distingués parmi les guerriers mais comme ayant un corps de règles - on dirait il faut qu'ils apprennent la détontologie de la guerre -, c'est à ce moment-là que l'on a créé les règles chevaleresques, lorsqu'on était reçu chevalier, lorsqu'on était fait chevalier, on était reconnu comme un guerrier courageux mais aussi comme quelqu'un ayant reçu une formation morale et religieuse.

 

 

Le roi Arthur fait chevalier (Film Excalibur - John Boorman 1981)

Le roi Arthur fait chevalier (Film Excalibur - John Boorman 1981)

C'est à partir du règne de Robert II que l'on commence à attribuer au Capétien des pouvoirs thaumaturgiques, des dons miraculeux capables de guérir les écrouelles, fistules purulentes dues à une maladie tuberculeuse. Ces guérisons qui se poursuivront jusqu'à la fin de la dynastie des Capétiens (jusqu'à Charles X qui guérit lui aussi les écrouelles), lui valent le surnom de Robert le Pieux. Son fils, Henri Ier, qu'il a fait sacré de son vivant lui succède en 1031.

Robert II guérit les écrouelles

Robert II guérit les écrouelles

Henri IV touchant les écrouelles, gravure de Pierre Firens extraite de l'ouvrage d'André du Laurens, De strumis earum causis et curæ, 1609.

Henri IV touchant les écrouelles, gravure de Pierre Firens extraite de l'ouvrage d'André du Laurens, De strumis earum causis et curæ, 1609.

Convertis au christianisme, sous l'impulsion des ducs, les Normands construisent églises et abbayes, et leur foi toute récente n'est pas pervertie (église Saint-Etienne de Caen, Abbaye -aux-Dames de Caen, église priorale de Saint-Fromond, Abbaye de Montivilliers). C'est en voulant effectuer un pélerinage en Terre-Sainte, qu'en 1035, meurt le duc de Normandie, Robert le Magnifique.

Statue de Robert le Magnifique, descendant du tout premier duc de Normandie Rollon, sur le socle de celle du Conquérant à Falaise

Statue de Robert le Magnifique, descendant du tout premier duc de Normandie Rollon, sur le socle de celle du Conquérant à Falaise

La conquête de l'Angleterre

 

Le fils de Robert le Magnifique, Guillaume, est né en 1028. Cet héritier de sept ans est un bâtard. Il connaît le respect et notamment celui du droit féodal. Ainsi, il ne profite pas d'une victoire sur le comte d'Anjou soutenu par le capétien Henri Ier de France pour réclamer plus que ce que la logique féodale lui permet de réclamer. Il montre l'exemple du comportement à adopter dans ce monde féodal en pleine construction. Il respecte la légitimité des autres éléments de la pyramide, et en premier lieu celle de l'élément capétien.

 

Sa puissance et son dynamisme font de l'ombre à Henri Ier et incite le roi d'Angleterre Edouard le Confesseur (très aimé de son peuple, notamment des plus pauvres à cause de sa remarquable charité et sa grande piété, NDLR.) sans successeur et ayant fait voeu de chasteté, à proposer sa couronne à Guillaume en qui il reconnaît un digne successeur afin de poursuivre la construction de l'état anglais. Guillaume le Bâtard devient roi à la mort d'Edouard le Confesseur en 1066. Un homme pourtant persiste à se dresser face au destin de Guillaume, Harold, frère de la reine, et exerçant le pouvoir réel en Angleterre à la fin du règne, s'empare de la Couronne.

 

Tout autant que la logique féodale, Guillaume tient aux valeurs qui lui sont associées. Il se doit à la promesse faite à un homme aussi vertueux qu'Edouard le Confesseur et de récupérer son héritage. D'ailleurs Guillaume a l'appui du Pape qui lui transmet non seulement sa bannière mais aussi un cheveu de saint Pierre dans un Anneau, le tout consacré de sa main.

 

C'est une croisade avant l'heure que Guillaume prépare méticuleusement avec tout son peuple (Tapisserie de Bayeux). Bûcherons et charpentiers lui construisent une flotte de 600 navires, capables de transporter des éléments préfabriqués de fortins, des machines de guerre, des chevaux, l'approvisionnement de toute une armée, 7000 hommes, parmi lesquels beaucoup de laissés-pour-compte de la pyramide féodale, les fils cadets de seigneurs de Normandie et à qui il promet un fief sur la terre d'Outre-Manche. De violents vents contraires repoussent le départ et font croire à un mauvais présage. Ces pressentiements se confirment alors que la flotte longe la côte à vide (entre Dives-sur-Mer et Saint-Valéry-sur-Somme) et que d'un second lieu d'embarquement l'appareillage est toujours impossible. Guillaume se décide à organiser avec son armée une procession la nuit. Une comète passe dans le Ciel, et le vent se met alors au Nord.

 

 

(5) Les Rois de France - Hugues Capet

Guillaume prend la tête de la flotte sur la navire battant pavillon pontifical, Croix rouge sur fond blanc. Le navire amiral est si puissant qu'il arrive seul à l'aube en vue des côtes anglaises (Baie de Pevensey). Ce n'est qu'en milieu de matinée que le reste de la flotte rejoint le bateau de Guillaume et que le débarquement peut s'effectuer le 29 septembre 1066. Harold n'y croyait plus. De Londres, il marche avec son armée à la rencontre de Guillaume le Bâtard, jusqu'à la coline de Hastings d'où il décide de repousser les vagues normandes en édifiant un triple barrage, de flèches tout d'abord, de boucliers et de javelots dans un second temps. Enfin, pour ceux qui survivent, un troisième rempart constitué de hâches de celles que les Vikings affectionnaient. Et les vagues sont effectivement repoussées. Le chaos est tel dans les rangs français que l'on croit Guillaume mort: il relève la protection nasale de son casque et avant de lancer un nouvel assaut, ordonne à ses archers d'incliner leur tir vers le haut afin de contourner la muraille de boucliers et fait abattre une pluie de flèches sur l'armée anglaise. Les flèches tombent du Ciel et l'une d'elles transpercent la tête d'Harold de part en part.

 

L'usurpateur est mort et au soir, son triple mur finit par céder. Les vagues normandes déferlent sur toute l'Angleterre. Guillaume le Bâtard devient Guillaume le Conquérant. Par la volonté de Dieu, il est couronné roi d'Angleterre le 25 décembre 1066 dans la basilique de Westminster.

 

Guillaume met en place un système féodal centralisé et donc performant. La rigueur administrative normande traverse elle aussi la Manche et lance l'Angleterre sur la voix du modernisme politique.

 

Avec la pierre de Caen on construit la Tour de Londres.

 

 

(5) Les Rois de France - Hugues Capet

Le français devient la langue officielle. L'anglais n'est plus enseigné, utilisé uniquement que par le peuple, il se simplifie.

 

L'Angleterre est alors un territoire qui adoptera petit à petit les traditions gallo-romaines mâtinées de culture franque. Ce qui faisait l'originalité du Royaume de France, cette espèce de bouillonements de traditions de droit romain, de traditions guerrières, d'héritage gaulois aussi parce qu'il y a là-dedans des traditions gauloises qui sont maintenues. Tout cela essaimera en Angleterre.

 

C'est pourtant durant le règne de Guillaume que les tensions entre le royaume d'Angleterre et celui de France apparaissent pour s'éterniser pendant plusieurs siècles. Guillaume est roi d'Angleterre et la Normandie est anglaise: il est duc de Normandie, mais c'est un bien de l'Angleterre. Et c'est une affaire qui durera des siècles, qui entraînera les guerres de Cent Ans et des conflits interminables avec l'Angleterre.

 

Philippe Ier (1060-1108), le nouveau roi de France se méfie de l'influence du Conquérant et fait tout pour la limiter en excitant la crainte de la Bretagne et de l'Anjou face à cet ambitieux voisin et en participant activement à des coalitions antinormandes. Il stimule des dissenssions à l'intérieur même de la cellule familiale de Guillaume. Vingt ans de cette politique excède le Conquérant. Guillaume prend conscience de l'impossible cohabitation entre les deux royaumes. C'est en 1087 sur la route de Paris que son cheval trébuche sur une braise ardente et qu'il trouve la mort.

La première Croisade

 

Parallèlement au Renouveau spirituel insufflé par Cluny, une réforme profonde de l'Eglise chrétienne d'Occident s'organise officiellement et vigoureusement à partir de Rome, avec à partir de 1073 le début du Pontificat de Grégoire VII. La réforme grégorienne a cherché à donner la pleine liberté aux abbayes en sortant de l'autorité des rois ou des seigneurs (comme celle des comtes de Toulouse pour l'abbaye de Moissac).

Prise de Jérusalem (1099)

Prise de Jérusalem (1099)

Un schisme avec les chrétiens d'Orient a provoqué une rupture entre Rome et Constantinople sur le plan dogmatique. Ce qui n'empêche pas les alliances militaires entre chrétiens face à une menace extérieure à la Communauté. Or l'empereur d'Orient a besoin d'aide. Cet appel au secours va converger avec la volonté farouche de l'Eglise de réformer la société de l'Occident chrétien.

 

En novembre 1095, le Pape Urbain II organise un concile à Clermont qui réunit quelques 200 prélats, les principaux hommes influents sur le plan spirituel en Occident. Ils viennent de France, d'Espagne, d'Italie, d'Angleterre, aucun ne vient de l'empire germanique.

Statue d'Urbain II, à Châtillon-sur-Marne, lieu présumé de sa naissance

Statue d'Urbain II, à Châtillon-sur-Marne, lieu présumé de sa naissance

L'autorité de cette église qui se réforme a heurté les sensibilités des empereurs germaniques. Le but est de renforcer la paix de Dieu qui n'est guère respectée.

 

A la fin du Concile, Urbain II lance dans un prêche en plein air l'idée de la première Croisade. Il s'agit de libérer la Palestine aux mains de Musulmans depuis 638, de reconquérir les lieux saints qui ont vu vivre et mourir le Christ. Mais pour les musulmans aussi Jérusalem est une ville sainte.

Première Croisade (1099)

Première Croisade (1099)

[Sous le troisième calife Omar (634-644) l'empereur romain d'Orient contient difficilement les invasions arabes de 635 à 641. Les Romains sont défaits à la bataille de Yarmouk en 636. Omar s'empare de Jérusalem en 638. C'est la première prise de Jérusalem par les musulmans. Les chrétiens sont maintenus sur le territoire contre paiement de l'impôt, mais les Juifs en sont chassés. De 639 à 645, les Arabes conquièrent l'Egypte chrétienne (prise d'Alexandrie en 642). La Syrie est conquise en 640. Les gens conquis changent de religion, ils adoptent les préceptes de Mahomet ou ont des droits amoindris (liberté de culte restreinte) et doivent payer l'impôt, la djizya.

 

En 1078, Jérusalem est prise aux Fatimides par les Turco-Mongols Seldjoukides qui vont massacrer les Juifs autant que les Chrétiens, détruisent les églises, et empêchent les pèlerins de faire leurs dévotions à Jérusalem. Urbain II rappela que les cités de Nicée, Antioche, Jérusalem, villes où avaient vécu les premiers chrétiens, étaient maintenant aux mains des Arabes, des Sarrasins, des Persans et des Turcs qui détruisaient les églises et "immolaient les chrétiens comme des agneaux".]

 

Et cela va se savoir sur le Continent, chez nous, et à ce moment-là on se dit il faut aller aider les chrétiens à Jérusalem, et profitons-en pour délivrer le Tombeau du Christ qui est maintenant aux mains des Infidèles.

 

L'idée de croisade combine le pélerinage en vue de racheter ses péchés et celle de Guerre sainte.

 

Urbain II fait remonter la logique féodale jusqu'au service de Dieu, qui aura sa rémunération, le salut de l'âme. Et puis si ce n'est les descendants des guerriers francs, des chevaliers de Charles Martel, qui pourra le faire ?

 

Jérusalem et les Lieux saints sont repris par les Croisés en 1099. Les croisades donnent naissance à une nouvelle chevalerie avec un code et un principe de base, l'honneur.

 

Le Croisé est marqué du signe de la Croix.

né vers 1058 peut-être à Baisy en Basse-Lotharingie (aujourd'hui en Belgique) ou Boulogne-sur-Mer (en France) et mort le 18 juillet 1100 à Jérusalem, est un chevalier franc. Premier souverain du royaume de Jérusalem au terme de la première croisade, il refuse le titre de roi pour celui, plus humble, d'avoué du Saint-Sépulcre.

né vers 1058 peut-être à Baisy en Basse-Lotharingie (aujourd'hui en Belgique) ou Boulogne-sur-Mer (en France) et mort le 18 juillet 1100 à Jérusalem, est un chevalier franc. Premier souverain du royaume de Jérusalem au terme de la première croisade, il refuse le titre de roi pour celui, plus humble, d'avoué du Saint-Sépulcre.

Philippe Ier (1060-1108), bigame excommunié, ne peut peut prendre part à la Croisade.

 

[On n'enregistre pas sans stupeur cet autre arrêt du concile de Clermont de 1095: le roi Philippe Ier s'étant publiquement rendu coupable d'adultère en abandonnant sa femme (il a enlevé celle de son vassal, le comte d'Anjou, Foulques le Réchin), et ayant été sommé au nom de l'autorité spirituelle de renoncer à cette union scandaleuse, fit défaut au concile. Le concile prononça contre lui l'excommunication solennelle. NDLR.]

Godefroy de Bouillon à Jérusalem en 1099

Godefroy de Bouillon à Jérusalem en 1099

L'Occident est composé de différents peuple qui n'ont en commun que le christianisme. La notion de Chrétienté naît de l'idée de Croisade, de cet ennemi d'une autre religion.

 

En passant à côté de cette croisade, le Capétien devra attendre une prochaine pour retrouver une réelle influence sur le peuple de Francie.

 

De nombreuses motivations ont pu stimuler ces milliers de croisés, de l'aventurier au mendiant. Mais tous étaient en quête de spiritualité.

Conlusion

 

A la mort de Guillaume le Conquérant (1087) viendront les problèmes de succession au royaume d'Angleterre qui ne seront véritablement réglés qu'avec l'accession au trône de la dynastie (française NDLR.) Plantagenêt (1154). Mais c'est l'héritage de Guillaume en termes d'organisation politique qui leur permettra d'asseoir leur autorité.

 

 

(5) Les Rois de France - Hugues Capet

Autre généalogie des Plantagenêt :

(5) Les Rois de France - Hugues Capet

L'idéal de croisade, lui, bercera tout le Moyen Âge et traversera les siècles.

 

L'utilisation du système féodal créé par Guillaume le Conquérant avec son organisation pratique ainsi que l'idéal de croisade et sa philosophie permettront aux futurs capétiens de fédérer et d'asseoir leur autorité sur un territoire que l'on appelle, la France.

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5 mars 2015 4 05 /03 /mars /2015 09:24
Chaudron à quatre anses ornées de têtes cornues du dieu grec Acheloos - Tombe princière de Lavau (Aube)

Chaudron à quatre anses ornées de têtes cornues du dieu grec Acheloos - Tombe princière de Lavau (Aube)

L'expression "la France de culture grecque et romaine" prend tout son sens. Des archéologues ont annoncé hier avoir découvert en France à Lavau (Aube) une tombe princière celte du Ve siècle av. J.-C. "exceptionnelle", dans ce qui est aujourd'hui une zone d’activité commerciale.

Sur le même site, d’autres sépultures plus anciennes ont été mises au jour, contenant des esquilles et des cendres, bien plus anciennes et qui remontent à l’âge du bronze, jusqu’à 1 400 avant J.-C. Toutes ces sépultures ont été réunies dans un même monument au Ve siècle, ce vaste tumulus d’environ 7 000 mètres carrés.

Dans la tombe princière, une surprise attendait les chercheurs : des objets de prestige [un chaudron à quatre anses ornées de têtes cornues du dieu grec Acheloos (dieu fleuve d'Etolie, fils aîné du Titan Océan), un vase à boire de fabrication grecque représentant Dionysos dans une scène de banquet, sous une vigne, face à un personnage féminin; et des éléments de vaisselle].

 

Archéologie : découverte exceptionnelle en France d’une tombe princière celte

 

Le Monde | 04.03.2015 à 19h59 • Mis à jour le 04.03.2015 à 21h04 | Par Stéphane Foucart

 

L’endroit ne paie pas vraiment de mine, en bordure d’un rond-point, à un jet de pierre des tristes préfabriqués de la zone d’activité commerciale de Lavau (Aube). C’est pourtant là, en prévision de nouvelles constructions commerciales, que les chercheurs de l’Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap) fouillent, depuis l’automne, une tombe princière du Ve siècle avant notre ère, qui s’annonce comme l’une des plus remarquables de la culture celte de la période dite du Hallstatt (entre 800 et 450 avant J.-C.).

 

La découverte, rendue publique mercredi 4 mars, est qualifiée d’« exceptionnelle » par les archéologues, tant par les dimensions du site que par la qualité du matériel mis au jour. Et le caveau, dont la fouille n’est pas encore achevée, recèle sans doute de nouvelles surprises.

 

Objets de prestige

 

L’équipe de fouilleurs a déjà mis au jour des objets de prestige qui font de la tombe de Lavau un analogue de celles de Hochdorf (Allemagne) ou de la célèbre tombe de Vix, découverte en 1953. Un vaste chaudron de bronze, d’environ un mètre de diamètre, finement ouvragé et dont les quatre anses sont ornées de têtes cornues du dieu grec Acheloos, forme la pièce principale du matériel exhumé. « Nous pensons que ce chaudron est de facture probablement étrusque, ou peut-être grecque », dit l’archéologue Emilie Millet, responsable du mobilier.

 

D’autres objets de prestige, la plupart en provenance du monde méditerranéen, témoignent du pouvoir économique et politique du seigneur celte inhumé là voilà quelque vingt-cinq siècles. En particulier, un vase à boire de fabrication grecque – une oenochoe – retrouvé dans le chaudron est une pièce sans équivalent. Ce vase de céramique noire, utilisé pour prélever le vin dans le chaudron au cours du banquet, est rehaussé, à son pied et à sa lèvre, d’une tôle d’or.

 

« Même dans les riches tombes grecques on ne retrouve pas de tels objets », note l’archéologue Dominique Garcia, professeur à l’université d’Aix-Marseille et président de l’Inrap, pour qui les artisans grecs ont peut-être adapté leur production aux caprices du prince barbare. L’origine de l’objet ne fait cependant aucun doute. Dionysos y est représenté dans une scène de banquet caractéristique du monde grec, allongé sous une vigne face à un personnage féminin. D’autres éléments de vaisselle liés à la consommation de vin et à la pratique grecque du banquet – le symposium – ont également été retrouvés. Notamment, une cuiller d’argent et d’or permettait de filtrer le vin des aromates avec lesquels il était, à l’époque, mélangé.

 

Monument d’environ 7 000 mètres carrés

 

Le sexe du défunt n’est pas encore connu avec certitude – certains de ses ossements affleurent dans le caveau, mais n’ont pas encore été dégagés – mais la présence d’un poignard de bronze plaide pour un prince et non, comme dans la tombe de Vix, pour une princesse. Mais, que le défunt de Lavau soit un homme ou une femme, le mobilier funéraire suggère à nouveau l’acculturation des élites celtes de cette période aux pratiques culturelles du monde méditerranéen.

 

Sur le même site, d’autres sépultures plus anciennes ont été mises au jour. Une vingtaine d’urnes funéraires contenant des esquilles et des cendres sont bien plus anciennes et remontent à l’âge du bronze, jusqu’à 1 400 avant J.-C. Toutes ces sépultures ont été réunies dans un même monument au Ve siècle, un vaste tumulus d’une emprise d’environ 7 000 mètres carrés, ceinturé par un fossé et une palissade, érigé au-dessus de la sépulture princière hallstattienne. Un monument de plusieurs mètres d’élévation qui devait, à l’époque, fortement marquer le paysage. Aussi fortement que les préfabriqués aujourd’hui construits sur la ZAC, mais sans doute d’une manière quelque peu différente…

 

 

Source: http://www.lemonde.fr/archeologie/article/2015/03/04/decouverte-exceptionnelle-en-france-d-une-tombe-princiere-celte_4587484_1650751.html

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4 mars 2015 3 04 /03 /mars /2015 19:25

Du vandalisme de la Terreur aux saccages des islamistes, voici un inventaire non exhaustif des iconoclasmes et notamment l'iconoclasme protestant : "Quand on détruit leurs nids, les cigognes ne reviennent plus !" (Zwingle):

 

Du vandalisme de la Terreur aux saccages de Daech : la litanie des barbares

 

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Par Franck Ferrand

Mis à jour le 03/03/2015 à 18:30

Publié le 03/03/2015 à 17:42

 

FIGAROVOX/TRIBUNE - Le musée de Mossoul a été saccagé par l'État islamique la semaine dernière. Franck Ferrand retrace les massacres patrimoniaux qui parsèment l'histoire.

 

Franck Ferrand est historien, écrivain et journaliste. Toutes les semaines il tient une chronique sur FigaroVox.

 

La sauvagerie des images diffusées, la semaine dernière, par l'État islamique et qui montraient des brutes, armées de masses et de marteaux-piqueurs, ravageant des trésors de l'art assyrien, ce vandalisme inouï, ce crime contre le patrimoine et l'histoire, ont révolté la planète. Le musée de Mossoul -après la bibliothèque de la ville et la mosquée Kheder- est devenu le symbole de ce que l'être humain peut accomplir de pire, lorsque des esprits faibles sont la proie d'idéologies destructrices. De partout, se sont élevées des voix outrées, pour condamner de telles dévastations -sans effet, hélas…

 

D'autres saccages nous sont aussitôt revenus à la mémoire; et nous repensons, quatorze ans plus tard, au dynamitage des colossaux Bouddhas de Bâmyân, en Afghanistan, par des Talibans qui, déjà, voulaient faire table rase de tout ce qui n'appartenait pas à l'ère islamique. Comme si le monde, comme si l'humanité, n'avaient pas vraiment existé avant la Révélation coranique… Face à ce genre de désastre, j'ai tendance à chercher dans la mémoire des siècles certains faits similaires qui, à défaut de me consoler des horreurs du nôtre, me permettraient du moins de les relativiser.

 

Considérons à part les destructions contingentes et qui relèvent des fameux «dommages collatéraux». On ne fait pas de guerre sans provoquer de dégâts indirects -y compris sur le patrimoine… Parmi d'innombrables exemples, citons l'incendie de la Grande bibliothèque d'Alexandrie, en 47 avant notre ère, du fait de l'offensive de César; la destruction du colosse de Rhodes par les troupes califales d'Othmân Ibn Affân, en 654 de celle-ci; l'acharnement des arbalétriers de Louis XII contre un cheval de craie conçu par Léonard pour les Sforza, en 1499; l'explosion de la toiture du Parthénon, transformé en dépôt de poudre par les Ottomans, et pris pour cible par les Vénitiens, en 1687; l'incendie des Tuileries par la Commune de Paris, en 1871; le bombardement de la cathédrale de Reims par les Allemands, en 1914, etc. Dans ces derniers cas, le départ est difficile à faire, de la conséquence fortuite et de la volonté délibérée...

 

J'aurais tendance à mettre aussi de côté les saccages, prémédités ou non, de villes ou de sites historiques: pillage de Rome par les Vandales en 455, ravage de Constantinople par les Croisés en 1204, sac du Palais d'Eté de Pékin par les troupes anglaises et françaises en 1860… De tels exemples rempliraient plusieurs pages. Restent les destructions programmées, organisées, pensées par des esprits malades et qui sont véritablement la honte du genre humain. Certains de ces massacres patrimoniaux se parent de justifications politiques: on songe évidemment au vandalisme de la Terreur, sous la Révolution française, contre ce qu'on appelait les «insignes de royauté»; on songe, plus près de nous dans le temps, aux cas épouvantables des autodafés de l'Allemagne nazie, des destructions de la Révolution culturelle, lancée par Mao en 1966, et des attaques de Khmers rouges contre des pagodes, entre 1975 et 1979…

 

Au sommet de cette litanie des barbares, viennent enfin -et ce sont peut-être les prodromes de Mossoul-les dégâts causés à l'Art par le fanatisme religieux. Comment ne pas évoquer ici les ravages de la crise iconoclaste, à Byzance, au VIIIe siècle et au IXe? Et comment oublier les stigmates de l'iconoclasme de la Réforme, en Europe, culminant en France lors des guerres de Religion? Finalement, ce à quoi nous assistons, impuissants, en ce moment même, n'est que le énième avatar d'un vieux démon de l'humanité... Je doute que cela rende la situation plus acceptable.

 

Source: http://www.lefigaro.fr/vox/monde/2015/03/03/31002-20150303ARTFIG00263-du-vandalisme-de-la-terreur-aux-saccages-de-daech-la-litanie-des-barbares.php

 

 

Michelade à Nîmes le 29 et 30 septembre 1567  La Michelade est le nom donné au massacre de quatre-vingts à quatre-vingt-dix catholiques (moines, clercs) par des émeutiers protestants le 29 septembre 1567 à Nîmes.

Michelade à Nîmes le 29 et 30 septembre 1567 La Michelade est le nom donné au massacre de quatre-vingts à quatre-vingt-dix catholiques (moines, clercs) par des émeutiers protestants le 29 septembre 1567 à Nîmes.

S'agissant de l'iconoclasme de la Réforme, après avoir présenté la "tolérance protestante" à l'oeuvre en Europe, vous trouverez un peu plus bas un inventaire (non exhaustif) du saccage protestant et des meurtres de catholiques commis par des Réformés avant le massacre de Vassy (1562) qui selon la narrative protestante déclencha les guerres de religion.

 

Parmi les préjugés qui courent le monde, il en est un en effet assez répandu, non-seulement dans les rangs du protestantisme, mais aussi chez certains catholiques. "Si la Réforme a fait du mal et démoralisé des pays entiers, du moins a-t-elle apporté au monde un bien inappréciable: la tolérance religieuse." Or, il n'y a rien de plus faux et de moins fondé que ce préjugé historique. Partout où il est le maître, le protestantisme a été intolérant et persécuteur. Sans doute, il ne l'a pas été partout au même degré; mais d'où cela vient-il? De ce qu'il n'a pas partout le même degré de puissance. Pour persécuter, il ne suffit pas de vouloir, il faut pouvoir. Le protestantisme, heureusement, ne put pas toujours ce qu'il voulait; mais toujours, qu'on lui rende cette jsutice, en fait d'intolérance, il fit ce qu'il put.

 

Partout où la Réforme s'est introduite, elle l'a fait violemment, et ses premiers fruits en Allemagne, à Genève, en Angleterre, en Suède, ont été invaribalement la guerre civile, les proscriptions et les meurtres. C'est tout simple: la Réforme est une révolution, et toute révolution est tyrannique de sa nature.

 

Une fois établi, le protestantisme s'est maintenu par les mêmes violences. Chacun sait ce qu'est le protestantisme anglais vis-à-vis des catholiques, quelles sanglantes lois il a portées et exécutées, et avec quel despotisme féroce il a écrasé la fidèle et malheureuse Irlande.

Par suite des bûchers et des échafauds, la population catholique de l'Angleterre fut décimée en moins de six ans.

 

Un célèbre historien anglais protestant, William Cobbet, a été forcé par sa conscience de rendre, contre son Eglise nationale, cet écrasant témoignage :

 

"Cette Eglise, dit-il, la plus intolérante qui ait existé, se montra au monde armée de couteaux, de haches et d'instruments de supplice; ses premiers pas furent marqués du sang de ses innombrables victimes, tandis que ses bras ployaient sous le poids de leurs dépouilles."

 

Il rapporte des actes officiels du Parlement, constatant que, par suite des bûchers et des échafauds dressés contre les catholiques, la population de l'Angleterre fut décimée en moins de six ans.

 

Angleterre : PEINE DE MORT. La peine de mort était prononcée et impitoyablement exécutée contre tout prêtre catholique qui entrait dans le royaume d'Angleterre, ou qui était convaincu d'avoir célébré la Messe. PEINE DE MORT contre quiconque refusait de reconnaître que la reine Elisabeth était le chef de l'Eglise de JESUS-CHRIST. Une forte amende était prononcée contre tout citoyen qui n'assistait pas aux offices protestants, et "la liste des personnes mises à mort pour le seul crime de catholicisme, pendant le règne d'Elisabeth, formerait, ajoute l'historien protestant, une liste dix fois plus longue que celle de notre armée et de notre marine réunies.

 

"L'Eglise d'Angleterre n'a point changé; elle a gardé le même caractère depuis le jour de son établissement jusqu'à présent; en Irlande, ses atrocités ont surpassé celles de Mahomet, et il faudrait un volume pour rapporter ses actes d'intolérance"

 

(Lettre de sir William Cobbet à Lord Tenderden, chef de la justice d'Angleterre, quia vait, en plein Parlement, vanté la tolérance du protestantisme anglais...)

 

(Source: Mgr de Ségur, Causeries sur le protestantisme d'aujourd'hui, Libraie Saint-Joseph, Tolra libraire-éditeur, Rennes 1894, rééd. Editions Saint-Rémi, p. 172-174.)

 

Le calvinisme en France: un siècle de révoltes, de séditions et de pillages commis par les Huguenots

 

"C'est de la même manière que le calvinisme a tenté de s'introduire en France. Pendant plus d'un siècle, l'histoire de notre patrie ne retentit que de révoltes, de séditions et de pillages commis par les huguenots, partout où pénétraient leurs prédicants. Toute cette période n'est qu'un tissu de désordres, de perfidies, de cruautés! Et il n'y a point lieu de s'en étonner, puisque Calvin prêchait hautement qu'il fallait jeter à bas les rois et les princes qui ne voulaient pas embrasser le protestantisme, et leur cracher au visage plutôt que de leur obéir.

 

Sous les ordres de Coligny, les calvinistes révolutionnaires formèrent le projet d'enlever dans son palais le roi de France encore enfant...; ayant manqué leur coup, ils s'emparèrent d'orléans, dévastèrent les bords de la Loire, la Normandie, l'Île de France, et particulièrement le Languedoc, où ils commirent les cruautés et profanations les plus odieuses.

 

A Montauban, à Castres, à Béziers, à Nîmes (la Michelade en 1567), à Montpellier, ces grands prôneurs de la tolérance et de la liberté de conscience interdirent, sous les peines les plus rigoureuses, tout exercice du culte catholique.

 

Tout le monde connaît ce fameux baron des Adrets, chef calviniste qui, ayant pris Montbrison, se donna l'innocent plaisir de faire sauter du haut d'une tour ce qui restait de la garnison faite prisonnière. Or tel est à peu près le traitement que les protestants firent subir à toutes les villes qui tombèrent en leur pouvoir: églises profanées, vol de vases sacrés, prêtres ou religieux chassés ou tués, atrocités les plus barbares jointes aux sacrilèges les plus abominables.

 

(Source: Mgr de Ségur, Causeries sur le protestantisme d'aujourd'hui, Librairie Saint-Joseph, Tolra libraire-éditeur, Rennes 1894, rééd. Editions Saint-Rémi, p. 172-174.)

 

Les saccages des protestants et les meurtres de catholiques durant les Guerres de Religion

 

Les persécutions et les dévastations dont les prétendus "réformés" se rendirent coupables à partir de 1560 anticipèrent sur ceux commis pendant la Révolution française.

 

Le prince de Condé avait appelé à son secours 18 000 reîtres du prince - protestant - Casimir d'Allemagne. Ils restèrent dix-huit jours dans la région de Vichy.

 

Ils ruinèrent le village d'Escolles.

La plupart des maisons avec leurs dépendances furent livrées aux flammes.

La tour sainte et le château d'Escolles furent anéantis

Dix hommes furent massacrés

Une femme indignement mise à mort

Tous les biens et les animaux furent pillés

 

Le chroniqueur qui nous décrit ce désastre signale que seules cinq maisons furent épargnées. C'était au début de l'an 1576 (Abbé Alain Delagneau, Douze siècles de tradition catholique au Pointet, Fideliter Novembre-décembre 2001, n° 144, p. 16.)

 

Les atrocités commises par les protestants aux Pays-Bas

 

On ne saurait lire, sans frissoner d'horreur, les atrocités commises par les Hollandais pour étendre le protestantisme dans les Pays-Bas, et particulièrement les tortures et les supplices auxquels eut recours le zèle religieux des envoyés du prince d'Orange, Lamark et Sonoi... Ce dernier était passé maître dans l'art de tourmenter les corps pour perdre les âmes. Voici la description qu'une plume protestante et hollandaise nous a laissée des moyens employés par ce tigre pour martyriser les catholiques fidèles à leur religion:

 

"Les procédés ordinaires de la torture la plus cruelle, écrit Kerroux, ne furent que les moindres tourments qu'on fit endurer à ces innocents. Leurs membres disloqués, leurs corps mis en lambeaux par les coups de verges, étaient ensuite enveloppés dans des linges trempés d'eau-de-vie auxquels on mettait le feu, et on les laissait dans cet état jusqu'à ce que leur chair noircie et ridée laissât voir à nu les nerfs sur toutes les parties du corps.

Souvent on employait jusqu'à une demi-livre de soufre pour leur brûler les aisselles et les plantes des pieds. Ainsi martyrisés, on les laissait plusieurs nuits de suite étendus sur la terre sans couverture, et à force de coups, on chassait loin d'eux le sommeil. Pour toute nourriture, on leur donnait des harengs et d'autres aliments de cette espèce propres à allumer dans leurs entrailles une soif dévorante, sans leur accorder seulement un verre d'eau, quelque supplice qu'on leur fit endurer. On apliquait des frelons sur leur nombril. Il n'était pas rare que Sonoi envoyât au service de cet épouvantable tribunal un certain nombre de rats qu'on plaçait sur la poitrine et sur le ventre de ces infortunés, sous un instrument de pierre ou de bois façonné pour cet usage et recouvert de combustibles. On mettait ensuite le feu à ces combustibles, et on forçait ainsi ces animaux à ronger les chairs de la victime et à se faire un passage jusqu'au coeur et aux entrailles. Puis on cautérisait ces plaies avec des charbons allumés, ou bien on faisait couler du lard fondu sur ces membres ensanglantés... D'autres horreurs plus dégoûtantes encore furent inventées et mises à exécution avec un sang-froid dont on pourrait à peine trouver des exemples parmi les cannibales; mais la décence nous interdit de continuer." (M. Kerroux, Abrégé de l'histoire de Hollande, t. II, p. 319.)

 

(Source: Mgr de Ségur, Causeries sur le protestantisme d'aujourd'hui, Libraie Saint-Joseph, Tolra libraire-éditeur, Rennes 1894, rééd. Editions Saint-Rémi, p. 175-176.)

 

Partout où il domine, le protestantisme se montre l'ennemi acharné et l'aveugle destructeur des catholiques

 

"Ce que la tolérance protestante a fait en Angleterre, ce qu'elle a voulu faire en France et en Hollande, elle le fait encore aujourd'hui (en 1894) en Suède. Là aussi, la "Réforme" s'est établie par la violence et par le sang, et les lois religieuses de ce pays ont conservé toute la barbarie que comporte l'esprit de notre siècle. En cette année même où j'écris, plusieurs familles viennent d'être condamnées à l'exil et dépouillées de tous leurs biens unqiuement pour avoir embrassé la foi catholique. En Norvège, en Danemark, en Prusse, à Genève, partout où il dommine, le protestantisme se montre l'ennemi acharnée et l'aveugle destructeur des catholiques. Ayant là ses coudées franches, il dédaigne tous ces ménagements hypocrites qui lui donnent si souvent chez nous l'apparence de la modération; il dit hautement ce qu'il veut et ce qu'il espère.

 

Au Synode protestant de Brême (Allemagne), un pasteur d'Elberfeld, M. Sangler, s'écriait, en parlant du Pape et des Religieux de la Compagnie de JESUS:

 

"Des autorités protestantes ne doivent pas souffrir qu'ils existent, encore moins doivent-elles supporter qu'ils soient libres."

 

(Source: Mgr de Ségur, Causeries sur le protestantisme d'aujourd'hui, Libraie Saint-Joseph, Tolra libraire-éditeur, Rennes 1894, rééd. Editions Saint-Rémi, p. 176-177.)

 

La persécution des catholiques à Genève

 

A Genève, les protestants, jaloux des progrès du catholicisme, ont formé, d'un commun accord, une ligue ou association dans laquelle ils prennent l'engagement:

 

de ne rien acheter des catholiques;

de ne les employer à aucun travail, et de chercher ainsi à les réduire à la plus complète indigence;

de faire en sorte que les protestants obtiennent seuls les charges et les emplois.

 

Et tout cela évidemment, se fait par des hommes qui réclament avec indignation la liberté et l'égalité des cultes dans les pays où ils forment une perceptible minorité ! par des hommes qui ne parlent que de liberté de conscience, de charité chrétienne, de religion de paix et d'amour...; par des hommes qui ne croient plus en JESUS-CHRIST, et chez qui l'on est libre d'être incrédule, panthéiste, athée, mais non point catholique !"

 

(Source: Mgr de Ségur, Causeries sur le protestantisme d'aujourd'hui, Libraie Saint-Joseph, Tolra libraire-éditeur, Rennes 1894, rééd. Editions Saint-Rémi, p. 177-178)

 

En France, le 7 janvier 1562 l'édit de tolérance de Saint Germain (ou Edit de janvier) donnait liberté de culte aux réformés. Les protestants obtenaient le droit de pratiquer publiquement leur culte : droit de se réunir à l'extérieur des villes fortifiées. La paix de Saint –Germain consacrait l’influence de Coligny et provoqua le début des guerres de religion (de 1562 à1598, à 1629- Paix d’Allès, en d’autres pays elles ne cesseront qu’en 1648) :

Paradoxalement, l’édit de tolérance attisa la haine entre les deux communautés. Le Parlement de Paris refusa de ratifier l'Édit de Janvier. Protestants et catholiques se tinrent sur le qui-vive, prêts à en découdre. On estime que plus d'un tiers de la noblesse française est à ce moment acquise au protestantisme. Les tensions entre les deux communautés ont été avivées par la rivalité entre la famille catholique des Guise et celle, protestante, des Condé.

Les protestants qui criaient à la persécution, prirent les armes en mars 1562 : la véritable guerre civile commençait, et un manifeste du prince de Condé l’ouvrit.

 

François de Guise (catholique) avait pour lui Paris qui restera jusqu’au bout catholique, et la résistance passionnée de la capitale annonçait l’échec de la nouvelle religion, car déjà la France ne pouvait plus être qu’à l’image de Paris.

 

C'est le début des guerres de religion. Elles dureront plus de trente ans.

 

L'iconoclasme réformé, "le vandalisme protestant au XVIe siècle"

 

Les informations suivantes sont tirées du livre de Jean Guiraud, Histoire partiale histoire vraie, tome II, Moyen Age – Renaissance – Réforme, 4° édition, Gabriel Beauchesne & Cie Editeurs, Paris 1911, p. 345 :

 

"L'intolérance protestante s'est attaquée aux monuments religieux, aux statues et en général aux œuvres d'art, […] la mutilation des églises, martelages au point de bas reliefs, destruction des trésors avec leurs collections artistiques ou archéologiques, statues mutilées ou décapitées, disparition ou destruction de richesses d'orfèvrerie accumulées dans les sacrisities, destruction des boiseries, stalles de chœur, salle capitulaire 'ouvréees et maniérées' (Aubeterre, mai 1562), magnifiques vitraux du XIIIe siècle, cassés et brisés à coups de bâtons, destruction d'un des plus bels orgue du royaume (Cathédrale St Germain d'Auxerre en 1567), manuscrits, parchemins précieux, riches miniatures et livres saints brûlés, destruction d'un grand nombre de châsses et reliquaires, profanations des sépulcres et des corps (cathédrale d'Angoulême en mai 1564 où les corps de messire Jean et Charles, comtes d'Angoulême, aïeul et bisaïeul du roi, furent mis à l'air et découverts, et celui dudit comte Jean, trouvé entier, ils lui avaient coupé la tête et massacré son corps en plusieurs endroits à coups de dague…), dispersion des reliques des saints Ausone, Aptone, Cybard, Groux, Fredebert, etc. (FOURGEAUD, Origine et introduction du protestantisme à Angoumois, p. 115-117.), reliques jetées au vent ou confondues avec les ossements des animaux, sépultures violées (Lyon, avril 1562, tombe au pouvoir des protestants. C 'est le sac d'une ville prise d'assaut)

 

"[…] C'est par fanatisme religieux plutôt que par de légitimes représailles que les réformés de toute confession ont multiplié les actes de vandalisme. La vraie raison de ces mutilations d'églises,[…] c'est que, au XVIe et au XVIIe siècle, tout protestant se doublait d'un iconoclaste.

 

[…] Trente ans avant les guerres de religion, les premiers huguenots français brisaient dans les rues de Paris les images vénérées de la Vierge. Leurs maîtres, les prédicateurs de la Réforme, leur en faisaient un devoir.

 

[…] Thédore de Bèze, le plus fidèle élève de Calvin, s'élevait surtout contre les crucifix qu'il avait en abomination et dont il eût voulu que les autorités chrétiennes ordonassent la destruction. Zwingle demandait encore la démolition des églises pour mieux anéantir le catholicisme. "Quand on détruit leurs nids, disait-il, les cigognes ne reviennent plus !"

 

Il est à remarquer qu'un grand nombre des excès que nous signalons ont été commis avant le fameux massacre de Vassy, au cours duquel une cinquantaine de protestants furent tués (1er mars 1562), qui aurait attiré aux catholiques les naturelles représailles des réformés.

 

Paris. Le 31 mai 1528, nuit de la Pentecôte, les huguenots abattirent la tête d'une figure de la Vierge, dans le mur de la rue des Rosiers qui faisait coin de la rue des Juifs; ils rompirent aussi la tête de l'enfant qu'elle tenait, les jetèrent toutes les deux derrière des pierres, donnèrent quelques coups de poignard dans la robe de la statue et plongèrent son couvre-chef dans la boue…. Elle fut remplacée par une image d'argent à l'issue d'une cérémonie de réparation. Celle-ci fut dérobée en 1545; on en mit une en bois, qui fut brisée en 1551; on en mit une quatrième de marbre (DOM LOBINEAU, Histoire de Paris, II, p. 983-985.)

Près de la rue Saint-Martin, une image de la Vierge et deux autres de Saint Fiacre et de Saint Roch furent défigurées dans la nuit du samedi 21 mai 1529; les protestants leur crevèrent les yeux…. (ibid., p. 988.)

La nuit du 8 au 9 septembre 1554, une image de la Sainte Vierge qui était devant l'hôtel de Châlons fut mise en pièces; une autre de Notre-Dame de Pitié, qui était auprès, fut lacérée de coups de poignard (ibid., p. 988.)

En 1562, les huguenots profanent l'église Saint-Médard (LEBOEUF, Histoire de la ville et du diocèse de Paris, ed. 1883, I, p. 257.)

Dans la nuit du 17 au 18 octobre 1534, ils affichèrent à Paris et en Province des placards violentes contre les catholiques. Ils y traitaient de menteurs et blasphémateurs "le pape et toute sa vermine de cardinaux, d'évêques et de prêtres, de moines et autres cafards,…" et annonçaient "que leur règne serait détruit à jamais" (LAVISSE, Histoire de France, V, partie I, p. 380.) Les pamphlétaires huguenots prêchaient la destruction du catholicisme et demandaient à François Ier de la proclamer ! à l'exemple des princes luthériens de l'Allemagne, ses alliés.

 

Les actes de vandalisme avant le "Massacre de Vassy" en 1562, n'étaient pas particulier à la France. Partout où "la Réforme" avait eu des succès, elle les avait multipliés : Allemagne, Pays-Bas, Flandre, Suisse, Autriche, Angleterre, etc.

 

Augsbourg. En 1528, Michel Cellarius fait briser les images. En janvier et février 1537, le Conseil abolit le catholicisme, s'emprae de force de la cathédrale, des églises, des couvents; il ordonne la destruction des autels et des tableaux…; tous les autels et statues de pierre furent enlevés. Le chapitre écrivait à Charles-Quint que "les tableaux qu'il eût fallu respecter, rien que par égard pour leur antiquité et pour l'amour de l'art," avaient été en grande partie détruits, les épitaphes et les mausolées brisés et dispersés. (JANSSEN, L'Allemagne et la Réforme, Plon, tome III, Paris 1889-1905, in 8°, p. 107, 370.)

 

Strasbourg (1528). A l'instigation du disciple de Luther, Bucer, la cathédrale est saccagée… On y brise 50 autels, des tableaux, des croix… On fait servir aux travaux de fortification les pierres tombales enelvées aux églises… JANSSEN, L'Allemagne et la Réforme, Plon, tome III, Paris 1889-1905, in 8°, p. 105.)

 

Bergerac. Le 16 janvier 1544, les huguenots entrent aux couvents des Carmes, et des Cordeliers, dont ils emportent les croix, calices, encensoirs. Le 10 juillet, ils brisent la statue de Notre-Dame du Pont particulièrement vénérée par les matelots. Plus tard, ils détruisent l'église du prieuré de Sainte-Catherine de Mercadil (NEYRAC, Les geurres de religion dans nos contrées, p. 25.)

 

Toulouse. En 1547, les huguenots troublaient les cérémonies du culte catholique; la veille de Noël 1547, ils faisaient irruption dans l'église Saint-Pierre en tenant un lièvre embroché et en criant à tue-tête : Christus natus est ! Le 29 mars suivant, ils empêchaient une procession et un sermon. Cinq ans plus tard, en 1553, les Etats du Languedoc signalaient la destruction d'un grand nombre de croix dans toute la province; et deux après, des statues de saints étaient mutilées à Toulouse (1555.) Après la mort d'Henri II (1559), l'audace des huguenots augmente en Languedoc et ils s'emparent par la force de beaucoup d'églises catholiques pour en faire des prêches protestants. (Jean Guiraud, Histoire partiale histoire vraie, tome II, Moyen Age – Renaissance – Réforme, 4° édition, Gabriel Beauchesne & Cie Editeurs, Paris 1911, p. 391.)

 

Nîmes. En 1548, les protestants brûlaient, dans la cathédrale de Nîmes, un tableau représentant la sainte Vierge (BOREL, Histoire de la réforme à Nîmes.)

Le 29 septembre 1560, le prédicant huguenot Guillaume Maugé, à la tête des huguenots, s'empare de l'église paroissiale Saint-Jacques du Capitole, brise les images, renverse les autels et en fait un temple (Histoire du Languedoc, XI, p. 330.) Le dimanche 21 décembre 1561, les huguenots au nombre de deux mille, envahissent la cathédrale pendant l'office pontifical, renversent les autels, pillent les vases sacrés, brisent les images. Ils en font autant chez les Carmes, les Jacobins, les religieuses de Saint-Sauveur et de Sainte-Claire. L'après-midi, ils allument un grand feu devant la cathérale et brûlèrent les archives, les tableaux, les reliques, les ornements, les saintes hosties. On fait de même dans toutes les églises des environs (Histoire du Languedoc, XI, p. 371.) Du 2 au 12 février 1562, le pastreur Viret préside un synode protestant de 70 ministres; ils décident qu'on démolira toutes les églises de la ville et du diocèse. Le 25, à la suite d'une nouvelle assemblée du synode, au signal de la cloche de l'Hôtel-de-Ville, on pille toutes les églises de Nîmes et on détruit les tableaux qui restent. La cathédrale était un grand monument à trois nerfs, rebâti sous Urbain II (XIe siècle). Il n'en resta que la façace (Histoire du Languedoc, XI, p. 374-375.) L'église Sainte-Eugnénie fut transformée en un magasin de poudres (Histoire du Languedoc, XI, p. 686.)

 

Bretagne. En 1558, quatre ans avant l'échauffourée de Vassy, "les catholiques bretons étaient chassés de leurs propres églises et la messe était transformée de force en prêche protestant !" (Jean Guiraud, Histoire partiale histoire vraie, tome II, Moyen Age – Renaissance – Réforme, 4° édition, Gabriel Beauchesne & Cie Editeurs, Paris 1911, p. 390.)

 

Dauphiné. En 1559, les huguenots de Valence s'emparèrent par la force de l'église des Cordeliers. "Tous ceux de leur parti s'y rendirent en foule; la plupart étaient armés…, si on leur en voulait faire, comme ils disaient (31 mars). Les seigneurs des environs, Claude de Miribel et Jean de Quintel, leur prêtèrent main forte. On opéra de la même manière à Romans et à Montélimar. Dans cette dernière ville, l'église des Cordeliers fut transformée en un prêche protestant, grâce à l'intervention armée des seigneurs de Montbrun, de Saint-Auban, de Vesc, de Compset et de Candorce. Ces nobles "avaient tellement abattu le courage des catholiques, par leur autorité et par leur nombre, que ceux-ci n'osaient même prendre la liberté de se plaindre ni de parler pour leur religion…. Ils commencèrent à exhorter leurs sujets de changer de religion comme eux, et leurs paroles n'ayant pas un assez prompt effet, ils les contraignirent de le faire par les mauvais traitements et par les menaces. Mais Montbrun fut le plus violent de tous: il avait appelé de la ville de Genève des ministres qui prêchaient dans son châterau et forçait ses sujets à coups de bâton de les venir ouïr" (Nicolas Chorier, Histoire générale de Dauphiné, 1672, p. 542-545.)

 

Bearn (Noël 1560) Jeanne d'Albret, reine de Navarre, se déclare protestante, elle fait dresser l'inventaire de tous les biens ecclésiastiques de la Navarre et du Béarn, puis les confisquent ! les églises devinrent des temples, le culte protestant est le seul permis, le culte catholique est interdit.

 

Languedoc. 1560. Le 15 décembre à Carcassonne, les calvinistes renversent et traînent dans la boue, à travers les rues de la ville, une statue de la sainte Vierge, "la corde au col"; une procession expiatoire ayant été faite à cette occasion par les catholiques, une émeute a lieu mettant aux prises les deux partis. Bientôt, des bandes protestantes armées parcourent tout le Languedoc, pillant sur leur passage les sanctuaires et les maisons des catholiques; le 13 juillet 1560, six cents huguenots de Montauban marchent sur Saint-Antonin dont ils brûlent les églises. Après une violente émeute qui éclate le 19 octobre 1561, […] le culte catholique est aboli dans toute la ville et un prêche est établi dans le palais épiscopal. Des émeutes du même genre font tomber aux mains des calvinistes les villes de Montauban, Nîmes, Lunel, Gignac, Sommières, Négrepelisse, Alais, Castres, Rabastiens, Annonay, etc. et partout ils interdisent l'exercice du culte catholique; à Castres, ils conduisent de force les religieuses clarisses aux prêches des ministres (tous ces faits sont empruntés à l'Histoire du Languedoc, note de J. Roman, tome XII, p. 71-89.)

 

Orange. En septembre 1561, avec la complicité du prince, les huguenots convertissent en temples la grande église Notre-Dame et l'église des Jacobins, après avoir renversé les autels, brûlé les crucifix et les images de la Sainte Vierge qui étaient au coin des rues, ravi les croix, les calices, les châsses d'argent des corps des saints Eutrope et Florent, évêques de la ville (BOUCHE, Histoire de Provence, II, 633.)

 

Montauban. En Juillet 1561, les huguenots s'emparent des églises des Cordeliers et de Saint-Louis; en octobre, ils ravagent toutes les autres églises excepté la cathédrale qui était bien défendue (Histoire du Languedoc, XI, p. 372.)

 

Montpellier. Le 24 septembre 1561 (six mois avant Vassy), les protestants prennent les armes, s'emparent de Notre-Dame des Tables, l'église devient le temple de "La Loge"…

Le 19 octobre suivant, ils assiègent les catholiques réfugiés dans la cathédrale Saint-Pierre. Les catholiques ayant capitulé, la cathédrale est pillée avec une fureur extrême, les autels sont renversés, les retables, tableaux, images, statues sont mis en pièces. Cette église que son fondateur, Urbain V, avait merveilleusement ornée au XIVe siècle, fut entièrement saccagée en sept heures.

"Dans ses rapports au roi, M. de Joyeuse, lieutenant général du Languedoc, décrivait la terreur que les bandes protestantes faisaient régner dans toute la province. […] Le 24 octobre (1561), il écrivait:

"A Montpellier, deux mille hommes armés sont entrés par la force dans l'église Saint-Pierre, et après l'avoir pillée, ont tuée vingt-cinq à trente personnes dans ladite église et, entre autres, quelques chanoines et deux prêcheurs qui prêchaient tous les jours, et ayant fait cela, ils sont allés piller tous les couvents, jusqu'à tirer hors de la religion les religieuses réformées…."

(Jean Guiraud, Histoire partiale histoire vraie, tome II, Moyen Age – Renaissance – Réforme, 4° édition, Gabriel Beauchesne & Cie Editeurs, Paris 1911, p. 358 et 393 sur les morts.)

"Ce n'était pas seulement en Languedoc que les huguenots essayaient de détruire par la force le catholicisme; leurs émeutes, leurs pillages, leurs profanations se répétaient, de la même manière, dans toutes les provinces du royaume." (ibid., p. 393.)

 

Toutes les églises, chapelles, de Montpellier, au nombre de soixante, furent pillées. Le 26 octobre, on recommença et on pilla les églises des Carmes, des Augustins, des Cordeliers et des Jacobins qui étaient hors la ville. "En moins de huit jours, les messes furent abolies, les prêtres chassés, les ornements, les livres d'église et les reliques brûlés, déchirés, dissipés, les images et les croix brisées." On agit de même peu de temps après,… à Lunel, Gignac, Sommières et dans plusieurs autres villes de la province (Histoire du Languedoc, XI, p. 363-364.)

En novembre (1561), les protestants, maîtres absolus de Montpellier mirent en pièces tous les anciens tombeaux qui étaient dans les églises, en déterrèrent les corps et les ossements qu'ils abandonnèrent à la merci des chiens (Histoire du Languedoc, XI, p. 365.)

 

Agen. A la fin de 1561, les huguenots pillent les couvents des Augustins, des Carmes et des Cordeliers, détruisent les autels dont les débris furent brûlés de la main du bourreau. Les jours suivants, on en fit de même aux couvents de femmes (GAULLIEUR (protestant), Histoire de la Réformation à Bordeaux, I, 337.)

 

Bourges. L'émeute le dimanche 17 août 1561 entre quatre et cinq heures du soir… En un instant, il y a plus de deux mille combattants sur les remparts, "tous armés de garrots, de pistollets, de pierres et autres ferremens." […] Forcés de battre en retraite, les catholiques se replient sur la ville. Toute la lutte se concentre autour du portail de Bourbonnoux. L'on se bat avec une telle fureur sous la voûte "qu'il s'en fût ensuivi une telle effusion de sang" si le poste n'eût réussi à fermer les portes pour séparer les combattants (De Brimont, Les XVIe siècle et les guerres de religion en Berry, t. I, chap. 3.) (p. 396.)

 

Bazas. A la fin de 1561, les protestants mettent en pièces les statues de toutes les églises, les orgues, les vases sacrés, les ornement sacerdotaux (GAULLIEUR, (protestant), Histoire de la réformation à Bordeaux, I, p. 115-117.)

 

Castres. Le 31 décembre 1561 et le 1er janvier 1562, les protestants détruisent les images et les autels de la cathédrale Saint-Benoît et de toutes les autres églises de la ville; le 2 février, on brûle tous les ornements sacerdotaux de l'église des Mathurins (Histoire du Languedoc, XI, p. 373.)

 

Saint-Paul-Trois-Châteaux. Les huguenots, en 1561, pillent l'église, prennent les croix, calices et ornements et brûlent les reliques de saint Restitut (BOUCHE, Histoire de Provence, II, 633.)

 

Vienne. En mars 1561, quarante huguenots armés brisent, la nuit, les statues du portail de la cathédrale. Ils en font autant à Saint-Pierre, Saint-Martin et Saint-André-le-Haut (NICOLAS CHORIER, Histoire du Dauphiné, I, 553.)

 

Valence. En 1562, les protestants mettent le feu aux églises, brûlent les images et battent les autels (BOUCHE, Histoire de Provence, II, p. 638.)

 

Toulouse. En mai 1562, les huguenots essaient de prendre Toulouse, ils réussissent à en occuper une grande partie. Ils s'emparent de l'église Saint-Paul qu'ils mettent au pillage, tentent d'en faire autant de la cathédrale Saint-Etienne et de la Daurade. Le 14 mai, ils visent à coups de canon les clochers des Augustins, des Cordeliers, des Jacobins, de Saint-Sernin; […] Ils prennent d'assaut les couvents de Saint-Orens, des Cordeliers, de la Merci, de Saint-Antoine, des Béguines, des Augustines, l'église paroissiale de Notre-Dame du Taur, les églises de Saint-Pantaléon et de Saint-Quentin. Ils enlèvent les objets précieux de ces églises. Le 15 mai, ils échouent devant Saint-Sernin, mais prennent et saccagent l'églises des Chanoinesses de Saint-Sernin (Histoire du Languedoc, XI, p. 387 et suiv.)

 

Vendôme. En mai 1562, Jeanne d'Albret…, reine protestante de Navarre, s'empara de vendôme et laissa ses soldats piller la collégiale de Saint-Georges, profaner les tombeaux, briser les statues et les autels… L'orgue, qui avait été construit en 1487, fut détruit et ses tuyaux d'argent enlevés. La reine fit briser les tombeaux des Bourbons, aïeux de son mari (Antoine) et même celui de son beau-père… (METAIS, Jeanne d'Albret et la spoliation de l'église Saint-Georges de Vendôme.)

En même temps, Jeanne d'Albret fit piller un grand nombre d'églises du Vendômois, celles de Saint-Sauveur, de l'Etoile, de Notre-Dame de Villethion.

 

Poitiers. En 1562, les huguenots pillent l'église et l'abbaye de Saint-Hilaire. Ils saccagent la "fameuse bibliothèque et librairie dudit lieu qui était munie de si grand nombre de bons et anciens livres, tant grecs, hébreux que latins, et où de toutes parts, les gens doctes accouraient pour en tirer quelque chose".

 

Le Puy. En 1562, le baron des Adrets avec une troupe de protestants, pille le faubourg de l'Aiguille et les autres faubourgs du puy, saccage les églises des Carmes, des Cordeliers, des Jacobins (Histoire du Languedoc, XI, p. 413.)

 

"La raison de ces troubles est facile à comprendre. Tant que François Ier avait subi l'influence de leur protectrice, Marguerite de Valois, sa sœur, les protestants avaient espéré gagner le gouvernement royal à leurs doctrines et, par le bras séculier, devenu huguenot, les imposer de force à la France. Mais, dans les dernières années de son règne, soit qu'il cédât au Parlement, gardien des traditions catholiques et gallicanes du pays, soit qu'il redoutât lui-même le triomphe du protestantisme, François Ier se montra fidèle catholique; son fils, Henri II (1547-1559), accentua encore ce zèle en faveur de la religion nationale et il le prouva en sanctionnant les mesures de rigueur prises par le Parlement contre les protestants. Ceux-ci changèrent alors de tactique ! Et, le coup de force contre les catholiques qu'ils avaient tout d'abord espéré de l'Etat, ils essayèrent de l'accomplir eux-mêmes : au lieu de la loi générale qui aurait aboli la messe (comme en Angleterre ou en Suisse), confisqué les biens du clergé, forcé les prêtres et les fidèles à l'apostasie, comme cela s'était produit en Allemagne, en Angleterre, en Suisse, en Suède, en Norvège et Danemark, ils essayèrent de supprimer en détail le culte catholique, profitant de toutes les occasions qui paraissaient s'offrir à leur fanatisme"

 

(Jean Guiraud, Histoire partiale histoire vraie, tome II, Moyen Age – Renaissance – Réforme, 4° édition, Gabriel Beauchesne & Cie Editeurs, Paris 1911, p. 388-389.)

 

1er mars 1562, : Massacre de Vassy en Champagne, (23 morts et plus de cent blessé : LAVISSE, Histoire de France, t. IV, p. I, p. 58-59, in Jean Guiraud, Histoire partiale histoire vraie, tome II, Moyen Age – Renaissance – Réforme, 4° édition, Gabriel Beauchesne & Cie Editeurs, Paris 1911, p. 402) par des soldats du duc de Guise, contre 200 Huguenots qui célèbrent leur culte dans une grange.

 

"Or, il (le massacre de Vassy) fut précédé de massacres de catholiques et d'excès de toutes sortes commis sur plusieurs points du territoires par les huguenots. Excitées par "les appels sauvages" de leurs pamphlétaires, les passions protestantes 'faisaient rage dès 1560.'

Dans les provinces du Midi surtout, il y avait des prêches en armes, des pillages, saccagements d'églises, des courses, des combats entre les bandes huguenotes et les troupes royales. […] En 1561, les huguenots avaient saccagé l'église saint-Médard et plusieurs autres.

Dans un certain nombre de villes du Languedoc, ils s'étaient emparés à main armée de plusieurs églises : à Montauban, Béziers, Castres, Nîmes, ils avaient interdit tout culte catholique, arraché les religieuses de leurs couvents et forcé ces innocentes victimes à assister aux prêches; à Montauban, il y avaient poussé le peuple à coups de fouet et de nerfs de bœufs.

Ceux qui avaient essayé de résister avaient été mis en prison et fouettés jusqu'au sang; plusieurs mêmes avaient expiré sous les coups.

Le 20 octobre 1561, à Montpellier, les huguenots avaient pris les armes, s’étaient rués à l'improviste sur les catholiques, avaient tué, avec le gardien des Cordeliers, près de quarante personnes et pillé plus de soixante églises ou chapelles…"

 

(Jean Guiraud, Histoire partiale histoire vraie, tome I Des origines à Jeanne d'Arc, neuvième édition, Gabriel Beauchesne & Cie Editeurs, Paris 1911, p. 70-71.)

 

"Il n'y eut pas à Vassy un "massacre" de protestants; mais […] une bagarre sanglante, une échauffourrée où il y eut des morts des deux côtés, Guise lui-même étant blessé par les protestants" (ibid. p. 403.)

 

"[…] Les guerres de religion étaient déjà commencées avant le massacre de Vassy. […] On vit des bandes ou plus exactement de vraies armées protestantes organisées, dès 1559, 1560, 1561, c'est-à-dire un an, deux ans, trois ans auparavant, dans toute l'étendue du territoire, occupant de force les églises, saccageant les villes, promenant la dévastation dans les campagnes. […] Qu'étaient-ce donc que ces émeutes suscitées délibérément par les protestants, ces rixes et ces batailles sinon des guerres de religion ? […] Et le tableau que Ronsard (Discours des misères de ce temps adressé à la reine régente Catherine de Médicis) et Mézeray nous ont tracé de la France en 1562, nous montre qu'elle était livrée depuis longtemps aux luttes à main armées des factions politiques et religieuses." (p. 404.)

 

En somme et pour résumer, si l'on écoute les mythographes républicains, les catholiques du XVIe siècle auraient dû se laisser égorger sans se défendre, laisser les oeuvres d'art, les églises et leurs lieux de culte se faire détruire, dépecer, incendier, saccager, les religieux assassiner.

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3 mars 2015 2 03 /03 /mars /2015 13:48
Messe de requiem pour la Petite Emigrée Françoise Gandriau à Lassay-les-Châteaux

Vendredi 6 mars 2015 à 20h30 en l'église paroissiale de Lassay-les-Châteaux (Mayenne), une messe de requiem sera célébrée à la mémoire du martyre de Françoise Gandriau, simple servante vendéenne, assassinée par les terroristes républicains.
 

Françoise Gandriau dite « La petite émigrée », s'enfuit à la Révolution avec sa maitresse (1794) mais fut rattrapée et guillotinée avec celle-ci et cinq de ses compagnons. Elle repose aujourd'hui à Lassay-les-Châteaux, à l'endroit où elle fut enterrée avec sa maîtresse et ses compagnons, c'est-à-dire au fond d'un champ devant un châtaignier sur la route de Thubœuf. Son lieu de sépulture est entouré d'une clôture. Au bord de la route, à proximité, se trouve une croix blanche en souvenir d'elle. ("Lassay les Châteaux, ses châteaux, son passé", S. GRARD) Sa tombe existe toujours, ainsi qu'un modeste oratoire qui borde la route de Thuboeuf, élevé par la population lasséenne qui garde le culte de l'honneur. En effet, on vient toujours en faire le tour, comme les mamans par le passé avec leurs enfants car on disait qu'ils pourraient alors marcher précocement, mais aussi pour rendre hommage à cette jeune héroïne. L'accès y a été sécurisé.

 

Cette Vendéenne de 19 ans a été guillotinée le 6 mars 1794 dans la commune, par la commission Clément, particulièrement sanguinaire. « Cette jeune fille a été héroïque non en raison de l'injustice commise par la juridiction de la Terreur révolutionnaire, mais pour son exigence morale qui l'a conduite à choisir la mort plutôt que le déshonneur et le mensonge », souligne Claude Bodin, président de l'association du Souvenir de la petite émigrée .

Elle a été exécutée le lendemain de son jugement, et sa tombe est toujours située dans la commune. Elle est toujours visitée et entretenue.

Au programme :
Autour de l'abbé Julliot, curé de Lassay,
l'ensemble du prestigieux vocal Volubillis d'Évron chantera La Messe de Requiem de Gabriel Fauré, le Cantique de Jean Racine de Faure, et le Vexilla regis de Saint-Venant.

Messe de requiem pour la Petite Emigrée Françoise Gandriau à Lassay-les-Châteaux
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2 mars 2015 1 02 /03 /mars /2015 10:51
Empire carolingien

Empire carolingien

Suite du documentaire Les Rois de France (Merapi productions, AB productions, La Bibliothèque nationale de France)

Charlemagne est le plus célèbre des souverains de la dynastie carolingienne qui lui doivent son nom. Conquérant, administrateur, législateur, propagateur de la religion catholique, il agit en maître et défenseur de l'Eglise.

 

(4) Les Rois de France - Charlemagne

Protecteur des arts et des lettres, Charlemagne est à l'origine de la Renaissance carolingienne.

Charlemagne est considéré comme le Père de l'Europe puisqu'il a assuré le regroupement de l'Europe occidentale.

Il a aussi posé des principes de gouvernement dont ont hérité les grands états européens.

Charlemagne est un monarque guerrier. Il a agrandi le royaume grâce à une série de campagnes.

 

Dans les années 770, il commença ses nombreuses conquêtes. Royaume lombard en 773, conquête de la Saxe de 771 à 804, Roncevaux dans les Pyrénées (778) fut sa plus grande défaite. Cependant, ses ennemis furent continuellement repoussés.

(4) Les Rois de France - Charlemagne

Le signe éclatant de l'autorité acquise par Charlemagne fut son couronnement en tant qu'empereur par le Pape Léon III en 800.

 

[Du fait des règles successorales germaniques du partage à la mort du roi défunt. NDLR] [l]'énorme empire ne peut survivre à la disparition de son créateur. Charlemagne, soucieux de la tradition germanique avait prévu de le partager entre ses trois fils dès 806, mais l'empire ne fut en fait partagé qu'entre ses trois petits-fils, en 843, au Traité de Verdun.

La Francie au traité de Verdun en 843 et les menaces extérieures

La Francie au traité de Verdun en 843 et les menaces extérieures

Le documentaire omet d'indiquer que si Charlemagne résolut de soumettre les Saxons par la force c'est parce que ceux-ci faisaient des raids réguliers et des pillages meurtriers sur la Gaule romaine dès le IVe siècle, de même que sur le Regnum francorum au VII et VIIIe siècles.

 

En Gaule, sous l'empereur Valentinien (364-375) :

 

Histoire du déclin et de la chute de l'empire romain, Tome 1 : Rome de 96 à 582 par Gibbon "Les côtes maritimes de la Gaule et de la Grande-Bretagne étaient toujours exposées aux ravages des Saxons. Le succès de leurs premières entreprises excita naturellement l'émulation des plus braves de leurs compatriotes, qui se déplaisaient dans la triste solitude des montagnes et des forêts. ... Ils étendirent la scène de leur brigandage, et les pays les plus enfoncés dans les terres ne durent plus se croire en sûreté contre leurs invasions. ... Leurs bateaux étaient si légers qu'on les transportait sur des chariots, d'une rivière à une autre : et les pirates qui entraient dans l'embouchure de la Seine ou du Rhin pouvaient descendre sur le cours rapide du Rhône jusque dans la Mer méditerranée. Sous le règne de Valentinien, les Saxons ravagèrent les provinces maritimes de la Gaule." (Gibbon, Histoire du Déclin et de la Chute de l'Empire romain, Rome de 96 à 582, Robert Laffont, Malesherbes 1984, p. 727-729)

 

Au VIIe s., sous Dagobert , on vit les Saxons menacer la frontière nord (627), puis au VIIIe, sous Pépin le Bref (Roi des Francs 751-768) reprendre leurs raids.

 

Histoire religieuse de l'Occident médiéval par Chélini "A travers les considérants de la terrible Capitulatio de partibus Saxoniae, l'on peut évoquer quelques traits du paganisme saxon. Ces barbares adoraient les fontaines, les arbres, les bois sacrés; ils croyaient aux sorciers; ils pratiquaient des sacrifices animaux et humains et le cannibalisme rituel; ils incinéraient leurs morts.

 

A l'égard du christianisme, ils ressentaient une haine farouche et ils pourchassaient les clercs jusqu'à ce qu'ils aient quitté le pays ou qu'ils aient été mis à mort. Une manifestation de cette aversion du nom chrétien fit éclater le conflit." (Jean CHELINI, Histoire religieuse de l'Occident médiéval, Pluriel, Millau 2012, p. 153-154)

 

Début des années 780, les Saxons se soulèvent de nouveau, entrent en territoire franc, et provoquent des ravages jusqu'à la Moselle. Charlemagne ne pouvait rester les bras ballants. Il organise une sévère répression, mais les révoltes n'en continuent pas moins. Commandés par Widukind, les Saxons opposent une vigoureuse résistance. Le massacre de Verden (782) sur la Weser fera 4.500 victimes et 12000 femmes et enfants sont déportés car ils refusent le baptême. Charles se conduisit alors comme le fléau de Dieu, usant de la politique de la terre brûlée, renversant leurs idoles, ravageant leurs sanctuaires, massacrant et pillant tout sur son passage. Il reprit en pays saxon une méthode autrefois utilisée par son grand-père, puis par son père. Le chef des Saxons, Widukind, se réfugia chez ses voisins et se mit sous la protection de Sigfred, roi des Danois. Après cette victoire, Charles réorganise la Saxe, qui devient une province de son empire, et ordonne la conversion forcée des Saxons païens. La plupart des rebelles ont été livrés à Charlemagne par les chefs saxons, sauf Widukind, introuvable. Celui-ci obtient le soutien des Frisons et des Danois établis au nord de l'Elbe.

 

Les Francs sont battus par Widukind au mont Süntel en 782. S'ils sont victorieux l'année suivante, ils doivent hiverner dans le pays de 784 à 785 pour venir à bout du soulèvement.

 

En 785, Charlemagne instaure en Saxe le Capitulaire De partibus Saxoniae: les païens doivent se convertir sous peine de condamnation à mort. Widukind aurait accepté de se rendre contre la promesse de ne pas être tué. Voyant qu'il devait gagner son soutien, Charlemagne le persuade de se faire baptiser lors d'une cérémonie collective en 785 à Attigny dans les Ardennes françaises.

(4) Les Rois de France - Charlemagne

Dans les années 792 à 795, des Saxons se soulèvent à nouveau, refusant le Capitulaire.

 

Les rebelles saxons demandent l'aide des Frisons, leurs voisins du nord, eux aussi païens, et des Avars, déjà en lutte contre Charlemagne. Ils réhabilitent le culte des idoles, pillent les églises et traquent les catholiques. Devant la tournure des évènements, Charlemagne doit revenir en Saxe (494). Il divise son armée en deux. Une partie sous ses ordres, l'autre sous ceux de son fils, Charles le Jeune. Charlemagne entre en Thuringe et Charles en Westphalie. Les rebelles se rendent sans combat et jurent fidélité au roi.

 

L'année suivante, Charlemagne et son armée traverse la Saxe jusqu'à l'Elbe.

Si la pacification de la Saxe dura encore de nombreuses années, elle s'achève officiellement à Paderborn en 799. [Widukind ne prend plus part aux combats sporadiques - qui durent jusqu'en 804 - après cette date. Il meurt le 7 janvier 810. L'historien Pierre Bauduin explique que « la crainte inspirée par la conquête du pays et la brutale soumission de ses habitants eut sans doute sa part dans le mouvement d'expansion viking » (Élisabeth Deniaux, Claude Lorren, Pierre Bauduin, Thomas Jarry, La Normandie avant les Normands, de la conquête romaine à l'arrivée des Vikings, Ouest-France, Rennes, p. 371). Hypothèse déjà formulée par Lucien Musset (Lucien Musset, « Naissance de la Normandie », Michel de Boüard (dir.), Histoire de la Normandie, Privat, 1970, p. 93. Hypothèse que l'on peut aussi lire dans le Dictionnaire du Moyen Âge, histoire et société, Encyclopaedia Universalis, Albin Michel, 1997, p. 285 et 833).

 

Plus de mille ans après sa mort, un monument en hommage à Widukind fut érigé en 1899, à Herford dans le nord-ouest de la Westphalie, œuvre en bronze du sculpteur berlinois Heinrich Wefing. Détruit pendant la Seconde Guerre mondiale en 1942, pour récupérer le bronze, le monument a depuis été reconstruit, signe de l'attachement des Allemands aux personnages emblématiques de leur histoire, même ancienne. Widukind est un peu aux Allemands ce que Vercingétorix est aux Français.

 

Mais on n'en aura pas fini avec les Saxons puisque l'accession au trône du "Saint-Empire romain germanique" de Otton Ier (en 962), fils d'Henri Ier de Saxe, dit Henri l'Oiseleur, duc de Saxe, inaugurera le nouveau pouvoir saxon en Germanie, qui allié avec le roi d'Angleterre tentera d'envahir la France et de supprimer la monarchie française en 1154 et à Bouvines en 1214. NDLR.]

(4) Les Rois de France - Charlemagne

L'invasion des Maures

(4) Les Rois de France - Charlemagne

En 711, les Maures envahissent l'Espagne. Sous le commandement de Tariq Ibn Ziyad, ils imposent à une grande partie de l'Espagne et du Portugal le règne islamique. Ils étendent leur influence et font des incursions jusque dans le nord de la France, mais ils sont arrêtés à la bataille de Toulouse en 721 et par Charles Martel à la bataille de Poitiers en 732.

 

Dans la péninsule ibérique, seul le Nord-Ouest et les régions majoritairement basques des Pyrénées échappent à leur domination.

Pour le pape Adrien Ier, comme tous les Chrétiens, il revient à Charlemagne de se défendre contre ce danger permanent. Charlemagne n'avait pas l'intention de conquérir l'Espagne, il avait conscience du décalage économique et culturel des deux mondes. 

Sulayman Ibn Al Arabi, wali, c'est-à-dire gouverneur de Barcelone et Gérone, est menacé par par Abd ar-Rahman I, l'émir Omeyyade de Cordoue. Il envoie donc une délégation à Charlemagne afin de lui offrir sa soumission, et l'allégeance de Hussein de Saragosse, le gouverneur de la ville, en échange d'une aide militaire. L'occasion était belle pour Carolus Magnus d'affermir sa réputation en faisant une démonstration de la puissance de son armée. Intimider les Musulmans, et rasséréner les Chrétiens soumis à leur autorité, voilà deux objectifs exaltants pour le protecteur du Pape. En réponse, l'armée de Charlemagne traverse les Pyrénées vers Saragosse en 778, dans le but de tenir la ville. Il s'entoure de douze ducs, et chaque duc dispose de 3000 cavaliers. Hussein de Saragosse refuse d'ouvrir les portes de la ville, déclarant qu'il n'avait jamais promis son allégeance. Trouvant les portes closes, l'armée du roi franc décide de retourner sans son royaume, car sans machines de siège qu'il ne pouvait pas transporter à cause des Pyrénées, la cavalerie est inefficace. Sur le chemin de retour, l'armée met à sac la ville basque de Pampelune qui avait pourtant résisté à la pression musulmane.

Roland sonnant du Cor à Roncevaux

Roland sonnant du Cor à Roncevaux

Puis, en août 778, une partie de l'armée doit se replier pour rejoindre la Germanie où les Saxons s'étaient de nouveau rebellés. Ce groupe est composé de Charlemagne et de son escorte. L'armée est divisée en deux car le passage est très étroit. L'arrière-garde qui protège le repli s'engage ensuite dans les vallées pyrénéennes. Elle est commandée par Roland, gouverneur de la Marche de Bretagne, un valeureux guerrier, très aimé de Charlemagne. Il passe par le Col de Roncevaux, situé à une cinquantaine de kilomètres de Pampelune. Ce col correspond à l'ancien passage du Col d'Ibaneta à 1066 m d'altitude, voie de passage naturel utilisé depuis la préhistoire pour accéder à la péninsule ibérique. Sur les pentes escarpées de Roncevaux, les Vascons, ancêtres des Gascons et des Basques, attaquent par surprise en représaille du pillage de Pampelune, ils dévalent les montagnes et massacrent la troupe franque, surpenant l'ennemi sur les hauteurs afin de le précipiter dans le ravin. Cet évènement devint le plus connu du règne grâce à un poème épique et une chanson de geste écrite à la fin du XIe siècle, la Chanson de Roland. Alors qu'Eginhard, dans sa Vita Caroli, accuse les Vascons de ce revers, la Chanson de Roland évoque les Sarrasins, terme qui englobe tous les Musulmans, et fait de Roland un martyr chrétien.

 

[Voici comment Eginhard, l’historien de Charlemagne, raconte cet échec du grand empereur : « Charles, dit-il, ramena d’Espagne ses troupes saines et sauves. A son retour cependant, et dans les Pyrénées, il eut à souffrir un peu de la perfidie des Basques. L’armée défilait sur une ligne étroite et longue, comme l’y obligeait la conformation du terrain. Les Basques se mirent en embuscade sur la crête de la montagne, qui, par l’étendue et l’épaisseur de ses bois, favorisait leur stratagème.

« De là, se précipitant sur la queue des bagages et sur l’arrière-garde destinée à protéger ce qui la précédait, ils la culbutèrent au fond de la vallée, tuèrent, après un combat opiniâtre, tous les hommes jusqu’au dernier, pillèrent les bagages, et protégés par les ombres de la nuit, qui déjà s’épaississait, s’éparpillèrent en divers lieux avec une extrême rapidité.

« Les Basques avaient pour eux dans cet engagement la légèreté de leurs armes et l’avantage de leur position. La pesanteur des armes et la difficulté du terrain rendaient au contraire les Francs inférieurs en tout à leurs ennemis. Egghiard, maître-d’hôtel du roi ; Anselme, comte du palais ; Rotland, commandant des marches de Bretagne, et plusieurs autres, périrent dans cette occasion. »

[...] Roland est la personnification la plus brillante, la plus animée, de cette chevalerie qui née vers le milieu du XIe siècle se prolongea jusqu’aux derniers jours du XIIe dans sa réalité, et jusqu’au règne brillant de François Ier dans son apparence et dans sa forme. La chevalerie, dont la figure imaginaire de Roland est un des types les plus précis, les plus brillants, fut une institution d’une haute importance à une époque où la force semblait la seule loi, le seul droit.

[...] Fondée sur trois grandes passions : la foi, la valeur et l’amour ; prenant pour devise : Dieu et ma dame, la chevalerie, tant poétique, tant idéale malgré l’imperfection et le vague où elle demeura, fit faire de grandes choses, excita l’enthousiasme et influa heureusement sur le développement moral de la société. A la fois, pour ainsi dire, prêtre et soldat, le chevalier s’appuyait sur le courage et la religion : il faisait bénir cette épée qu’il consacrait à la défense du bon droit ; dans son noviciat, il apprenait l’obéissance et la valeur ; enfin, avant que le jeune écuyer reçût l’accolade, fût armé chevalier par son maître, il devait avoir fait preuve de vertu, de courage, de piété, et s’être lié par ses serments à protéger le faible, l’orphelin, et à ne combattre que pour la bonne cause ; puis il partait pour les grandes aventures, pour les emprises d’armes, pour les lointaines expéditions.

Ce sont ces mœurs, ces vertus héroïques, cette pureté de cœur, cette vaillante audace que célébraient les poèmes chevaleresques et, pour en rehausser sans doute l’éclat, on les mit sous le patronage des hommes qui avaient laissé dans l’histoire un nom célèbre, glorieux. C’est ainsi que Charlemagne fut le héros d’un roman, d’une épopée où le vainqueur des Saxons se transforme sous l’armure du chevalier.

Dans ces récits l’histoire et la fantaisie, la réalité et l’idéalité se confondent, se mêlent à ce point que, plus tard, l’histoire hésita longtemps sur la voie qu’elle devait suivre, ignorant où était la vérité, et qui elle devait adopter, de ces physionomies idéales, resplendissantes de dévouement, de franchise, de piété, ou de ces barbares et courageux vainqueurs des invasions saxonnes, dont les traits sont durs, sauvages, dont la politique est adroite, rusée, la foi intéressée.

[...] De tous les souvenirs chevaleresques, celui de Roland est demeuré le plus populaire ; à chaque pas, dans le Midi, on retrouve les traces de cette fabuleuse et héroïque figure : la brèche de Roland, dans les Pyrénées, vaste défilé au milieu des montagnes, atteste encore la trempe de sa puissante épée ; dans le Roussillon, le pas de Roland maintient son souvenir ; à Blaye on a longtemps conservé son cor d’ivoire, ce cor merveilleux dont les sons se faisaient entendre à sept lieues de distance et avec lequel il adressa à son oncle Charlemagne ses suprêmes adieux ; enfin souvent nos soldats, dans les guerres contre les Anglais, s’animaient au combat en chantant la romance dont les aventures de Roland forment le sujet.]

 

La plupart des historiens s'accordent maintenant pour dire qu'à la bataille de Roncevaux, les chevaliers carolingiens ont, en fait, affronté la milice vasconne (basque) et non l'armée sarrasine. En pleine période de reconquête de l'Europe, il est fort possible que le texte de la Chanson de Roland, ait été écrit pour donner un fondement historique aux Croisades.

Charlemagne se contenta alors d'occuper les places fortes en Catalogne. Les représailles sont impossibles. Comment manoeuvrer dans ce dédale de pierres et qui punir?

 

["La 'Reconquête' commence en Espagne dès lors que Charlemagne, malgré son échec de 778 et le désastre de Roncevaux, ajoute dans les premières années du IXe siècle aux principautés demeurées chrétiennes - la Galice, la Cantabrie, les Asturies - une 'marche d'Espagne' qui se mue en un comté de Catalogne et un royaume de Navarre. Dès le IXe siècle, la Reconquête donne naissance à l'Ouest au royaume de Leon. Au milieu du Xe siècle, s'ébauchent autour de Burgos un royaume de Castille et au sud de la Navarre un royaume d'Aragon. C'est de ces deux royaumes que partent les principales entreprises en direction du centre de la péninsule..." qui aboutiront en 1212 à Las Navas de Tolosa, à la défaite des Almohades qui s'effondrent sous les coups portés par les chrétiens enfin réunis. Source: Jean FAVIER, Les Grandes découvertes, d'Alexandre à Magellan, Fayard, Paris 1991, p. 132-133.]

 

La Bavière

 

Le soulèvement des Saxons encouragea par ailleurs le duc de Bavière, Tassilon III, qui en 779 refusa de reconnaître la souveraineté franque et fut sur le point de semer le trouble dans toute la partie sud de la Germanie occupée par les Francs.

(4) Les Rois de France - Charlemagne

Tassilon était le fils d'Hiltrude, fille naturelle de Charles Martel, et épouse du duc Odilon de Bavière. Ce lien de parenté avait permis à sa mère d'être régente du duché de Bavière pour son compte en 748.

En 757, Tassilon jura fidélité au roi des Francs à l'assemblée de Compiègne, devenant ainsi le vassal de Pépin le Bref. En 787, Tassilon tenta d'obtenir le soutien du Pape Adrien Ier, mais la faveur de l'Eglise allait aux Francs. Charlemagne, son cousin, leva trois armées pour soumettre le duc rebelle. Tassilon, contraint et forcé, renouvelle son serment au Lechfeld, près d'Augsbourg, le 3 octobre 787.

De retour dans sa capitale, à Ratisbonne, Tassilon reprit ses intrigues, il négocia avec les Avars, ennemis des Francs, mais le parti de l'aristocratie favorable à Charles fit prévenir ce dernier. Tassilon fut forcé d'avouer tous les crimes qu'on voulait bien lui reconnaître, et fut condamné à mort en 788. Toutefois, en raison de son lien de parenté, Charles le fit sauver, mais à condition qu'il entrât dans les ordres. Ce qu'il fit à l' l'abbaye Saint-Pierre de Jumièges. La Bavière est intégrée au royaume en 788.

 

Charlemagne confisque les biens immenses de Tassilon qui était considéré comme l'homme le plus riche de l'empire, plus que Charlemagne lui-même, qui de surcroît n'a jamais eu de fortune personnelle et fut un des premiers rois de l'époque médiévale à distinguer le Trésor royal et ses biens propres.

Les Avars

 

Après la Bavière en 791, Charles mène contre les Avars une première expédition.

 

Les Avars sont une peuplade belliqueuse d'origine turco-mongole. Ils sont établis en Pannonie, l'actuelle Hongrie. Pillards païens, les Avars constituent une menace constante pour les Francs. Ils ont multiplié les interventions dévastatrices en Bavière et dans le Frioul en 788. Ils s'attaquent aux églises, qu'ils pillent sans vergogne, et mettent à l'abri leurs trésors dans un camp fortifié fortement gardé, appelé le Ring.

 

La guerre contre les Avars est sans pitié. Charlemagne répond à la férocité de l'ennemi par une férocité égale. Pour la première campagne en 791, Charlemagne fait appel à 10.000 cavaliers, et pour faire suivre l'intendance nécéssaire, un train de bateaux progresse en même temps sur le Danube. Il divise son armée en deux afin d'avancée en même temps sur les deux rives du Danube. Charlemagne confie le commandement de celle au nord au comte Theodoric, alors qu'une troisème force composée par son fils Pépin doit attaquer à revers depuis la frontière du Frioul. L'armée franque entre en terre avare à la fin du mois de spetembre sans rencontrer de résistance. Les Avars pratiquent la politique de la terre brûlée. Ainsi à la mi-octobre, alors que Charlemagne atteint la rivière Raab, le manque de fourrage et les privations imposées aux soldats le décide à faire demi-tour sans avoir livré bataille.

 

Charlemagne ne renonce pas et en 793, il prépare de nouveau la guerre contre les Avars, il fait construire un pont de bateaux démontables sur le Danube et commence la construction d'un canal pour relier les bassins du Rhin et du Danube. Néanmoins, ce projet n'aboutira pas. Cette même année, l'armée que Charlemagne lève en Frise contre les Avars est détruite par les Saxons révoltés. Le comte Theodoric est tué et la révolte de la Saxe ajourne l'expédition contre les Avars.

 

En 795, l'affrontement se termine par la prise du camp retranché royal avar par Pépin, il envahit le pays avec des forces considérables. Le camp abrite un trésor gigantesque, fruit de plusieurs années de pillage. Le territoire avar est placé sous le contrôle des Francs, puis christianisé. La prise du butin du Ring avar, quinze chars d'or fut envoyé à Aix et joua un rôle conséquent dans la puissance de Charlemagne, lui permettant de récompenser largement ses fidèles. On estime que ce seul butin a contribué à un mouvement d'inflation sensible dans l'ensemble de l'empire carolingien.

 

Charlemagne désire créer l'empire carolingien, un empire pluri-ethnique civilisateur. Le pape Léon III va dans ce sens, mais pour lui, le pouvoir spirituel l'emporte sur le pouvoir temporel, et il saura le signifier clairement au futur empereur.

(4) Les Rois de France - Charlemagne

Le jour de Noël de l'an 800, Charlemagne est couronné empereur d'Occident par le pape Léon III à la basilique Saint-Pierre de Rome. La papauté doit énormément à Charlemagne car celui-ci a renforcé les états pontificaux créés par son père, Pépin le Bref (751-768).

 

Les rites du couronnement vont être inversés au profit du pape. Le pape pose la couronne sur la tête de l'empereur Charlemagne, en le faisant acclamer par ses troupes, mais il fait exprès de le faire acclamer après avoir déposé la Couronne sur la tête de Charlemagne. Ce qui veut dire que le pouvoir spirituel est supérieur au pouvoir temporel, et que Charlemagne ne doit pas l'empire à ses victoires - qui pourtant sont importantes -, mais qu'il le doit à une désignation particulière par Dieu. Nous sommes dans un système de Chrétienté.

 

Selon Eginhard, l'historien de Charlemagne, l'empereur est sorti furieux de la cérémonie. Il aurait préféré que l'on suive le rituel bizantin, c'est-à-dire l'acclamation d'abord, le couronnement et enfin l'adoration [système que l'on peut dire "césarien démocratique", et non chrétien, où le pouvoir trouve son fondement dans le peuple, et où les empereurs assumaient sur leur tête les deux pouvoirs temporel et spirituel, ce qui était la confusion des pouvoirs temporel et spirituel et non leur distinction selon l'enseignement de Jésus "Rendez à César ce qui appartient à César et à Dieu ce qui appartient à Dieu.")

 

Le pape Léon III eut donc une bonne raison de ne faire acclamer Charlemagne qu'après lui avoir déposé la Couronne sur la tête. Ce sera d'ailleurs plus tard de cette manière que tous les rois de France seront couronnés: sacre, couronnement, acclamation.

"Il n'y a point d'autorité qui ne vienne de Dieu". Epître aux Romains, 13, 1 : Le pouvoir du roi lui vient de Dieu et il exerce la suprême autorité temporelle en son nom. 

En 1789, la Révolution détruira l’autorité en prétendant qu'elle provient des inférieurs : « Le principe de toute souveraineté réside essentiellement dans la nation. Nul corps, nul individu ne peut exercer d’autorité qui n’en émane expressément. » (Article 3 de la Déclaration des droits de l’homme de 1789.)

Si l’on veut rétablir l’ordre naturel chrétien, il faut commencer par rétablir la vraie notion de l’autorité, et affirmer que celle-ci vient de Dieu et non du peuple. Cf. "Dieu, principe et modèle de toute autorité". NDLR].

 

 

Le "Defensor Ecclesiae"

 

"Charlemagne mit au service de l'Eglise son pouvoir en identifiant totalement la société civile et la société religieuse (ce qui était déjà la pratique de nos ancêtres les Gaulois. NdCR.).

 

À aucun moment n'existe chez Charlemagne, quelle que fut sa piété, la tentation de la théocratie sacerdotale. Il ne lui vint jamais à l'esprit de penser que le pape était son supérieur et avait un rôle politique à jouer dans l'imperium christianum. Il s'en est expliqué bien avant d'être sacré empereur dans sa lettre à Léon III de 796 :

 

"Voici quelle est notre tâche. À l'extérieur, protéger, les armes à la main, avec le secours de la grâce divine, la sainte Église du Christ de l'invasion des païens et de la dévastation des infidèles; et à l'intérieur, défendre le contenu de la foi catholique. La vôtre, très saint Père, par la prière de vos mains levées au ciel à l'instar de Moïse, est d'aider notre armée jusqu'à ce que, par votre intercession, sous la conduite et par le don de Dieu, le peuple chrétien ait toujours la victoire sur les ennemis de son saint nom et que Notre Seigneur Jésus-Christ soit glorifié dans le monde entier."

 

Le pape est ainsi confiné dans un rôle sacerdotal, il est le grand prêtre du Regnum christianum. Il ne saurait être question qu'il en sorte.

 

(En même temps que Charles était roi choisi par la volonté divine) [j]amais en Occident, après la disparition de l'Empire, la papauté ne fut aussi soumise et de bon gré à l'autorité monarchique." (Jean CHELINI, Histoire religieuse de l'Occident médiéval, Pluriel, Millau 2012, p. 141-142.)

L'empire bizantin refuse de reconnaître le couronnement impérial de Charlemagne, le considérant comme une usurpation.

 

Charles et ses conseillers invoquent le fait que l'empire d'Orient ne peut être dirigé que par un homme, or c'est à l'époque une femme, l'impératrice Irène de Bizance (797-802) qui revendique ce titre.

 

Ce n'est qu'avec le traité de paix d'Aix-la-Chapelle en 812 que Michel Ier Rangabé, empereur d'Orient, daigne accepter vraiment de reconnaître le titre impérial de Charlemagne et de ses successeurs en utilisant toutefois des formules détournées, évitant de se prononcer sur la légitimité du titre, tel que "Charles, Roi des Francs, que l'on appelle leur empereur".

Administration et progrès de l'empire chrétien d'Occident

 

Au VIIIe siècle, les Carolingiens originaires d'Austrasie (Ancien "Royaume de Reims") déplacent vers le nord-est leur résidence.

 

Au début de son règne, Charlemagne n'a pas de lieu de résidence fixe.

Aix-la-Chapelle, capitale de l'empire franc

Aix-la-Chapelle, capitale de l'empire franc

A partir de 790, Charlemagne réside le plus souvent à Aix-la-Chapelle (Austrasie, terre des ancêtres de Charlemagne), qui à la fin du VIIIe siècle n'avait rien du capitale. C'était une station thermale antique fondée par les Romains. Selon Egihard, Charlemagne l'a découverte lors d'une partie de chasse. Il apprécie l'endroit et en fait son lieu de résidence et la capitale de l'Empire, construisant un Palais, dont la magnifique Chapelle, allait devenir la cathédrale. Le Palais de Charlemagne fut construit sous ses ordres. Son architecture s'inspire des traditions romaines et bizantines. Charlemagne y a résidé de 801 à sa mort, en 814, et y est enterré.

 

L'axe Rome-Aix-la-Chapelle est l'épine dorsale de l'Occident chrétien sous Charlemagne et Louis le Pieux.

 

Vue intérieure de la chapelle palatine d'Aix-la-Chapelle (Aquisgranum / Aachen), commencée vers 792 et achevée en 805

Vue intérieure de la chapelle palatine d'Aix-la-Chapelle (Aquisgranum / Aachen), commencée vers 792 et achevée en 805

La ville d'Aix se développe grâce au Palais. La justice royale se rend dans la salle de juridiction du Palais, il abrite aussi une caserne militaie et un atelier monétaire. Charlemagne fait d'Aix la Chapelle le siège de sa Cour. Ainsi la ville devient aussi une capitale intellectuelle, elle est considérée comme la nouvelle Athènes. Charlemagne y crée l'Académie palatine, un cercle de lettrés réservé aux beaux esprits proches de l'empereur, qui a pour mission de former la nouvelle génération de comtes, d'administrateurs, sachant lire et écrire. Elle dispose aussi d'une importante bibliothèque. La Cour, la demeure de Charlemagne était aussi le lieu de réception des ambassadeurs.

 

On sait que Charlemagne avait voulu rivaliser avec le Palais de Constantinople.

Le Mosaïque du plafond de l'entrée de la Chapelle palatine d'Aix-la-Chapelle montre des fleurs de lys, symbole de la monarchie française depuis Clovis. Les fleurs de lys, symbole de pureté virginale, furent remises à Clovis lors de la bataille de Tolbiac, par son épouse, sainte Clotilde, à qui un ermite de la forêt de Marly avait remit un bouclier où figurait trois fleurs de lys, en référence à la sainte Trinité (Père, Fils et Saint-Esprit). L'ermite affirma l'avoir reçu d'un ange pour que le roi s'en serve durant la bataille à la place de ses armes ornées de trois croissants ou de trois crapauds. Selon l'ermite, ce bouclier devait lui assurer la victoire. (Cf. La légende de Clovis recevant la fleur de lys - XVe siècle, Bedford Book of Hours, 1423)

Le Mosaïque du plafond de l'entrée de la Chapelle palatine d'Aix-la-Chapelle montre des fleurs de lys, symbole de la monarchie française depuis Clovis. Les fleurs de lys, symbole de pureté virginale, furent remises à Clovis lors de la bataille de Tolbiac, par son épouse, sainte Clotilde, à qui un ermite de la forêt de Marly avait remit un bouclier où figurait trois fleurs de lys, en référence à la sainte Trinité (Père, Fils et Saint-Esprit). L'ermite affirma l'avoir reçu d'un ange pour que le roi s'en serve durant la bataille à la place de ses armes ornées de trois croissants ou de trois crapauds. Selon l'ermite, ce bouclier devait lui assurer la victoire. (Cf. La légende de Clovis recevant la fleur de lys - XVe siècle, Bedford Book of Hours, 1423)

La Chapelle est un témoin de la Renaissance carolingienne, la salle voûtée annonce les cathédrales.

 

Au début du IXe siècle, l'état franc représente déjà un vaste empire, et ses frontières sont fortement consolidées. Après le couronnement de Charlemagne, le centre de gravité se déplace vers l'Est, c'est-à-dire au détriment de la France et au bénéfice de l'Allemagne.

 

[...] Les lettrés du temps utilisent le terme "Renovatio" pour qualifier le mouvement de renouveau en Occident après deux siècles de déclin. Dès 774, en vainquant les Lombards, Charlemagne prend le contrôle de l'Italie du Nord et de son précieux patrimoine culturel. De plus la chute du royaume wisigoth lors de l'invasion de l'Espagne par les Sarrasins, amène de nombreux intellectuels et ecclésiastiques à rejoindre la Cour des rois francs. Les Carolingiens bénéficient donc de connaissances venues du royaume qui se voulait l'héritier de l'empire romain et le conservateur de sa culture.

Depuis le VIe siècle, le monachisme est très fortement développé dans les Îles britanniques.

 

Les monstères irlandais conservent les connaissances latines et grecques et sont le siège d'une vie intellectuelle intense.

Les érudits viennent à la Cour de Charlemagne

Les érudits viennent à la Cour de Charlemagne

Les invasions conduites par les Vikings font venir des Îles britanniques des érudits [on avait déjà vu des celtes catholiques des Îles britanniques se réfugier chez nous en Armorique, lors des invasions saxonnes en Angleterre fin Ve-début VIe siècle et dont les légendes du Roi Arthur et des Chevaliers de la Table ronde sont une réminiscence. Il s'intégrèrent si bien dans cette région qu'ils lui donnèrent leur nom, la Bretagne. NDLR.] 

 

Les érudits contribuent avec l'instauration de la Règle de Saint Benoît à l'essor de la vie monastique dans le royaume carolingien. Cette poussée monastique et la facilitation de l'écriture aboutissent à un meilleur partage des connaissances. Ainsi, de nombreux érudits de toute l'Europe viennent à la Cour de Charlemagne, et en y partageant leurs connaissances, déclenchent la Renaissance carolingienne.

 

Alcuin, par exemple, est arrivé d'Angleterre en 782. Il est l'un des principaux conseillers de l'empereur. Il participe vivement au renouveau biblique: la Bible d'Alcuin est un des plus anciens manuscrits d'Occident [C'est cette Bible, dans la traduction latine de Saint Jérôme, corrigée par Alcuin (la Vulgate), qui sera choisie par le concile de Trente, au XVIe siècle, comme la référence officielle de l'Église catholique. Replié à l'abbaye de Saint-Martin de Tours, Apôtre des Gaulois, Saint Patron de la France dont on a vu les premiers Mérovingiens (Clovis et sainte Clotilde) développer le culte, Alcuin développe un atelier de copistes qui va devenir le plus important d'Occident. Source: http://www.herodote.net/Alcuin_732_804_-synthese-377.php].

 

Alcuin institue à Aix-la-Chapelle une école palatine pour former les futures élites laïques et religieuses. Il met en place un vaste programme d'éducation.

 

Le monachisme irlandais et l'instauration de la Règle de Saint Benoît conduisent à la fondation de nombreux monastères et écoles dans tout l'empire. Ces monastères, avec leurs deux écoles intérieure et extérieure, leur bibliothèque et leur scriptorium sont la base de la Renaissance carolingienne.

Folio 50 de l'Admonitio generalis de 789

Folio 50 de l'Admonitio generalis de 789

 

Charlemagne prévoit dans son Capitulaire Admonitio generalis de 789 que dans chaque évêché, dans chaque monastère, on enseigne les Psaumes, les notes, les chants, les computs, la gramaire, et que l'on ait des livres soigneusement corrigés.

 

Le nombre d'école augmente encore après le Concile de Mayence de 813, qui ordonne la création d'écoles rurales pour former de jeunes prêtres.

Vers 770, la mise au point par des scribes de l'Abbaye de Corbis, d'une nouvelle écriture, la minuscule Caroline, permet de gagner en lisibilité car les mots sont séparés les uns des autres et les lettres sont mieux formées. [Elle se diffuse ensuite dans tout l'Empire dans les codex, les capitulaires et divers textes religieux avant d'évoluer vers l'écriture gothique au XIIe siècle. Elle présente des formes rondes et régulières qui la rendent plus facile à lire et à écrire que la minuscule mérovingienne, ce qui assure sa renaissance au XVe siècle, sous la forme de l'écriture humanistique lorsque des humanistes florentins l'ont redécouverte et préférée à l'écriture gothique qu'ils jugeaient artificielle et illisible. NDLR]

 

Des ateliers de copies se développent dans les abbayes carolingiennes et les connaissances s'échangent dans toute l'Europe.

 

Pour stimuler et maintenir les valeurs chrétiennes au sein de son Empire, Charlemagne adopte une politique culturelle ambitieuse. L'art des manuscrits s'enrichit considérablement avec les enluminures mais surtout la minuscule Caroline. En effet, Charlemagne diffuse de l'utilisation de l'écrit comme moyen de diffusion de la connaissance et de l'usage de la langue latine.

 

S'appuyant sur les érudits britanniques comme Alcuin, le latin médiéval s'uniformise et incorpore des mots nouveaux avec des racines grecques ou germaniques pour servir de langue internationale. La théologie aussi se développe, et Charlemagne restaure la philosophie et l'histoire. Il fait aussi construire des cathédrales dans tout l'Empire, avec un art très aché de l'orfèvrerie, des fresques et des mosaïques inspirées de l'art bizantin.

 

Carolingian Minuscule, minuscule caroline dans un parchemin du Xe siècle

Carolingian Minuscule, minuscule caroline dans un parchemin du Xe siècle

L'homme et la fin de son règne

(4) Les Rois de France - Charlemagne

Le portrait de Charlemagne nous est connu grâce à Eginhard, son contemporain. Grand, il est dit qu'il mesurait 1m92, il était fort et vigoureux. Charlemagne inspire le respect de ses ennemis qui sur le Champ de bataille craignent davantage sa force physique que son intelligence tactique.

 

D'une réelle bonté, il aimait faire des aumônes au pauvres et vénère sa mère (Berthe au Grand pied) qu'il consulte souvent. Très attaché à sa famille, il ne se sépare jamais de ses enfants. Il fut marié à quatre reprises.

 

Charlemagne a une grande curiosité d'esprit. Il s'instruit beaucoup pour pallier ses lacunes. Il donne ainsi une éducation complète à ses enfants. Mais il est d'abord et avant tout un guerrier, bien que son but affirmé soit la paix.

 

Profondément religieux, il est convaincu que Dieu a confié au peuple franc et à son souverain la tâche de répandre et de défendre la foi chrétienne, ainsi que les coutumes qu'elle a portées avec elle.

 

Il est souvent surnommé l'empereur à la barbe fleuri. En prêtant à l'empereur une barbe alors qu'il était vraisemblablement imberbe, les représentations du souverain veulent souligner son autorité virile. Charlemagne a cependant une épaisse moustache.

 

Charlemagne apprend à écrire tardivement et n'apprend jamais à maîtriser cette difficile technique. Ce qui le motive à créer une école dans son palais afin que les hommes devant le servir soient à même de rédiger des rapports. Bien que ne sachant pas écrire, Charlemagne sait lire. Sa langue maternelle est le francique, il parle couramment le latin et le grec.

 

La figure de Charlemagne est idéalisée dans la culture médiévale, notamment au travers des Chansons de geste.

 

Avant sa mort, suivant la coutume franque, Charlemagne prépare le partage de son royaume entre ses fils, sans désigner de successeur au titre d'empereur. Il ne reste plus à ce moment-là qu'un seul fils, Louis, qui était roi d'Aquitaine. Il le nomme co-empereur en septembre 813 à Aix-la-Chapelle.

Charlemagne décède le 28 janvier 814 à Aix-la-Chapelle.

 

En 1165, à l'instigation de l'empereur Frédéric Barberousse, Charlemagne est mis au nombre des saints par l'antipape Pascal III. Cependant, cette canonisation n'a jamais été légitimée par la suite. Peut-être en raison de la conversion des Saxons par la force, il ne compte donc pas au nombre des saints. Mais son culte reste toléré et sa fête est fixée au 28 janvier.

Épée de Charlemagne, dite Joyeuse

Épée de Charlemagne, dite Joyeuse

Son épée "Joyeuse" et ses éperons d'or, étaient utilisés lors du couronnement des rois de France. Napoléon Ier utilisa lui aussi l'épée Joyeuse lors de son couronnement impérial.

 

[Cette épée, conservée dans Le Trésor de la Basilique de Saint-Denis jusqu'en 1793, est alors entrée dans les collections du musée du Louvre. L'épée a de nouveau été utilisée pour le sacre sous la Restauration. NDLR]

Empire franc en 814 à la mort de Charlemagne

Empire franc en 814 à la mort de Charlemagne

Le fils de Pépin le Bref, qui donna son propre nom à la dynastie fondée par son père, aura régner 46 ans durant les quelquels son appétit de conquêtes lui aura permis de soumettre Saxons, Bavarois, Lombards et Avars. Il aura conquis la quasi totalité du continent européen occidental. Cet immense territoire où vivaient des peuples aux cultures hétérogènes ne pouvait se fondre en son royaume. Il en fit un empire, érigeant le christianisme en religion commune. Il utilisa l'Eglise comme un outil de cette unification, mais en fut également un fidèle serviteur et le protecteur du Souverain Pontife. Organiser un si grand empire à un moment où les moyens de communication étaient très peu développés était un véritable défi auquel Charlemagne fit face avec habileté. Il répandit l'usage de la monnaie argent pour mieux contrôler les échanges

Denier argent de Charlemagne

Denier argent de Charlemagne

(4) Les Rois de France - Charlemagne

Il nomma des Missi dominici dans chaque comtés afin d'améliorer la centralisation administrative et le contrôle des territoires les plus éloignés.

 

Il fit venir dans son Palais des lettrés d'Orient et d'Occident et mit la culture au service de son pouvoir et de la religion qui devint le ciment indispensable à la cohérence de cet empire chrétien d'Occident.

 

Mais cette cohérence reposait sur la personne de l'empereur [nous ne sommes pas encore dans la monarchie héréditaire et statutaire qui - fin XIIe siècle - reposera non plus sur l'élection et la personne du roi (monarchie élective) mais sur le droit et la Constitution coutumière du Royaume, principes qui seront acquis avec l'avènement de Philippe II Auguste en 1180. NDLR.], et ce dernier ne crut pas que son oeuvre puisse lui survivre. Il organisa son partage, qui sera le prélude de son éclatement.

 

Néanmoins, on reconnaît en Charlemagne le Pater europae (Père de l'Europe), le père qui forgea le premier ensemble européen uni, il y a douze siècles.

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25 février 2015 3 25 /02 /février /2015 10:31

Suite du documentaire Les Rois de France (Merapi productions, AB productions, La Bibliothèque nationale de France)

(3) Les Rois de France - Charles Martel et Pépin le Bref

Les Carolingiens qui doivent leur nom à Charles, Carolus, Charles Martel, grand-père de Charlemagne, gouvernèrent l'Europe de 750 jusqu'au 10e siècle.

 

 

Francie vers 600 - Début VIIe siècle

Francie vers 600 - Début VIIe siècle

Raids saxons

 

En 627, sous Dagobert, les Saxons menaçèrent la frontière nord du royaume.

 

Incursions de Saxons à la frontière nord du royaume en 627

Incursions de Saxons à la frontière nord du royaume en 627

Dagobert lança ses troupes à leur rencontre. Pendant la bataille, le chef des Saxons parvint à couper la chevelure du roi mérovingien. Mais la frontière orientale est maintenant pacifiée. Saxons, Thuringiens, Alémans et Bavarois, toute une Germanie potentielle est fédérée à un royaume dont le centre de gravité se situe beaucoup plus à l'est que les cités de Neustrie.

 

Dagobert favorisa le développement d'une abbaye construite autour du culte de Saint-Denis, Premier évêque de Paris, décapité par les Romains sur le Mont des Martyrs en 258. On raconte qu'il prit sa tête et marcha ainsi en direction du nord, jusqu'à Saint-Denis où il dit c'est ici que je veux me faire enterrer. C'est au temps de Clovis que l'on construit une basilique à l'endroit où il s'est arrêté. Puis, une abbaye se développe sur ce lieu de pélerinage. Dagobert donne des terres à l'abbaye et surtout le droit d'organiser des foires. C'est une grande première qu'un roi accorde ce tel privilège à un centre religieux. En janvier 629, Dagobert inaugure une pratique qui va encore davantage marquer les esprits. Il est enseveli dans cette basilique qui est devenue la nécropole de tous ceux qui se succéderont sur le trône de France. Quelques Mérovingiens seront enterrés à cet endroit, mais à partir de Louis VI (1108-1137), tous les rois de France seront enterrés à Saint-Denis, jusqu'à la Révolution, et jusqu'à Charles X (1824-1830).

 

En 639, Dagobert laisse deux fils.

Clovis II, cinq ans, hérite de la Neustrie et de la Burgondie.

Sigebert III, dix ans, hérite de l'Austrasie. Il ne peut s'appuyer sur Pépin Ier que durant une seule année.

 

Le premier pipinnide meurt en 640, laissant la mairie à son fils, Grimoald. Ainsi, la mairie du Palais d'austrasie devient une charge héréditaire.

A la mort de Sigebert, en 656, il est alors tentant pour Grimoald de se débarasser du fils du Mérovingien, Dagobert II, alors âgé de quelques années. Grimoald le fait tonsurer et l'envoie dans un monastère irlandais, aux confins de l'Occident. Grimoald met son fils sur le trône d'Austrasie. Tous deux sont aussitôt assassinés sur ordre de Clovis II, après peut-être avoir été soutenu par ce même Clovis II pour pouvoir se débarasser de Dagobert II. C'est le premier coup d'état carolongien, alors même que cette dynastie est encore appelée pippinide. Les descendants de Grimoald retiendront la leçon et apprendront la prudence.

 

Les rois enfants de Dagobert Dagobert sont en train de perdre la réalité du pouvoir au profit des Grands. Ils inaugurèrent le règne des Rois fainéants.

Rois fainéants (650-750)

Rois fainéants (650-750)

Les Rois fainéants ne font pas grand chose pour plusieurs raisons. Ils règnent brièvement, cependant que la réalité du pouvoir à ces moments-là étaient détenue par les Maires du Palais, comme le sera Charles Martel. Et au XIXe siècle, sous la IIIe république, sous Jules Ferry, on les caricaturera, en les représentant dans des lourds chars couverts de coussins, traînés lentement par des boeufs, s'acheminant de ci de là.

 

Les Rois fainéants restaient sur le trône parce que l'on ne pouvait pas supprimer les descendants de Mérovée du jour au lendemain.

 

Les chefs des grandes familles règnent au nom des descendants de Clovis.

 

En 687, Pépin II de Herstal réunit entre ses mains les mairies du Palais d'Austrasie et de Neustrie, dont les transmissions deviennent héréditaires.

 

Pépin II est appellé Princeps, c'est-à-dire qu'il est prince des Francs.

 

Généalogie

 
 
Arnoul
(v. 582 † 641)
évêque de Metz
 
Dode
 
Pépin de Landen
(v.580 † 640)
maire du palais d'Austrasie
 
Itte
(† 652)
abbesse de Nivelles
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Ansegisel
(† entre 648 et 669)
domestique
 
 
 
 
 
Begge
(v.620† 693)
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Plectrude
 
 
 
 
 
Pépin de Herstal
(v.645 † 714)
maire de palais
 
 
 
 
 
Alpaïde
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Drogon
(† 708)
duc de Champagne
 
Grimoald II
(† 714)
maire du palais
 
Charles Martel
(v.688 † 741)
maire du palais
 
Childebrand
(† 751)
 

La famille de Pépin II s'est enrichie, pendant que les rois se ruinaient. C'est de ce transfert du Trésor royal que la dynastie mérovingienne meurt.

 

 

(3) Les Rois de France - Charles Martel et Pépin le Bref

Pépin meurt le 7 décembre 714. Une famille neustrienne s'empare de la Mairie du Palais d'Austrasie et utilise un prince mérovingien pour en faire un roi, Chilpéric II (719-721).

 

Charles Martel, le presque-roi, grand-père de Charlemagne

 

Charles a 30 ans en 714. C'est déjà un homme aguerri. Il réussit à repousser l'avancée des neustriens en Austrasie, mais il a besoin d'argent et d'un roi. Maire du Palais d'Austrasie, il fait proclamer roi d'austrasie un autre mérovingien, Clotaire IV (717-719). Il se prépare à donner la riposte aux Neustriens. Ceux-ci s'allient aux Aquitains et aux redoutables guerriers basques.

 

 

(3) Les Rois de France - Charles Martel et Pépin le Bref

Charles donne un premier exemple de sa maîtrise de l'art de la guerre en l'année 720. Il fait mieux que mettre en déroute Aquitains et Basques, il se rend maître du Palais de Neustrie. Il récupère au passage le roi mérovingien des Neustriens, Chilpéric II (719-721), le sien ayant rendu l'âme. A la tête des deux royaumes, Charles est appelé Princeps, comme son père. Le pape va même jusqu'à l'appeler "vice-roi".

 

Comme son père, Charles favorise l'expansion et la cohésion de la Chrétienté, en protégeant les missionnaires. Le duc d'Aquitaine fait appel à lui pour stopper la progression des cavaliers musulmans qui font des raids en Aquitaine et de plus en plus loin jusqu'au royaume des Francs.

 

(3) Les Rois de France - Charles Martel et Pépin le Bref

Invasions arabes

 

Les Mahométans, comme on disait à l'époque ou les Sarrasins, après avoir pillé la Basilique Saint-Hilaire de Poitiers, se dirigent vers le sanctuaire le plus populaire des Francs, Saint Martin de Tours.

 

Il y a dans cette invasion une revendication spirituelle : les gens conquis changent de religion, ils adoptent les préceptes de Mahomet. C'est à ce moment-là qu'il y a une prise de conscience d'un péril de la Chrétienté. L'Eglise latine met tout son poids dans la balance. Il y a une mobilisation énorme des royaumes francs et l'homme qui symbolise cette mobilisation, c'est Charles.

 

C'est sur la voix romaine entre Poitiers et Tours qu'après sept jours d'escarmouches et d'observations entre les deux armées, le 25 octobre 732, qu'un affrontement inédit voit les cavaliers de l'émir se heurter à la discipline de fer du guerrier du Prince des Francs. Des guerriers soudés par des liens d'hommes à hommes et qui défendent leur territoire. La bataille est violente.

Charles Martel bat les Arabes à Poitiers en 732

Charles Martel bat les Arabes à Poitiers en 732

Les troupes musulmanes qui faisaient des razzias depuis des mois sont écrasées. On pense que cela a été une guerre extrêmement meurtière, avec de très grands pillages de part et d'autre.

 

Les conséquences à court terme de ce triomphe sont de l'ordre de la politique intérieure. L'Aquitaine est assujettie au Royaume des Francs.

 

Sur le plan religieux, l'islam est alors considéré par les Chrétiens comme une hérésie parmi d'autres. Il est possible en revanche que sur le plan culturel Charles et ses contemporains aient eu conscience d'un choc des civilisations. La bataille de Poitiers est un message de Dieu.

(3) Les Rois de France - Charles Martel et Pépin le Bref

Charles Martel devient le défenseur de la Chrétienté et le garant de la civilisation, ou plutôt d'une civilisation, celle de l'Occident, celle de l'Europe. Il devient par la même occasion le premier chevalier. Charles ne fut jamais roi de France, mais quand il décède en 741, il est inhumé dans l'abbatiale de Saint-Denis. La basilique n'est pas encore la nécropole des rois de France. Mais l'histoire finit donc par donner à Charles une sépulture digne de lui.

 

Pépin le Bref, le roi sacré

 

Ami des moines de l'Abbaye de Saint-Denis, Charles leur a confié l'éducation de son fils, Pépin le Bref. Pépin doit son surnom de sa petite taille. Il va épouser Berthe au grand pied, et il va avoir un fils, Charlemagne. Et on sait, grâce à un tibia que l'on a retrouvé, que Charlemagne mesurait entre 1m85 et 1m88.

 

En 743, deux ans après la mort de Charles, Carloman et Pépin sont contreints de s'entendre pour mettre un mérovingien sur le trône. Le temps n'est pas venu de s'approprier le trône. Mais on est toujours dans la monarchie élective, on choisit celui qui va être roi. [La monarchie deviendra héréditaire à partir du sacre de Philippe Auguste en 1179, puis statutaire ou constitutionnelle au XVe siècle, suite au désastreux traité de Troyes qui en 1420 déshérita le roi de France au profit du roi d'Angleterre. La couronne de France n’est point une propriété particulière du roi, mais un véritable fidéicommis dévolu à l’aîné de la race capétienne : fidéicommis intangible et que nulle loi ni volonté souveraine ne peut modifier. C'est la base du royalisme légitimiste. Source].

 

Les Mérovigiens étant dans une phase de perte de puissance depuis le début du VIIIe siècle, Pépin le Bref considère dans les années 740 qu'il est temps désormais de changer la dynastie royale. Il envoie au pape une lettre pour obtenir l'autorisation de déposer le dernier Mérovingien. La réponse lui parvient, l'autorisant à éliminer ce Mérovingien [Le pape Zacharie répondit que devait "être roi celui qui exerçait la réalité du pouvoir"]. En 751, avec l'aval du pape, Pépin le Bref fait couper la chevelure du dernier descendant de Mérovée, Childéric III, qui finit sa vie dans un monastère. Acclamé par les guerriers, les évêques et les grandes familles, Pépin le Bref est couronné roi des Francs dans l'abbatiale Sant Médard de Soissons. C'est un coup d'état.

 

Pépin le Bref ne se contente pas d'être couronné. Il se fait sacrer roi, comme les rois d'Ancien Testament. Il reçut l'onction sainte des mains de Saint Boniface, l'Apôtre des Germains. Jamais un Mérovingien n'avait été sacré. Comme Clovis ils avait été baptisé, puis couronné. Ils (les Marovingiens) tenaient leur légitimité de Dieu. Mais Pépin fait mieux, il est l'élu. Il ne se contente pas d'être en accord avec le projet divin, il est censé le concrétiser.

(3) Les Rois de France - Charles Martel et Pépin le Bref
(3) Les Rois de France - Charles Martel et Pépin le Bref

Le pape Etienne II, menacé par les Lombards, avait besoin d'un allié en Europe, qu'il trouva en Pépin.

 

 

(3) Les Rois de France - Charles Martel et Pépin le Bref

En 754, le pape nomme Pépin "Protecteur des Romains". Pépin en profite pour donner plus de crédit à sa Couronne en se faisant sacrer une seconde fois par le pape, en l'abbatiale de Saint-Denis. Et cette fois, c'est toute une famille qui est sacrée, les deux fils de Pépin, Carloman et Charles reçoivent aussi l'onction papale. C'est l'acte de naissance d'une dynastie qui amènera Charles jusqu'au couronnement impérial. Mais c'est bien son père qui assure non seulement la transition entre les rois de la première race et ceux de la seconde, mais aussi une transition institutionnelle. La moralisation de la société s'accompagne d'une modernisation du droit qui va de pair avec la centralisation du pouvoir. Le projet est bien de gouverner une communauté unie par une même foi, à partir d'un point central, tout autant pôle idéologique et politique que pôle économique. Vers ce point central convergent les ressources économiques. Le Trésor royal, de patrimoine privé devient budget d'état. Ce point central n'est pas encore Paris. Pépin, comme les Mérovingiens, n'a pas de résidence fixe et la capitale de Charlemagne sera Aix-la-Chapelle. En effet, les Carolingiens, c'est plus que la France, c'est l'Allemagne et bientôt l'italie.

 

La mutation que cette famille a opéré est à l'origine de l'organisation politique de l'Europe, une même foi sous l'autorité de Rome, une même logique de fonctionnement tant que culturelle et juridique et administrative pour des peuples d'une grande diversité.

 

Se sentant malade, Pépin le Bref se fait transporter à Saint-Denis. Le 23 septembre 768, il sacrifie à la coutume franque en divisant son royaume entre ses deux fils, il meurt le lendemain à l'âge de 54 ans.

 

Au IXe siècle, on inventa des filles à Dagobert afin qu'elles épousassent des Pipinnides. Quand les Carolingiens finiront par céder la place, des quatre coins de l'Europe, d'autres familles grefferont des ramifications dans leur arbre généalogique afin de se rattacher à la matrice carolingienne. Une matrice définie par l'association de deux pouvoirs, le pouvoir politique et le pouvoir spirituel.

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20 février 2015 5 20 /02 /février /2015 07:39

Suite du documentaire Les Rois de France (Merapi productions, AB productions, La Bibliothèque nationale de France).

(2) Les Rois de France - Dagobert Ier
La Francie en 629 sous Dagobert

La Francie en 629 sous Dagobert

«En 511, à la mort de Clovis, le royaume fut partagé (tradition successorale germanique du partage entre les héritiers).

Les quatre fils survivants se partagent les états de leur père. Chacun reçoit essentiellement une portion des régions centrales, c'est-à-dire des espaces les plus riches (le bassin parisien, les espaces rhénans) et chacun reçoit également une frontière dangereuse à garder et éventuellement des zones de conquêtes annexées.

 

Thierry Ier, l'aîné, eut la responsabilité de la région rhénane face au peuple germain ("Royaume de Reims" s'étendant de Reims à l'ouest à la Werra à l'est, et des actuels Pays-Bas au nord à la Burgondie au sud, grosso modo Rhône-Alpes) face au royaume burgonde. Plus les terres conquises contre les Wisigoths en 507 (Massif central). Les trois autres frères héritèrent des territoires avec pour chacun d'entre eux des villes fortement symboliques.

Pour Clodomir, Tours, la cité de Saint Martin, le soldat romain qui était devenu l'Apôtre de la Gaule ("Royaume d'Orléans").

Pour Childebert Ier, Paris ("Royaume de Paris"), la ville où reposait Clovis.

Et enfin, pour Clotairer Ier, le plus jeune, Soissons et Tournai ("Royaume de Soissons"), les premières capitales des Francs saliens en Gaule.

 

Plusieurs rois, mais un seul Regnum francorum. Chaque responsable de cité était appelé comte. Il recevait des terres et la protection du roi.

 

Les serments de fidélité des guerriers à leur supérieur sont connus depuis le Ve siècle. C'est une création romaine. Toutefois, les Barbares ont adopté ces serments qui prennent des noms variables. On parlera plutôt de vasselage à partir du VIIIe siècle.

 

Après la mort de Clovis en 511, l'unité du royaume fut néanmoins assuré pendant un temps par Clotilde († 545), l'épouse de Clovis, qui dut sinon assurer une régence, au moins influencer les décisions de ses enfants. Pendant près de quinze ans, Clotilde assure la régence au nom de ses trois fils les plus jeunes.

 

Les quatre frères affrontèrent les troupes burgondes le 25 juin 524 à Vézéronce, près de Vienne, bataille qui vit la défaite des Francs, mais aussi la mort de Clodomir, dont la tête servit de trophée aux soldats burgondes. Clodomir avait trois fils (Théodebald ou Thibault, Gunthar ou Gonthaire, et Clodoald) qui trouvèrent refuge auprès de la reine Clotilde. Mais Childebert Ier et Clotaire Ier s'en emparèrent. Thibault et Gonthaire furent assassinés. Clodoald fut le nom de l'enfant qui survécut, il choisit la tonsure, et fuyant les hommes et les loups, fonda un monastère en région parisienne. ll devint Saint-Cloud.

 

Clotaire, Childebert et Thierry dépeçèrent le royaume de leur frère Clodomir en trois parts. Clotilde se retira à Tours, près du sanctuaire de Saint Martin [l'Apôtre des Gaules, NDLR.]

 

Statue de saint Cloud à l'hôpital Saint-Cloud en Minnesota, États-Unis

Statue de saint Cloud à l'hôpital Saint-Cloud en Minnesota, États-Unis

Regnum francorum en 531

Regnum francorum en 531

Après le sud-est, direction le nord-est et la Thuringe (région située à l'est de l'empire franc, dans les régions des cours d'eau Saale, affluent de l'Elbe et la Weser) où là aussi, d'autres loups se disputaient un trône. Un espace depuis longtemps guigné par des rois des Francs qui y ont des contacts et des espérances pour récupérer cette région. Thierry et Clotaire profitèrent de la guerre civile pour envahir le royaume de Thuringe probablement en 531. Le trésor de guerre fut partagé en deux lots. Dans celui de Clotaire, des terres et une princesse de onze ans, Ste Radegonde († 587).

 

A partir de 532, de nouvelles campagnes furent menées en Burgondie. En 534, elle fut enfin annexée. Les Burgondes étaient des envahisseurs germaniques venus de l'Est qui régnèrent sur les sud-est de la France et également une région qui deviendra la Suisse romande, et laisseront leur nom à ce qui deviendra la Bourgogne.

 

En 537, coincé entre le Regnum francorum et l'empire romain d'Orient (empire byzantin), le royaume ostrogoth qui en 526 avait perdu Théodoric le Grand céda la Provence au Regnum. L'unité du royaume était réalisée, à l'exception de la Septimanie qui reste wisigothique. Les fils de Clovis avait accès à la Méditerranée.

 

En 537, les grandes frontières du Regnum francorum sont dessinées après l'annexion de la Burgondie et de la Provence

En 537, les grandes frontières du Regnum francorum sont dessinées après l'annexion de la Burgondie et de la Provence

Dans les années 530, l'Alémanie, au sud de la Thuringe et du Royaume de Reims, perdit aussi son autonomie, en même temps que la protection des Ostrogoths, dont la puissance déclinait. Ces contrées fédérées prirent le nom de duchés, terme qui servait à désigner des regroupements de comtés.

 

Avec la disparition de Thierry Ier en 534 et de ses enfants en 555, puis celle de Childebert Ier en 558, Clotaire Ier, régna seul sur ce Regnum francorum, jusqu'à sa mort en 561. Comme son père avant lui, le plus jeune fils de Clovis était le maître de l'Occident, entre 558 et 561.

Regnum francorum vers 550

Regnum francorum vers 550

L'un des fils de Clotaire, Chramne, s'était une première fois allié avec son oncle Childebert Ier afin de défaire son père et de s'approprier son royaume. Le fils vaincu obtint le pardon du père. Après la mort de Childebert (558), Chramne récidiva. Une nouvelle fois vaincu, Clotaire ne refit pas la même erreur. Il enferma Chramne avec femme et enfants dans une cabane de pécheurs qu'il fit brûler.

 

Les moeurs de Clotaire Ier peuvent heurter certaines sensibilités. Aussi, Ste Radegonde († 587) que Clotaire épousa de force en 538, et qui avait persécuté son peuple et massacré sa famille, ne plia jamais à ses exigences. Lors de réceptions, Radegonde apparaissait vêtue d'une tunique blanche. Son humilité chrétienne tranchait avec le rang qu'elle devait tenir. L'union dura pourtant une quinzaine d'années. Clotaire qui ne voulait pas s'avouer vaincu face à celle qui défiait son autorité, le fut cependant et Radegonde, retrouvant sa liberté, fonda un monastère dédié à la Vierge à Poitiers, en 555 (le Monastère Sainte Croix de Poitiers, le premier grand monastère de femmes d'Occident).

Partage du Regnum francorum en 561 à la mort de Clotaire Ier

Partage du Regnum francorum en 561 à la mort de Clotaire Ier

A la mort de Clotaire Ier, en 561, la Gaule fut à nouveau partagée entre ses quatre fils restants.

L'Austrasie (ou Royaume de Reims) revenait à Sigebert Ier.

La Burgondie (ou Royaume d'Orléans (jusqu'à la Provence), fut donnée à Gontran.

Le Royaume de Paris (allant de l'actuelle Normandie à l'Aquitaine), pour Charibert (Caribert Ier)

Et le petit royaume de Soissons (Nord) pour Chilpéric Ier.

 

En 567, Charibert disparut sans fils. Son royaume, celui de Paris, fut réparti en trois et en premier lieu, Paris elle-même, dont les revenus fiscaux furent divisés en trois parts égales.

Autre conséquence majeure du nouveau morcellement, Chilpéric changeait de statut en obtenant des domaines qui rapportaient et allaient lui permettre de concurrencer ses frères en créant une troisième entité en face de l'Austrasie (Royaume de Reims) et de la Burgondie, la Neustrie (Nord-ouest, capitale Soissons, et qui recouvrira la Normandie).

 

Sigebert (Roi de Reims 561-575), lui, régnait sur la partie la plus exposée du Regnum (est de l'Austrasie). Et alors qu'il était occupé à défendre ses frontières contre les Avars, apparentés aux Huns, peuple d'Asie centrale, Chilpéric l'attaqua. Sigebert, finalement vainqueur, pardonna à son frère et fit preuve de clémence.

 

Royaume des Francs en 561

Royaume des Francs en 561

En 566, le roi des Wisigoths accorda la main de sa fille cadette Brunehaut (ou Brunehilde) († 613) au plus puissant des Mérovingiens, Sigebert. A quinze ou seize ans, la mariée était cultivée, gracieuse et très belle. Cette union est le premier acte d'une tragédie. Brunehaut va se maintenir au pouvoir pendant quarante ans, comme épouse, mère, grand-mère, puis arrière grand-mère du roi régnait, assurant pratiquement à chaque fois la régence du royaume, jusqu'en 613.

 

Jaloux, Chilpéric demanda alors au roi des Wisigoths la main de sa fille aînée, Galswinthe. Ce dernier accepta. Une double alliance avec les Francs valait mieux qu'une. La tradition voulait que la nuit de noces, l'époux qui avait reçu la virginité de sa promise, lui fasse en échange un don, qu'on appelait "don du matin" ou morgengabe. Chilpéric consentit à lui donner un tiers de son territoire (sud de l'Aquitaine). Le mariage qui eut lieu en 567 devait lui fournir un héritier. Au bout de quelques mois, le ventre de la princesse wisigothe restait plat et Chilpéric retourna dans les bras d'une ancienne épouse, Frédégonde. Or si Galswinthe retournait en Espagne, elle emmènerait avec elle le morgengabe. Mais le père de celle-ci trépassa, et sans plus craindre sa vengeance, Chilpéric fit étrangler la soeur de Brunehaut pendant son sommeil. Une nuit de 568. Il se remaria alors rapidement avec Frédégonde. Et à partir de là, pour des générations d'historiens, ce fut la haine entre Frédégonde et Brunehaut qui allait mettre à feu et à sang le royaume des Francs: le début d'une guerre civile qui allait durer 45 ans.

 

Frédégonde, femme de Chilpéric Ier, petit-fils de Clovis, est la grande ennemie de Brunehaut non par haine personnelle (les deux reines ne se sont jamais rencontrées de leur vie), simplement parce que Brunehaut favorise les personnages de ses fils et petits-fils, alors que Frédégonde tente d'imposer son propre descendant, Clotaire II (613-629), comme maître de l'ensemble du royaume franc.

 

En 575, Chilpéric envoya deux esclaves assassiner son frère. Des catastrophes naturelles ravagèrent alors le royaume de Neustrie. La même année, une épidémie de dyssentrie tuait les deux fils de Frédégonde et de Chilpéric. Et tandis que la Neustrie s'affaiblissait, Brunehaut devint une véritable Reine mère en Austrasie à partir de 584. Quelques mois plus tard, Chilpéric fut poignardé par un de ses serviteurs. Avant de mourir, il avait eu un fils avec Frédégonde, le futur Clotaire II (613-629).

 

Pour gouverner, les Mérovingiens avaient besoin du ralliement des élites locales. Les Grands monopolisaient comtés et évêchés (Reims, Toul, Mayence, Liège, Cologne, Châlons, Strasbourg, Bâle, Metz, Trèves, Spire), ainsi que des charges publiques à l'intérieur du Palais. Brunehaut fit tout pour limiter leurs pouvoirs. Pour elle, l'ordre prévalait, le modèle restait l'Empire. L'autorité impériale était encore forte. Mais une autre référence se fit de plus en plus pressante à Rome. Le pape que les Mérovingiens avaient oublié. Brunehaut était contemporaine de Grégoire Ier le Grand, élu pape en 590.

 

Brunehaut était loin d'être populaire auprès des Grands d'Austrasie et de Burgondie, que Childebert II, son fils, récupéra à la mort de Gontran en 593. Il mourut en 593. A la mort de son petit-fils, Thierry II en 613, et du fils de celui-ci, dernier héritier, Sigebert II, la même année, deux grands d'Austrasie se rapprochèrent de Clotaire II, Arnoul de Metz et Pépin de Landen. Le fils du premier épousa la fille du second. De cette union naquit Pépin de Herstal, père de Charles Martel.

 

Grâce à ces deux conspirateurs, Brunehaut fut capturée. Torturée pendant trois jours, elle fut exhibée nue entre les bosses d'un chameau au milieu des insultes, puis on l'attacha par les pieds sur le dos d'un cheval, le reste du corps traînant le long des pattes arrières. Le cheval put alors partir au galop.

Mort de Brunhilde, British Library, Londres.

Mort de Brunhilde, British Library, Londres.

Clovis avait délimité un périmètre, on attendait que quelqu'un creuse les fondations. Le fils de Clotaire II allait pouvoir le faire maintenant que Brunehaut, entre la mort de sa soeur et la sienne, avait levé les dernières hypothèques au prix de son sang. Il s'appelait Dagobert.

Dagobert Ier, roi d'Austrasie, de Neustrie et de Bourgogne (mort en 639), Portrait imaginaire par Emile Signol

Dagobert Ier, roi d'Austrasie, de Neustrie et de Bourgogne (mort en 639), Portrait imaginaire par Emile Signol

Roi unique du Regnum, Clotaire II voulait en état central puissant comme Brunehaut. Il convoqua à Paris tous les évêques et tous les seigneurs laïques du Regnum en 614. Ceux-ci lui cédèrent les trésors de Brunehaut, mais il dut maintenir les trois entités (Neustrie, Austrasie, Brugondie) indépendantes, avec pour chacune un délégué responsable de leur gestion qui reprit l'appellation déjà ancienne, de maire du Palais.

A partir des années 580 apparaît au Palais mérovingien, un personnage de haut fonctionnaire bien connu, qui est le maire du Palais. Il s'agit avant tout d'un intendant qui assure le bon fonctionnement des institutions.

A partir des années 610, ce maire du Palais devient le premier personnage de l'état mérovingien, au point qu'en cas de Régence, c'est lui qui assure la quasi totalité des pouvoirs. Il y avait maintenant un roi et trois maires. La guerre civile avait affaibli le pouvoir royal tandis que les trois composantes se construisaient une identité propre, renforcée par les Grands.

 

Dagobert naquit vers 604 et jusqu'en 613 il fut bercé par les évènements de la fin de la guerre civile. Adolescent, il apprit son futur métier de roi à l'école du Palais, institution dont Clotaire semble être à l'initiative. Dagobert rentra en contact avec un cercle de fidèles nourris par le Souverain et potentiellement davantage préoccupés par le Bien public que par l'ambition personnelle. Ils reçevaient une formation juridique de haut niveau afin de participer à la politique de centralisation du Regnum, que l'on peut commencer à appeler Francie.

Le premier de ces esprits éclairés, était Eloi de Noyon, dit saint Eloi. Il avait seize ans de plus que Dagobert. Orfèvre de formation, il était le maître royal des monnaies. Le second s'appelait Ouen de Rouen, dit saint Ouen, né en 600, repéré par Eloi, il intégra cette élite grâce à ses compétences exceptionnelles. Un troisème se nommait Amand de Maastrichtd, dit saint Amand. C'était l'homme d'église de ce noyau dur qui allait contribuer au rétablissement de l'autorité royale. Grâce à eux, Dagobert se lança à la reconquête du pouvoir.

 

Le roi Dagobert est surtout connu pour avoir eu de très grands ministres. Le plus célèbre, le trésorier du Palais, saint Eloi, mais il y eu d'autres personnages éminent comme saint Ouen. Ces personnages ont laissé une importante correspondance grâce à laquelle on peut reconstituer la vie de Cour à l'époque du roi Dagobert.

 

Saint Éloi - Vitrail église Sainte-Anne de Gassicourt, à Mantes-la-Jolie

Saint Éloi - Vitrail église Sainte-Anne de Gassicourt, à Mantes-la-Jolie

 

La rivalité entre Neustrie et Austrasie n'avait pas disparu. Cette dernière réclamait la présence d'un roi.

En 623, Dagobert fut choisi pour représenter son père Clotaire II dans le pays de Pépin de Landen où Pépin Ier est nommé à vie maire du Palais d'Austrasie. En tant que délégué du roi il était le seul à pouvoir faire la loi. Dagobert s'appuya sur cette période de paix pour uniformiser et rationaliser la justice.

 

Un calendrier fut tout d'abord défini afin de fixer régulièrement des audiences. En cela, Dagobert est véritablement le précurseur de Saint-Louis. Tout comme lui et avant lui, Dagobert rend la justice où qu'il se trouve.

A l'époque de Dagobert, la justice de modèle romain a tendance à moins bien fonctionner qu'autrefois, dans la mesure où les grandes aristocraties locales assurent le traitement de la plupart des procès. Dagobert, pour réinstaurer une autorité monarchique sur la justice, se déplace énormément à travers le royaume, et part tantôt en Burgondie, tantôt en Austrasie pour essayer d'imposer un traitement public, étatique, monarchique de la justice, en imposant très souvent la peine de mort.

 

A la mort de Clotaire II en 629, Dagobert prit en main la Francie, malgré l'existence d'un frère discret et peu instruit, qui n'avait jamais suscité beaucoup d'espoir de la part de son père. Nommé tout de même vice-roi d'Aquitaine, il mourut en 632. Dagobert s'installa rapidement en région parisienne.

 

Une équipe gouvernementale s'était structurée à partir de l'école du Palais, et Paris devint un centre administratif. Eloi, l'argentier du royaume pouvait être considéré comme un Premier ministre. Proche des humbles, en quête de justice fiscale, il précisa les devoirs des Grands en échange des honneurs qu'on leur attribuait. Tout en protégeant les petits gens, il consolidait le pouvoir central.

 

(2) Les Rois de France - Dagobert Ier

Eloi sera l'objet d'une chanson au XIXe siècle "le Bon Roi Dagobert", avec "le grand Saint Eloi" et "le cher Dagobert".

 

Ouen, référendaire et Garde du sceau, généralisa en Neustrie et en Bourgogne l'action que Dagobert avait entreprise en Austrasie, en uniformisant la loi. La justice est maintenant la même pour tous, sans abus immoraux, mais conformes aux valeurs d'une société chrétienne, qui se voulait nationale. Tout vient du roi, tout est garanti par le roi.

 

Sur la lancée de la réforme du pape Grégoire le Grand, Amand, l'aumonier de la Cours, assainit le clergé. Les hommes d'église furent de moins en moins de faux dévots. Il inaugura chez les Slaves et les Basques une nouvelle forme d'évangélisation, en représentant l'autorité royale de Dagobert. L'adhésion à la religion du roi était aussi l'intégration au nouveau système mis en place en Francie.

 

Le prestige du roi amena Héraclius Ier, empereur d'Orient, à contracter (en 631) un traité de paix éternelle.

Restait dans le domaine militaire, deux priorités. Tout d'abord pacifier les deux peuples qui n'avaient jamais été totalement soumis par les Francs : Basques et Bretons. Ce qui fut fait. Les premiers par les armes en 635. Les derniers par la négociation. Ensuite, renforcer la frontière orientale. Ce qui fut fait. Saxons, Thuringiens, Alémans et Bavarois, toute une Germanie potentielle plus que jamais fédérée à un royaume dont le centre de gravité se situait beaucoup plus à l'est que les cités de Neustrie.

Francie et régions germaniques fédérées sous Dagobert (du nord au sud, Saxe, Thuringe, Alémanie, Bavière)

Francie et régions germaniques fédérées sous Dagobert (du nord au sud, Saxe, Thuringe, Alémanie, Bavière)

La paix du roi était solidement installée en Francie, ce qui permet à l'économie de s'épanouir. La production augmentait. Les échanges et les déplacements se multipliaient entre Méditerranée et la Mer du Nord avec le Bassin parisien comme relai privilégié.

 

L'Antiquité se diluait dans ce qui allait devenir la France médiévale. La base de cette vitalité était l'influence grandissante des grands domaines agricoles contrôlés par l'aristocratie et l'Eglise. Le VIIe siècle fut le temps des évêques. Il ne participaient pas seulement au développement de l'agriculture. Bâtisseurs, et restaurateurs des édifices du culte, ils relançaient l'artisanat. Propriétaires terriens, les évêques tenaient également la ville, l'hospice, l'école, une partie de l'administration judiciaire et fiscale.

 

Dagobert a été un grand bienfaiteur de l'abbaye de Saint-Denis. Il mourut le 16 janvier 639, et fut le premier roi à être enterré à côté du tombeau de Saint-Denis dans cette basilique, qui allait devenir abbatiale et nécropole de tous ceux qui se succéderont sur le trône de France.

 

La légende du roi Dagobert

 

Le bon roi Dagobert est devenu une légende parce qu'après lui commence l'ère des Rois fainéants.

 

Dagobert avait eu deux fils de deux épouses différentes.

 

Sigebert III qui avait dix ans en 639 hérita de l'Austrasie.

Clovis II, cinq ans, hérita de la Neustrie et de la Burgondie.

 

L'unité de la Francie n'était plus et le bel mais fragile équilibre obtenue par Dagobert et ses fidèles serviteurs laissa la place de nouveau au chaos. Les rois enfants de Dagobert allaient biensûr perdre la réalité du pouvoir, au profit des Grands. Ils inaugurèrent le règne des Rois fainéants.

Les Mérovingiens restent des rois relativement puissants jusqu'à la fin du VIIe siècle. Même au début du VIIIe siècle, le roi mérovingien est assez bien assis sur le trône pour condamner son propre maire du palais pour malversations financières. Toutefois, à partir des années 710, la plupart des rois sont extrêmement jeunes, et les Maires du Palais prennent une importance telle que le roi est condamné à l'inaction, ce qui a entraîné la légende des Rois fainéants.

 

Les Rois fainéants restaient sur le trône parce qu'on ne pouvait pas supprimer comme ça les descendants de Mérovée, du jour au lendemain. La légitimité de cette dynastie était ancrée dans les moeurs.

 

Dès 687, les Pippinides, membres d'une dynastie de la noblesse d'Austrasie, permirent à Pépin II de Herstal de réunir entre ses mains les mairies d'Austrasie et de Neustrie.

 

En 751, avec l'aval du Pape, le fils de Charles Martel, Pépin le Bref, coupa la longue chevelure du descendant de Mérovée, Childéric III. Le dernier héritier de Clovis finit ses jours dans un monastère. Pépin le Bref se fait couronner roi des Francs à Soissons. Désormais on parlera de dynastie carolingienne. Acclamé roi par les guerriers, les évêques et les grandes familles, Pépin donna plus de crédit à sa nouvelle Couronne en se faisant sacré par le Pape dans l'abbatiale de Saint-Denis.

 

Le "bon roi" est une synthèse d'humanité faite roi. Il personnifie les valeurs chrétiennes de justice, de sagesse et d'humilité, tout autant que les faiblesses de l'homme. Monogame en série, il contracta cinq unions légitimes, et accumula les concubines. Ce bon vivant avait la réputation de bien se tenir à table, malgré sa maladie. Ce côté paillard le rapprochait du peuple plus que de l'excommunication. Sa distraction légendaire fut mise en chanson, au XVIIIe siècle. Il est aussi utilisé comme caricature d'un roi qui allait bientôt perdre la tête.

 

Le bon roi Dagobert - Chanson (video)

"Le roi Dagobert" - Les petits chanteurs de l'Ile de France (avec paroles) (1966) Orchestre: François Rauber - Extrait de Rondes et chansons de France Vol. 1 - Renée Caron et Les Petits chanteurs de l'Ile

 

Populaire grâce à ses actes politiques, tout autant qu'à son mode de vie, il est le modèle du bon roi comme le fut près de mille ans après, Henri IV. Cependant, sa fermeté face aux Grands et sa quête de justice n'était peut-être qu'une stratégie qui avait pour objectif, avant tout, le renforcement de l'autorité royale.

(2) Les Rois de France - Dagobert Ier

Dagobert a servi de garde-fou aux futurs rois qui devront méditer sur la leçon du bienfaiteur de Saint-Denis. Ils apprendront dès leur plus jeune âge le projet divin. Leur tuteur étant bien souvent choisi parmi les membres de l'Eglise. Dans les périodes de chaos, ceux qui de nouveau voudront restaurer l'ordre s'appuiront sur son héritage.

 

Si l'arbre mérovingien vacilla rapidement après sa mort, Dagobert avait enraciné profondément sur un terrain religieux favorable le ferment de la nation française. Un gouvernement solide, une justice équitable, une hiérarchie qui organise un territoire à partir de Paris, capitale unitaire, et surtout des principes élaborés de son vivant ou à titre posthume.

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16 février 2015 1 16 /02 /février /2015 11:05

L'agence de presse russe en français "Sputniknews" a réalisé une utile infographie sur la naissance de l'Etat islamique, naissance située en 2006, en Irak, à partir de la "fusion de 11 mouvements islamistes radicaux".

L'infographie indique que "les réseaux jihadistes ont publié une carte dévoilant les plans d'expansion de l'Etat islamique dans les cinq années à venir."

L'objectif à long terme du Califat ("doctrine wahhabite de l'islam" précise l'infographie) est d'islamiser une zone couvrant tout le Proche et le Moyen-Orient, jusqu'à l'Inde et les frontières de la Chine, une partie du sud-est de l'Asie, l'Afrique du nord, ainsi que des territoires en Europe: Espagne, Grèce et Balkans.

"Des milliers de chiites (courant de l'islam considéré comme hérétique par les wahhabites), chrétiens et yézidis (monothéisme issu de l'antique mithraïsme iranien) ont été tués par les islamistes". "[D]es milliers de civils ont dû fuir les régions occupées par les extrémistes. Beaucoup de femmes et d'enfants ont été faits prisonniers et sont détenus dans des camps de concentration des terroristes."

"L'Etat islamique a créé une puissante structure de propagande. Al-Furqan est considéré comme son agence de communication."

 

Organisation terroriste État islamique

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