Depuis le début des événements, les références à la Révolution sont légion et elles sont toutes à côté de la plaque. Marion Sigaut remet les pendules à l’heure.
Verbatim :
« Bonjour, c'est Marion Sigaut. Il était tentant pour les Français pétris de culture républicaine que nous sommes de faire le parallèle entre l'actuel soulèvement des Gilets jaunes et la Révolution française. Cela n'a pas manqué. Et on entend régulièrement Macron comparer avec Louis XVI, la classe politique avec la noblesse, et ce système en décomposition avec l'Ancien Régime. J'aimerais qu'on remette les pendules à l'heure. Oui le peuple français avait faim avant la Révolution française, mais la raison n'est pas que la noblesse et le clergé s'en seraient mis les poches au détriment du peuple comme on l'entend souvent (Il y avait même de très nombreux nobles, à qui le commerce était interdit, plus pauvres que les bourgeois. Ndlr.) les foules désespérées qui faisaient le coup de point avec des forces de l'ordre complètement dépassées ne réclamaient pas la fin de l'Ancien Régime mais son sauvetage et l'interdiction du nouveau.
« Toujours les rois de France avaient assuré au peuple que le pain du peuple serait accessible à tous au meilleur prix et là était la raison d'être de la royauté. Le roi était le père nourricier et son autorité envoyait sur les marchés une police dont la fonction consistait à protéger le peuple contre les appétits des marchands. Pointilleuse, respectée, dotée de pouvoirs réels, la police des grains assurait une sorte de service public de l'alimentation, et ne laissait les marchands faire leurs achats qu'une fois que la population locale, toute la population locale s'était servie. En cas de disettes, quand pour des raisons politiques comme une guerre ou des raisons climatiques, le grain manquait, son prix était fixé par la négociation entre les autorités locales et les marchands. On appelait cette négociation la taxation ou la fixation d'un taux. Le peuple faisait confiance au roi pour le protéger des profiteurs, et Henri IV avait fait de l'exportation de blé en cas de disette un crime de lèse-majesté, donc puni de la peine de mort : le pain du peuple était sacré au nom du Bien commun.
« Un jour sont arrivées "les Lumières" qui ont prétendu remplacer le Bien commun par "la recherche du profit". Des gens sans scrupules ont poussé le roi à s'endetter jusqu'à ce qu'il n'en puisse plus, puis l'ont convaincu que pour qu'il puisse rembourser la dette il libéralise le commerce des subsistances. Laisser circuler les blés sans la tracasserie de la police des grains, laisser la loi de l'offre et de la demande en fixer le prix. Laisser faire, laisser passer. Louis XV décida de tenter l'expérience en 1763 mais devant les violences et les cris de la population indignée par la hausse des prix, il choisit de reculer et de revenir à l'ancien système. À son avènement au trône en 1774, le jeune Louis XVI fut convaincu par les arguments du brillant Jacques Turgot, homme des Lumières, qui lui présenta tous les avantages qu'il aurait à libéraliser le commerce des subsistances. Intimidé, désireux de bien faire et manquant d'expérience, Louis XVI laissa Turgot vider les greniers à l'orée de l'hiver et laisser les marchands rafler les grains à la place des consommateurs, sous les applaudissements nourris d'un Voltaire qui voyait enfin se réaliser ses rêves. Ce fut un soulèvement. Comme un seul homme mais femmes en tête, et au cri de taxation, taxation, la population partit récupérer son grain et le distribua au bon prix, celui qui ne lèse personne et permet à tout le monde de vivre.
« Si les gigantesques manifestations de Gilets jaunes réclamant un carburant à prix abordable ressemble à quelque chose c'est bien à ces foules de la guerre des farines : dans les deux cas le peuple exige d'être entendu et refuse de payer pour une dette qui n'est pas la sienne. En 1776 encore le roi entendit son peuple et revint à l'ancien système, celui de la police des grains. Il renvoya Turgot. Or la dette continua d'augmenter encore et encore. Et quand elle fut telle que l'État risquait de ne plus pouvoir payer ses fonctionnaires, quand furent épuisés tous lés expédients habituels, le roi, acculé, accepta une nouvelle fois de libéraliser le commerce des subsistances. Puis il fut contraint de réunir les États généraux, assemblée chargée de répartir l'impôt, et d'apporter au roi les doléances du peuple, et rien d'autre. Les libéraux avaient eu le vent en poupe et avaient obtenu en même temps que la libre circulation des subsistances, un contrat de libre échange entre la France et l'Angleterre, qui inonda le marché français de produits à bas prix, fabriqués par des enfants et des ouvriers réduits à la misère en Angleterre. La hausse du prix du pain se doubla donc d'un chômage abominable et les six mois qui précédèrent la prise de la Bastille furent faits d'émeutes de chômeurs et de familles exigeant le retour du système protecteur qui avait eu cours jusque-là et non son abolition : le peuple ne contestait pas l'Ancien Régime mais le nouveau, celui du capitalisme appliqué à sa substance.
Chauffés par les loges maçonniques déterminées à renverser toutes les protections du peuple et les entraves au profit, les députés aux États généraux s'auto-proclamèrent "Assemblée Constituante", et inscrivirent dans le marbre l'économie de marché que le peuple rejetait de toutes ses forces. C'est cela la Révolution. Le roi ne pouvait plus rien puisqu'il était renversé. Il n'allait plus gêner les profiteurs enfin au pouvoir ! Ceux qui ont pris sa place et l'ont tué sont ceux qui ont imposé au peuple français la barbarie économique qui a cours encore aujourd'hui. C'est la bourgeoisie qui a voulu, fait et gagné la Révolution française pour imposer au peuple un régime que celui-ci ne voulait pas. On le lui a imposé par la Terreur et les massacres (et la famine organisée. Ndlr.) Il a subi la pauvreté, la prolétarisation, la barbarie économique et la perte de toute sa tradition. Si Macron ressemble à quelqu'un ce n'est certainement pas au roi que le peuple chérissait et considérait comme son père. Macron n'est que le dernier en date des successeurs de ceux qui l'ont assassiné pour imposer le règne de l'argent-roi contre le Bien commun. » (Fin de citation)

Note du blog Christ Roi. Ajoutons qu'en 1788-89, le financier Necker, rappelé au trône, affama volontairement le peuple en organisant une flambée des prix agricoles (due soit-disant selon la légende républicaine par des mauvaises récoltes...) En réalité, la libéralisation des prix du grain demandée par les libéraux provoqua une famine. Et hasard :
Necker affamera ce peuple pour le forcer à l'insurrection; les frères excitateurs enverront de Paris les harpies des faubourgs demander du pain à Louis XVI... De retour au trône,
(Augustin Barruel, Mémoires pour servir à l'Histoire du jacobinisme, tome 2, Editions de Chiré, Poitiers 2005, p. 458.)
L'historienne Marion Sigaut explique cette flambée des prix agricoles par l'introduction sous Turgot (1775) de la libéralisation du prix des subsistances et du libéralisme économique. Le plus grand pas qu'ait à faire l'administration vers la régénération du royaume , expliquait Turgot. Le dogme laissez-faire, laissez passer , c'est à ce moment-là que cela se joua. Laisser faire, c'était laisser les ouvriers travailler sans les corporations; laisser passer, c'était laisser passer les marchands et les marchandises.
La Révolution dite française n'est qu'un coup d'Etat, une immense escroquerie soutenue par la banque et la bourgeoisie d'affaires contre le peuple, l'acte de naissance d'une oligarchie composée de professionnels de la politique.Patrice Gueniffey, La Politique de la Terreur, Essai sur la violence révolutionnaire, Fayard 2000, réed. Tel Gallimard, Mesnil-sur-l'Estrée 2003, p. 206-207), dont le moteur est la haine dans la division, le "diviser pour régner" des partis républicains.
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