Dans cette video, l'historien Henri Guillemin, explique une citation de Jean-Jacques Rousseau qu'il a découvert.
Dans sa "Lettre à d’Alembert sur les spectacles", en 1758, Jean-Jacques Rousseau décrivait parfaitement le piège d'une république dont les notables peuvent aisément prendre le contrôle.
"Jamais, dans une monarchie, l’opulence d’un particulier ne peut le mettre au-dessus du prince ; mais, dans une république, elle peut aisément le mettre au-dessus des lois. Alors, le gouvernement n’a plus de force, et le riche est toujours le vrai souverain."
— Anice Lajnef (@AniceLajnef) October 6, 2021
JJ #Rousseau (1758) pic.twitter.com/Zg41PR7FJT
"C'est vrai qu'il veut la république, Thiers, et pourquoi la veut-il ?
"Deux raisons. Comprenez-moi bien, ce sont des choses que je n'avais pas vues autrefois.
"La monarchie est moins forte. Un système monarchique est moins fort que le système républicain pour faire tenir tranquilles les pauvres gens. Pourquoi ? Parce que quand c'est le roi qui parle, on peut toujours remettre en cause la volonté royale; on pourra dire 'et bien c'est un homme qui ne veut pas que nous améliorions notre situation. Tandis que s'il y a une révolte, une révolte de pauvres sous la république, c'est-à-dire sous le régime du suffrage universel, l'autorité qui va contraindre ces gens à rentrer dans leurs tanières, elle s'appelle comment ? Elle s'appelle 'volonté nationale'. Du moment qu'il y a suffrage universel, que le suffrage universel s'est prononcé, que nous avons avec l'assemblée ce que nous appelons la volonté de la nation, cette volonté de la nation (qui est en fait la volonté des notables) est autrement forte qu'une simple volonté royale pour faire tenir tranquilles les misérables ! La république est une manière de coincer les pauvres bien meilleure, selon monsieur Thiers, que ne l'était la monarchie. Un.
"Deuxièmement. Là j'aimerais vous apporter une citation de Jean-Jacques Rousseau que j'ai découvert absolument par hasard, mais qui va tellement bien à ma pensée. Rousseau écrivait à d'Alembert :
'Jamais, dans une monarchie, l’opulence d’un particulier ne peut le mettre au-dessus du prince ; en revanche, dans une république, elle peut aisément le mettre (ce particulier) au-dessus des lois. [...] Alors, le gouvernement n’a plus de force, et le riche est toujours le vrai souverain." (J.-J. Rousseau, Lettre à d'Alembert sur les spectacles, 1758)
"Dans une république, les lois sont faites par l'assemblée nationale. Qu'est-ce que l'assemblée nationale ? C'est le suffrage universel. Qu'est-ce en fait que le suffrage universel ? C'est ce que veulent les notables. Par conséquent, dans une république bien conduite c'est l'argent qui est au pouvoir. Il n 'y a pas de régime meilleur qu'un régime démocratique bien orienté pour la protection de l'argent. Voilà pourquoi Thiers était républicain !"
Aujourd'hui, les notables sont les multinationales et les milliardaires qui possèdent les médias.
Source : https://twitter.com/AniceLajnef/status/1445805291405254656?s=20
Add. 14-12-2024
On trouve une illustration de ce phénomène décrit par Jean-Jacques Rousseau, où (dans une république) "l’opulence d’un particulier (...) peut le mettre au-dessus du prince", dans le journal Le Monde :
''Tout aussi inédit, le fait qu'une entreprise atteigne une valorisation supérieure au budget de l'État, un particulier est plus puissant que le roi.''
(Cf. Elsa Conesa et Solenn de Royer, Comment Bernard Arnault, l'homme le plus riche du monde, étend son empire au-delà du luxe, Le Monde 7 août 2023, cité in Catherine MALABOU, Il n'y a pas eu de Révolution, Réflexion sur la propriété privée, le pouvoir et la condition servile en France, Bibliothèque Rivages, Éditions Payot & Rivages, Paris 2024, p. 184.)
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