Le site "Juif.org" a publié le 6 février 2012 une petite étude sur le golem, ce personnage humanoïde ésotérique fait d'argile, vengeur et défenseur de la communauté juive - "massacreur de Goyim, invulnérable et invincible" - nous dit Hervé Ryssen in "Le fanatisme juif" (Editions Baskerville, Mercuès 2007, p. 377).
Le personnage du golem est sorti du cerveau d'un rabbin de Prague (Tchéquie) au XVIe siècle, le Maharal de Prague nommé Yehudah-Leib, au moment où les Juifs de cette ville étaient, "dans le courant du XVIe siècle, menacés d'une annihilation certaine et imminente" (H. Ryssen, ibid., p. 376) ; Il continue d'attirer des touristes, plus ou moins persuadés que ses restes sont conservés... au grenier de la synagogue du Maharal, où pourtant "nul n'est autorisé à monter".
Le golem surgit donc, nous dit l'article, dans une période où "il était rare qu'une fête de Pessa'h passât sans une attaque, ou la menace d'une attaque, de la part d'une populace déchaînée et débordant de ressentiment contre les juifs sans défense". Des juifs toujours victimes, toujours innocents... Il fut fabriqué par le rabbin de la synagogue "dans le but de protéger la communauté juive de Prague contre les fausses accusations et les attaques" (Ndlr. Notamment les pogroms et accusations de crimes et de meurtres rituels d'enfants chrétiens à Pessa'h, la Pâque juive célébrant l'Exode des Juifs hors d'Egypte. Sur ces crimes rituels, leurs sources, leurs procès, lire l'ouvrage incontournable d'Hervé Ryssen, "Histoire de l'antisémitisme", qui en fait une large recension au fil des chapitres).
Le rabbin de Prague aurait donné la vie au golem en inscrivant EMET(H) (אמת, vérité en hébreu et un des noms de Dieu) sur son front et en introduisant dans sa bouche un parchemin sur lequel était inscrit le nom ineffable de Dieu, parfois dit Hashem (Le Nom) pour ne pas le prononcer.
Pour le tuer, il aurait fallu effacer la 1re lettre (l’aleph) car MET(H)(מת) signifie mort. Le Golem étant devenu trop grand pour que le Rabbin pût effacer l’aleph, Rabbi Loew lui demanda de lacer ses chaussures, ce qu’il fit. Le plan fonctionna : la créature se baissa et mit son front à portée de son créateur, le Golem redevint ce qui avait servi à sa création : de la terre glaise.
Selon d'autres sources, certains racontent que le golem devenu trop grand et incontrôlable..., "son créateur est mort, écrasé par la masse de sa créature". La fiche "golem" de Wikipedia ajoute : "Une autre légende veut aussi que le golem, son corps, soit entreprosé - ou dormant - dans la genizah (entrepôt des vieux manuscrits hébreux, il est interdit de jeter des écrits qui contiennent le nom du très-haut) de la communauté juive de Prague, qui se trouve dans les combles de la synagogue Vieille-Nouvelle de Josefov, qui serait d'ailleurs toujours scellé et gardé".
Plus globalement, la légende du Golem de Prague se rattache à ce qu'Hervé Ryssen nomme la "théologie de la vengeance" (Cf. Le Fanatisme juif, ibid., p. 215.).
Article in extenso :
Peu de personnes ignorent le Golem, cette créature étrange à laquelle donna le jour le célèbre Rabbi Judah-Leïb Loëwe, le Maharal de Prague, qui vécut il y a plus de 350 ans. De merveilleux récits au sujet de cet être étonnant nous ont été transmis de génération en génération. L'ancienne synagogue du Maharal, dans le vieux quartier juif de Prague, n'a pas cessé d'attirer nombre de visiteurs et de touristes, juifs aussi bien que non-juifs.
Non seulement parce qu'elle est l'une des plus anciennes de la ville, celle que fréquenta le Maharal, et où le siège qu'il occupait à côté de l'Arche Sainte est respectueusement gardé vacant, mais aussi parce qu'on affirme que les restes d'argile du Golem sont conservés au grenier de ce lieu de prière. Nul n'est autorisé à y monter. Et quand les visiteurs en demandent la raison, il leur est répondu qu'un souci de sécurité l'impose, car le toit, peu solide, pourrait s'effondrer. En fait, ce grenier fut interdit depuis de longues années, étant considéré comme un lieu sacré.
Les fausses accusations
Enfants, nous n'étions pas en âge de comprendre grand-chose aux livres saints que le grand Maharal a écrits, et qui sont une source inépuisable d'inspiration. En revanche, nous étions fascinés par les récits sur le Golem, que le vieux Zékhariah, le Chammache de notre Beth Hamidrache, avait l'habitude de nous faire de temps en temps, et surtout pendant la fête de Pessa'h. Car le Maharal est né la première nuit du Sédère, et bon nombre des histoires sur le Golem se rapportaient à Pessa'h et aux terribles « Libellés du Sang » d'alors. Il était rare qu'une fête de Pessa'h passât sans une attaque, ou la menace d’une attaque, de la part d'une populace déchaînée et débordant de ressentiment contre les Juifs sans défense.
C'est dans le but de protéger la communauté juive de Prague contre les fausses accusations et les attaques que le Maharal fit le Golem, un personnage d'argile, et lui insuffla la vie par l'invocation du Nom de D.ieu que seuls de saints Kabbalistes d'une valeur exceptionnelle connaissent.
On affirme que la naissance même du Maharal mit en échec une telle accusation, comme l'atteste le récit suivant :
Un provocateur
Rabbi Betsalel, père du Maharal et chef de la communauté juive de Worms, était assis à la table du Sédère en compagnie de quelques invités de marque et d'un certain nombre d'indigents sans foyer. Quand, conformément à la coutume, le moment vint d'ouvrir la porte au prophète Élie, la femme de Rabbi Betsalel, enceinte de neuf mois, fut prise des douleurs de l'enfantement. Quelques invités se hâtèrent d'aller chercher une sage-femme. À ce moment précis, un individu d'allure louche profitait de l'obscurité pour s'approcher à pas feutrés de la maison de Rabbi Betsalel. Il portait sur l'épaule un sac contenant le cadavre d'un enfant chrétien. Son intention était de déposer son sinistre ballot dans la cave du rabbin, afin que ce dernier fût accusé, avec preuves à l'appui, de « meurtre rituel ». Mais voyant la porte de la maison s'ouvrir avec fracas, et plusieurs hommes se précipiter au dehors, le traître prit peur et s'enfuit. Il tomba sur une patrouille de police. Un homme qui court en pleine nuit ne peut qu'éveiller les soupçons. On l'arrêta et le cadavre de l'enfant fut découvert. Pris de panique, le gredin reconnut sans peine que des comploteurs l'avaient chargé, moyennant rémunération, de déposer le sac avec son macabre contenu dans la cave de Rabbi Betsalel. Ainsi, avant même que de naître, le Maharal sauvait la communauté juive d'un terrible « Libellé du Sang ».
Quand il devint Der Hohe Rabbi Loëwe, le Grand-Rabbin de Prague, le péril était grand pour les Juifs. Un moine nommé Tadeusz, antisémite notoire, suscitait et entretenait l'agitation contre les Juifs, se livrant à toutes sortes de machinations destinées à leur nuire. Cela ne laissait pas d'inquiéter beaucoup le Maharal ; il priait constamment D.ieu de leur venir en aide. Puis, il eut un songe dans lequel lui fut indiquée la conduite à tenir en ces circonstances.
Le lendemain matin, il fit appeler son gendre et son disciple le plus proche, et leur fit part du secret que le Ciel lui avait révélé. « Nous trois, nous constituerons un Beth Din (Cour de Justice) régulier, et nous ferons un Golem d'argile qui nous aidera à nous défendre contre nos ennemis », conclut-il.
Naissance du Golem
Les trois hommes se rendirent au Mikvé où ils se sanctifièrent trois jours durant, se livrant aux prières et au jeûne, et purifiant leurs esprits et leurs cœurs avec une concentration extrême. A l'aube du troisième jour, ils préparèrent un paquet de vêtements de la taille d'un homme normal, et l'emportèrent à un endroit hors de la ville, non loin de la rive du fleuve. Là, ils modelèrent une statue d'argile ayant l'apparence et la taille d'un homme ; il était dans une position inclinée, et son visage tourné vers le ciel.
Le Maharal dit à son gendre, qui était un Cohen, d'accomplir sept Hakafoth (tours) autour du Golem tout en concentrant son esprit sur certains Noms et certaines lettres, saints les uns et les autres, et que le Maharal lui avait préalablement révélés. Puis il dit à son disciple, qui était un Lévite, de faire de même. Enfin, le Maharal accomplit à son tour les sept Hakafoth autour du Golem inerte. Ayant achevé le dernier tour, il posa un parchemin portant inscrit le Nom de D.ieu, sur les lèvres de la statue d'argile. Puis tous ensemble, ils récitèrent avec une grande concentration le verset des Écritures Saintes : « Et Il souffla dans ses narines un souffle de vie, et l'homme devint un être vivant. » Verset qu'ils répétèrent sept fois. À ce moment, le Golem ouvrit les yeux. Alors, le Maharal lui ordonna de se lever et de se couvrir avec les vêtements qu'ils lui avaient apportés.
Yossel Golem
« Ton nom est Yossel », dit le Maharal au Golem. « Je t'ai créé avec l'aide de D.ieu, afin que tu accomplisses la mission Divine de protéger les Juifs contre leurs ennemis. Tu obéiras à tous mes ordres, car tu n'as aucune volonté propre. Ta place sera à l'intérieur du Beth Din et tu rempliras les fonctions de Chammache (bedeau) ».
Ceci fait, les trois hommes prirent le chemin de la ville, suivis par le Golem. Il avait, comme nous l'avons dit, l'apparence d'un homme ordinaire, encore que ses mouvements eussent une certaine raideur. Muet — car le Maharal ne l'avait pas doté du don de la parole —, il était dépourvu de toute pensée et de toute intelligence.
On donna vite au nouveau bedeau le sobriquet de Yossel Golem. Toute la journée il demeurait assis au Beth Din, ne disant rien, ne faisant rien, le regard vide. Lui adressait-on la parole ? Il ne réagissait point, n'ouvrait jamais la bouche. Son visage s'animait seulement quand le Maharal lui parlait ; alors il écoutait attentivement, humblement, puis partait exécuter ponctuellement l'ordre reçu, quel qu'il fût.
Le Maharal envoyait le Golem patrouiller dans le ghetto. Il avait fort à faire surtout durant la période — la plus dangereuse pour les Juifs — allant de Pourime jusqu'après Pessa'h. Le Golem, obéissant à l'ordre de son maître, arpentait les rues étroites du ghetto. Il avait un flair, dont l'avait doté le Maharal, pour détecter dans le noir un ennemi des Juifs, quel qu'il fût. Il était à la fois puissant et agile. Sa proie ne pouvait espérer lui échapper. Le Golem capturait le chenapan, le garrottait, et le transportait comme un ballot jusque devant l'Hôtel de Ville, où il l'abandonnait. Cela fait, il disparaissait, et reprenait le chemin du Beth Din où il regagnait la place qu'il occupait habituellement quand il n'avait pas de mission à accomplir. Ainsi le Maharal, avec l'aide de son Golem, déjouait les complots de Tadeusz, qui mettait à contribution jusqu'à la magie noire pour nuire aux Juifs [Ndlr. Les Juifs étant connus pour leurs pratiques des sortilèges, maléfices et incantations magico-kabbalistiques de toutes sortes, on peut noter ici la remarquable inversion accusatoire qui caractéristise une des pathologies du judaïsme].
Tels étaient les récits que nous faisait le vieux Zékhariah sur le Golem. Un jour, lisant quelque frayeur sur nos visages, il nous conta pour nous dérider l'histoire suivante.
La maison inondée
On était à Erev Pessa'h, et la femme du Maharal était occupée à préparer la maison pour la fête. C'était une tâche fatigante ; aussi, à un moment, demanda-t-elle à son mari de permettre à Yossel Golem de l'aider. Le Maharal ordonna à ce dernier de faire ce que la Rebbetsine lui demanderait. Celle-ci lui dit d'aller chercher de l'eau du puits et de remplir le tonneau qui se trouvait à la cuisine. Yossel Golem prit les deux seaux qu'elle lui tendait et se dirigea vers le puits. Obéissant, il les remplit d'eau et alla les vider dans le tonneau. Il ne fallut pas longtemps pour que celui-ci fût plein. Mais le Golem, comme si de rien n'était, continuait son travail. Le tonneau déborda, mais l'automate poursuivait sa tâche, apparemment ne s'apercevant de rien. Et il continuait de verser de l'eau dans le tonneau depuis longtemps déjà plein. Quand la Rebbetsine accourut, la cuisine et le salon étaient inondés. « Arrête ! Arrête ! » cria-t-elle affolée ; mais Yossel n'écoutait point. Elle courut au Beth Din. « Ton Golem est en train d'inonder la maison », dit-elle hors d'haleine à son mari, « et si tu ne l'arrêtes pas à l'instant, c'est toute la ville qui va être inondée ! »
Le Maharal se précipita vers la maison. Il ordonna au Golem de s'arrêter ; ce qu'il fit sur-le-champ. L'histoire, quand elle fut connue, amusa toute la ville. Yossel Golem avait failli provoquer un déluge aussi grave que celui du temps de Noa'h ! Quant à la Rebbetsine, ce fut la première et la dernière fois qu'elle demanda de l'aide à l'étrange personnage.
Quand la situation des Juifs s'améliora et que le Golem eut achevé sa mission, le Maharal lui ordonna de l'accompagner au grenier de la synagogue. Là, il lui dit de se coucher et d'ouvrir la bouche. Le saint Rabbi retira le parchemin sur lequel était inscrit le Nom Divin et dit au Golem : « Tu es poussière, et tu retourneras à la poussière. » Instantanément, ce dernier devint un monceau d'argile.
Ce fut la fin du Golem. C'est aussi la fin de notre récit.