Le fléau de la solitude s'empare des Français
Selon une étude de la Fondation de France, la famille ne joue plus son rôle de soupape de sécurité et le travail ne favorise pas forcément des relations humaines de qualité. Conséquence : l'isolement est le lot quotidien de 4 millions de Français.
Parmi les 4 millions de Français déclarant se sentir seuls, 56% imputent leur mal-être à une rupture familiale, selon une étude de la Fondation de France révélée jeudi par Le Parisien. Le facteur famille a la particularité de transcender les âges : perte du conjoint pour les plus âgés et rupture sentimentale voire divorce pour les plus jeunes.
Complexes à cerner, les «nouvelles solitudes» - selon la formule de la psychiatre Marie-France Hirigoyen, prennent une forme pour le moins paradoxale. Paradoxe tout d'abord d'une «société de l'hypercommunication, qui nous abreuve de messages d'informations mais où le mode de communication virtuel prend le pas sur les échanges intimes», explique-t-elle.
«Les femmes sont de plus en plus exigeantes»
En contrepartie, l'univers professionnel est loin d'être un brise-glace : 20% des personnes interrogées n'ont pas de relations sociales avec leurs collègues. En cause : la pression psychologique exercée sur les travailleurs. Alors que «le collègue devient facilement un rival», la généralisation des open spaces n'a pas amélioré la donne. Comble de l'ironie, c'est dans «cet espace ouvert censé inviter à l'échange qu'il ne faut pas parler pour ne pas gêner et que l'on communique par l'Intranet ou par messages en allant à l'essentiel. Le temps des palabres est révolu», résume la spécialiste.
Paradoxe enfin du rapport au célibat. Si les femmes sont plus nombreuses à demander le divorce, elles constituent aussi le plus gros bataillon de solitaires. 40% des femmes de 35-49 ans souffriraient d'isolement, contre 28% des hommes du même âge, selon un sondage TNS Sofres réalisé pour le journal La Croix. «Les femmes sont de plus en plus exigeantes, confirme Marie-France Hirigoyen. Elles veulent un compagnon, mais ne veulent pas forcément vivre le quotidien du couple.» Leur profil-type ? Celui de la citadine active qu'Alain Souchon avait déjà croqué dans sa chanson «Ultramoderne solitude», où se rendre «boulevard Haussmann à cinq heures» suffit à s'en faire une idée.
La solitude, une fatalité ? «Très souvent, les patients que je reçois se comportent de manière passive», concède la psychiatre. Pour inverser la tendance, elle a un credo : s'occuper des autres. «Ils se plaignent que l'on n'aille pas vers eux mais ils ne vont pas vers les autres», observe-t-elle.