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Christ Roi

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12 janvier 2021 2 12 /01 /janvier /2021 10:14
Cléricalisation : Confusion à deux reprises: sur le motu proprio "Spiritus Domini" de François

Source: The Catholic World Report

 

Le problème sous-jacent de ce document est qu'il éviscère l'enseignement clair de saint Jean-Paul II dans l'exhortation apostolique post-synodale Christifideles Laici.

 

Le dernier motu proprio du pape François, Spiritus Domini, ouvre aux femmes les petits ministères de lecteur et d'acolyte. En apparence, cela peut ressembler à beaucoup de bruit pour rien puisque les femmes travaillent comme lecteurs et acolytes depuis des décennies maintenant. Le Seigneur sait que tout le monde a une grand-mère qui distribue la Sainte Communion depuis des années. 1

 

Cependant, il y a bien plus à considérer ici que les personnes exerçant des "fonctions". 2

 

Le problème sous-jacent de ce document est qu'il éviscère l'enseignement clair de saint Jean-Paul II dans l'Exhortation apostolique post-synodale Christifideles Laici (1988), où nous lisons:

Lorsque la nécessité ou l'utilité de l'Eglise l'exigent, les pasteurs peuvent, selon les normes établies par le droit universel, confier aux fidèles laïcs certains offices et certaines fonctions qui, tout en étant liés à leur propre ministère de pasteurs, n'exigent pas cependant le caractère de l'Ordre. Le Code de Droit Canon prescrit: «Là où les nécessités de l'Eglise le conseillent, et à défaut de ministres sacrés, des laïcs peuvent, même sans être lecteurs ou acolytes, remplir en suppléance telle ou telle de leurs fonctions: ministère de la parole, présidence des prières liturgiques, administration du Baptême, distribution de la Sainte Communion, suivant les normes du droit»(69). Il faut remarquer toutefois que l'exercice d'une telle fonction ne fait pas du fidèle laïc un pasteur: en réalité, ce qui constitue le ministère, ce n'est par l'activité en elle-même, mais l'ordination sacramentelle. Seul le sacrement de l'Ordre confère au ministre ordonné une participation particulière à la fonction du Christ Chef et Pasteur et à son sacerdoce éternel(70). La fonction exercée en tant que suppléant tire sa légitimité formellement et immédiatement de la délégation officielle reçue des pasteurs et, dans l'exercice concret de cette fonction, le suppléant est soumis à la direction de l'autorité ecclésiastique. (n. 23)

Jean Paul poursuit:

 

Dans cette même Assemblée synodale cependant, à côté de jugements positifs, les critiques n'ont pas manqué. Elles ont porté sur l'usage indiscriminé du terme «ministère», sur la confusion et le nivellement pratiqué entre le sacerdoce commun et le sacerdoce ministériel, sur la non application des lois et des normes ecclésiastiques, l'interprétation arbitraire du concept de «suppléance», la tendance à la «cléricalisation» des fidèles laïcs et le risque de créer en fait une structure ecclésiale de service parallèle à celle qui est fondée sur le sacrement de l'Ordre. (n. 23).

 

Il faut dire d'emblée que Jean-Paul n'inventait pas des catégories théologiques. En effet, on ne peut pointer une seule ligne dans les seize documents de Vatican II où le mot "ministère" ou "ministre" était appliqué aux non ordonnés. Alors, voyons ce que dit le prudent Jean-Paul et comment cela correspond à ce que dit François.

 

Premièrement : "en fait, une personne n'est pas un ministre simplement en accomplissant une tâche, mais par l'ordination sacramentelle". Au fil des ans, un langage grossier a favorisé la confusion, de sorte que chacun et son oncle sont des ministres de quelque chose ou d'autre (par exemple, "ministre de la musique", "ministre de l'hospitalité", "ministre du deuil"). C'est pourquoi Jean-Paul rappelle à tous que lors du Synode qui a donné naissance à Christifideles Laici, "un jugement critique a été exprimé. ... à propos d'une utilisation trop aveugle du mot "ministère"".

 

Deuxièmement : pourquoi en est-il ainsi ? Parce que cela conduit à la "confusion", dit-il, et risque de "créer, en réalité, une structure ecclésiale de service parallèle à celle fondée sur le sacrement de l'Ordre". Dix ans après Christifideles Laici, huit dicastères de la Curie romaine ont pris l'initiative sans précédent de coproduire un document traitant de ces questions très graves : Instruction sur certaines questions concernant la collaboration des fidèles non-ordonnés au ministère sacré du prêtre. En d'autres termes, ce problème se pose depuis longtemps. Les prélats responsables de cette Instruction rappellent à tous l'interdépendance des problèmes :

 

Entre autres choses, elle [l'équation facile de l'activité des laïcs avec le sacerdoce ministériel] peut encourager une réduction des vocations au sacerdoce (ministériel) et obscurcir le but spécifique des séminaires comme lieux de formation au ministère ordonné. Il s'agit de phénomènes étroitement liés. Leur interdépendance exige une réflexion approfondie afin d'arriver à des conclusions bien réfléchies à leur égard.

 

Le document actuel et son motu proprio qui l' accompagne ne semblent pas prendre au sérieux les avertissements lancés par le Pape Jean-Paul ou par les responsables du dicastère en 1997 - comme si ces dangers ne persistaient pas jusqu'à nos jours ?

 

Certes, les femmes remplissent ces fonctions; cependant, c'est une chose de permettre à quelqu'un de jouer un rôle par délégation et d'institutionnaliser l'exercice de ce rôle chez une personne. Par exemple, si j'ai un feu dans ma cuisine, il est tout à fait logique pour moi de saisir l'extincteur et d'éteindre le feu. Cependant, cela ne fait pas de moi un pompier!

 

Comme d'habitude avec François, il y a des curiosités derrière ce document.

 

Où est le processus consultatif dans tout cela? Je pensais que c'était le Pape de la collégialité et de la synodalité. Il n'y a pas la moindre preuve que quiconque ait été consulté. Cela rappelle le comportement de François dans l'encadrement de Mitis Iudex en 2015, réformant certaines procédures de poursuite d'un décret de nullité dans une affaire matrimoniale. Personne n'a été associé dans la discussion avant la promulgation du décret, à la suite de quoi de nombreuses situations imprévues par le Pape et son entourage ne sont apparues que plus tard, de sorte que le document est relativement inutile. L'Église demande une consultation pour une raison.

 

Même le pape Pie IX, dans la perspective de sa définition du dogme de l'Immaculée Conception, a sollicité l'apport de l'épiscopat mondial (comme Pie XII avec le dogme de l'Assomption). Toute sagesse ne réside pas dans un seul homme, et cela est particulièrement vrai de François, qui a une formation théologique superficielle et qui a en fait exprimé son quasi-dédain pour la théologie à de nombreuses reprises. 3

 

Autre bizarrerie: le Pape écrit une lettre au préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, l'instruisant sur les raisons de cette décision. Je pensais que c'était censé être l'inverse! Cela a-t-il été fait parce que le préfet a refusé de signer ce document?

 

En outre, pourquoi François était-il apparemment obligé de faire appel à un professeur de l'Université du Latran pour fournir la "note explicative" du document? Est-ce parce que, une fois de plus, il n'a pu trouver personne au sein de sa propre curie pour approuver sa décision?

 

À plusieurs reprises, François a du mal à s'éloigner de cette démarche qui consiste à donner à n'importe quelle femme l'accès à l'épiscopat, au presbytère ou au diaconat. Bien sûr, cette décision donne en fait des raisons de croire à tort que l'accès aux ministères officiels de lecteur et d'acolyte est en fait un tremplin vers l'ordination éventuelle. C'est une attitude pastoralement insensible et nuisible pour les âmes de ceux qui sont induits en erreur. Ou bien ce document est-il un coup de pouce à ceux qui font une fixation sur le diaconat féminin, leur donnant un atterrissage en douceur pour un jugement final négatif sur le diaconat féminin ?

 

Ce qui est tout aussi étrange, c'est que François, sans doute le pape le plus anticlérical de l'histoire, se soit maintenant engagé dans cette même cléricalisation qu'il a si souvent condamnée et qui a été prévue par Jean-Paul il y a plus de trente ans.

 

Si François pensait que cette action apaiserait ceux qui pressent la cause de l'ordination féminine, il se trompe grossièrement. Le seul effet de ce document sera une nouvelle aliénation de ceux dont il s'est aliéné pendant des années.

Notes:

 

1 La pratique quasi universelle aux États-Unis de recourir à des ministres "extraordinaires" de la Sainte Communion est particulièrement flagrante, en violation de l'Immensae Caritatis, du Code de droit canonique, Inaestimabile Donum et Redemptionis Sacramentum. "Extraordinaire" est, en fait, "ordinaire"; triste à dire, beaucoup plus de catholiques américains reçoivent la sainte communion d'un laïc que d'un prêtre ou d'un diacre. Pourquoi les évêques n'ont-ils pas freiné ces abus ?

2 J'ai un intérêt (et une compétence) particulier dans ce domaine puisque ma thèse de licence en théologie sacrée à la Maison dominicaine d'études à Washington portait précisément sur les ministères inférieurs au diaconat, de Trente à Vatican II.

3 En fait, François n'est en aucune façon un homme de collégialité et de synodalité. Il ne consulte même pas son propre Collège des cardinaux. Ses prédécesseurs immédiats ont tenu des réunions du Collège avant un consistoire pour créer de nouveaux cardinaux, sollicitant et recevant ainsi leurs conseils. François n'a fait cela que la première fois, probablement parce qu'il ne valorise pas les idées des cardinaux ou qu'il sait que leurs opinions pourraient contester les siennes.

 

(Fin de citation)

___________

Note du blog Christ-Roi. La cléricalisation en cours sous le pontificat de François se situe en droite ligne du concile Vatican II qui confond clercs et laïcs ("la participation des laïcs au sacerdoce commun et au culte" de LG 34).

 

Et une inquiétude paraît que nous avions décrite ici : "en liant désormais plus étroitement le sort des chrétiens à celui des empires, en demandant que les laïcs s'engagent résolument pour un modèle global et universel qui sert de base au nouvel ordre international, cette nouvelle orientation de l'Église revient sur mille ans de distinction nuancée des clercs et des laïcs."

 

Avec ce mouvement de cléricalisation des laïcs, parallèlement, on demande systématiquement au religieux de s'immiscer dans le temporel et de faire de la politique, mais en revanche on ne demande jamais au temporel (au politique) de respecter et de tenir compte du spirituel. Un deux poids deux mesures dont il faudra bien se départir un jour.

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