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15 juillet 2022 5 15 /07 /juillet /2022 00:00

Les oeuvres du Christ ne reculent pas, mais elles progressent.

Si tu dis que le monde est éternel, tu ne sais rien du Christ.

S. Bonaventure

Si vous n'apprenez rien sauf le Christ, vous apprenez tout.

S. Bonaventure

Saint Bonaventure, docteur de l'Église (1217-1274)

Le "second fondateur de l'ordre franciscain", surnommé "le docteur séraphique", S. Bonaventure naît Giovanni (Jean) da Fidanza probablement en 1217 à Civita de Bagnoregio (Toscane, Italie) de parents recommandables par leur piété, Giovanni Fidanza, médecin, et Maria di Ritello. Il fut le septième ministre général de l'ordre des frères mineurs (Franciscains).

 

À l’âge de quatre ans, il fut attaqué d’une maladie si dangereuse, que les médecins désespérèrent de sa vie. Sa mère alla se jeter aux pieds de François d’Assise  († 1226), le conjurant d’intercéder auprès de Dieu pour un enfant qui lui était si cher. Le Saint, touché de compassion, se mit en prière, et le malade se trouva parfaitement guéri. Par reconnaissance, Giovanni entrera dans l’Ordre fondé par saint François et en deviendra l’ornement et la gloire. Le saint patriarche, près de finir sa course mortelle, lui prédit toutes les grâces dont la miséricorde divine le comblerait, et s’écria tout à coup, dans un ravissement prophétique : "O buona ventura !", paroles italiennes qui signifient : Ô la bonne rencontre ! De là vint le nom de Bonaventure qui fut donné à notre Saint !

 

Durant les années 1232-1246, élève d'Alexandre de Hales († 1245), Giovanni Bonaventure, est étudiant à l’Université de Paris, où il lie avec saint Thomas une amitié qui semblera faire revivre celle de saint Grégoire de Nazianze et de saint Basile. Tous deux courent plus qu’ils ne marchent dans la carrière des sciences et de la vertu, et, d’étudiants de génie, ils parviennent en peu de temps à la gloire des plus savants professeurs et des docteurs les plus illustres. Les études de Bonaventure ne sont que la prolongation de sa fervente oraison.

 

Quand les Franciscains étaient arrivés en 1219 à Paris, on avait été curieux des les voir parcourir pieds nus les rues de la cité et suivre les cours à l'université. Ne rien posséder en propre, c'est imiter expressément la nudité du Christ crucifié, qui fut pauvre dans sa naissance, dans sa vie et dans sa mort et dont le premier discours fut : "Bienheureux les pauvres."

 

Dans ces années-là à Paris se répandait une violente polémique contre les frères mineurs de saint François et les frères prédicateurs de saint Dominique de Guzman. On leur contestait le droit d'enseigner à l'Université, et l'on allait jusqu'à mettre en doute l'authenticité de leur vie consacrée. Assurément, les changements introduits par les ordres mendiants dans la manière d'envisager la vie religieuse, étaient tellement innovateurs que tous ne parvenaient pas à les comprendre. S'ajoutaient, comme cela arrive parfois même entre des personnes sincèrement religieuses, des motifs de faiblesse humaine, comme l'envie et la jalousie. Bonaventure, même s'il était encerclé par l'opposition des autres maîtres universitaires, avait déjà commencé à enseigner à la chaire de théologie des franciscains et, pour répondre à qui contestait les ordres mendiants, il composa un écrit intitulé La perfection évangélique. Dans cet écrit, il démontra comment les ordres mendiants, spécialement les frères mineurs, en pratiquant les vœux de chasteté et d'obéissance, suivaient les conseils de l'Évangile lui-même.

 

De même, il rédigea l'Apologie des pauvres (Apologia pauperum) dans laquelle il défendit avec force la vocation franciscaine à la pauvreté volontaire pour l'amour du Christ; c'est imiter la nudité du Christ crucifié, qui fut pauvre dans sa naissance, dans sa vie et dans sa mort et dont le premier discours fut : 'Bienheureux les pauvres.'

Saint Bonaventure recevant la communion des mains d'un ange . F. de Herrera. XVIIe siècle

Saint Bonaventure recevant la communion des mains d'un ange . F. de Herrera. XVIIe siècle

De 1253 à 1255, Bonaventure est maître régent, titulaire de la chaire franciscaine de la faculté de théologie de l'Université de Paris. Il est surnommé le Docteur séraphique.

 

Enseignant un temps aux côtés de l'Aquinate à Paris, Bonaventure développe une angélologie et démonologie (Breviloquium) héritières de toute la tradition scripturaire et patristique. Il est assez fidèle aux sentences du Lombard et des œuvres d'Hugues de Saint-Victor (surtout le De Sacramententis). Comme le fera S. Thomas, Bonaventure parle de l'exorcisme dans le cadre du baptême des enfants et des adultes (in IV Sent. sur le baptême) : l'exorcisme baptismal a surtout pour effet de protéger le fidèle des maléfices des démons.

 

Comme Thomas, Bonaventure note que l'intelligence des démons est diminuée, mais que leur jugement pratique reste totalement perverti. Ils n'ont pas une connaissance certaine de l'avenir, mais peuvent parfois prédire avec justesse, en raison de l'acuité de leur esprit, de leur expérience et de leur ruse. Ces détails auront une grande importance dans la divination et la voyance.

 

Il y a quelques différences mineures entre ces saints docteurs. Le franciscain pense que les anges de tous les ordres ont pu tomber dans le péché (in Sent. Lib II, dist. VI a 1, q. II.); l'Aquinate doute que des séraphins soient tombés. La volonté des démons ne peut être rectifiée car ils ne peuvent se repentir, même si Dieu, absolument parlant, pourrait leur rendre leur intégrité, possibilité que Thomas ne semble pas envisager. (Jean-Baptiste GOLFIER, Tactiques du diable et délivrances, Artège-Lethielleux, 2018, p. 120-121.)

 

Bonaventure cherchait en toutes choses la gloire de Dieu et sa propre sanctification. Jamais il ne s'appliquait au travail sans invoquer les lumières de l'Esprit-Saint. Cet esprit de piété donne à ses écrits une chaleur et une onction toute divine, ce qui l'a fait appeler docteur séraphique

 

Il sait parfaitement que François voulait voir ses frères passionnés de simplicité, de prière et de pauvreté. Si François témoignait un affectueux respect aux théologiens, leur science comme telle n'est jamais entrée dans son charisme. Il ne refusait ni l'étude ni la science à condition que les frères fussent libérés de tout esprit de possession.

 

Si le Christ, Verbe incarné est l'image du Père, l'homme a été créé à l'image du Christ. Ce thème central dans la pensée biblique et chez les Pères grecs est l'élément fondamental de l'anthropologie chrétienne de Bonaventure. Bonaventure a plus que d'autres attaché une extrême importance au thème de l'homme-image de Dieu dans son anthropologie et dans la description du retour de l'homme à Dieu. 

 

Le spirituel : il trouve dans la Création le premier palier 

Saint Bonaventure voit et découvre Dieu grâce à ses créatures , par co-intuition, telle que la définissent les spécialistes de sa pensée : à partir du monde sensible, le saint trouve en Dieu la raison de son être, puisque Dieu est le fondement de tout être et de la connaissance elle-même. Il écrira :

Toutes choses ensemble constituent une échelle qui monte jusqu'à Dieu.

[...] La contemplation de toutes les créatures nous conduit au Dieu éternel.

S. Bonaventure, Itinéraire

Dans ces lignes de son son Itinerarium (Itinéraire de l'Esprit vers Dieu), un de ses plus célèbres ouvrages composé au cours de l'année 1259 après une extase mystique lors d'une promenade sur le mont Alverne, résonne le Cantique des Créatures de saint François, résonne ce Dieu qui, à travers les hommes, se révèle au monde et exprime son amour.

 

Il voit dans la Création sensible le premier palier grâce auquel l'homme monte vers Dieu. Reconnaissant comme François que toute créature est parole du Seigneur, il remonte de la créature vers Dieu dans une méditation qui va du moindre signe de la présence agissante jusqu'à Dieu lui-même dans son mystère. La "spéculation du pauvre dans le désert", comme Bonaventure appelle l'Itinerarium, rend intelligible la révélation que Dieu nous fait de lui en Jésus-Christ et, du coup, nous rend meilleurs.

 

L'homme a différentes voies pour parvenir à la connaissance de Dieu, mais pour une connaissance parfaite, il faut de l'amour.

 

Ce qui représente le mieux l'idée de connaître Dieu chez saint Bonaventure est donné par une lecture de la réalité qui nous entoure et de Dieu lui-même : c'est la connaissance qui s'accomplit grâce à l'intelligence mariée à l'amour : "Il n'y a pas de connaissance parfaite sans amour. Nous atteignons Dieu par l'amour parce que par lui nous atteignons la connaissance la plus parfaite surtout quand l'amour est expérientiel : la connaissance se réalise dans l'amour de Dieu. Le moyen le plus parfait de connaître Dieu consiste dans l'expérience de sa propre douceur." (Source: https://lanuovabq.it/it/bonaventura-la-conoscenza-di-dio-passa-dallamore )

 

Bonaventure est un spirituel parce qu'il perçoit que la raison ne peut suffire à rendre compte de la vision qui s'offre à elle d'un Dieu créateur désireux d'entrer en relation personnelle avec sa créature. De la première de ses œuvres à la dernière, on décèle une pensée synthétique : ainsi dans la triple vision du verbe de Dieu, Verbe incréé, qui est le Fils dans sa réalité éternelle de relation au Père et qui est l'idée première de la Création à partir de laquelle nous la connaissons à notre tour; Verbe incarné, le Fils de Dieu fait homme qui, en mourant par obéissance au Père, sauve et libère l'homme, et à travers Lui, la création entière; Verbe inspiré, le Fils qui révèle le mystère du Père et son propre mystère dans les mots humains de l'Ecriture. Ainsi, l'exemplarisme apparaît comme la doctrine des relations d'expression entre Dieu et la Création. (Dictionnaire des saints et Grands témoins du christianisme, Sous la direction de Jean-Robert ARMOGATHE et André VAUCHEZ, CNRS Éditions, Paris 2019, p. 174.)

 

Saint Thomas d’Aquin vint un jour le visiter et lui demanda dans quels livres il puisait cette profonde doctrine qu’on admirait en lui. Bonaventure lui montra quelques volumes : mais, son ami faisant l’incrédule, il finit par montrer un crucifix qui était sur sa table, et lui dit :

 

"Voilà l’unique source de ma doctrine ; c’est dans ces plaies sacrées que je puise mes lumières !"

Si vous voulez connaître les ruses de Satan et démasquer ses tromperies, soyez un homme de prière.

Saint Bonaventure, docteur de l'Église (1217-1274)

Le souvenir de Jésus crucifié demeurait constamment en son âme. L'une de ses dévotions particulières était durant les quarante jours qui suivent l'Épiphanie, c'est-à-dire le temps de la retraite du Christ au désert, de rechercher la solitude et, de s'appliquer sans interruption, tout en menant le jeûne le plus rigoureux possible à prier et louer Dieu. Jésus est mort de sa blessure, une blessure d'amour a ravi Son Cœur; une mort d'amour l'a emporté. Ainsi, pour Bonaventure, "l'amour est fort comme la mort" et en vérité, il est même plus fort que la mort. Il n'est pas possible de la maison de Son Cœur la première mort, c'est-à-dire l'amour de ceux qui sont morts car il se l'est acquise par une blessure inguérissable... Son flanc a été percé pour nous permettre d'y entrer. (Ivan GOBRY, Mystiques Franciscains, Éditions Artège, Perpignan 2013, p. 46-50.)

La messe n'est pas une imitation ou un souvenir du Calvaire, elle est identiquement le même Sacrifice et ne diffère du Calvaire que par le mode d'offrande. Dans chaque messe, le sang de Jésus est à nouveau versé pour nous.

S. Bonaventure

Saint Bonaventure, docteur de l'Église (1217-1274)

Les Douleurs du Cœur de Marie

Saint Bonaventure remarque que "les plaies qui étaient éparpillées sur le corps de Notre-Seigneur étaient toutes réunies dans l'unique cœur de Marie". Notre-Dame donc, à cause de sa compassion pour Jésus, fut flagellée, couronnée d'épines, insultée, et cloué sur la croix.

Saint Bonaventure, contemplant Marie au Calvaire à la mort de son fils, l'interroge et lui demande : "Ô Dame, dis-moi, où étais-tu au Calvaire ? Près de la croix ? Non, je dirais plutôt que tu étais réellement sur la croix, crucifiée avec ton Fils."

 

Élu général de l'Ordre des Franciscains en 1556 malgré ses larmes, il le mit sous la protection de la très-sainte-Vierge, et s'appliqua à y corriger les abus et à y rétablir la paix et l'harmonie. Il continua ses travaux ; mais, de tous, celui qui lui fut le plus cher fut la Vie de saint François d’Assise, qu’il écrivit avec une plume trempée dans l’amour divin, après avoir visité tous les lieux où avait passé son bienheureux père.

Si vous voulez obtenir le courage et la force pour vaincre les tentations de l’ennemi, soyez un homme de prière.

S. Bonaventure

Urbain IV et S. Bonaventure écoutant saint Thomas d'Aquin présenter la messe de la Fête-Dieu en 1264. Artiste inconnu

Urbain IV et S. Bonaventure écoutant saint Thomas d'Aquin présenter la messe de la Fête-Dieu en 1264. Artiste inconnu

Saint Thomas vint un jour lui rendre visite, et, à travers sa porte entrouverte, l’aperçut ravi, hors de lui-même et élevé de terre, pendant qu’il travaillait à la vie du saint fondateur ; il se retira avec respect, en disant : "Laissons un Saint faire la vie d’un Saint."

 

Bonaventure avait à peu près cinquante six ans quand, le 3 juin 1273, le Bx Grégoire X (Tebaldo Visconti, 1271-1276) le nomma cardinal-évêque d’Albano. Les envoyés du Pape le trouvèrent, lui, général de l’Ordre, l'un des plus grands théologiens et philosophes du Moyen Âge occupé, avec plusieurs frères, à laver la vaisselle.

 

Ainsi Bonaventure gouverna l'ordre durant dix-sept ans, cherchant l'unité des frères dans la paix et l'amour de la pauvreté. Il visitait les provinces, écrivait pour les frères, réprimait les abus, parfois avec force, suivait de très près la vie bouillonnante de l'université parisienne.

Madone avec l'enfant Jésus, Francesco Vanni 1563/65-1610

Madone avec l'enfant Jésus, Francesco Vanni 1563/65-1610

Marie recherche ceux qui s'approchent d'elle avec dévotion et respect, car elle les aime, les nourrit et les adopte comme ses enfants.

S. Bonaventure

Il meurt ministre général des Franciscains, le 15 juillet 1274. 

En apprenant cette mort le pape Grégoire X s’écria : "Cecidit co­lumna christianitatis ! Une colonne de la chrétienté s’est écroulée !"

 

Les élèves de Bonaventure défendront son esprit contre l'aristotélisme envahissant : Gauthier de Bruges, pour qui l'existence de Dieu est "la première vérité" et donc ne peut pas être prouvée a priori; John (ou Jean) Peckham, maître en théologie d’Oxford et de Paris, qui s'opposa à Thomas d'Aquin sur la nature de l'âme, Guillaume de la Mare, Maître Régent à l'Université de Paris, auteur de Correctorium Fratris Thomae, critique de l'œuvre de Thomas, et Mathieu (ou Matteo) d'Aquasparta, Maître en Théologie à Paris qui prêcha une croisade dans les États pontificaux pour défendre le pape Boniface VIII contre les attaques de Philippe le Bel.

 

Bonaventure a été inscrit dans le livre des saints le 14 avril 1482 par le pape franciscain Sixte IV (Francesco della Rovere, 1471-1484).

 

En 1562 ses restes furent brûlés par des Calvinistes fanatiques. Seule sa tête a été sauvée. (Paroisse Verneuil-sur-Havre)

 

En 1588, un autre pape franciscain, Sixte V (Felice Peretti, 1585-1590) le déclara “Docteur de l’Église”.

Saint Bonaventure, docteur de l'Église (1217-1274)
Le 3 mars 2010, Benoît XVI a tracé un portrait de Bonaventure, un personnage a dit le Pape, "qui m'est particulièrement cher pour l'avoir étudié dans ma jeunesse". Cet "homme d'action et de contemplation, de grande piété et de prudence", explique Benoît XVI, fut un des principaux promoteurs de l'harmonie entre Foi et culture au XIII siècle.
 

Benoît XVI a conclu la biographie de ce Docteur de l'Église en invitant à recueillir l'héritage de Saint Bonaventure, qui résumait le sens de sa vie ainsi:

 

"Sur terre nous pouvons contempler l'immensité Divine grâce au raisonnement et à l'admiration.

A l'inverse, au Ciel, lorsque nous serons devenus semblables à Dieu, par la vision et l'extase...nous entrerons dans la Joie de Dieu". (source: VIS 100303-540 et La conoscenza di Cristo, q. 6, conclusione, in Opere di San Bonaventura. Opuscoli Teologici/1, Roma 1993, p. 187).

 

 

PRATIQUE. Faites les choses communes d'une manière non commune.

Saint Bonaventure, docteur de l'Église (1217-1274)

Sources

 

(1) Vie des Saints pour tous les jours de l'année avec une pratique de piété pour chaque jour et des instructions sur les fêtes mobiles, Alfred Mame et Fils éditeurs, Tours 1867, p. 195; (2) Audience Générale de Benoît XVI du mercredi 3 mars 2010 sur Saint Bonaventure; (3); (4); (5); (6); (7) Ivan GOBRY, Saint-François d'Assise et l'esprit franciscain, Maîtres spirituels aux Editions du Seuil, 1957, p. 83; 110 ; (8) Dictionnaire des saints et Grands témoins du christianisme, Sous la direction de Jean-Robert ARMOGATHE et André VAUCHEZ, CNRS Éditions, Paris 2019, pp. 173-178.

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