Le progressisme a décliné son argumentaire sophiste sur Les Echos. On peut très facilement développer, à notre tour, un argumentaire critique du dit "progressisme", en tenant compte de paramètres ignorés :
* "la pauvreté a baissé dans le monde ces 50 dernières années" : cet argument progressiste est nul s'agissant de la situation économique des seuls Français. Il s'agit donc d'un argument fallacieux et de mauvaise foi qui consiste à opposer aux Français (qui se plaignent de leur situation économique qui s'est dégradée ces 50 dernières années, et qui donc, disent que c'était mieux avant), le fait que la situation des Chinois s'est considérablement améliorée pendant la même période. "Quoi, les 50 millions de Français se plaignent qu'ils mangeaient de la viande tous les jours il y a 50 ans alors qu'ils n'en mangent plus qu'une fois par semaine aujourd'hui ? Alors que le milliard de Chinois mangent de la viande tous les jours aujourd'hui alors qu'ils n'en mangeaient qu'une fois par semaine il y a 50 ans ! Salauds de populistes !"
Cette argumentation sophiste consiste à opposer à une affirmation formulée dans un cadre national, par un Peuple donné, au regard de sa propre situation la considération d'un point de vue mondial d'autres Peuples au regard de la situation de ces derniers.
* "la pauvreté a baissé en France grâce à un système social performant". Argument bidon : outre le fait que ce système social n'est pas en équilibre et n'est financé que par la cavalerie de la dette, cette argumentation prend en considération un indicateur (le taux de pauvreté) qui n'est pas en rapport avec une base fixe, mais avec un taux (50 %) du niveau de vie médian. Or, même si le taux de pauvreté stagne, voire baisse, si le niveau de vie médian baisse ou s'effondre, les pauvres sont bien encore plus pauvres.
* "la productivité, et donc la richesse, augmente en France". Ces 30 dernières années ont surtout vu la part du capital accaparer les richesses produites au détriment de la part du travail salarié. Gilbert a ainsi une meilleure productivité en travaillant chez Total (+ 5 % cette année), mais Total se taillant la part du Lion en appréhendant + 4 % et en laissant + 1 % à Gilbert (ce qui permettra aux Echos de dire que les salaires augmentent dans le privé, soit dit en passant), permet-il honnêtement de dire que la richesse augmente en France ? L'argumentation progressiste cache simplement le fait que la plus grosse partie de la population est surexploitée.
* "les salaires augmentent et l'inflation est faible, le niveau de vie des Français augmente". Les principaux postes de dépense des Français, à savoir le logement et les impôts, ne sont pas pris en compte dans le calcul de l'inflation ( + 300 % d'augmentation de l'immobilier en 20 ans à Paris au bas mot, de + 90 à +250 % en province) : qui a vu ses salaires augmenter dans de telles proportions ? Quant aux impôts… no comment.
Pour le reste, le calcul de l'inflation est faussé car les dépenses quotidiennes (notamment la nourriture, pour une qualité égale, dépense contrainte) sont sous-pondérées.
* "aujourd'hui on peut voyager plus facilement, on a internet, la médecine fait des progrès" Argument anachronique puisque on compare ce qui n'est pas comparable, à savoir deux périodes dans le temps qui ne sont pas au même niveau d'avancée scientifique. Depuis que l'Homme existe, le progrès technique s'est toujours déroulé de manière continue. Personne chez ceux qui disent "c'était mieux avant" ne souhaite revenir à l'âge de pierre. Moins d'ailleurs ceux-là que les écolos intégristes. Le progrès technique a lieu de toutes façons, nonobstant toute autre considération économique, sociale, sociétale, identitaire. Le "c'était mieux avant" ne concerne bien évidemment pas le progrès technique et scientifique mais concerne le reste, l'économique, le social, le sociétal et l'identitaire.
Au surplus, le progrès technique et scientifique n'est pas toujours corrélé à un absolu progrès économique, social, sociétal et identitaire : l'informatique dans le monde du travail, peut revêtir une forme d'esclavage des salariés, le progrès médical ne constitue un progrès social que si son financement est assuré.
* "le monde ouvert est un monde d'opportunité pour les jeunes". Le monde ouvert est aussi et surtout un moyen de perdre son identité, sa culture, le sens de ce qu'on est, sa spiritualité, pour devenir un résidu d'"homo economicus", interchangeable, producteur et consommateur, sans autre perspective que de trimer, d'acheter des choses inutiles et vaines, manger, déféquer, dormir et re-trimer.
En conclusion.
Le niveau de vie n'a pas suivi la croissance, les salaires sont restés plutôt stables, la création d'emploi n'a pas suivi. Tout n'est pas économique, tout n'est pas matériel, il y a une impression aussi, l'image que l'on a de son pays, de sa nation, de l'école, de l'avenir de ses enfants. La thèse des Echos selon laquelle la mondialisation est formidable, parce qu'elle nous a tous enrichi est fausse. Elle a enrichi certains, les habitants des métropoles mais pas des périphéries. Lire le géographe Christophe Guilluy.
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