Sainte Solange, Patronne du Berry et des enfants, dans Le Petit Livre des Saints, Éditions du Chêne, tome 2, 2011, p. 179.
Jeune et jolie bergère près Bourges (Cher), fille d'un pauvre vigneron, Solange est d'humeur joyeuse. Solongia (ou Solange, comme on l'appelle maintenant) avait fait voeu de virginité dès son plus jeune âge. Un seigneur, la trouvant si belle, lui proposa de l'épouser. Refusant, celui-ci résolut de l'enlever mais ne put vaincre sa résistance et son voeu. Furieux, il lui trancha la tête d'un coup d'épée. La légende ajoute que la jeune fille, après avoir reçu debout le coup de la mort, ne perdit pas cette position, reçut sa propre tête dans ses mains et alla ainsi jusqu'à Saint-Martin-du-Cros où elle fut ensevelie dans le cimetière de cette église.
Sainte Solange avait voué à Dieu sa virginité et ce fut la cause de son martyre. Sainte Agnès, sainte Agathe, sainte Lucie, sainte Maria Goretti et des dizaines d'autres exemples de ces âmes d'élite qui vouèrent leur pureté au Christ, peuvent être citées... Un archevêque de Bourges l'appela la "Geneviève du Berry".
Solange est la patronne du Berry et de Bourges.

Solange naquit au bourg de Villemont à trois lieues environ de Bourges, au milieu du IXe siècle (peut-être en 858). Il ne reste plus rien aujourd'hui du hameau qui la vit naître.
Comme sainte Geneviève et plus tard sainte Bernadette, elle eut le soin d'un petit troupeau et sut rendre de précieux services aux populations au milieu desquelles elle vivait.
Rendue célèbre par sa beauté et ses vertus, elle excita la curiosité d'une jeune seigneur. Il devait s'agir de Bernard de la Gothie, comte de Bourges et d'Auvergne, fils de Bernard, comte de Poitiers et de Bélichilde, fille de Roricon, comte d'Anjou, et neveu de Gozelin, évêque de Paris qui, avec l'aide du fils de Robert le Fort, Eudes, défendit sa ville contre les Vikings. C'est l'opinion de la plupart des auteurs.
Le jeune comte est fou de rage. Il saisit Solange, remonta en selle et l'emporta au galop afin de l'enfermer au château de Brécy. Elle se débattit, arriva à s'enfuir, quand le cheval marqua un temps d'arrêt devant un ruisseau. Furieux, le fils du comte la poursuivit et la rattrapa. Jusqu'au dernier moment, elle invoqua Jésus et Marie, et supplia son bourreau de changer d'attitude. mais Bernard trancha la gorge de Solange en ce 10 mai 878. Une tradition rapporte que la jeune femme prit sa tête sous son bras et se rendit ainsi jusqu'à Saint-Martin-du-Crot, où elle est ensevelie.
Son culte est resté important en Berry depuis le moyen-âge jusqu'à notre époque. On exhuma les restes de la sainte «à cause des miracles qu'ils opéraient» (Guérin). D'abord recueillis dans une châsse en bois, ils furent ensuite placés dans une châsse en cuivre. La dernière translation eut lieu en 1511. En 1657, la ville de Bourges fit don d'une châsse d'argent pour y placer l'ancienne. Puis en 1793, pendant la Révolution, les reliques furent dispersées.
La croyance populaire attribue à la vierge de Villemont de nombreux miracles opérés par son intercession : aveugles qui recouvrent la vue, muets qui retrouvent la parole, sourds qui peuvent de nouveau entendre. Les malades «de toute espèce» guérissent, les possédés sont délivrés.
Les habitants de Bourges avaient recours à Sainte Solange "dans les calamités publiques".
On portait en procession, dans leurs murs, la châsse qui contenait les reliques de la sainte. "Le 31 mai 1637, Henri de Bourbon, prince de Condé, se rendit en pèlerinage à Sainte-Solange et voulut conduire lui-même, à la métropole, les saintes reliques que la population entière réclamait. Ce fut pour Bourges un jour de fête; on jonchait de fleurs les rues par lesquelles la châsse devait passer; le devant des maisons était tapissé; de toutes parts on n'entendait que de pieux cantiques." (Raynal)
Ces processions avaient lieu particulièrement dans les temps de sécheresse. Ainsi une chronique relate que le 6 mai 1635 (sous le règne de Louis XIII), pendant une sécheresse désolante, la procession qui amenait les précieuses reliques de la sainte arriva à la Place Gordaine, l'un des quartiers les plus commerçants de Bourges, où le peuple prononçait à haute voix les invocations : "Sainte Solange, priez pour nous, sainte Solange, donnez-nous de l'eau." Un protestant sceptique s'écria au milieu de la foule des fidèles : "A quoi bon cette procession ? Croit-on que les cataractes du ciel vont s'ouvrir parce que l'on promène cette châsse !" Le ciel lui donna tort, car la messe était à peine commencée dans l'église où s'était arrêtée la procession, qu'une pluie torrentielle vint attester l'efficacité de la protection de sainte Solange.
On a conservé le procès-verbal d'une autre procession, celle qui eut lieu, en 1730 sous le règne de Louis XV. Cette année-là, le Berry se trouvait désolé par une extrême sécheresse. "Le 10 mai, anniversaire de sa mort, le lundi de la Pentecôte, anniversaire de la translation de ses reliques et de la dédicace de son Eglise, une foule immense de pèlerins, de malades, de mères, tenant leurs enfants dans leurs bras, viennent invoquer son intercession et chercher autour de son église sinon la santé, au moins l'espérance. Sa châsse est portée processionnellement par des hommes revêtus d'aubes et couronnés de fleurs. Cette châsse en bois argenté, aujourd'hui vide des reliques de la Sainte, a remplacé une châsse en argent détruite pendant la Révolution et que la ville de Bourges avait offerte à la modeste église de village en 1657. Jadis, en effet, toutes les fois que régnaient de longues sécheresses, on apportait solennellement, à Bourges, les reliques de sainte Solange, et on a conservé la mémoire de plusieurs de ces processions que des pluies abondantes avaient suivies de bien près." (Raynal)
Au XIXème siècle (en 1874), une chapelle fut édifiée sur le lieu supposé de son martyre, à moins d'un kilomètre du village qui porte désormais son nom. Des membres de la communauté villageoise ainsi que des pèlerins, souvent nombreux, y portent toujours en procession la châsse qui contenait les reliques de la sainte, témoignage d'une religiosité populaire toujours vivace et qui a traversé les siècles.
***
Sources:
(1) Daniel Bonnin, Les Saints du Berry. Préface: Abbé Hervé Benoît, Edition A à Z Patrimoine éditions, Sury en Vaux 2006, p. 71-80; (2); (3) Le culte de sainte Solange en Berry ; Le Petit Livre des Saints, Éditions du Chêne, tome 2, 2011, p. 178.