Saint Philippe et saint Jacques le Mineur (Frère du Seigneur), évêque de Jérusalem, apôtres (1er s.)
S. Philippe était de Bethsaïde, en Galilée, patrie de S. Pierre et de S. André.
Le Sauveur, dès les premiers jours de sa vie publique, le rencontra et lui dit : "Suis-Moi !"
Après la Pentecôte (fête de la descente du Saint-Esprit sur les Apôtres, cinquante jours après Pâques), il alla prêcher dans les immenses contrées de l'Asie supérieure (Turquie actuelle) ; il évangélisa longtemps les Scythes, puis les Galates, les Phrygiens, et c'est dans la ville d'Hiérapolis, en Phrygie qu'il confirma sa prédication par le témoignage de son sang.
Philippe rencontra un eunuque, haut fonctionnaire de Candace, reine d’Éthiopie, et administrateur de tous ses trésors, qui était venu à Jérusalem pour adorer, et qui lisait le prophète Isaïe. Philippe lui demanda : "Comprends-tu ce que tu lis ?" L'eunuque lui répondit : "Et comment le pourrais-je s’il n’y a personne pour me guider ? [...] Dis-moi, je te prie : de qui le prophète parle-t-il ?". Alors Philippe prit la parole et, à partir de ce passage de l’Écriture, il lui annonça la Bonne Nouvelle de Jésus. (Actes 8,27-35) Ceci montre que selon la sainte Bible elle-même, l'interprétation privée des Écritures doit se réaliser dans la tradition apostolique. "Car vous savez cette chose primordiale : pour aucune prophétie de l’Écriture il ne peut y avoir d’interprétation individuelle," (2 P 1,20)
Un jour que le peuple offrait de l'encens à un gros serpent qu'il regardait comme une de ses divinités principales, Philippe, saisi de compassion, se jette à terre et supplie Dieu de délivrer ces malheureux de la tyrannie du serpent infernal. L'affreuse bête expire aussitôt. Le peuple se montrait disposé à accepter la doctrine d'un homme qui opérait de telles merveilles ; mais les magistrats et les pontifes s'emparèrent de l'Apôtre, le battirent de verges, le clouèrent à une croix et l'accablèrent de pierres. À sa mort, la terre trembla et plusieurs édifices s'écroulèrent.
Saint Philippe mourut dans un âge fort avancé puisque S. Polycarpe eut quelque temps le bonheur de converser avec lui.
Dans un portrait peint par Dürer en 1516 et conservé aux offices de Florence, Philippe est représenté sous les traits d'un très vieil homme. C'est ainsi que celui qui fut un des premiers à suivre le Nazaréen est le plus communément représenté. Il serait en effet mort très âgé à Hiérapolis, en Phrygie, une région située dans l'actuelle Turquie. (4)
S. Jacques le Juste ou Jacques le Frère du Seigneur, appelé aussi Jacques le Mineur pour le distinguer de Jacques le Majeur, frère de saint Jean, était né à Cana, en Galilée, d'Alphée et de Marie, soeur, c'est-à-dire proche parente de la sainte Vierge.
Jacques a joué un rôle important après l'Ascension de Jésus, et il fut le premier évêque de Jérusalem (été 58).
La tradition affirme qu'il ressemblait au Sauveur, et que les fidèles aimaient à regarder en lui une vivante image de leur Maître remonté dans le Ciel.
Jacques le Mineur eut un frère, Apôtre comme lui, nommé Jude, et ses deux autres frères, Joseph et Siméon, furent disciples de Jésus.
Saint Jacques était de la tribu de Juda et "frère de Jésus", c'est-à-dire cousin de Notre-Seigneur selon la chair. "Les évangiles et Paul (Ga 1, 18-19 ; 1 Co 9,5) appellent 'frères du Seigneur' ceux qui étaient en réalité ses cousins selon l'usage extensif du lien de fraternité dans le monde sémitique (Voir en particulier les système de parenté à Iamneia, ville de la côte palestinienne, d'après Inscriptions de Délos, n° 1208)" (5)
Dans le texte nazoréen, dit Protévangile de Jacques, attribué à Jacques de manière pseudépigraphique, et daté de la seconde moitié du IIe siècle, Jacques est le fils de Joseph issu d'un premier mariage. (6)
"Jacques, le 'frère de Jésus', exécuté en 62, faisait l'admiration des pharisiens par sa piété et son assiduité au temple." (7)
Il eut la faveur d'une apparition particulière du Ressuscité, après Pierre et les Douze (1 Co 15,7).
C'est chez lui que Pierre se rendit aussitôt après être miraculeusement sorti de prison, et Paul fit de même après sa conversion. (8)
L'Eglise, maison de David
Après la Pentecôte, quand les Apôtres se partagèrent l'évangélisation du monde, Jacques se fixa à Jérusalem, pour la conversion spéciale des Juifs. Son autorité était très grande dans l'Église primitive, et, au concile de Jérusalem, c'est lui qui, le premier après saint Pierre, prit la parole et déclara que les paroles de Pierre étaient en accord avec celles des prophètes concernant la reconstruction de la demeure de David (Actes 15,15-16, citant Amos 9,11). Cette maison de David est sans aucun doute l'Église du Christ - le Fils de David - et comprend à la fois des Juifs et des Gentils. Le Psaume 122 décrit cette Maison de David comme ayant des "trônes" "sièges pour le jugement" (Ps 122 - Bible catholique Crampon 1923) : "Jérusalem, bâtie comme une ville solidement attachée, vers laquelle montent les tribus, les tribus du Seigneur, comme il a été décidé pour Israël, pour rendre grâce au nom du Seigneur. C'est là qu'ont été placés les trônes du jugement, les trônes de la maison de David" (Ps. 122, 3-5). Les trônes sont associés à l'autorité de juger. Les tribus de toutes langues et de toutes nations viennent au Dieu d'Israël pour "rendre grâce". L'acte central du culte chrétien est le sacrifice de l'"Eucharistie", qui signifie "action de grâce". C'est l'"offrande pure" dont Malachie a prophétisé qu'elle serait offerte par les païens (Ml 1,11), parce qu'elle est l'offrande du Christ. Les nations "rendent grâce au Seigneur" grâce à l'offrande pure et à l'intercession du Messie.
Avant son ascension, Jésus promit aux apôtres qu'il serait avec eux jusqu'à son retour (Mt 28,20). Sa promesse s'étend à leurs successeurs qui siègent sur les trônes apostoliques de la Maison de David, les évêques. Apocalypse 20, versets 1 à 4 mentionne également ces "trônes" où s'assoient "des personnes à qui le pouvoir de juger fut donné" et décrit l'enchaînement de Satan par la croix et la résurrection du Christ, l'enchaînement de "l'homme fort" auquel Jésus a fait allusion pendant son ministère terrestre. Satan est lié afin que ses biens - les âmes asservies - puissent être pillés. Ce "jugement" fait référence à l'autorité de "lier et délier" que Jésus a conférée aux apôtres, en particulier à saint Pierre (Matthieu 16,19 ; Mt 18,18) Cette période des trônes dure "mille ans". Qu'il s'agisse d'un sens littéral ou d'une métaphore pour désigner un "temps long", il est évident qu'elle dépasse la durée de vie personnelle des apôtres.
Nous avons ici la réponse au mystère de la promesse du Christ de rester avec les Apôtres jusqu'à son retour, malgré leur mort au premier siècle : il reste avec leurs successeurs, les évêques, "ceux à qui le jugement a été confié", qui siègent sur les "trônes" de la Maison de David, dont le Christ a explicitement dit que les Apôtres eux-mêmes y siégeraient pendant les "mille ans", à partir de son Ascension. Le Christ a également promis à ces mêmes apôtres que le Saint-Esprit les guiderait dans toute la vérité (Jean 16,13). Cela doit logiquement inclure l'exercice du pouvoir de lier et de délier, puisque le Christ a promis que de tels jugements seraient soutenus par le ciel (Mt 16,19 ; 18,18). Il s'agit là de la base biblique de ce que l'on appelle la succession apostolique.
Les conversions nombreuses et éclatantes opérées par son ministère lui suscitèrent des ennemis parmi les judéens.
Jacques serait mort après l'an 60, en des circonstances incertaines parce que ne provenant que de sources apocryphes. Toutefois, Clément d'Alexandrie (150-215), un auteur de la fin du IIe siècle, mentionne qu'il a été élu premier évêque de Jérusalem et est mort martyr, battu à mort après avoir été jeté du haut du pinacle du temple (Histoire ecclésiastique 2, 1, 2-3) (10)
C'est en 62 que le grand prêtre Anne (Ananus), fils de celui du pontificat duquel Jésus avait été crucifié, se croyant assez fort pour briser la jeune Église, le fit arrêter, et le déféra au Sanhédrin.
Nous connaissons le détail du drame par Flavius Josèphe et le mémorialiste et historien chrétien Hégésippe, qui écrivait au milieu du IIe siècle. Jacques "fut non seulement attaqué par les scribes et les pharisiens, mais aussi par d'autres groupes judéens". (11)
La persécution de 62 a eu un caractère collectif. Jacques ne fut pas condamné personnellement, puisque son groupe fut exécuté avec lui - c'est la première exécution collective de chrétiens. (Antiquités judaïques, XX, 9,1 (200).)
L'année 62, celle de la mort de Jacques, est marquée incontestablement par le début des tensions entre Juifs. La condamnation du groupe de Jacques illustre l'explosion du sectarisme et le replis des groupes légalistes et conservateurs du Temple. (12) Jacques devient le symbole de l'affrontement entre Judéens pharisiens et Judéens chrétiens, après l'avoir été de l'affrontement entre chrétiens d'origine judéenne et chrétiens d'origine grecque. (13)
Outre l'exécution de Jacques le Mineur, conséquence de l'influence exercée par la communauté chrétienne d'origine judéenne auprès de l'ensemble des Judéens, l'histoire de la communauté chrétienne de Jérusalem a été marquée par deux autres martyres : en 33, la lapidation d'Étienne, et en 43-44 la mise à mort de Jacques le Majeur. (14)
Les princes des Juifs (Sadducéens) firent monter Jacques sur la terrasse du temple de Jérusalem et lui dirent : "Juste, nous avons confiance en toi ; parle et dis-nous la vérité sur Jésus !"
Le saint Apôtre s'écria : "Pourquoi m'interrogez-vous sur le Christ ? Il siège dans les Cieux à la droite de la Majesté divine, et un jour Il reviendra sur les nuées du Ciel." La foule approuvait ces paroles ; mais les chefs, jaloux, précipitèrent le vieillard du haut du haut du temple où le démon avait naguère tenté Jésus. Comme il n'était pas mort, on se mit à le lapider, puis en dépit de quelques protestations généreuses, un foulon l'acheva à grands coups de sa lourde masse. Exécution illégale, qui valut à Anne d'être déposé du souverain pontificat (15) , c'est-à-dire de sa charge de Grand prêtre par le nouveau procurateur romain entré en fonction.
Brisé dans sa chute, il mourut l'an 62 en priant pour ses bourreaux : "Seigneur, pardonnez-leur, ils ne savent pas ce qu'ils font."
Les judéens qui l'ont lapidé n'ont pu empêcher le peuple de l'enterrer sur place et de lui ériger un monument.
"L'exécution des deux Jacques, à l'instigation du Sanhédrin qui refusait tout messianisme, n'empêcha pas la communauté de rester sur place jusqu'en 66, sans participer aux mouvements qui agitèrent la population à partir de 60, en prélude à la guerre contre Rome." (16)
Nous avons de S. Jacques le Mineur une Épître qui a le titre de Catholique ou Universelle, parce qu'elle ne fut point adressée à une église particulière, mais à tout le corps des Juifs convertis qui étaient dispersés dans les différentes parties de l'univers.
On le représente en tunique et pallium, parfois avec une canne.
Il est invoqué contre les souffrances des agonisants.
Le nom Jacques vient de l'araméen et signifie "adepte de Dieu".
PRATIQUE. Pardonnez à vos ennemis, priez pour vos persécuteurs.
Sources:
(1) Vie des Saints pour tous les jours de l'année avec une pratique de piété pour chaque jour et des instructions sur les fêtes mobiles, Alfred Mame et Fils éditeurs, Tours 1867, p. 121 ; (2) ; (3) ; (4) Christine BARRELY, Le Petit Livre des Saints, Éditions du Chêne, tome 1, 2011, p. 146 ; (5) Marie-Françoise BASLEZ, Bible et Histoire, Judaïsme, hellénisme, chritianisme, Folio Histoire, Saint-Amand 2003, p. 160 ; (6) Pierre MARAVAL, Simon Claude MIMOUNI, Le Christianisme, des Origines à Constantin, Nouvelle Clio, l'Histoire et ses problèmes, PUF, Clamecy 2018; p. 168 ; (7) Marie-Françoise BASLEZ, Comment notre monde est devenu chrétien, CLD Éditions, Points Histoire, Lonrai 2015, p. 32 ; (8) Rosa GIORGI, Le Petit Livre des Saints, Larousse, Tolède 2006, p. 268-269 ; (9) DANIEL-ROPS, Histoire de l'Église du Christ, tome II Les Apôtres et les Martyrs, Librairie Arthème Fayard, Paris 1965, p. 22 ; (10) Pierre MARAVAL, Simon Claude MIMOUNI, Le Christianisme, des Origines à Constantin, ibid., p. 170 ; (11) Pierre MARAVAL, Simon Claude MIMOUNI, Le Christianisme, des Origines à Constantin, ibid., p. 169 ; (12) Marie-Françoise Baslez, Bible et Histoire, Judaïsme, hellénisme, chritianisme, Folio Histoire, Saint-Amand 2003, p. 264-268 ; (13) Pierre MARAVAL, Simon Claude MIMOUNI, Le Christianisme, des Origines à Constantin, ibid., p. 173 ; (14) Pierre MARAVAL, Simon Claude MIMOUNI, Le Christianisme, des Origines à Constantin, ibid., p. 171 ; (15) É Marie-Françoise BASLEZ, Comment notre monde est devenu chrétien, ibid., p. 32.