La nouvelle «bombe» de WikiLeaks serait imminente. Washington se prépare au pire, Londres tremble, Moscou s'inquiète…
Après avoir révélé le "bain de sang" commis en Irak par l'armée américaine, le site internet WikiLeaks s'appêterait à révéler dimanche une nouvelle bombe concernant des fuites sur le Proche-Orient, l'Afghanistan, l'Irak, et les relations des Etats-Unis avec ses partenaires, 251 287 câbles diplomatiques (statelogs) américains secrets remontant jusqu'en 1966, dont un millier de documents pourrait concerner la France.
Les "bonnes" relations diplomatiques des États-Unis avec une partie du reste du monde serait menacées, du fait des commentaires parfois crûs à l'égard de "partenaires". Le Daily Mail rapporte ainsi que le gouvernement britannique se prépare à des révélations potentiellement très embarrassantes sur ce que pensent les Etats-Unis de la Grande Bretagne et de ses leaders, et de ce que les deux pays pensent d'autres gouvernements...
Washington a rejeté samedi toute négociation avec Wikileaks sur leur diffusion, affirmant que le site internet spécialisé les détenait en violation de la loi américaine.
Washington a par ailleurs multiplié ces dernières 48 heures les contacts avec ses partenaires internationaux pour amortir le choc de la possible divulgation de ces documents. Vendredi, la secrétaire d'Etat américaine, Hillary Clinton, a d'ailleurs personnellement décroché son téléphone pour prévenir les dirigeants français, afghans, émiratis, britanniques ou encore chinois du contenu possible des câbles diplomatiques dont le site internet est en possession. «Dans tout le département d'Etat, de hauts responsables entrent en contact avec des pays pour les prévenir», a aussi confié le porte-parole de la diplomatie américaine, Philip Crowley.
Le site Wikileaks, spécialisé dans le renseignement, avait déjà publié vendredi 19 novembre près de 400.000 documents secrets de l'armée américaine sur la guerre en Irak, braquant les projecteurs sur un véritable «bain de sang» en Irak, avec 109.032 morts, dont 60% de civils.
Ses conclusions sont sans appel : la coalition internationale a torturé des prisonniers irakiens et fermé les yeux sur des exactions commises par les forces irakiennes.
Présentés comme «la plus grosse fuite de documents militaires secrets de l'Histoire», les documents mettent en évidence «de nombreux cas de crimes de guerre qui semblent manifestes de la part des forces américaines, comme le meurtre délibéré de personnes qui tentaient de se rendre».
WikiLeaks évoque le comportement de soldats américains «faisant sauter des bâtiments entiers parce qu'un tireur se trouve sur le toit».
Les documents révèlent «plus de 300 cas de torture et de violences commis par les forces de la coalition sur des prisonniers», et dénombrent plus d'un millier d'exactions de la part des forces irakiennes.
«On parle de cinq fois plus de morts en Irak, un vrai bain de sang comparé à l'Afghanistan», a assuré sur CNN le fondateur de WikiLeaks, Julian Assange.
Refusant d'entrer dans les détails de ces révélations, la secrétaire d'Etat américaine, Hillary Clinton, a condamné la fuite de tout document pouvant mettre en danger «la vie des soldats et des civils des Etats-Unis et de leurs alliés».
La même ligne a été reprise par le gouvernement britannique, qui a «condamné» une démarche pouvant «représenter un risque pour la vie des troupes britanniques et celles de nos alliés».
109.032 morts entre 2004 et 2009
WikiLeaks avait remis à l'avance ses documents à plusieurs médias internationaux comme le New York Times, le Guardian, Der Spiegel ou Al-Jazira, qui a la première révélé leur contenu. Selon la chaîne de télévision du Qatar, l'armée américaine a «couvert» des cas de torture de détenus par les autorités en Irak, où des centaines de civils ont en outre été tués à des barrages tenus par les alliés. Au vu des documents, «les autorités américaines n'ont pas enquêté sur les centaines de cas de violences, tortures, viols et mêmes des meurtres commis par des policiers et des militaires irakiens», pointe pour sa part le Guardian.
Selon le communiqué de WikiLeaks, les documents secrets couvrent la période du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2009, après l'invasion américaine de mars 2003 qui a renversé le régime de Saddam Hussein. Les documents révèlent que le conflit a fait 109.032 morts en Irak, selon le communiqué, qui précise que plus de 60% sont des civils. Un bilan américain publié officiellement fin juillet faisait état de près de 77.000 Irakiens civils et militaires tués de 2004 à août 2008. Des chiffres qui montrent «que les forces américaines disposaient d'un bilan recensant morts et blessés irakiens, même si elles le niaient publiquement», a relevé Al-Jazira.
A Londres, où le gouvernement Cameron a appelé les patrons de presse à «garder à l'esprit» les implications des fuites pour la sécurité du Royaume-Uni, «la divulgation de secrets britanniques sème la panique», assurait samedi le quotidien populaire Daily Mail. Quant à la France, elle serait concernée, à en croire le site internet Owni.fr, par 500 à 1.000 mémos en possession de WikiLeaks.
Dans plusieurs médias, les journalistes ne s'embarrassent plus du conditionnel pour évoquer les Statelogs. Sur la radio canadienne 98,5 FM, Normand Lester, spécialiste de la diplomatie américaine depuis plusieurs décennies, prédit un désastre, «la plus grande catastrophe diplomatique de l'histoire des relations internationales». Il évoque une «chronique crue» des rapports entre les Etats, et cite cinq rédactions: le New York Times, Der Spiegel, le Guardian, mais aussi El Pais et Le Monde. A la différence des trois premiers journaux cités, les deux derniers ne seraient en possession que d'une partie des documents, qui concerneraient leur propre pays.
Pour mieux vous retrouver dans la masse des documents, Slate.fr, en partenariat avec Owni.fr et LeSoir.be vous propose de suivre les développement grâce au live-blogging assuré par Owni ainsi que grâce à une application développée pour l'occasion. Lors de la publication des Warlogs irakiens, WikiLeaks avait directement contacté Owni.fr pour que le site fournisse l'application qui permettait de naviguer à travers les rapports de situation écrits par l'armée américaine. Cette fois-ci, Owni.fr a choisi de se mettre dans une situation qui ne le rende pas dépendant d'une clause de confidentialité. Et Slate.fr et LeSoir.be ont décidé d'accompagner la démarche. Slate.fr est ainsi partenaire de l'application développée (comme cela avait été le cas lors de la publication des documents sur l'Afghanistan), et qui sera en ligne dès dimanche.
Il y a eu les warlogs, cette fois-ci, les équipes d'Owni ont convenu d'appeler cette opération #Statelogs.
D'ici quelques heures, en cliquant sur l'image ci-dessous, vous pourrez accéder à l'application.
Sources : 1 http://www.lefigaro.fr/international/2010/10/23/01003-20101023ARTFIG00385-wikileaks-revele-l-horreur-de-la-guerre-en-irak.php
2 http://www.lefigaro.fr/international/2010/11/27/01003-20101127ARTFIG00542-la-nouvelle-grenade-de-wikileaks-serait-imminente.php
3 http://www.lesnumeriques.com/wikileaks-quand-web-bourleverse-ordre-mondial-news-16754.html
4 http://www.slate.fr/lien/30837/wikileaks-statelogs-owni
5 http://owni.fr/2010/11/27/wikileaks-statelogs-diplomatic-assange-application-insurance/