Ils demandent aux Églises chrétiennes dans le monde de soutenir cette démarche.
Le document, d’une dizaine de pages, est intitulé Kairos Palestine, ce que l’on pourrait traduire par « le moment que Dieu a choisi d’agir pour la Palestine » (1). Il fait référence à un texte similaire produit en 1985 par les Églises d’Afrique du Sud qui résistaient à l’apartheid. Il avait grandement permis de mobiliser l’opinion publique dans le pays et à l’étranger.
Justice.
Le « document de foi et de travail » des chrétiens palestiniens a de quoi mobiliser les masses. Aux accents clairement prophétiques, se référant notamment à Jérémie (“Ils disent ‘Paix ! Paix !’ et il n’y a point de paix”. Jr 6,14), ils présentent leurs intentions ainsi : « En ce moment historique, nous chrétiens palestiniens, nous déclarons que l’occupation militaire de notre terre est un péché contre Dieu et contre l’humanité, et que toute théologie qui légitime l’occupation est éloignée des enseignements chrétiens.
Extraits : "Le mur de séparation, qui a été construit sur les terrains palestiniens, en a
confisqué une grande partie, a converti nos villes et nos villages en prisons et en a fait
des cantons séparés et dispersés. Gaza, après la guerre cruelle déclenchée par Israël en
décembre 2008 et janvier 2009, continue à vivre dans des conditions inhumaines, sous
embargo permanent et reste isolée géographiquement du reste des Territoires
palestiniens.
1.1.2 Les colonies israéliennes qui nous dépouillent de notre terre, au nom de
Dieu ou au nom de la force, contrôlent nos ressources naturelles, surtout l’eau et les
terres agricoles, dont elles privent des centaines de milliers de Palestiniens. Elles sont
aujourd’hui un obstacle face à toute solution politique
1.1.3 L’humiliation à laquelle nous sommes soumis chaque jour aux points de
contrôle militaires, pour nous rendre à notre travail, à nos écoles ou à nos hôpitaux.
1.1.4 La séparation entre les membres d’une même famille, qui rend la vie
familiale impossible pour des milliers de Palestiniens, lorsque l’un des époux n’est pas
porteur d’une carte d’identité israélienne.
1.1.5 La liberté religieuse elle-même, à savoir la liberté d’accès aux lieux saints,
devient limitée, sous prétexte de sécurité. Les lieux saints de Jérusalem sont
inaccessibles à un grand nombre de chrétiens et de musulmans de la Cisjordanie et de
Gaza. Les gens de Jérusalem eux-mêmes ne peuvent accéder à leurs lieux saints
certains jours de fêtes, de même que certains de nos prêtres arabes ne peuvent entrer à
Jérusalem sans difficultés.
1.1.6 Les réfugiés font partie de notre réalité. La plupart d’entre eux vivent
encore dans les camps dans des situations difficiles inacceptables pour les êtres
humains. Eux, qui ont le droit de retour, attendent ce retour depuis des générations.
Quel sera leur sort ?
1.1.7 Les milliers de personnes détenues dans les prisons israéliennes font elles
aussi partie de notre réalité. Les Israéliens remuent ciel et terre pour un seul prisonnier,
mais ces milliers de prisonniers palestiniens qui croupissent dans les prisons
israéliennes, quand verront-ils la liberté ?
1.1.8 Jérusalem est le coeur de notre réalité. Elle est en même temps symbole de
paix et signe de conflit. Après que le “mur” a créé une séparation entre les quartiers
palestiniens de la ville, les autorités israéliennes ne cessent de la vider de ses habitants
palestiniens, chrétiens et musulmans. On leur confisque leur carte d'identité, c'est-à-dire
leur droit de résider à Jérusalem. Leurs maisons sont démolies ou confisquées.
Jérusalem, ville de la réconciliation, est devenue la ville de la discrimination et de
l’exclusion, et donc source de conflit au lieu d’être source de paix.
1.2 Par ailleurs, Israël tourne en dérision le droit international et les résolutions
internationales, avec l’impuissance du monde arabe comme de la communauté
internationale face à ce mépris. Les droits de l’homme sont violés. Malgré les multiples
rapports des organisations locales et internationales des droits de la personne,
l’oppression continue.
1.2.1 Les Palestiniens de l'Etat d’Israël, tout en étant des citoyens ayant tous les
droits et les devoirs que leur confère la citoyenneté, ont eux aussi subi une injustice
historique et ne cessent de souffrir de politiques discriminatoires. Eux aussi attendent
d’obtenir tous leurs droits et d’être traités à égalité avec tous les citoyens de l'Etat.
1.3 L’émigration est une autre dimension de notre réalité. L’absence de toute
vision ou espoir de paix et de liberté a poussé les jeunes, chrétiens et musulmans, à
émigrer. Le pays se voit ainsi privé de sa ressource la plus importante et la plus riche :
une jeunesse instruite. La diminution du nombre de chrétiens, en particulier en
Palestine, est une des graves conséquences de ce conflit, de l’impuissance et de l’échec
aux niveaux local et international à trouver une solution globale au problème.
1.4 Face à cette réalité les Israéliens prétendent justifier leurs actes comme
actes de légitime défense. C’est pourquoi l’occupation continue, de même que les
punitions collectives et les représailles de toutes sortes contre les Palestiniens. C’est là,
à notre avis, une vision renversée des choses. Oui, il y a une résistance palestinienne à
l’occupation. Mais, précisément, s’il n’y avait pas d’occupation, il n’y aurait pas de
résistance ; il n’y aurait eu non plus ni peur ni insécurité. Voilà ce que nous constatons,
et nous appelons les Israéliens à mettre fin à l’occupation. Ils verront alors un nouveau
monde, dans lequel il n’y a ni peur ni menaces, mais sécurité, justice et paix.
1.5 La riposte palestinienne face à cette réalité a revêtu de nombreuses formes.
Certains ont choisi la voie des négociations : c'est là la position officielle de l'Autorité
palestinienne. Mais cela n'a pas fait avancer le processus de paix. D'autres partis
politiques ont eu recours à la résistance armée. Israël s'en est servi comme prétexte
pour accuser les Palestiniens d'être des terroristes, ce qui lui a permis d'altérer la
véritable nature du conflit, le présentant comme une guerre israélienne contre le
terrorisme et non comme une résistance palestinienne légitime à l'occupation
israélienne.
1.5.1 Le conflit interne entre les Palestiniens, ainsi que la séparation de Gaza du
reste des territoires palestiniens n'ont fait qu'aggraver la tragédie. Il convient aussi de
noter que bien que la division ait affecté les Palestiniens eux-mêmes, la responsabilité
pèse pour beaucoup sur la communauté internationale, car elle a refusé d'accueillir
positivement la volonté du peuple palestinien telle qu'elle a été exprimée avec les
résultats des élections menées démocratiquement et légalement en 2006.
Encore une fois, nous proclamons que notre parole chrétienne, au milieu de
toute notre tragédie, est une parole de foi, d'espérance et d'amour." (Extrait du document)
... Ces chrétiens réussiront-ils à susciter un mouvement d’indignation d’ampleur ? Pas évident. À ce jour (15 décembre), il a été signé par quelques centaines de chrétiens palestiniens. Les injustices en Palestine peuvent ne pas être aussi manifestes que l’était l’apartheid, aux yeux des Églises. Si les signataires regroupent des orthodoxes, des catholiques, des luthériens et des anglicans qui occupent des postes de responsabilité très importants, il manque plusieurs noms de poids parmi les signataires, dont l’actuel Patriarche catholique de Jérusalem, Mgr Fouad Twal. Il n’y a pas de chrétiens évangéliques parmi les signataires, sans doute parce qu’ils font une lecture différente de la Bible. L’appel n’a pas non plus été «repris» d’une façon claire par l’institution la plus influente à l’étranger : le Vatican. En revanche, le Conseil œcuménique des Églises (349 Églises) a grandement participé à la publication du texte, notamment sur son site, mais il n’appelle pas à le soutenir. On le trouve également sur le site de la Fédération protestante de France. L’Église catholique française, elle, ne s’exprime pas sur le sujet.
1. Le mot grec kairos signifie « moment de grâce que Dieu donne pour agir ».
Source
Pour rappel, lors de son voyage en Terre sainte en mai 2009, Benoît XVI a appelé à la destruction du mur israélien, qu'il a qualifié de "tragique". "J'ai vu le mur qui fait intrusion dans vos territoires, séparant des voisins et divisant des familles. Bien que les murs peuvent être facilement construits, nous savons qu'ils ne subsistent pas toujours. Ils peuvent être abattus", a dit le pape, devant le président palestinien Mahmoud Abbas.
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