Mis a jour le 04/08/2024
En 1923, Joseph Barthélemy, député du Gers, remit à l'ordre du jour la question du vote des femmes devant le "Parlement". Il égréna les "objections fantaisistes" des bonnes consciences républicaines qui freinaient des quatre fers pour ne pas voter cette avancée égalitaire et les contredit :
D'après « L'Intransigeant », paru en 1923
De 1919 à 1940, des propositions de loi en faveur du vote des femmes sont adoptées, mais refusées par le Sénat. Le 22 novembre 1922, ce dernier avait, sur cette question du vote des femmes, refusé par 156 voix contre 134, de passer à la discussion des articles, les intentions de la Haute Assemblée étant nettes : l'enterrement.
Quelques mois plus tard, Joseph Barthélemy, député du Gers qui en est rapporteur, remet à l'ordre du jour la question devant le Parlement. Ne pouvant soumettre de nouveau, en vertu de l'article 110 de la Chambre, des propositions identiques rejetées quelques mois plus tôt par le Sénat, il suggéra de fixer à trente ans l'âge de l'accession des femmes aux droits politiques.
Il rétorqua en outre aux détracteurs du projet : « Voyons maintenant les objections qui ont été formulées. On a dit que les femmes ne désiraient pas le vote et qu'elles en négligeraient l'exercice Mais, en 1848, les hommes non plus ne désiraient par le vote, on le leur a donné par justice.
« On dit encore que la femme serait inférieure. La femme n'est pas inférieure, elle est seulement différente et complémentaire. La vérité, qu'il faut bien reconnaître, c'est que le génie, dans ses manifestations les plus sublimes, est le privilège du sexe masculin. Mais le génie n'est pas nécessaire pour voter, ni même pour être élu ! Tout cela ne tient pas. Toutes ces objections sont fantaisistes. Il en est de même quand on dit que la femme admise aux droits politiques émettrait des votes extrémistes ou réactionnaires. C'est là une pure affirmation contredite par l'expérience.
« On objecte aussi : La femme ne fait pas de service militaire. Sans doute, elle n'est pas soldat, mais elle fait des soldats, et pour celles qui n'ont pas d'enfant, combien parmi les électeurs et même les élus n'ont pas fait de service militaire ! Enfin, le grand argument, c'est : la femme est faite pour le foyer ! C'est bien notre avis, mais ce n'est pas la participation aux comices qui éloignera la femme de son foyer, elle n'en sera pas plus éloignée que par sa participation à un marché ou à une foire, et puis enfin les conditions actuelles ont jeté dans la lutte pour la vie des milliers de femmes, il est juste qu'elles puissent défendre leurs intérêts tant par leurs bulletins de vote qu'au sein des assemblées politiques. »
Le député Barthélemy songea un instant, puis reprit : « Ce qu'il faut surtout que l'on sache, c'est le fait que la France tend à devenir une exception en restant masculine. » Et de rappeler qu' « en Europe, les pays masculins sont une exception qui se rétrécit chaque année davantage. Les femmes votent en Suède, en Norvège, au Danemark, en Finlande, en Estonie, en Lituanie, en Lettonie, en Tchécoslovaquie, en Pologne, en Autriche, en Allemagne, en Hongrie, en Belgique ; elles participent aux élections locales et un certain nombre d'entre elles aux élections législatives. »
En France, le droit de vote sera accordé aux femmes le 21 avril 1944 par le Comité français de la Libération nationale, et mis en oeuvre pour la première fois le 29 avril 1945 lors d'élections municipales, puis en octobre 1945 lors des élections à l’Assemblée constituante.
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« Quant au vote des femmes, il avait été rejeté par les républicains par crainte de l'influence néfaste du clergé sur le sexe faible : ''Non, la femme n'est pas égale de l'homme, proclamait en 1881 l'éditorialiste de La République maçonnique, non, il n'y a égalité ni morale ni physique entre ces deux êtres. (…) A l'homme l'action extérieure, à lui la lutte de la vie et de la tribune. (…) A la femme l'action lente, douce et persévérante du foyer.''
« Infatigable contempteur du régime républicain, Charles Maurras avait observé au contraire en 1910 : ''Quoi de plus arbitraire que d'exclure les femmes ? On dit que c'est injuste... Ce n'est pas injuste, c'est idiot !''
« Horresco referens : l'accès des femmes au droit de vote apparut pour la première fois dans le droit français dans le projet de Constitution publié le 30 janvier 1944, par le Maréchal Pétain ! »
(SOURCE: Michel de JAEGHERE, éditorial Ce que c'est que la République, in Le Figaro Histoire, août-septembre 2024, n° 75 Alexandre le Grand, l'empire impossible, p 4-5.)