La grande majorité des messes font aujourd’hui office de narcotiques.
Transformées en simples occasions d’activisme et de bavardage, ces prétendues messes, tels des soporifiques spirituels, nous poussent à nous échapper de la profondeur de notre être afin de nous rendre peu à peu étrangers à la présence de Dieu.
Certes, en participant à de telles liturgies, nous restons encore dans l’Eglise ; mais c’est dans une Eglise sans Dieu et sans foi ; une Eglise où les célébrations liturgiques, vidées de leur sens, sont remplacée par un culte du « moi » par lequel les célébrants et leurs groupies imaginent encore susciter un quelconque intérêt de la part des fidèles qui y assistent.
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« L’une des manifestations de la vie liturgique postconciliaire dont on puisse se réjouir, c’est qu’il y a toujours plus de fidèles à vouloir célébrer pleinement l’Eucharistie en recevant le Corps du Seigneur, communiant avec lui et en lui avec l’Eglise de Dieu tout entière.
Cependant, parfois, en voyant des communautés aller communier en masse, on ne peut s’empêcher d’être gagné par un secret malaise : trouve-t-on ici encore ce que saint Paul exigeait avec tant d’insistance des Corinthiens - « discerne-t-on » encore le Corps du Seigneur (1 Co 11,29) ?
On a quelquefois l’impression que la communion est considérée comme faisant partie du rituel, et qu’elle se déroule comme un rite qui ne ferait qu’exprimer l’appartenance à la communauté. Il faut que l’on comprenne beaucoup plus nettement que l’Eucharistie n’est pas sans valeur parce qu’on ne communie pas. En communiant sans discernement, nous ne nous élevons pas vers les hauteurs de la communion, mais nous ravalons le don du Seigneur à la banalité de ce qui relève de notre bon plaisir, du quotidien.
Parce que l’Eucharistie n’est pas un repas rituel, mais la prière commune de l’Eglise, au cours de laquelle le Seigneur prie avec nous et se communique à nous, elle demeure précieuse et grande, elle demeure don véritable, même si nous ne pouvons communier. Si nous comprenions à nouveau mieux cela, et qu’ainsi nous comprenions à nouveau plus exactement ce qu’est l’Eucharistie elle-même, certains problèmes de pastorale, tels que la situation dans l’Eglise des divorcés remariés, perdraient d’eux-mêmes beaucoup de leur lourde pesanteur. »
Cardinal Joseph Ratzinger
Source: PRO LITURGIA, Actualités du dimanche 18 novembre 2018