"Aquarius / migrants : l'Europe est-elle à la hauteur. Pourquoi l'Europe n'est-elle pas solidaire ?", était le sujet d'une émission ce matin sur RMC. Une autre question nous vient : l'Europe est-elle à la hauteur de ce commerce cynique ?
Ce week-end, l'"Aquarius", un navire humanitaire secourant les migrants en difficulté en Méditerranée s'est vu refusé l'accès des ports d'Italie et de Malte. À son bord, 629 migrants dont la majorité sont des enfants en bas âge et des femmes enceintes. Face à cette situation, l'Espagne a ouvert son port et le président de l'Assemblée de Corse a également offert l'asile au bateau. Jusqu'à ce mardi matin, alors que plusieurs élus de LaREM ont estimé que "la France se serait honorée" à imiter l'Espagne, le silence de l'exécutif face au refus italien de recevoir l'Aquarius a été relevé par Le Figaro qui titre en fin de matinée : Aquarius : l'inaction de la France fracture LaREM et pousse l'exécutif à se justifier.
Ce n'est en effet que lors du Conseil des ministres de ce mardi matin, que selon le porte-parole du gouvernement Benjamin Griveaux, le chef de l'État aurait dénoncé le "cynisme et l'irresponsabilité" de l'Italie après avoir "rappelé le droit maritime" qui indique "qu'en cas de détresse, ce soit la côte la plus proche qui assume la responsabilité de l'accueil". [1]
Pourtant le cynisme froid et l'irresponsabilité ne sont-ils pas aussi du côté des navires et des Ong passant eux-mêmes les migrants en Europe afin d'approvisionner les usines en main d'oeuvre docile, laborieuse et peu rémunérée ? Ne s'agit-il pas là de ce néo-esclavagisme aux mains de grands groupes proposant aux migrants des salaires de misère dans leurs entreprises afin de faire pression à la baisse sur les salaires moyens eux-mêmes ? Ce nouveau commerce mondialisé "humanitaire" trans-méditerranée, ne participe-t-il pas du même mercantilisme cynique et irresponsable que fut l'ancienne traite trans-atlantique et l'esclavage des Noirs vers les Amériques à partir des ports de l'atlantique ?
Quelques heures plus tard ce matin, le premier ministre Édouard Philippe a été contraint de s'exprimer sur le sujet durant la séance de questions d'actualité à l'Assemblée nationale, à la suite d'une question d'un député de la majorité, Pieyre-Alexandre Anglade. "Nous sommes évidemment prêts à aider les autorités espagnoles pour accueillir et analyser la situation de ceux qui, sur ce bateau, pourraient vouloir bénéficier du statut de réfugié", a déclaré le chef du gouvernement, en se disant "heureux" de la décision de l'Espagne d'ouvrir le port de Valence.
Ce matin dans l'émission Brunet-Neumann à réécouter en podcast sur RMC, le journaliste Éric Brunet a expliqué :
"Je suis toujours un peu gêné avec ces 'il n'y a qu'à..., il faut qu'on; il y a de la souffrance, nous devons être compassionnels et accueillir plus de monde'. Typiquement les opinions publiques, les électeurs européens, dans leur majorité, sont plutôt hostiles à cela. Ce qui est intéressant et ce qui se joue aujourd'hui en Méditerranée, c'est le premier bras de fer entre un exécutif et un ministre de l'intérieur populiste Matteo Salvini qui est à la droite de la Ligue du Nord [...] et qui a sur la question de l'immigration une position très dure. Et là il est testé par cette ONG européenne SOS Méditerranée, qui est soutenue d'ailleurs par l'ONG du milliardaire américain George Soros, 'Open Society', qui veut un monde plus ouvert aux migrants. Donc il y a un bras de fer idéologique [...], un affrontement entre deux visions de politiques migratoires. C'est un choc qu'on attendait." (Fin de citation)
La réponse de Laurent Neumann qui ne conteste pas l'information apportée par Éric Brunet du financement de l'ONG Sos Méditerranée par Soros, est intéressante :
"On n'est pas forcément en désaccord ce matin. Ce qu'il faut bien avoir en tête c'est qu'en trois ans, il y a six cent trente mille migrants qui sont arrivés en Italie et que les 26 autres pays de l'Union européenne ne joue pas la solidarité. Et il y aura d'autres bateaux..."
On a sans doute-là la raison pour laquelle les scrutins se succèdant voient partout les populistes arriver au pouvoir en Europe.
Notes
[1] Aquarius : l'inaction de la France fracture LaREM et pousse l'exécutif à se justifier, Le Figaro, 12/06/2018