La chaîne Youtube de "Les Rois de France" propose un documentaire historique (Merapi productions, AB productions, La Bibliothèque nationale de France) enrichi d'une belle icônographie sur Clovis et les Mérovingiens :
Territoire des Francs vers 256-260
Extrait :
Les Francs font leur apparition dans l'histoire dans les années 256-260. Hors de l'empire, entre Rhin et Danube, ce sont des Germains.
[Entre 253 et 260, des Francs et des Alamans firent des incursions en Gaule romaine.
Les Francs participèrent à un raid qui les conduisit jusqu'en Espagne et en Afrique.
Après avoir été refoulés et cantonnés dans un territoire par Aurélien (empereur de 270 à 275), Francs et Alamans franchirent une seconde fois, massivement, le Rhin et ravagèrent la Gaule de fond en comble.
C'est au cours des années 350-360 que se fixa à l'intérieur de l'Empire une ébauche de répartition géographique des Francs que l'Empire fit mine de prendre à son service. Cologne, pièce centrale du dispositif du limes (la frontière de l'Empire), tomba un moment entre leurs mains en 345.
C'est alors que commença l'occupation d'une partie des Pays-Bas actuels et de la Belgique par les Francs saliens, celle des deux rives du Rhin par les Francs Ripuaires et celle d'une région plus au sud qui déborde l'Alsace par les Alamans.
On peut se demander si ce n'est pas dès le dernier quart du IVe s. que s'ébauche, se dessine, sans conteste de 350 à 450, avec le retrait du limes troué comme une coquille fêlée et vidée, la frontière linguistique majeure de l'Europe, celle qui sépare les parlers germaniques et romans.
Mais qui sont les Francs ?
Sorte de nom de guerre, le mot franc se rattacherait à une racine germanique ayant le sens de fier, hardi, farouche, avec une nuance d'arrogance provocante et à laquelle répondrait l'adjectif allemand moderne frech." (Cf. Pierre Chaunu, Éric Mension-Rigau, Baptême de Clovis, baptême de la France, De la religion d'État à la laïcité d'État, Éditions Balland, Mayenne 1996, p. 28-29). Ndlr].
Depuis le milieu du IIIe siècle [vers 250], c'est la fin de la Pax romana, la Paix romaine.
La menace barbare pousse l'Empire à faire ses premières concessions, en particulier en Gaule. L'Empire consent à signer des traités appelés fœdus, avec eux, leur versant un tribut en échange de contingents de soldats, dits fédérés.
La plupart des peuples barbares se sont bien intégrés. Ce sont des peupes alliés de Rome, souvent depuis pratiquement un siècle. Ils reçoivent des territoires à administrer, des ressources à exploiter, essentiellement des terres et sont des alliés de Rome, au point que lorsque des rois barbares frappent monnaie, ce n'est pas leur propre effigie qu'ils mettent sur leur monnaie mais l'effigie de l'empreur romain.
Premier pilier de la Pax Romana, l'armée est infiltrée par des éléments barbares, de plus en plus nombreux.
Barbares fédérés (Wisigoths, Burgondes, Francs saliens), intégrés à l'armée romaine au Ve siècle
Les Francs saliens constituent des contingents nombreux à l'armée romaine.
Les Francs rhénans n'ont pas conclu de foedus avec l'Empire. Ils sont installés à l'est du Rhin, se contentant d'incursions au cours du Ve siècle.
Les Francs Saliens sont depuis la fin du IVe siècle installés par foedus au sud des Pays-Bas et dans la Belgique actuelle, à la fin du IVe siècle. Leur nom vient probablement de "Salland", région du nord des Pays-Bas. Leur premier roi connu est Clodion le Chevelu (roi des Francs vers 430-450).
On ne sait si Clodion partageait le pouvoir avec d'autres rois saliens, comme c'était de tradition, ou si occasionnellement il avait pu rassembler ce pouvoir. Quoiqu'il en soit, c'est sous son impulsion que dans la première moitié du Ve siècle, les Francs saliens sortent de leurs marais et s'emparent de Tournai et de Cambrai.
Contrairement aux habitudes des guerriers germains, les villes ne sont pas pillées. Clodion est ensuite arrêté dans sa progression par l'armée romaine. Plus que la paix, il obtient par foedus en 431 les territoires qu'il a conquis.
Les foedus avec les Germains sont d'autant plus faciles à consentir qu'il y a plus barbares que ces barbares, les hordes du cruel roi des Huns (tribu turco-mongole), Attila, qui fit des ravages considérables en Europe jusqu'à ce qu'il soit anéanti dans la Bataille des Champs catalauniques (451) sur le territoire de l'actuelle Châlons-en-Champagne, par le général romain Aetius qui pour la bataille agrégea à l'armée romaine des Wisigoths, des Burgondes et des Francs. À la tête des troupes franques : Mérovée, fils de Clodion [et grand-père de Clovis. NDLR.]
Mérovée à la Bataille des Champs-Cataluniques en 451. Mérovée semble avoir été le fils de Clodion le Chevelu. Grégoire de Tours dans ses Dix Livres D'Histoire lui concède une brève référence et en fait le descendant possible de Clodion le Chevelu : « Certains prétendent que de sa lignée est sorti le roi Mérovée. » (Grégoire de Tours, Histoire des Francs, livre II, IX, 592). Mérovée fut le père de Childéric Ier, père de Clovis
Les premiers Mérovingiens
La Gaule vers 480, si elle est encore romaine, est en train de devenir chrétienne.
Le sanctuaire de Saint Martin de Tours, [l'Apôtre des Gaules] devient après 460 le principal relai du christianisme dans la Gaule du Nord (Basilique Saint Martin de Tours).
L'Eglise parle au peuple, elle nourrit les pauvres et pousse au respect de la personne humaine que l'Antiquité ignorait. [Le Sermon sur la Montagne du Christ donne à l'individu une personnalité avec des droits.]
Tombeau de Saint Martin, Basilique St Martin de Tours
[«Lorsque en 371, l'abbé Martin est élu au siège de Tours, le christianisme a pénétré depuis deux siècles dans les Gaules; on y trouve, dès le IIIe siècle, de nombreux diocèses...
[...] Chaque cité dirigée par un évêque possède un clergé, une liturgie, l'administration des sacrements; mais les campagnes sont restées vouées aux cultes idolâtriques; au point que paganus, qui signifie paysan, a pris pour les chrétiens des villes le sens de païen.
L'évêque Martin va mériter son nom d'apôtre en ensemençant le catholicisme dans ce territoire entre le Rhin et les Pyrénées, qui fera l'objet de la conquête de Clovis: il le prépare au roi barbare qui va unifier la Gaule chrétienne sous son sceptre. Ce lien entre la conquête des âmes et la conquête du sol sera perçu par Clovis, qui éprouvera une profonde ferveur pour Saint Martin, et lui manifestera un culte public. Et cela dès sa conversion.
[...] De toute façon une chose est certaine: Clovis a voulu placer sa conversion sous le patronage de saint Martin de Tours. Et il ne s'est pas contenté de cette démarche solitaire un jour de ferveur exceptionnelle; il a renouvelé ces marques de dévotion et les a fait partager à son armée. Quand il franchit la Loire pour entamer la conquête de l'Aquitaine, il s'arrêta à Tours et, par respect envers saint Martin, nous dit l'évêque Grégoire, il publia un décret qui défendait de manger et de boire dans cette ville et dans les environs, quoi que ce fût, sinon de l'herbe et de l'eau. Et il tua de sa main le guerrier qui avait enfreint son ordre. "Comment espérer la victoire, commentait-il, si nous offensons saint Martin?" Après la victoire de Vouillé (contre les Wisigoths en 507), il combla de présents la basilique de Tours. Puis, après avoir pris Bordeaux, il fonda à Auch l'abbaye Saint-Martin. »
(Cf. Ivan GOBRY, Saint Martin, Perrin, Mesnil-sur-l'Estrée 1996, p. 9-11.)]
À Paris, lors du raid d'Attila (451) une jeune femme de vingt-huit ans, Geneviève, issue d'une famille romanisée d'origine franque, s'appuie sur sa seule foi afin d'organiser la défense de la ville, et détourne Attila de Paris.
Sainte Geneviève contre Attila
En 486, la bataille de Soissons oppose Clovis, roi des Francs, à Syagrius, dernier représentant romain en Gaule.
Bataille de Soissons (486). Cette bataille marque la fin du dernier vestige du pouvoir romain en Gaule.
À la bataille de Tolbiac (496), une fois le voeu de Clovis prononcé en cas de victoire, les Alamans subissent une sévère déroute.
Le 25 décembre 498 ou 499, Clovis fut baptisé, avec la Sainte-Ampoule, au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit.
[« Arrivant des bords du Rhin où il vient de promettre au Dieu de Clotilde de se faire chrétien, il (Clovis) écoute les leçons de saint Rémi et, pour prendre sa résolution finale, il va se recueillir à Reims dans l'église Saint-Martin. C'est Saint Nizier, évêque de Trêves, qui le racontera, quelques décennies plus tard à Clodoswinde (Clotsinde), petite-fille de Clovis: "Ayant admis, lui écrit-il, les miracles catholiques, il s'agenouilla dans l'église Saint-Martin et promit de se faire baptiser sans tarder." Curieusement, les historiens modernes ont interprété cette église Saint-Martin (de Reims) comme la basilique de Tours qui possédait le corps du grand évêque. Comme s'il n'existait alors qu'une seule église qui lui fût dédiée! Il y en avait une précisément, et renommée, dans la ville de Reims, non loin de la cathédrale, et si elle avait été édifiée à cet endroit, c'était justement pour commémorer le passage de l'évêque Martin quand il s'était rendu de Poitiers à Trèves. Puisque Clovis devait se faire baptiser à Reims, après avoir été catéchisé par l'évêque de Reims, son mouvement spontané fut d'aller s'agenouiller dans le sanctuaire de Saint-Martin de Reims. L'interprétation fallacieuse du vocable a permis à Bruno Krusch, en 1932, de prétendre que Clovis avait été baptisé non en 495, mais en 507; selon lui, on ne voit pas Clovis se rendre à Tours avant cette date; donc, ce fut à cette date qu'il fut baptisé. Mais la dévotion du converti n'avait pas à le pousser jusqu'à la Loire pour vénérer le souvenir de l'Apôtre des Gaules: il lui suffisait de le trouver sur place. »
Cf. Ivan GOBRY, Saint Martin, Perrin, Mesnil-sur-l'Estrée 1996, p. 10.]
En 511, la France est composée essentiellement des territoires au nord de la Loire, d'une annexion récente en Aquitaine, de l'Auvergne et de quelques petites possessions dans la région Provence Alpes
(A partir de la 45e minute)
En 511, le Concile d'Orléans est convoqué par Clovis.
"En terme purement ecclésiastique, le concile a peu d'influence, mais en terme national, c'est la première réunion de toutes les autorités de l'Eglise dans le territoire que l'on va bientôt appelé la France.
Une des décisions du Concile fut de soumettre à l'autorité royale la possibilité pour un laïque de devenir clerc. La liberté des églises était menacée mais les évêques réunis à Orléans acceptèrent l'intrusion et scellèrent le début de la collaboration du roi et des évêques.
En effet, si le Roi est au-dessus des évêques, c'est davantage pour des raisons politiques. On dit qu'il a la responsabilité du pouvoir temporel, celui lié aux questions matérielles.
Par contre, l'autorité des représentants de l'Eglise fut reconnue sur le plan spirituel et celui-ci était intemporel. Le partage des pouvoirs évitait le totalitarisme arien, où le roi, puisqu'il conservait son statut de surhomme était le chef de l'Eglise. L'avenir était ailleurs et Clovis sembla l'avoir compris. Il envoya une couronne à l'évêque de Rome : le temporel au roi, le spirituel au pape. C'est l'idée du Moyen Âge."
Ce passage du documentaire est intéressant, il montre que la laïcité entendue comme distinction des pouvoirs temporel et spirituel était déjà un élément de notre nation dès le Ve siècle et que cet élément était une invention catholique et française, dès l'origine (la laïcité était inconnue de l'Antiquité où temporel et spirituel reposaient sur une même tête...)
[À comparer avec les faux laïques totalitaires aujourd'hui comme le PS Bartolone qui veulent imposer la "religion de la république" pour tous, où Emmanuel Macron fait un discours à l'intérieur de la cathédrale Notre-Dame de Paris le 29 novembre 2024 avant sa réouverture au public (voir ici et là), et où à nouveau depuis l'Antiquité, le temporel (gouvernement) et le spirituel (la religion séculière "de la république ") sont confondus et dépendent de la même autorité ("républicaine"). Ce qui est une nouvelle confusion des pouvoirs, un nouveau césarisme ou "holisme" religieux. (Cf. Jean-Louis HAROUEL, Le Vrai génie du christianisme, Laïcité, Liberté, Développement, Jean-Cyrille Godefroy, Clamecy 2012.)]
"Sur le plan social et économique, le Moyen Âge se prépare. L'esclavage commence à disparaître grâce à la christianisation de la législation. Le servage s'annonce. Se mettent alors en place des seigneuries rurales."
. Clovis et son temps (film de Jean-Jacques Barsac)
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