À l’occasion du ‘’bicentenaire de la Révolution française, l’historien René Sédillot († 1999) a donné une conférence sur le thème du bilan, ''la balance sur le plan de la population, du territoire, de la culture, de l'enseignement, les arts, sur le plan juridique, sur le plan économique (problèmes agricoles, industriels, commerciaux, financiers) de la Révolution qu'il fait commencer en 1789 et se terminer en 1815.
"Le Code civil a instauré le partage obligatoire et égal des successions a été l'un des grands éléments de la baisse de la natalité au XIXe siècle, et qui nous a valu le déclin de la France au XIXe siècle.
La Banque de France a été la conséquence d’une période monétaire singulièrement douloureuse, avec le problème des assignats qui ont ennuyé une bonne partie des Français.
De la Révolution ‘’française’’ ce que l’on dira par-dessus tout pour la célébrer, c’est qu’elle a été à l’origine de la proclamation des droits de l’homme et du citoyen, et bien cela n’est pas vrai. Les droits de l’homme ont été un article d’importation et l’importateur a été LaFayette. Ce sont les Américains qui en 1776 ont imaginé, écrit et lancé une proclamation des ‘’droits de l’homme’’. L’initiative a été prise dans l’état de Virginie en 1776 par George Mason (1725-1792)
https://fr.wikipedia.org/wiki/George_Mason_(politique)
et dans cette proclamation des ‘’droits de l’homme’’ il y avait la liberté, l’égalité, le droit au bonheur et la propriété. Cette proclamation était inspirée d’une autre révolution qui s’était déroulée en Angleterre cent ans plus tôt en 1688 – cent un an avant la Révolution de 1789 – lorsque la dynastie des Orange a pris le pouvoir en Angleterre. On a rédigé à ce moment-là un Bill of Rights, qui a été à l’origine de l’initiative américaine, qui, elle-même est à l’origine de l’initiative ‘’française’’. Après l’initiative de l’état de Virginie, tous les états américains ont adopté une déclaration des droits, c’était devenu une mode. Il y eut plusieurs déclarations des droits de l’homme et à l’échelon fédéral il y eut également avec Thomas Jefferson une déclaration des droits de l’homme pour toute la collectivité américaine et La Fayette a soufflé l’affaire à Mirabeau, qui s’en est emparé et en août 1789 nous avons rédigé une déclaration plus prolixe. Nous ne sommes donc pas tout à fait la ‘’patrie des droits de l’homme’’. Des droits de l’homme il y en a dans le monde entier, il y en a partout et il ne faut pas rire, il y en a aussi en Russie où il y a même un droit au travail qui ne figure pas dans les autres déclarations des droits de l’homme, et en principe, il n’y a pas de chômage dans les pays soviétiques. En Afrique, j’en ai parlé une fois avec Leopold Sédar Senghor, qui a dit : ’’les droits de l’homme, pour nous, ce n’est pas la fraternité ou la liberté ou l’égalité, pour nous c’est de l’eau et un puits’’, voilà les droits de l’homme fondamentaux, et c’est vrai. Il faut y penser, les droits de l’homme ce n’est pas la même chose partout, sous tous les climats.
Première réserve. C’est bien la déclaration des ‘droits de l’homme’ mais ce n’est pas la déclaration des droits de la femme. Pas du tout. Il n’en a pas été question. Excusez-moi, mais la femme (sous la Révolution), cela ne comptait guère. Alors que sous l’Ancien Régime au XVIIIe siècle, la femme était reine. Frédéric II parlant du ‘’royaume de France’’ a dit ‘’c’est le règne du quotidien’’, c’est le temps où régnait sur les esprits Mme Du Deffand [qui avec son ‘salon’ qui attire toute l’élite intellectuelle de l’époque, personnalités du monde des lettres, des sciences et des arts, incarne le modèle libertin du XVIIIe siècle. Amie de Voltaire avec lequel elle entretient une correspondance suivie, elle est proche de D’Alembert, Fontenelle, Marivaux, Sedaine, Helvétius.) Ndlr], Mme d’Helvétius, Mme d’Holbach, etc., ou les presque reine, Mme de Pompadour, Mme du Barry, et quelques autres.
La France prenait une place considérable dans la société du XVIIIe siècle. Avec la Révolution, tout change. La femme ne compte plus. Et avec le Code civil elle ne comptera plus du tout. Il est convenu que c’est l’homme qui doit régner sur le foyer et non pas la femme. On donne à l’homme des droits civiques, on ne les donne pas aux femmes : il n’en est pas question. Et lorsque une délégation de femmes se présente à la tribune de la Commune en 1794, c’est le procureur Chaumette qui dit ‘’Citoyennes, que faites-vous là ? Vous n’avez rien à faire ici.. Retournez dans vos foyers. Vous n’avez rien à faire dans ce temple réservé à la sagesse masculine..’’
Deuxième réserve. La déclaration des droits de l’homme de 1789 c’est la déclaration des droits de l’homme blanc, mais pas du tout la déclaration des droits de l’homme de couleur. La déclaration est faite pour le citoyen français. Et lorsqu’il s’agit s’agit des colonies, par exemple de Saint Domingue, qui a ses représentants à la Constituante, on leur précise bien : ‘attention, nous avons des esclaves, nous en avons besoin pour la production de sucre ou de rhum, etc., et il n’est pas question de les affranchir ni de rien du tout. Chacun à sa place, la déclaration des droits de l’homme vaut pour nous, citoyens français de France mais ne vaut pas pour les Noirs de Saint Domingue’. C’est une déclaration qu’il n’aurait pas fallu faire et qu’il faudrait rappeler.
La Convention (1792-1795), elle, a affranchi les esclaves (décret d’abolition du 4 février 1794) . . . au moment où nous n’avions plus d’esclaves (puisque Saint Domingue avait été prise par les Anglais et que c’était une façon de jouer un mauvais tour aux Anglais, mais cela n’avait aucune signification sur le plan pratique. Et lorsque par la suite nous avons recouvré ces colonies, Joséphine, qui était créole, a bien précisé à son mari que les esclaves reprenaient leur condition servile et que la déclaration des droits de l’homme de 1789 – à laquelle Bonaparte voulait bien se référer – ne concernait pas les hommes de couleur,)
Le bilan ou coût de la Révolution
Le coût démographique.
La France en 1789 (avec en 27 et 28 millions d’habitants) était le premier pays du monde, elle l’était à tous les égards, mais elle l’était en particulier sur le plan démographique. Il n’y avait pas de pays plus populeux, hormis peut-être la Chine, dont on ne connaissait pas la population (on ne l’a su qu’au cours du XXe siècle). Chine mise à part, la France était la première population du monde avant la Russie, avant bien évidemment l’Autriche et l’Espagne, bien avant l’Allemagne et l’Italie qui n’existaient pas. Et l’Angleterre, sur la plan démographique, était une toute petite puissance.
Hors de ces 27 à 28 millions d’habitants, la Révolution et l’Empire en ont fait deux millions de morts. Soit quasiment la même chose que ce qu’il y a eu au XXe siècle entre la Guerre de 14-18 et celle de 1940. À nouveau deux millions de morts sur une population qui était de 40 millions d’habitants. C’est dire que les deux millions de morts de 1789-1815 sur 28 millions d’habitants c’est une hémorragie et quelque chose de beaucoup plus considérable et de beaucoup plus douloureux. Cela dit, il faut préciser qu’en 1815 la France a fini avec plus d’habitants qu’en 1789 ; Pourquoi ? Parce que sur l’élan donné par l’Ancien Régime, la natalité était encore exubérante. Il naissait chaque année un million d’enfants et d’enfants vivants. . . . Alors qu’aujourd’hui (en 1989) la natalité ne dépasse pas entre 700 000 et 800 000 naissances annuelles.
La dénatalité française du XIXe siècle due en partie au code civil – nous l’avons dit tout à l’heure – elle a aussi été due à cette perte initiale, cette perte de substance que nous ont valu les conflits, toutes les guerres civiles ou extérieurs de la Révolution et de l’empire.
Bilan territorial
Je pense rapidement car cela ne nous pose pas de problème. Il y a eu des gains et il y a eu des pertes. Et sur le plan de l’Hexagone, le bilan des gains et des pertes se balancent sensiblement. Nous avons gagné Avignon, Montbéliard et Mulhouse mais nous avons perdu au traité de 1815 (plus dur que celui de 1814) sur la frontière du Nord-Est un certain nombres de cités importantes : Sarrebrück, Landau, Sarrelouis, Mariembourg, Philippe, un certain nombre de cités importantes, peuplées, qui balancent à peu près les gains que nous ont valu Senones, Avignon, Montbéliard et Mulhouse.
Mais sur le plan territorial nous avons perdu notre empire Outre-Mer. Nous avons gardé Martinique, Guadeloupe, La Réunion. Nous avons perdu dans l’Océan indien les Seychelles, l’Île Rodrigues, l’Île de France (devenue l’Île Maurice). Et nous avons perdu dans les Antilles un bon nombre de petites îles et une grande île, d’une prospérité singulière à l’époque, Saint-Domingue, qui île prospère en 1789, paradis de l’Atlantique, devient deux cents ans plus tard la miséreuse Haïti.
[À titre de comparaison, ‘’Les guerres de Louis XIV ont coûté 500 000 hommes. Elles ont rapporté dix provinces et un empire. Celles de la Révolution et de l’Empire feront tuer du seul côté français quelque 1 500 000 soldats sans modifier véritablement nos frontières.’’ François Bluche, Louis XIV, Fayard, Paris 2002, p. 842]
Le bilan juridique
Les libertés ouvrières ont été perdu. Il y avait des libertés ouvrières sous l'Ancien Régime, cela s'appelait le Compagnonnage. Le maître avait des compagnons et les compagnons pouvaient se réduire en compagnonnage, sortes de syndicats, et il y avait le droit de grève. Et il y eu des grèves qui durèrent longtemps dans le bâtiment et l'imprimerie. La Révolution, elle, n'admet pas qu'il y ait d'intermédiaire entre l'État et l'individu. Il n'y aura plus aucune corporation, aucun syndicat (le mot syndicat n'existait pas mais il y avait le mot syndic, et des groupement de syndics). Et à particulier de la loi Allarde et Le CHAPELIER les ouvriers n'ont plus eu le droit d'association et ils ont perdu le droit de conflit ou de grève. C'est une conquête ouvrière qui a été perdu sous la Révolution.
Et c'est seulement sous Napoléon III que les ouvriers vont recouvrer timidement le droit de grève et sous la IIIe république, le droit d'association et de se constituer en syndicat.
Les libertés paysannes. Elles ont disparu, elles aussi. La première liberté paysanne qui a disparu était le droit de libre parcours et de vaine pâture, qui signifiait que les femmes et les enfants avaient le droit d'aller grapiller dans les champs de façon à parfaire leurs besoins alimentaire. La Révolution tient à défendre la propriété pour la raison qu'ayant émis des assignats, elle a besoin d'acheter des biens nationaux (les biens de l'Eglise qui avaient été nationalisés). Et ces biens, il en fallait la garantir la propriété à ceux qui en étaient les nouveaux propriétaires. Sous la Révolution, on décide donc que les champs seront enclos, ce qui n'était pas le cas sous l'Ancien Régime. Et on ne pourra plus les parcourir, les troupeaux ne pourront plus y passer, à travers les biens communaux ou autres. Tout doit être enclos et il est convenu que le droit de libre parcours et de vaine pâture sont interdits. Les libertés paysannes, les plus grandes libertés paysannes disparaissent.
Les libertés qui ont disparu sont des libertés locales, provinciales, municipales. La France d'Ancien Régime était une constellation de franchises. Cela ne s'appelait pas des privilèges, cela s'appelait des franchises. Et les provinces avaient des statuts très particuliers. La Bretagne, l'Artois, la Provence, avaient leurs états. La Franche-Comté : le mot franche Comté veut bien dire ce qu'il veut dire. Lorsque Louis XIV a conquis la Comté, il a promis une fois pour toutes par écrit que les Comtois garderaient leurs franchises. C'est-à-dire qu'ils avaient le droit de décider de leurs propres impôts ou de ne pas les payer au pouvoir central, ou d'organiser leur système de représentation à l'échelle provinciale ou locale. La Corse a été conquise en 1769, vingt ans avant la Révolution. Et la Corse avait la terre du commun, des podestats dans chaque village, et les Corses tenaient beaucoup à leurs franchises. Et l'Ancien Régime a confirmé ces franchises aux Corses. En 1789, sur l'autel de 'la Nation', toutes les provinces ont offert leurs libertés. Les Corses aussi. Les Corses ont renoncé à leurs terres du commun, à leurs podestats, à leurs confréries locales. ... On allait non plus en faire des 'sujets' mais des assujettis.
Le bilan culturel
L'enseignement primaire sous l'Ancien régime était prodigué par les Oratoriens (les Jésuites avaient été chassés du Royaume). On sait que la moyenne était 40% de gens qui savaient signer. Ce qui était énorme par rapport au reste de la population européenne (à cette époque). Dans les pays d'Europe centrale il y avait 2 ou 3% de personnes en mesure de signer leur nom.
Que fait la Révolution ? Elle annonce que l'instruction doit désormais être gratuite et obligatoire. Voilà de bons et fermes propos auxquels on ne peut qu'applaudir. Seulement la Révolution commence par mettre à la porte ou envoyer à la guillotine les frères Oratoriens. Si bien que les enseignants disparaissent dans les provinces. Il a fallu en recruter tant bien que mal auprès de personnes qui étaient parfaitement illettrées. Et la plupart des écoles n'ont pas pu enseigner parce qu'il n'y avait plus de corps enseignant. Les bâtiments mêmes des écoles qui étaient propriété de l'Eglise, avaient été nationalisés, passés aux mains de la Nation, il n'y avait plus ni écoles ni corps enseignant. Moyennant quoi on applaudissait en disant vive l'instruction ! À la fin de la révolution (en 1799) il y avait toute une classe de génération qui ne savait ni lire ni écrire. Les livres également, soupçonnés pleins de religiosités, avaient disparu. Résultat : les Français n'étaient même plus capables de signer leur contrat de mariage.
Le bilan "désastreux" sur le plan des arts
Dans le domaine des arts, la Révolution n'a rien fait. En revanche, elle a détruit ! Ce qui a été détruit, nous le savons pas, dans ce sens que nous ne le voyons plus. Nous ne voyons plus telle église, tel couvent, tel palais, tel château. Mais nous savons qu'ils ont disparu.
Par exemples :
- le château de Chantilly a été reconstruit.
- La statue d'Henri IV sur le Pont Neuf à Paris, la statue originale a été détruite, le bronze a été coulé comme toutes les statues de tous les rois de toutes les villes France. On a refait une statue d'Henri IV sous la Restauration ou la Monarchie de Juillet.
- Il en est de même pour les cathédrales et ainsi dans toute la France, cela a été véritablement un désastre.
- Le château de Versailles a été littéralement laissé à l'abandon. En 1800 il pleuvait à l'intérieur.
- La flèche de Notre-Dame est celle de Violet-le-Duc, ce n'est pas celle de l'Ancien Régime comme à la Sainte-Chapelle : on ne sait pas pourquoi on a voulu abattre les flèches de Notre-Dame, et celle de la Sainte-Chapelle, parce que c'était attenter à l'égalité et qu'il fallait tout niveler. C'est au nom de l'égalité que l'on a supprimé les flèches dans beaucoup d'endroits, en particulier à Notre-Dame.
Le bilan agricole et économique
L'Angleterre gagnante !
Sur le terrain industriel c'est le blocus qui a été le responsable. Il a coupé la France de tous les apports Outre-Mer mais il a livré la France au continent. Le cordon douanier instauré par Napoléon pour empêcher l'Angleterre de gagner de l'argent par ses exportations (ce qui était un blocus financier plus qu'économique). Napoléon isolait nos industries et il a permis à quelques industries de se développer.
En 1815 la Terre de France produisait un peu moins qu'en 1789. Les biens avaient été nationalisés. La main d'œuvre a disparu dans les guerres de l'Empire.
Le bilan agricole a donc été négatif.
La métallurgie et l'industrie anglaise se sont développés dans des conditions considérables.
L'Angleterre, elle, a pris une avance considérable sur le plan métallurgique mais aussi sur le plan textile et dans bien des domaines, tandis que la France, elle, s'attardait sur ses anciennes techniques.
Ce retard technique de quarante ans, nous le devons à la Révolution qui a été vraiment dramatique. Et c'est pourquoi en 1815, lorsque la monarchie a pu être restaurée, il a fallu que très sérieusement on élève des frontières douanières autour de la France de la France, qu'un protectionnisme rigoureux isole nos industries des industries anglaises parce qu'on aurait pas pu tenir la concurrence. Ce protectionnisme frileux a duré quasiment tout le XIXe siècle, sauf sous Napoléon III la tentative d'un allégement des barrières douanières. Et ce n'est qu'avec le marché commun au XXe siècle qu'on nous avons pu retrouver une liberté d'échange et un renoncement au protectionnisme auquel nous avait condamné la Révolution et l'Empire.
En 1789, le commerce extérieur de la France était le premier du monde à égalité avec le commerce britannique. Nous n'avons retrouvé ce niveau que vers 1825. Mais ce niveau de 1789 qui était le premier niveau du monde ne l'était plus du tout en 1825. Il s'en fallait de beaucoup. Nous avions perdu notre suprématie commerciale sur le plan mais sur le plan relatif nous ne pouvions pas non plus prétendre recouvrer le premier rang en 1825. Et aujourd'hui, (en 1989) notre commerce extérieur est le cinquième ou le sixième. Nous sommes loin de notre premier rang, perdu en 1789.
Le bilan financier
C'est celui des assignats.
La Révolution a été faite pour des raisons financières.
L'Ancien Régime était déficitaire, et nous ne devons pas le taire. Deux milliards de livres tournois : pour l'essentiel c'était une dette due à la guerre d'Amérique.
Le système des recettes fiscales d'Ancien Régime n'était pas si mal. Calonne dont on a dit beaucoup de mal avec prévu un système de vingtième qui était un peu celui de notre Impôt sur les Revenus : on l'a redécouvert cent ans plus tard.
Sans ressources, la Révolution a nationalisé les Biens de l'Eglise.
La Révolution, en fin de compte c'est très simple, on le voit avec toutes les histoires de corruption et de spéculation que j'ai pu étudier, elle a enrichi les riches et elle a appauvri les pauvres. Ce qui fut tout de même un bilan, disons discutable.
Des impôts dix fois supérieurs à ce qu'ils étaient avant 1789 !
Bilan final
Ce bilan, à n'en pas douter, il est négatif. On ne peut plus écrire aujourd'hui ce que l'on écrivait au XIXe siècle du temps de Lamartine.
Si la France en a souffert, le monde entier nous en est reconnaissant. Car la Révolution a diminué la France, et elle à l'origine de l'existence même d'un bon nombre de nos concurrents. L'Allemagne est née de la Confédération du Rhin. L'Italie est née de ce royaume d'Italie qu'on a ébauché avec Eugène de Beauharnais. Et en Allemagne les mouvements de rassemblement qui ont abouti avec l'empire allemand de Bismarck, tous ces mouvements ont été stimulé par des organisations patriotiques allemandes ou italiennes qui sont nés après la Révolution, avec la Révolution, de la Révolution. Et nous sommes responsables de l'unité allemande et de l'unité italienne. Alors il est tout naturel que les Italiens et les Allemands nous disent merci.
Nous sommes aussi responsables de la grandeur de l'Angleterre au XIXe siècle. Je l'ai dit, l'Angleterre a gagné sur tous les tableaux ! La Révolution, pour elle, fut véritablement du pain béni, une aubaine incroyable. Son industrie a pris un développement incroyable, son commerce extérieur a évincé le nôtre. L'Angleterre est devenue une grande puissance grâce à la Révolution.
Et ce n'est pas tout. L'Amérique, colonie espagnole, a été séparée de la métropole de Lisbonne ou de Madrid du fait de la Révolution et de l'Empire. Il y a eu une coupure et les peuples d'Amérique ont alors eu l'idée qu'ils pouvaient vivre très bien indépendamment des subsides et des prélèvements qu'opéraient Lisbonne et Madrid. Et les révolutions qui ont éclaté par la suite au Mexique, au Brésil, en Argentine, au Pérou, partout, ce sont, c'est le fruit de la Révolution française. Et les grands hommes de ces pays-là, San Martín, Bolivar, et au Mexique, ce sont des enfants de la révolution. Il est tout naturel que les Mexicains, les Argentins, les Péruviens et les Brésiliens nous en soient reconnaissants et viennent nous dire en 1789 'merci bons française, c'est à vous que nous devons nos libertés !'
Et voilà pourquoi on va célébrer la Révolution. C'est le succès, le triomphe des autres, ce n'est pas le nôtre, voilà tout. J'en suis morfendu comme vous-mêmes.
Lire : Le complot anglo-genevois contre la France (1789-1792)
Refaisons l'addition des pertes dues à la Révolution et à l'Empire:
400 000 morts pour les guerres jusqu'en 1800;
un million pour les guerres napoléoniennes;
600 000 pour les guerres intestines;
et l'échafaud pour mémoire. Voilà nos deux millions de morts.
Près de 80% des personnes guillotinées sous la Révolution étaient des petites gens. Les ouvriers ont été envoyés par charrettes entières à la guillotine. Les décapitations [...] concernent pour 28% des paysans, pour 31% des artisans et des ouvriers, sans doute pour plus de 20% des marchands ... 8 à 9% des nobles, pour 6 à 7% des membres du clergé...
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