Saint Barnabé est qualifié du nom d'Apôtre, quoiqu'il ne fût pas du nombre des douze que Jésus avait choisis ; on lui a donné ce titre glorieux parce que le Saint-Esprit l'avait appelé d'une manière toute spéciale et qu'il eut une grande part, de concert avec les Apôtres, dans l'établissement du christianisme.
Il était Juif, de la tribu de Lévi, et natif de l'île de Chypre ; son nom de Joseph lui fut changé par les Apôtres contre celui de Barnabé, qui signifie fils de consolation ou d'encouragement (Ac 4:36). C'est de lui dont parlent les Actes des Apôtres qui évoquent celui qui vend son champ et en apporte la somme aux Apôtres (Ac. 4:36-37). Il avait été ami d'enfance de saint Paul et a peut-être été, comme Paul, disciple de Gamaliel à Tarse. Après l'étonnante conversion de cet Apôtre, Barnabé présenta Paul à Pierre, le chef de l'Église de Jérusalem, qui se méfiait encore de son ancien persécuteur (Ac. 9:27).
Envoyé à Antioche de Syrie, capitale de la Syrie et troisième ville de l'empire (la ville antique fondée par Séleucos Ier, successeur d'Alexandre le Grand en Syrie), il vit tant de bien à faire, qu'il appela Paul à son secours, ce dernier se trouvant alors à Tarse où celui-ci s'était retiré. Il passa une année entière avec lui, se consacrant à l'évangélisation de cette ville importante, dans l'Église de laquelle Barnabé était connu comme prophète et docteur (Ac 13, 1) et où la foi prenait de grands accroissements. Ainsi, au moment des premières conversions des païens, Barnabé a compris qu'il s'agissait de l'heure de Saul. En ce moment important, il a comme restitué Paul à l'Église; il lui a donné, en ce sens, l'Apôtre des nations.
En réalité, il s'agit d'un voyage missionnaire de Barnabé, qui était le véritable responsable, et auquel Paul se joignit comme collaborateur, touchant les régions de Chypre et de l'Anatolie du centre et du sud (dans l'actuelle Turquie), et se rendant dans les villes d'Attalia, Pergé en Pamphylie (Ac 13:13), Antioche de Pisidie, Iconium (Konya), Derbe, qui entendirent leur parole éloquente, furent témoins de leurs miracles et, sous leurs pas, la foi se répandit avec une rapidité prodigieuse. À Lystre en Lycaonie (Ac 13, 14), ils furent pris pour des dieux : Barnabé fut pris pour Zeus et Paul pour Hermès. Belle indication qui nous permet de deviner la stature physique de ces apôtres: Barnabé devait être de stature imposante, Hermès (Paul) paraissant plus petit à ses côtés !
Barnabé se rendit ensuite avec Paul au Concile de Jérusalem (49 ap. J.-C.), où, après un examen approfondi de la question, les Apôtres et les Anciens décidèrent de séparer la pratique de la circoncision de l'identité chrétienne (Ac 15, 1-35). C'est ainsi qu'ils ont rendu officiellement possible l'Église des païens, une Église sans circoncision: nous sommes les fils d'Abraham simplement par notre foi dans le Christ.
Barnabé et Paul eurent ensuite un litige, au début du deuxième voyage missionnaire, car Barnabé était de l'idée de prendre Marc (Jean surnommé "Marc" ou "Jean-Marc") comme compagnon, alors que Paul ne voulait pas, ce jeune homme les ayant quittés au cours du précédent voyage (Ac 13, 13; 15, 36-40). Ils se séparèrent donc et formèrent deux équipes. Paul et Silas partirent pour la Lycaonie, tandis que Barnabé et Marc s'en allèrent évangéliser Chypre (Ac 15:36-40).
Entre les saints, il existe donc aussi des contrastes, des discordes, des controverses. Et cela m'apparaît très réconfortant, écrit Benoît XVI dans l'Audience générale du 31 janvier 2007, car nous voyons que les saints ne sont pas "tombés du ciel". Ce sont des hommes comme nous, également avec des problèmes compliqués. La sainteté ne consiste pas à ne jamais s'être trompé, à n'avoir jamais péché. La sainteté croît dans la capacité de conversion, de repentir, de disponibilité à recommencer, et surtout dans la capacité de réconciliation et de pardon. Ainsi Paul, qui avait été plutôt sec et amer à l'égard de Marc, se retrouve ensuite avec lui. Dans les dernières Lettres de saint Paul, à Philémon et dans la deuxième à Timothée, c'est précisément Marc qui apparaît comme "mon collaborateur". Ce n'est donc pas le fait de ne jamais se tromper, mais la capacité de réconciliation et de pardon qui nous rend saint. Et nous pouvons tous apprendre ce chemin de sainteté.
Quoi qu'il en soit, Barnabé, avec Jean-Marc, repartit vers Chypre (Ac 15, 39) autour de l'année 49. On perd ses traces à partir de ce moment-là. Tertullien lui attribue la Lettres aux Hébreux, ce qui ne manque pas de vraisemblance car, appartenant à la tribu de Lévi, Barnabé pouvait éprouver de l'intérêt pour le thème du sacerdoce. (2)
Selon des traditions plus tardives et moins sûres, Barnabé se serait rendu dans l'île de Chypre d'où il était originaire pour l'évangéliser. (3) Il serait mort martyrisé près de Salamine, lapidé (4) et brûlé (5) vers l'an 60, par des juifs excités et jaloux des conversions qu'il suscitait. (6)
Sources: (1); (2) Benoît XVI, Audience générale du 31 janvier 2007 ; 3 ; (4) Alexandre de Chypre, Laudatio Barnabae, 539-541, éd. Peter Van Deun, CCSG 26, p. 105-106 ; (5) Actes de Barnabé, 23, trad. Enrico Norelli, dans Écrit Apocryphes Chrétiens t.2, Gallimard, 2005, p. 641, le texte n'est pas clair pour savoir si le corps a été brûlé une fois mort ou encore vivant; (6) Missel du Dimanche 2018, Nouvelle Traduction liturgique, Année B, Bayard Éditions, Lonrai 2017, p. 481