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Le cardinal corse Mgr Dominique Mamberti a fait l’annonce en latin : "Habemus papam !", "Nous avons un pape !".
L’Archevêque américain Robert Francis Prevost a été élu pape ce 8 mai 2025 et prendra le nom de Léon XIV, a annoncé le Vatican. À 69 ans, il devient le 267e souverain pontife de l’histoire et succède à François.
Lors de son apparition et de son premier discours sur le balcon de la basilique Saint-Pierre au Vatican, Robert Francis Prevost est apparu humble et ému, mais charismatique, habillé de sa mozzetta de soie en satin rouge et de son étole. Il a béni la foule et affirmé que "Dieu nous aime, Dieu vous aime tous, et le mal ne prévaudra pas." (1)
La blessure infligée par son prédécesseur lorsqu'il est entré en fonction dans sa soutane blanche n'était pas seulement visuelle. Avec la mozzetta et l'étole, le pape Léon met en avant la dimension spirituelle du ministère pétrinien et s'incline dignement devant le fardeau de la fonction.
Il ne figurait pas dans la liste des "papabili" qui regroupe les cardinaux dont on parle le plus avant l’entrée dans la chapelle Sixtine. C’est le signe de la liberté de l’Église catholique d’oser aller chercher un "inconnu", les 133 cardinaux ayant discerné qu’il était l’homme de la situation. Ce cardinal, devenu pape sans l’avoir véritablement imaginé, va incarner désormais toute l’Église catholique.(2)
Il a mené une vie missionnaire, d’abord comme prêtre au Pérou, dans les antiques terres incas, puis comme évêque dans ce pays d’Amérique du Sud couvrant une partie de la forêt amazonienne.
Issu d’une famille d’ascendance française, italienne et espagnole, il est né à Chicago le 14 septembre 1955, en la fête de la Sainte Croix.
Après sa formation en mathématiques et en philosophie à l’université de Villanova à Philadelphie, il entre en 1977 en noviciat chez les pères augustiniens, où il prononce ses vœux quatre ans plus tard, avant de recevoir l’ordination sacerdotale en 1982 à Rome. C’est une figure considérée, selon Le Figaro, comme "progressiste" au sein de la Curie romaine qui lui impose les mains pour lui conférer le sacrement de l’ordre : Mgr Jean Jadot (1909-2009), diplomate du Saint-Siège alors pro-président du secrétariat pour les non-chrétiens. Cet archevêque de nationalité belge avait été délégué apostolique aux États-Unis de 1973 à 1980, à une époque où la nonciature n’existait pas encore en raison de l’absence de relations diplomatiques formelles entre Washington et le Saint-Siège.(3)
Ordonné en 1982 à l'âge de 27 ans, il a obtenu un doctorat en droit canonique à l'Université pontificale Saint-Thomas d'Aquin à Rome. À la tête des Augustins, il a visité des ordres du monde entier et parle espagnol et italien. Le cardinal Prévost, souvent décrit comme réservé et discret, s'éloignerait stylistiquement de François.(4)
Missionnaire au Pérou. Robert Francis Prevost obtint en 1987 un doctorat en droit canonique à l’Angelicum (Université pontificale Saint-Thomas d’Aquin) avec une thèse sur le rôle du prieur local de l’Ordre de Saint-Augustin. Malgré l’engagement à préparer sa thèse, il désire faire une expérience missionnaire au Pérou en 1985, où il occupe la fonction de chancelier du diocèse de Chulucanas et de vicaire de la cathédrale. Conquis par la chaleur communicative et le sens de la transcendance du peuple péruvien, il ne retourne que quelques mois dans son Illinois natal comme responsable de la pastorale des vocations et directeur des missions pour sa province, avant de repartir au Pérou en 1988 pour une dizaine d’années au cours desquelles il a de nombreuses responsabilités dans l’archidiocèse de Trujillo, au bord de l’océan Pacifique. Il y fonde une paroisse dont il est le premier curé, et est aussi prieur de sa communauté religieuse, juge ecclésiastique, directeur du séminaire augustinien, ainsi que préfet des études et recteur du séminaire diocésain, où il enseigne le droit canonique, la patristique et la morale. Élu provincial pour sa région d’origine couvrant le Midwest américain, il rentre à Chicago en 1999. Le père Prevost est ensuite élu prieur général de l’Ordre de Saint-Augustin, une charge qu’il exerce durant deux mandats de six ans, de 2001 à 2013.
Après une année de transition comme directeur de la formation au couvent de Saint-Augustin à Chicago, premier conseiller et vicaire provincial, le pape François le renvoie au Pérou en novembre 2014, d’abord comme administrateur apostolique du diocèse de Chiclayo, puis comme évêque du même diocèse, un an après.
Mgr Prevost exerce en plus la charge d’administrateur apostolique du diocèse de Callao, le grand port sur le Pacifique, de 2020 à 2021. Au sein de la conférence des évêques du Pérou, il est élu vice-président, devenant membre du conseil permanent de 2018 à 2023, et président de la commission pour l’éducation et la culture de 2019 à 2023. Avec le président de la conférence des évêques du Pérou, il joue un rôle important pour la stabilité institutionnelle durant les crises politiques successives qui mènent aux renversements des présidents Pedro Pablo Kuczynski en 2018, Martín Vizcarra et Manuel Merino en 2020, et Pedro Castillo en 2022.
C’est en janvier 2018, au cours du voyage pontifical au Pérou, que François repère Mgr Prevost, reçu en audience privée en 2021. Il le nomme rapidement membre du dicastère pour le Clergé, en juillet 2019, et du dicastère pour les Évêques en novembre 2020, avant de lui confier un dicastère stratégique, celui des évêques, chargé de sélectionner les premiers responsables des diocèses dans les pays depuis longtemps évangélisés, essentiellement situés dans l’hémisphère Nord.
Prenant la succession effective du cardinal Marc Ouellet le 12 avril 2023, de sensibilité plus traditionnelle, il devient le premier évêque missionnaire nommé à ce poste. Les terres de mission demeurent sous la juridiction du dicastère pour l’Évangélisation, l’ex-congrégation pour l’Évangélisation des peuples. Cependant, des évêques venus des pays de l’hémisphère Sud ont parfois occupé la charge de préfet du dicastère pour les évêques, tels que les cardinaux Bernardin Gantin, béninois, de 1984 à 1998 et Lucas Moreira Neves, brésilien, de 1998 à 2000. Durant ses premiers mois de mandat, le nouveau préfet, resté discret dans les médias, est apprécié pour sa qualité d’écoute et sa maîtrise des dossiers.
L'Église n'est pas sainte à cause de nos actions, mais parce que le Christ lui-même est sa tête.
Notre tâche est de vivre en conformité avec Lui, et non de façonner l'Église à notre propre image.
Nous sommes des bergers et non des idéologues. Notre autorité ne vient pas de nous-mêmes, mais de notre fidélité à l'Évangile transmis.
Défenseur de la tradition de l’Église
Le nom de Léon est associé au pape conservateur du XIXe siècle qui s'opposa au communisme et à l'idéologie libérale.
Les papes précédents nommés Léon furent des papes défenseurs de l'orthodoxie.
Sur la liturgie, le cardinal Robert Francis Prevost a été décrit comme une figure équilibrée dans le débat actuel sur l'avenir de l'Église, en particulier en ce qui concerne la messe en latin. Bien qu'il n'ait pas explicitement pris position sur la messe en latin, ses partisans soulignent sa capacité à écouter et à synthétiser diverses perspectives, suggérant qu'il pourrait trouver un moyen de réconcilier les différents points de vue sur la question. (Michael J. Matt)
Des sources aux États-Unis confirment que le pape Léon XIV a célébré la messe latine traditionnelle en privé pendant des années, même à l'intérieur du Vatican, avec un indult spécial du pape François.
Lors de la deuxième phase du Synode sur la synodalité, en 2024, il a mis en valeur l’importance d’une formation commune pour les évêques des diocèses de l’hémisphère Nord et ceux des diocèses dits "de mission", invitant à mieux articuler le lien entre Rome et les Églises locales et à élargir la sélection des nouveaux évêques en consultant le peuple de Dieu. Dans un entretien aux médias du Vatican en 2023, il avait pour autant expliqué ne pas souhaiter que le choix des évêques soit le résultat d’un processus démocratique ou politique, défendant en cela la tradition de l’Église.
Dans le même registre, début 2024, il fit partie des évêques de la Curie qui bloquèrent le projet de "Conseil synodal" du Synode allemand, cette structure voulue pour permettre à des représentants laïcs désignés démocratiquement de participer pleinement à la gouvernance de l’Église catholique dans le pays.
"Le communisme a même pénétré les milieux chrétiens déguisés en solidarité. C’est notre devoir pastoral de le démasquer", a déclaré dans sa conférence devant les évêques d’Amérique latine le cardinal Prévost, le 14 mai 2010.
Le nouveau pape suivra la ligne de François, écartant la possibilité de femmes diacres, une décision qui selon lui risquerait de "cléricaliser" la femme dont la vocation dans l’Église n’est pas de l’ordre du ministère ordonné. Le cardinal Prevost a largement plaidé cependant pour donner davantage d’espace aux femmes, notamment à des postes de responsabilités. Son dicastère s’est transformé dans ce sens puisque trois femmes y siègent.
Selon Le Monde, "sur le rôle des femmes dans l’Eglise, le nouveau pape est sur une ligne plutôt conservatrice : lors du Synode sur la synodalité en octobre 2023, il a dit que 'cléricaliser les femmes' – c’est-à-dire les ordonner à des rôles cléricaux – ne résoudrait pas les problèmes de l’Église et pourrait même en créer de nouveaux." (5)
Sur la question des personnes Lgbtq, François avait donné la possibilité de "bénir les 'couples' en situation irrégulière et les couples de même sexe" (Cardinal Víctor Manuel Card. FERNÁNDEZ, Préfet, dans la présentation du document Fiducia supplicans signé par François le 18 décembre 2023), pour finalement dire qu'"on ne bénit pas l'union, mais seulement les personnes". . . Entres autres très nombreux refus d'appliquer ce document, Mgr Prevost insista alors sur la nécessité pour les conférences épiscopales nationales d’avoir l’autorité doctrinale pour interpréter et appliquer ces directives dans leurs contextes locaux, compte tenu des différences culturelles.
"La formation sacerdotale ne doit pas être façonnée par les tendances culturelles, le politiquement correct ou l'esprit de permissivité. Elle doit être trempée au feu de la vérité, de la chasteté, du sacrifice de soi et de l'amour eucharistique. Le prêtre n'est pas appelé à 'affirmer des identités', mais à convertir des âmes. Il n'est pas appelé à bénir les unions pécheresses, mais à appeler les pécheurs à la repentance." (Pape Léon XIV, Cardinal Robert Francis Prevost)
Le professeur Edward Feser ironise sur X : "On dit que pour produire la fumée noire, ils ont brûlé des exemplaires de Fiducia Supplicans."
Sur l'idéologie du genre, dans un discours aux évêques en 2012, citant le "mode de vie homosexuel" et les "familles alternatives composées de partenaires de même sexe et de leurs enfants adoptés", il déplora que les médias et la culture populaire occidentaux encouragent "la sympathie pour des croyances et des pratiques contraires à l'Évangile".
Les médias occidentaux sont extraordinairement efficaces pour susciter dans le grand public une énorme sympathie pour les croyances et les pratiques qui sont en désaccord avec l'Évangile - par exemple l'avortement, le mode de vie homosexuel, l'euthanasie.
En tant qu'évêque de Chiclayo, une ville du nord-ouest du Pérou, il s'est opposé à un projet gouvernemental visant à intégrer des enseignements sur le genre dans les écoles. "La promotion de l'idéologie du genre est source de confusion, car elle cherche à créer des genres qui n'existent pas", a-t-il déclaré aux médias locaux.
La foi que nous professons ne nous appartient pas pour la modifier ou l'adapter à notre guise. Le dépôt de la foi confié à l'Église doit être sauvegardé, et non redéfini.
"Je suis un fils de Saint Augustin", a déclaré le souverain pontife, adressant un salut en espagnol, "en particulier au Pérou".
Le nom de Léon XIV montre que contrairement à François, le cardinal Prevost a souhaité s'inscrire dans une lignée. Un pape qui choisit le nom de Léon ne le fait pas à la légère. C'est le nom des lions. Des guerriers. Des défenseurs. Treize papes l'ont porté. Chacun a laissé une trace. Dom Prosper Guéranger, dans son œuvre monumentale "L'Année Liturgique" souligne que le lion représente la Royauté du Christ, mais aussi la vigilance nécessaire à ses vicaires sur terre. "Soyez sobres, veillez : votre adversaire, le diable, comme un lion rugissant, rôde, cherchant qui dévorer." (1 P 5,8) Selon l'ancienne tradition patristique rapportée par Dom Guéranger, le lion dort les yeux ouverts, toujours vigilant. Le véritable Lion de l'Église doit être plus vigilant que le faux lion qu'est le démon. Saint Léon Ier le Grand qui défendit la doctrine catholique contre les hérésies (monophysisme) et arrêta Attila aux portes de Rome, Léon II (682-683) confirma les actes du sixième concile œcuménique (condamnant le monothélisme), promut le chant grégorien et composa plusieurs hymnes sacrés pour l'Office divin ; Léon III (795-816) qui couronna Charlemagne empereur des Romains (Noël, 800 ap. J.-C.), renforça l'autorité papale sur les souverains séculiers, et fit qu'Église et empire travaillassent ensemble. L'historien Georges Duby dans son Temps des Cathédrales (1976) souligne comment la distinction des pouvoirs soulignée par les papes médiévaux constitua le fondement des libertés occidentales. Léon IV (847-855) qui onstruisit le mur léonin autour du Vatican après les raids musulmans, reconstruisit les églises endommagées par les attaques sarrasines, et organisa une alliance navale qui battit les musulmans à la bataille d'Ostie (849) ; Saint Léon IX, pape des débuts de la réforme grégorienne au XIe siècle qui lutta contre la corruption cléricale et la simonie, et promut le célibat parmi le clergé; et Léon XIII (1878-1903) qui promut la dévotion mariale, opposa aux menaces modernes du libéralisme contre l'Eglise, fut le mentor du Pape Saint Pie X, mais aussi fut le pape de la doctrine sociale de l'Église au XIXe s, qui défend la dignité de la personne, la propriété privée (droit non absolu subordonné à l'usage commun, à la destination universelle des biens. Cf. encyclique Laborem exercens), la liberté économique avec la responsabilité morale et la solidarité avec ceux qui sont le plus dans le besoin. (Cf. Encyclique Rerum novarum 1891 face à "la misère et la pauvreté qui pèsent injustement sur la majeure partie de la classe ouvrière") ; il relança les études de la philosophie thomiste (tradition philosophique et théologique de l'Église), prit une position ferme contre l'hérésie de l'américanisme (Encyclique Longinqua Oceani 1895; Lettre apostolique Testem Benevolentiae Nostrae 1899), l'exploitation capitaliste dans le travail, et la franc-maçonnerie, la considérant comme une menace pour la foi et la société catholiques. Son encyclique Humanum Genus (20 avril 1884) condamna la franc-maçonnerie et les autres sectes similaires. Léon XIII (1878-1903) fut aussi le pape qui en 1886 après une vision du diable demandant 100 ans pour détruire l'Église, rédigea la prière à Saint Michel Archange pour repousser le diable et les formules d'exorcismes encore utilisées aujourd'hui par l'Église, comme le grand et le petit exorcisme. [Cf. Sur ce développement, voir aussi une video très bien faite : "Pourquoi ce nom, Léon XIV, Robert Cardinal Francis Prevost]
Ses prédécesseurs, pris dans les turbulences du XIXe siècle, avaient laissé un vide. Pie IX, bien que courageux dans sa défense de la foi avec le Syllabus des erreurs (1864), était contraint par la perte des États pontificaux et une position défensive face à la modernité. D'autres avant lui, accablés par un siècle de révolutions, de confiscations, d'occupations, de menaces, de sécularisation rampante, ont opté pour un repli qui isola l'Église du monde. Mais notre bon Léon XIII, jaillit comme un torrent, rompant le silence par un pontificat théologiquement riche, évangélique, combatif, prêt à prendre la modernité par les cornes comme un taureau par les cornes, sans céder un pouce de la Vérité éternelle. Il n'a pas plié. Il n'a pas cédé aux modes ni aux impositions idéologiques. Son héritage, loin d'être ''progressiste'' ou ''libéral'', a été un rempart de la foi, un équilibre magistral entre la tradition et les défis de son temps.
Le fondement de ce que l'on a appelé le programme léonin est la philosophie de Thomas d'Aquin, qu'il rendit normative pour l'Église dans l'encyclique Aeterni Patris de 1879. Rerum novarum (1891) et les autres encycliques sur l'État, la société et la religion (Immortale Dei 1885, Libertas 1888), étaient enracinées dans la tradition thomiste.
Le 10 mai, deux jours après son élection, le pape Léon XIV a expliqué son choix de nom : "J'ai choisi de prendre le nom de Léon XIV. Il y a plusieurs raisons à cela, mais principalement parce que le pape Léon XIII, dans son encyclique historique Rerum novarum, a abordé la question sociale dans le contexte de la première grande révolution industrielle. De nos jours, l'Église offre à tous le trésor de sa doctrine sociale en réponse à une nouvelle révolution industrielle et aux développements dans le domaine de l'intelligence artificielle qui posent de nouveaux défis pour la défense de la dignité humaine, de la justice et du travail."
Le Pape Léon XIV a ainsi déjà exprimé sa volonté de poursuivre le programme politico-social défini dans Rerum Novarum.
Notons que selon la tradition catholique, l'apparition de l'archange S. Michel au Mont Gargano (Italie) au Ve siècle est décrite dans le Bréviaire romain à la date du 8 mai. L'élection de Léon XIV un 8 mai est éminemment un signe d'élection d'un pape qui sera le défenseur de l'Église.
Les armoiries du Cardinal Robert Francis Prevost - le Pape Léon XIV comportent le lys royal des rois de France manifestant ainsi l'attachement du Saint-Père à ses origines françaises.
Add. 9 mais 2025. Le lys blanc stylisé sur fond azur apparaît sur la partie gauche du blason. Le lys est traditionnellement un symbole de pureté et d'innocence, souvent associé à la figure de la Vierge Marie. Ce choix souligne la dimension mariale de la spiritualité de Léon XIV, exprimant dévotion et confiance envers la Mère de Dieu. Le lys évoque également l'appel à la sainteté et à la transparence évangélique.
Le Sacré-Cœur de Jésus transpercé d'une flèche, posé sur un livre fermé, se trouve sur le côté droit de l'écu. Le Sacré-Cœur représente le sacrifice rédempteur du Christ et son amour miséricordieux pour l’humanité. La flèche qui le transperce rappelle la souffrance et le dévouement total de Jésus, tandis que le livre fermé symbolise la centralité de la Parole de Dieu, même lorsqu'elle reste mystérieuse ou pas encore pleinement révélée. Cet élément fait référence au besoin de foi et de confiance dans les plans divins, même face au mystère.
La devise choisie par Papa Leone XIV, "In Illo uno unum", se traduit littéralement par "En Celui qui est Un, nous ne faisons qu'un" et "En Lui, nous sommes un". Cette phrase n'est pas aléatoire, mais tirée d'une homélie de Saint Augustin, père de l'Église et référence spirituelle fondamentale pour le nouveau Pape, qui vient justement de l'Ordre des Augustins. La devise est un idéal d'unité dans la diversité, fondé dans la communion avec le Christ : la Église, pour traverser les tensions, la différence et la pluralité culturelle, si elle revient comme un corps unique dans l'amour du Rédempteur.
"In Illo uno unum" rend la vocation de l'Église à être un sentiment de communion et de fraternité universelle, capable d'accepter et de valoriser la différence sans perdre la propriété, identité profonde.(6)
Signe providentiel de l'élection du nouveau Souverain Pontife, le lendemain de son élection, la lecture du jour de la messe dit : ''Cet homme est l’instrument que j’ai choisi pour faire parvenir mon nom auprès des nations'' (Ac 9, 15)
"Les choix du pape Léon XIV de prendre un nom traditionnel et d'apparaître dans des vêtements papaux traditionnels - comme Benoît XVI l'a fait et comme François ne l'a pas fait - sont des signes modestes mais encourageants d'un homme qui se subordonne à la fonction papale et qui comprend l'importance de la continuité avec le passé." (Edward Feser)
Un pape missionnaire
Léon XIV a lancé un "appel de paix" à "tous les peuples" et à la "mission".
Le premier pape américain de l’Histoire a également appelé à "construire des ponts" à travers "le dialogue", appelant à "aller de l’avant" "sans peur, unis, main dans la main avec Dieu et entre nous".
"J’aimerais que ce salut de paix puisse entrer dans vos cœurs, dans vos familles. Je m’adresse à tous les peuples, à la terre entière : que la paix soit avec vous !".
Lisant ses notes, l’Américain a continué, toujours en italien. "Dieu vous aime tous et le mal ne gagnera pas. Nous sommes tous entre les mains de Dieu. Nous devons être unis, main dans la main, avec Dieu, ne pas avoir peur. Nous devons aller de l’avant. Le Christ nous a précédés, le monde a besoin de sa lumière".
Léo XIV a prononcé sa première homélie après l'élection papale devant ses collègues cardinaux le 9 mai dans la chapelle Sixtine. Le texte était Matthieu 16, 13-19, le passage biblique central pour le dogme de la primauté papale. Il s'agit d'une sorte de discours programmatique. Dans la ligne du Concile Vatican I, il ancre la fonction papale dans le Christ et lui donne une justification sotériologique, en lui assignant une fonction missionnaire. Léon XIV souligne qu'il a été choisi comme successeur de Pierre et qu'il s'est donc vu confier d'une manière particulière le "trésor" du salut, qu'il doit administrer pour le bien de toute l'Église.
L'Eglise est le "Corps mystique du Christ." Elle peut devenir de plus en plus "une ville sur une colline" (Ap 21,10), une "arche de salut", un "phare qui illumine dans la nuit de ce monde".(7) Il est tout à fait approprié que ces mots soient prononcés par le premier pape américain. Les Américains sont habitués à entendre que c'est l'Amérique qui est la cité perchée sur une colline, et l'Amérique qui est le dernier espoir de l'humanité. Les conservateurs modernes sont enclins à tenir ces propos, mais ces choses sont fausses, et elles seraient idolâtres si elles étaient prises au sérieux. L'Amérique n'est pas le dernier espoir de l'homme, ni la ville ou le phare qui illumine le monde. Seule l'Église l'est. Et l'Église l'est uniquement parce qu'elle nous conduit au Christ, et seulement dans la mesure où elle nous y conduit. La crise de l'Occident ne prendra fin que lorsque les citoyens et les gouvernements seront enfin prêts à l'admettre. Elle ne prendra fin que lorsqu'ils cesseront de se leurrer en pensant qu'un programme politique laïc, de gauche ou de droite, suffira. De tels programmes ne mènent qu'à des solutions ratées et à des déceptions – ou, pire, à de nouvelles idoles. Comme l'a enseigné Léon XIII, dans Rerum Novarum à propos des problèmes sociaux et économiques modernes : "Aucune solution satisfaisante ne sera trouvée si la religion et l'Église n'ont pas été appelées à l'aide... Sans hésitation, Nous affirmons que si l'Église est négligée, les efforts humains seront vains... Et puisque seule la religion, comme Nous l'avons dit au début, peut éliminer le mal, racine et branche, que chacun réfléchisse à ceci : Il faut avant tout rétablir la morale chrétienne, sans laquelle même les armes de la prudence, qui sont considérées comme particulièrement efficaces, ne serviront à rien pour assurer le bien-être."
Le pape rejette tout triomphalisme au nom de l'Église. C'est par la sainteté des membres de l'Église, le peuple que Dieu a gagné pour proclamer ses "actes puissants" (1 Pierre 2:9), que l'Évangile progressera. Par la sainteté et le témoignage du salut, l'Église est présente comme lumière et arche de salut dans le monde.
En Christ, l'incarné, nous avons reçu "un modèle d'humanité sainte et la promesse d'une destinée éternelle qui dépasse nos limites et nos capacités".
Le Christ révèle notre véritable humanité et nous conduit vers sa pleine réalisation en partageant avec nous le salut.
Le conflit entre l'Église et le monde moderne s'est aggravé, surtout à notre époque. Le nouveau pape met l'accent sur la compréhension et la confrontation de ce conflit, qui est la clé de la mission de l'Église.
Le Pape Léon revient à Matthieu 16, 13-19 et s'arrête sur la question de Jésus : "Qui dit-on que le Fils de l'homme est ?". Cette question reçoit encore des réponses aujourd'hui : Qui sommes-nous ?
Le pape note les réponses séculières : elles sont athées, bien que sous des formes différentes. Certains rejettent entièrement l'importance du Christ et cherchent à l'éliminer - c'est l'athéisme théorique.
Plusieurs croient que Jésus était un homme juste qui a eu le courage de dire la vérité. Ils l'admirent, le veulent même comme un idéal moral. Mais lorsqu'il devient difficile de suivre ses exigences morales, ils s'éloignent, le relativisent. C'est l'athéisme pratique de l'incroyant, qui s'est aussi répandu parmi les baptisés.
Le nouveau pape fait preuve d'un réalisme radical : c'est dans ce monde qui renie le Christ que nous devons annoncer l'Évangile.
L'analyse spirituelle du pape est ainsi éloigné de l'optimisme qui a marqué le Concile Vatican II.
Dans ce monde, la confession du Christ par Pierre doit demeurer : "Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant". Cette foi doit façonner la vie des croyants et nos efforts quotidiens de conversion.
Le pape qui se subordonne à sa fonction dans sa première homélie, cela s'applique à tous les responsables de l'Eglise. Ils doivent disparaître pour que le Christ demeure et s'humilier pour que le Christ soit connu et glorifié. Ils doivent se donner entièrement pour que personne ne soit privé de la possibilité de le connaître et de l'aimer. Le pape Léon parle différemment de Jean-Paul II, mais le même esprit est présent : la dévotion centrée sur le Christ. Comme chacun sait, la devise de Jean-Paul II était Totus tuus - entièrement vôtre.
Le nouveau pape semble profondément conscient de la rupture spectaculaire de la culture moderne avec la tradition chrétienne. Les derniers vestiges de la chrétienté ont disparu. Dans cette situation, il met l'accent sur la mission de l'Église en tant qu'intendante de l'Évangile dans un monde déchu. Le fondement de cette mission est le Christ, le Fils de Dieu, venu apporter la vie et le salut.
En s'engageant dans la société et la culture, le Christ doit venir en premier - c'est-à-dire l'Évangile d'abord et l'Église d'abord.
La modernité tardive se concentre sur la moralité - au niveau local et mondial - tout en ignorant la question de la vérité. Mais la vérité est essentielle à la foi chrétienne. Le Christ est le vrai Dieu et le vrai homme - la Vérité elle-même. C'est le conflit sur la vérité et la réalité qui a créé la tension de l'Église avec la modernité.
Nous, croyants, vivons dans une réalité créée par Dieu. Nous ne sommes pas livrés au scepticisme, mais nous pouvons utiliser la raison pour reconnaître ce qui est vrai et juste. Cela nous a conduits à une bataille sur la réalité, qui touche tous les conflits éthiques majeurs de notre époque - avortement, euthanasie, genre, relations, etc.
Le Pape missionnaire devrait ainsi s'engager et motiver la lutte pour la vérité face à la modernité tardive ou post-modernité.
Dès les premières paroles prononcées depuis la Loggia des Bénédictions par le Pape Prévôt, s’adressant d’abord et avant tout aux choses d’en haut, ont émergé la verticalité et l'évangélisation dans son intervention.
On dit que le premier discours d'un pape immédiatement après son apparition dans la Loge de Bénédiction à Saint-Pierre est très révélateur des lignes de son pontificat.
La référence au Christ se poursuit lorsqu'il affirme que nous sommes tous "disciples du Christ. Le Christ nous précède. Le monde a besoin de sa lumière. L'humanité a besoin de lui comme d'un pont vers Dieu et son amour." La sécularisation touche l’Église aujourd’hui. C'est une conséquence du naturalisme, la pensée selon laquelle le plan horizontal se suffit à lui-même sans le plan vertical. Le Christ précède les événements humains et les gouverne, cette observation recompose le juste lien entre la nature et le surnaturel.
Le nouveau Pape nous invite à "travailler comme des hommes et des femmes fidèles à Jésus-Christ, sans peur, pour annoncer l’Évangile, pour être missionnaires". Il y avait longtemps que nous n’avions plus entendu parler d’évangélisation, ni même de travail missionnaire compris comme annonce du Christ et non comme promotion sociale ! Il semble que l'Église y ait renoncé, considérant l'évangélisation comme une forme de prosélytisme, de manque de respect de la diversité, surtout religieuse, de désir de restreindre la dimension humaine, la considérant incapable d'autosuffisance et engageant l'Église à fonctionner seulement comme un "hôpital de campagne" où l'on soigne les blessures mais où l'on n'indique aucune thérapie ... où l'on écoute les questions mais où l'on ne donne aucune réponse...
À un autre moment du discours du pape Léon, on pourrait souligner la dimension religieuse de son intervention. Cela s'est produit lorsqu'il a rappelé la fête de Notre-Dame de Pompéi qui coïncidait avec son élection et a dirigé la prière du Je vous salue Marie avec le peuple chrétien. Ainsi émerge une dimension religieuse, dévotionnelle et populaire. Ces éléments, les manières utilisées et les vêtements portés, donnaient l’impression d’un discours de foi, centré sur Dieu, non interprétable politiquement, non susceptible d’interprétations sociales ou idéologiques. (8)
***
Nous devons veiller à ne pas faire de l'Église un miroir du monde. Elle est appelée à être un signe de contradiction.
La crédibilité de l'Église ne vient pas de la popularité, mais de la fidélité. Les saints ont évangélisé non par le pouvoir, mais par le témoignage de vies transformées.
Sources :
(1) https://x.com/father_rmv/status/1920588892966957089
(2) https://www.lefigaro.fr/actualite-france/en-direct-deuxieme-jour-conclave-pape-election-2025-vatican-fumee-blanche-20250508
(3) https://www.lefigaro.fr/actualite-france/l-americain-robert-francis-prevost-devient-le-pape-leon-xiv-20250508
(4) https://www.nytimes.com/2025/05/02/world/americas/pope-candidate-cardinal-robert-francis-prevost.html
(5) https://www.lemonde.fr/international/live/2025/05/08/en-direct-un-nouveau-pape-a-ete-elu-de-la-fumee-blanche-s-eleve-au-dessus-du-vatican_6604053_3210.html
(6) https://www.tag24.it/1322316-stemma-di-papa-leone-xiv-ecco-cosa-significa
(7) https://x.com/PlatonKatolikos/status/1922291964961051073
(8) https://lanuovabq.it/it/leone-xiv-si-presenta-il-ritorno-dellevangelizzazione-e-della-verticalita