La fête du Corpus Christi est une solennité liturgique catholique célébrant la présence réelle du corps et du sang de Jésus-Christ qui est le Fils de Dieu dans le sacrement de l'Eucharistie qui est connu sous le nom de transsubstantiation. L'Eucharistie est pratiquée le Jeudi Saint dans une atmosphère solennelle, fait qui précède le Vendredi Saint.
La liturgie de ce jour honore également l'institution du sacerdoce, le lavement des pieds des disciples par Jésus et l'agonie dans le jardin de Gethsémani. Cette fête a été créée pour faire un jour qui se concentrait uniquement sur l'Eucharistie afin d’en expliquer la joie étant donné qu’il s’agit du sacrifice du corps et du sang de Jésus-Christ.
La Fête du Saint-Sacrement (2e dimanche après la Pentecôte) a été instituée au Moyen-Age pour commémorer la présence de Jésus-Christ dans le sacrement de l’eucharistie.
Le pape Urbain IV en 1264 rendit la fête du Saint-Sacrement obligatoire pour l’Église universelle.
Cette fête est devenue une fête très populaire, très célèbre en Espagne. Elle a été supprimée dans les pays protestants, mais cependant gardée par l’Église anglicane. Cette fête était appelée fête du Corpus Christi ou Fête du Saint-Sacrement. Le nom de Fête-Dieu n’existe qu’en français.
"La veille de sa Passion, au cours de la Cène pascale, le Seigneur prit le pain entre ses mains, et, ayant prononcé la bénédiction, le rompit et le leur donna, en disant : « Prenez, ceci est mon corps ». Puis, prenant la coupe, il rendit grâces, la leur donna, et ils en burent tous. Et il dit : « Ceci est mon sang, le sang de l'alliance, qui va être répandu pour une multitude » (Mc 14, 22-24). Toute l'histoire de Dieu avec les hommes est résumée dans ces paroles. Ce n'est pas seulement le passé qui est réuni et interprété, mais l'avenir également qui est anticipé : la venue du Royaume de Dieu dans le monde.
On fait une procession solennelle le jour de la Fête-Dieu pour sanctifier et bénir, par la présence de Jésus-Christ, les rues et les maisons de nos villes et de nos villages." (Extraits de l’homélie de Benoît XVI, Parvis de la basilique Saint-Jean-de-Latran, Jeudi 15 juin 2006) (2)
Saint Thomas d'Aquin (1225-1274) prépara la liturgie de cette fête du Saint Sacrement du Corps et du Sang du Christ, notamment par la création du Lauda Sion Salvatorem et de Pange Lingua Gloriosi permettant aux fidèles une catéchèse simple et belle sur la Présence Réelle. Pange Lingua Gloriosi est l'hymne eucharistique par excellence de l'Église catholique, même s'il faut préciser qu'elle appartient aussi à la tradition orthodoxe, le premier vers de cette pièce reprenant celui de l'hymne de Fortunat (VIe siècle) composé avant le schisme de 1054.
L'hymne Pange lingua gloriosi est chantée le Jeudi saint lors de la translation du Saint-Sacrement au reposoir. La dernière séquence Tantum ergo est chantée à tous les saluts du Saint-Sacrement. L'hymne atteste la croyance très ancienne en la présence réelle du corps et du sang du Christ dans les espèces consacrées.
Texte original : Nobis datus, nobis natus In supremae nocte cenae Verbum caro, panem verum Tantum ergo Sacramentum Genitori, Genitoque P. Panem de coelo praestitisti eis. (T.P. Alleluia) Oremus: Deus, qui nobis sub sacramento mirabili, passionis tu? memoriam reliquisti: tribue, quaesumus, ita nos corporis et sanguinis tui sacra mysteria venerari, ut redemptionis tu? fructum in nobis iugiter sentiamus. | Traduction en français : Fils d'une mère toujours vierge La nuit de la dernière Cène, Le Verbe fait chair, par son verbe, Il est si grand, ce sacrement ! Au Père et au Fils qu'il engendre P. Vous leur avez donné un pain descendu du ciel, (T.P. Allélulia) Oraison. Seigneur Jésus Christ, dans cet admirable sacrement tu nous as laissé le mémorial de ta passion ; donne-nous de vénérer d'un si grand amour les mystères de ton corps et de ton sang, que nous puissions recueillir sans cesse le fruit de la rédemption. |
Nous devons l'origine de la « Fête-Dieu » ou « Fête du Saint sacrement du corps et du sang du Christ » à une révélation faite à sœur Julienne du Mont Cornillon vers l'an 1210. Cette révélation demandait l'institution d'une fête annuelle en l'honneur du Saint Sacrement de l'autel. Malgré une vive persécution contre sœur Julienne et ceux qui souhaitaient que cette fête se répande, le diocèse de Liège l'institua vers l'an 1245 puis l'Église universelle ajouta cette fête au calendrier liturgique par le pape Urbain IV qui la rendit obligatoire pour l'Église entière en 1264.
En 1318, Jean XXII ordonna de compléter la fête par une procession solennelle où le très Saint Sacrement serait porté en triomphe.
Les processions du Saint Sacrement s'inspirent de 1 Roi 8, lorsque Salomon fit transporter l'Arche au Temple. Dès 675, on fit une procession du Saint Sacrement du Tabernacle. Ces processions du tabernacle étaient courantes et avaient lieu le dimanche ou pendant le Tridium au XIème siècle.
« Si quelqu'un dit que, dans le Saint Sacrement de l'Eucharistie, le Christ, Fils de Dieu, ne doit pas être adoré d'un culte de latrie, même extérieur et que, en conséquence, il ne doit pas être vénéré par une célébration festive particulière, ni être porté solennellement en procession selon le rite et la coutume louables et universels de la Sainte Église, ni être proposé publiquement à l'adoration du peuple, ceux qui l'adorent étant des idolâtres : qu'il soit anathème. »
(Concile de Trente, XIII session, 11 oct 1551)
Le culte eucharistique s'est développé de plus en plus depuis le XIVème siècle. À ce moment, l'Ostensoir apparaît en Allemagne et en France où l'hostie consacrée est exposée à l'adoration des fidèles. La pratique courante de l'exposition date de la période de l'instauration de la Fête Dieu.
SERMON POUR LA FETE-DIEU par SAINT THOMAS D'AQUIN,
Docteur des Docteurs de l'Église
(prononcé au Consistoire, devant le Pape et les Cardinaux)
Révérendissimes Pères, les souvenirs pleins d'allégresse qu'évoque la solennité de ce jour nous invitent à entourer de joyeuses louanges le Corps très saint du Christ. Quoi de plus doux, quoi de plus suave au cœur des élus que de chanter les trésors de la divine charité et d'exalter l'ardeur d'un amour sans mesure ? C'est qu'à la table de la grâce nouvelle, tous les jours, par les mains du prêtre, Dieu donne à ses enfants et aux héritiers de son royaume sa chair en nourriture et son sang en breuvage. Ce sont là tes œuvres admirables, ô Christ, toi dont la puissance est infinie et la bonté sans bornes ! Dans cet aliment sacré et ce pain super-substantiel qu'annonçaient les prodiges antiques, tu as trouvé le secret d'une union merveilleuse et auguste : la chair immaculée de Jésus-Christ, l'Agneau sans tache, devient le remède de ceux que le fruit défendu avait rendus malades et qui avaient perdu l'éternelle et immarcescible couronne.
Ô prodige qu'on ne peut trop exalter ! Effusion permanente de la bonté divine et d'une miséricorde sans mesure ! Dans ce sacrement, consommation de tous les sacrifices, Il demeure, ce Dieu, indéfectiblement avec nous ; Il y est pour jusqu'à la fin des siècles ; Il donne aux fils d'adoption le pain des anges et les enivre de l'amour qu'on doit aux enfants.
Ô humilité singulière, délices de Dieu, et que le Christ pratique après l'avoir prêchée lui-même ! Il ne se refuse à personne ; Il ne craint pas de prendre pour habitacle même un cœur souillé.
Ô pureté, qui semblable à celle du soleil n'est ternie par aucune fange et ne craint nulle contagion, mais qui gagne les âmes et en fait disparaître toute tache ! Ô nourriture des esprits bienheureux, qui sans cesse nous renouvelle et jamais ne s'épuise ! Tu n'es ni brisée, ni divisée, ni transformée ; mais, gardant ton intégrité et ta nature, tu nous rappelles le buisson antique, la farine et l'huile miraculeuses qui ne diminuaient pas.
Ô Sacrement admirable, où Dieu se cache et où notre Moïse à nous se couvre le visage du manteau de ses œuvres, objet de louanges dans toutes nos générations ! Par la vertu des paroles sacrées, instrument de la puissance divine, les substances symboliques sont changées en chair et en sang ; les espèces sacramentelles subsistent sans support, et pourtant nulle loi naturelle n'a souffert violence. Par la vertu de la consécration, un seul Christ, parfait et intègre, se trouve en divers endroits, comme une parole se communique, toujours identique à elle-même. Quand l'hostie se divise, Jésus s'y trouve comme un même visage dans les fragments d'un miroir brisé. Les fidèles l'offrent à Dieu sous les deux espèces, quoiqu'il soit tout entier sous chacune d'elles, et c'est à bon droit qu'on agit ainsi, car ce sacrement donne aux hommes le double salut du corps et de l'Âme, et il rappelle l'amertume d'une double Passion.
Ô Vertu ineffable du Sacrement, qui embrase notre cœur du feu de la charité et marque du sang de l'Agneau immaculé, au-dessus de leurs deux battants, les linteaux de nos portes !
Ô véritable viatique de notre exil militant, soutien des voyageurs, force des faibles, antidote des infirmités, accroissement des vertus, abondance de la grâce et purification des vices, réfection des âmes, vie des débiles et union des membres dans l'organisme unique de la charité !
Sacrement ineffable de la foi, Tu augmentes notre charité et nous communiques l'espérance ; soutien de l'Église, Tu éteins la concupiscence et parfais le corps mystique du Christ. Voici la substance de l'arbre de vie, ô Seigneur Jésus !
Ô Pasteur et nourriture, prêtre et sacrifice, aliment et breuvage des élus, pain vivant des esprits, remède à nos faiblesses quotidiennes, festin suave, source de tout renouveau !
Ô sacrifice de louange et de justice, holocauste de la nouvelle grâce, repas excellent, non de volailles ou de taureaux, mais de viandes plus succulentes et de ce vin délicieux qui renouvelle les amis de Dieu et enivre ses élus !
Ô table de bénédiction, table de proposition garnie d'une nourriture substantielle ! Table immense où tout est prodige étonnant ! Table plus douce que toute douceur, plus délectable que toute saveur, plus suave que tout parfum, plus magnifique que toute parure, plus succulente que toute nourriture ! Table que le Christ a préparée à ses amis et commensaux, que le père de famille sert à son fils de retour, après le repas de l'agneau symbolique. Vous êtes le bain sacré que figuraient les antiques piscines, ô notre Pâque, immolation du Christ, et vous exigez la conversion du vice à la vertu, donnant ainsi la liberté aux Hébreux de l'esprit.
Ô nourriture qui rassasie et ne dégoûte point, qui demande la mastication de la foi, le goût de la dévotion, l'union de la charité, et que divise non les dents du corps, mais le courage de la croyance !
Ô viatique de notre pèlerinage, qui attire les voyageurs sur les sommets des vertus !
Ô pain vivant, engendré au ciel, fermenté dans le sein de la Vierge, cuit sur le gibet de la croix, déposé sur l'autel, caché sous les espèces sacramentelles, confirme mon cœur dans le bien et assure ses pas dans le chemin de la vie; réjouis mon âme, purifie mes pensées. Voici le pain, le vrai pain, consommé, mais non consumé, mangé, mais non transformé ; il assimile et il ne s'assimile pas ; il renouvelle sans s'épuiser ; il perfectionne et conduit au salut ; il donne la vie, confère la grâce, remet les péchés, affaiblit la concupiscence ; il nourrit les âmes fidèles, éclaire l'intelligence, enflamme la volonté, fait disparaître les défauts, élève les désirs.
Ô calice de toutes suavités, où s'enivrent les âmes généreuses ! Ô calice brûlant, calice qui tourne au sang du Christ ; sceau du Nouveau Testament, chasse le vieux levain, remplis notre intime esprit, pour que nous soyons une pâte nouvelle, et que nous mangions les azymes de la sincérité et de la vérité.
Ô vrai repas de Salomon, cénacle de toute consolation, soutien dans la présente tribulation, aliment de joie et gage de la félicité éternelle, foyer de l'unité, source de vertu et de douceur, symbole de sainteté ! La petitesse de l'hostie ne signifie-t-elle pas l'humilité, sa rondeur l'obéissance parfaite, sa minceur l'économie vertueuse, sa blancheur la pureté, l'absence de levain la bienveillance, sa cuisson la patience et la charité, l'inscription qu'elle porte la discrétion spirituelle, les espèces qui demeurent sa permanence, sa circonférence la perfection consommée ?
Ô pain vivifiant, ô azyme, siège caché de la toute-puissance ! Sous de modestes espèces visibles se cachent d'étonnantes et sublimes réalités.
Ô Corps, ô Âme, et Toi de tous deux inséparable, ô Substance Divine ! De ce dont on chante les grandeurs dans ce sacrement auguste, ô bon Jésus, seules, pour la foi, après la consécration, les espèces sacramentelles demeurent ; ce qui est mangé sans être assimilé ne souffre ni augmentation ni diminution ; ce que tous reçoivent en entier, mille ne le possèdent pas plus qu'un seul, un seul le possède autant que mille. Ce que contiennent tous les autels, les parcelles intactes ou brisées le contiennent toutes ; ta chair est mangée véritablement, c'est véritablement ton sang que nous buvons. Et tu es ici le prêtre, et tu es aussi l'hostie, et les saints Anges sont là présents, qui exaltent ta magnificence et louent ta souveraine majesté. C'est là ta puissance, Seigneur, qui seule opère de grandes choses ; elle dépasse tout sentiment et toute compréhension, tout génie, toute raison et toute imagination. C'est Toi qui as institué et confié à tes disciples ce sacrement où tout est miracle.
N'approche donc pas de cette table redoutable sans une dévotion respectueuse et un fervent amour, homme ! Pleure tes péchés et souviens-toi de la Passion. Car l'Agneau immaculé veut une âme immaculée qui le reçoive comme un pur azyme.
Recours au bain de la confession ; que le fondement de la foi te porte ; que l'incendie de la charité te consume ; que la douleur de la Passion te pénètre ; qu'un droit jugement t'éprouve.
Approche de la table du Seigneur, de cette table magnifique et puissante, de telle sorte que tu parviennes un jour aux noces du véritable Agneau, là où nous serons enivrés de l'abondance de la maison de Dieu; là où nous verrons le Roi de gloire, le Dieu des vertus dans toute sa beauté; là où nous goûterons la Pain vivant dans le royaume du Père, par la grâce de Notre-Seigneur Jésus-Christ, dont la puissance et l'empire demeurent jusqu'à la fin des siècles. Amen.
Traduction du P. Sertillanges (Les plus belles pages de saint Thomas d'Aquin) (3)
La date de la Fête-Dieu est, dans l'Église universelle, le jeudi après la fête de la Trinité. Mais, en France, depuis le Concordat de 1801, la Fête-Dieu est solennisée le dimanche suivant et non le jeudi pour la majorité des catholiques. (4)
"La solennité du 'Corps et du Sang du Christ', instaurée par mon prédécesseur Urbain IV en mémoire de l'institution de ce grand mystère, comme acte de culte public rendu au Christ présent dans l'Eucharistie, appelle ici une mention spéciale." (S. Jean-Paul II, Dominicae Cenae, 3., 1980)