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11 décembre 2023 1 11 /12 /décembre /2023 01:00
Saint Damase Ier, Pape (366-384)

Fils de prêtre, Damase naît à Rome vers 305. Les souvenirs et l'engagement de sa famille dans l'église chrétienne remontent à la période pré-constantinienne, celle qui a connu la Grande persécution.

Il compte au nombre des diacres de Libère (Pape 352-366) et il le suit lors de son exil en 355.

Dès la mort de Libère, le 24 septembre 366, un groupe de prélats se réunit dans la basilique julienne au Trastévère, et désigne pour successeur le diacre Ursin (Ursinus), sacré par l'évêque de Tibur. Il y a alors un combat de trois jours entre les partisans d'Ursin et ceux de Damase qui, ayant pris le dessus, firent sacrer celui-ci Pape le 1er octobre 366.(1)

Evêque de Rome, Damase devient pape dans une époque agitée par l'hérésie arienne. Il soutient la foi en la Trinité que les ariens, bien que reconnaissant la divinité du Christ, combattaient. Ce qui entraîne son accord avec les principaux Pères de l'Église d'Orient, saint Athanase, saint Épiphane, saint Grégoire de Naziance et surtout saint Basile de Césarée.

Et moi je te dis que tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Eglise, et les portes de l'enfer ne prévaudront point contre elle.

Mt 16,18 - BCC 1923

Pour Damase, la primauté romaine se fonde sur son origine pétrinienne et la promesse évangélique faite par le Christ à S. Pierre (Mt 16,18), à la différence de Constantinople dont la primauté repose sur des décisions synodales. (John Norman Davidson KELLY, trad. Colette Friedlander, Dictionnaire des Papes, "The Oxford Dictionary of Popes, Brepols, coll. "Petits dictionnaires bleus", 1994, 1re éd. 1986, p. 60-63)

Il recourt pour la première à l'autorité civile pour combattre les plus intransigeants d'entre les ariens (qui refusent la consubstantialité adoptée par les pères du premier concile de Nicée en 325) à l'instar des disciples de Lucifer de Cagliari, qu'ont rejoints certains partisans de son rival Ursin.

En 377, il réunit à Rome un concile qui condamne l'apollinarisme, doctrine hérétique d'Apollinaire de Théodicée selon laquelle le Christ n'avait pas eu d'âme humaine, mais était le Verbe uni immédiatement à un corps humain.

Damase anathématise également le macédonianisme des pneumotomaques ("ceux qui combattent l'Esprit"), ou nom de l'hérésie qui refuse l'idée de la divinité du Saint-Esprit, hérésie proche du subordinatianisme, ainsi que de l'arianisme, et fait poursuivre la communauté donatiste (hérésie violente et schismatique d'Afrique romaine) de Rome par l'autorité civile qui expulse son évêque Claudianus à Carthage.

En 377, le Tomus Damasi (Tome de Damase), est l'exposé théologique constitué d'une série d'anathématismes contre les doctrines non-nicéennes, condamnant les sabelliens, les ariens, les eunomiens, les apollinaristes, les macédoniens et les partisans de Photin. (Charles PIETRI, Les dernières résistances au subordinatianisme, dans Jean-Marie Mayeur, Charles Pietri, Luce Pietri, André Vauchez et Marc Venard (dirs.), Histoire du Christianisme, vol. 2 : Naissance d'une chrétienté (250-430), Desclée, 1995, p. 381.) 

Cette énumération d'erreurs qui entachent la foi, fixe en creux, l'orthodoxie nicéenne au nom du siège romain, témoignant des progrès de la réflexion théologique à Rome. (Charles PIETRI, Les dernières résistances au subordinatianisme, ibid., p. 382.)

Damase accueille à Rome S. Jérôme qu'il choisit pour secrétaire, et auquel il commande la traduction latine de la Bible à partir de l'hébreu: ce sera la Vulgate. 

Il encouragea des matrones romaines, spécialement sainte Marcelle et sainte Paule, à transformer leurs palais en monastères, favorisant ainsi le monachisme féminin, très en retard en Occident.

Son action contribue indiscutablement à un renforcement de la primauté romaine autant en matière de foi que de juridiction. (Françoise Monfrin, "Damase Ier", dans Philippe Levillain (dir.), Dictionnaire historique de la Papauté, Fayard, 1994, p. 537). 

Lorsque Théodose promulgue l'édit de Thessalonique le 27 février 380, celui-ci définit l'orthodoxie par la communion avec l'évêque de Rome en la décrivant comme "religion que le divin apôtre Pierre a transmise aux romains (...) que suit manifestement le pontife Damase", première loi séculière connue qui comporte en son préambule une définition positive de ce qu’un souverain considère comme l'orthodoxie religieuse (R. Malcolm ERRINGTON, Roman imperial policy from Julian to Theodosius, The University of North Carolina Press, 2006, p. 217), et jalon important vers la christianisation officielle de l'Empire romain, qui se dessine au fil des décrets du règne de Théodose, conduisant à l’interdiction de toute manifestation des cultes païens au sein de l'Empire promulguée le 8 novembre 392. (Alain CORBIN (dir.), Histoire du christianisme, Des origines au XVe siècle, Seuil, coll. Points Histoire, 2007, p. 61.)

L'édit s’adresse essentiellement aux chrétiens de Constantinople, la ville comptant alors plusieurs communautés hérétiques, des macédoniens — nicéens opposés à la divinité de l'Esprit —, des Anoméens — ariens qui refusent toute réalité ontologique au Père et au Fils — ou encore des Apollinaristes — qui refusent la présence d'une âme humaine dans le Christ, auxquels s'ajoutent des Novatiens ayant développé leur propre Église depuis plusieurs décennies, pour des différends pénitentiels. (Pierre MARAVAL, Théodose le Grand : Le pouvoir et la foi, Arthème Fayard, Paris 2009, p. 108.) 

Il est possible que le code de l’orthodoxie défendu dans l’Édit soit inspiré de celui du Tome de Damase, profession de foi occidentale nicéenne élaborée à Rome trois ans plus tôt. (Pierre MARAVAL, Théodose le Grand, ibid., p. 107.) La formule de foi présentée dans l'édit affirme clairement l'égale divinité des trois personnes divines, exposant sans détour la position doctrinale nicéenne. 

Ce texte législatif — qui sera bientôt suivi par d’autres plus répressifs — est le premier à vouloir définir un point de foi chrétienne lui conférant une valeur programmatique. (Pierre MARAVAL, Théodose le Grand, ibid., p. 107) 

Il est vraisemblable que l’évêque de Rome Damase lui-même, bien qu’il soit cité dans l'édit, n’ait jamais eu vent de l'édit de Thessalonique. (P. MARAVAL, ibid. p. 106.)

Homme de lettres et poète cultivé, Damase est considéré comme l'initiateur de l'épigraphie chrétienne officielle ainsi que l'ordonnateur du culte des saints répandu dans l'Église depuis le IIe siècle, et des martyrs à Rome, particulièrement dans les catacombes romaines qu'il fait restaurer et rouvrir.

Il organise le culte des martyrs, et sur leur tombe il fait graver des épigrammes qui firent de lui l'un des premiers poètes latins chrétiens.(2)

La plus ancienne décrétale connue ("Canones synodi Romanorum ad Gallos episcopos"), en réponse à des questions soulevées par des évêques gaulois au cours d'un concile à Arles (353), est datée de cette époque et a régulièrement été attribuée à Damase. (Cette attribution reste débattue, ainsi que sa datation, la décrétale étant parfois attribuée à Sirice ou à Innocent Ier, successeurs de Damase, ou encore sa rédaction attribuée à Jérôme de Stridon. La recherche actuelle penche plutôt pour une attribution à Sirice. Pour un point de la question voir Yves-Marie Duval, La décrétale Ad Gallos Episcopos : son texte et son auteur : Texte critique, traduction française et commentaire, Brill, 2004.)

Enfin, du Concile convoqué à Rome en 382 par l’empereur Gratien (367-383) est issu le Décret de Damase (Decretum Damasus ou De explanatione fidei catholicae), composé de trois courts chapitres, dont le second porte sur un canon des Écritures reçues que l'on retrouve ensuite dans les actes des synodes d'Hippone (393) et de Carthage (397), Bible chrétienne incorporé au VIe siècle au Decretum Gelasianum, et le 3e sur la primauté romaine. Les copies de ce décret attribué à l'évêque de Rome figurent dans quatre manuscrits, deux datés du VIIIe et deux du IXe siècles.

Selon le comput de la tradition catholique qui le célèbre comme saint le 11 décembre, il est le 37e pape.(3)

Il meurt à Rome le 11 décembre 384 à soixante-neuf ans.

On le représente en habit sacerdotal.

Il est le protecteur des archéologues.

Son nom, d'origine grecque, signifie "celui qui peut maîtriser".(4) 

Sources

(1) Ivan GOBRY, Dictionnaire des Papes, Pygmalion, Paris 2018, p.141-142

(2) Missel des Dimanches 2024, Nouvelle Traduction du Missel Romain, p. 111

(3) https://fr.wikipedia.org/wiki/Damase_Ier

(4) Rosa GIORGI, Le Petit Livre des Saints, Larousse, 2006, p. 726

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