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Christ Roi

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Horloge

19 août 2023 6 19 /08 /août /2023 00:00
Saint Jean Eudes, dans Le Petit Livre des Saints, Éditions du Chêne, tome 2, 2011, p. 117.

Saint Jean Eudes, dans Le Petit Livre des Saints, Éditions du Chêne, tome 2, 2011, p. 117.

Dans le but de travailler au relèvement du Clergé, "le plus grand ennemi de l'Église", selon lui, le Père Eudes ouvrit à Caen un séminaire qui fut l'embryon d'une nouvelle famille religieuse, consacrée aux Coeurs de Jésus et de Marie et appelée "Congrégation de Jésus et de Marie" (Eudistes). Le succès vint aussitôt: les diocèses de Normandie furent bientôt pourvus de prêtres instruits et vertueux. Le Père Eudes ajouta à la formation du clergé les missions dans les campagnes.

En même temps, il fondait à Caen un Institut pour assurer la persévérance des "Repenties". Selon l'usage du temps, chaque maison était indépendante; à la mort du Père Eudes, il y en avait quatre; à la veille de la Révolution, il y en avait huit. En 1835, la supérieure du Refuge d´Angers, sainte Marie-Madeleine Pelletier, femme "de taille à gouverner un royaume", obtint que les nouvelles maisons fondées par son monastère restassent sous la dépendance de la Maison-Mère et donna à sa Congrégation le nom de "Bon-Pasteur". Cette branche a eu un grand succès, et possède des ramifications dans les cinq parties du monde.

 

 

Une des gloires du Père Eudes est d'avoir été le précurseur de la dévotion aux Coeurs de Jésus et de Marie. Quarante ans avant les apparitions de Paray-le-Monial, il faisait célébrer par ses prêtres l'Office solennel de ces très saints Coeurs et s'en faisait l'Apôtre dans ses missions. Aussi Léon XIII a appelé le Père Eudes "Auteur du culte liturgique des SS. Coeurs de Jésus et de Marie"; et Pie X, en le béatifiant, a dit qu´il devait être regardé comme "Père, Docteur et Apôtre" de cette dévotion.

Saint Jean Eudes, fondateur de la congrégation de Jésus et de Marie (1601-1680)

Dans son ouvrage "Le Royaume de Jésus" cité dans le Catéchisme de l'Église catholique au paragraphe 521, Saint Jean Eudes explique que "nous devons continuer et accomplir en nous les états et mystères de Jésus, et le prier souvent qu'il les consomme et les accomplisse en nous et en toute son Église. (...) Car le Fils de Dieu a dessein de mettre une participation, et de faire comme une extension et continuation de ses mystères en nous et en toute son Église, par les grâces qu'il veut nous communiquer, et par les effets qu'il veut opérer en nous par ces mystères. Et par ce moyen il veut les accomplir en nous" (Le Royaume de Jésus 3.4: Œuvres complètes, v. 1 [Vannes 1905], p. 310-311.) 

Arrivé à un âge avancé, le saint fondateur déposa sa charge de Supérieur et mourut saintement le 19 août 1680. Il est représenté avec un ou deux coeurs brûlants dans les mains.

Au XVIIIe siècle, les Eudites combattent le jansénisme, mouvement gallican contre l'ultramontanisme et l'autorité du Pape, donc proche du protestantisme et développant en même temps un rigorisme moral excessif.

 

On ne peut dire trop de fois l’Ave Maria, parce qu’on ne peut trop célébrer la mémoire de ce mystère.

Saint Jean Eudes

Saint Jean Eudes, fondateur de la congrégation de Jésus et de Marie (1601-1680)

Sources : (1) J.-M. Planchet, Nouvelle Vie des Saints, p. 332 ; (2) ; (3) ; (4) ; (5) ; (6) ; (7) Le Petit Livre des Saints, Éditions du Chêne, tome 2, 2011, p. 116.

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18 août 2023 5 18 /08 /août /2023 00:00
Etonnant destin de Ste Hélène, qui fut la concubine de Constance Chlore. Le nom de la mère de Constantin, devenue chrétienne et premier pélerin illustre de Terre sainte, est immortalisé par "l'Invention de la sainte Croix". Image tirée d'une photo Bibliothèque nationale in DANIEL-ROPS, Histoire de l'Eglise du Christ, tome II Les Apôtres et les Martyrs, Librairie Arthème Fayard, Paris 1965, p. 360

Etonnant destin de Ste Hélène, qui fut la concubine de Constance Chlore. Le nom de la mère de Constantin, devenue chrétienne et premier pélerin illustre de Terre sainte, est immortalisé par "l'Invention de la sainte Croix". Image tirée d'une photo Bibliothèque nationale in DANIEL-ROPS, Histoire de l'Eglise du Christ, tome II Les Apôtres et les Martyrs, Librairie Arthème Fayard, Paris 1965, p. 360

Sainte Hélène naquit vers le milieu du IIIe siècle. Voici ce que dit saint Ambroise (340-397):
« Hélène, première femme de Constance Chlore, qui ceignit depuis la couronne impériale, était, paraît-il, une humble fille d'étable. Noble fille d'étable, qui sut mettre tant de sollicitude dans la recherche de la Crèche sacrée ! Noble fille d'étable, à qui fut réservé de connaître l'Étable de Celui qui guérit les blessures de l'humanité déchue ! Noble fille d'étable, qui préféra les abaissements du Christ aux dignités trompeuses du monde ! Aussi le Christ l'a-t-il élevée de l'humilité de l'étable au sommet des grandeurs humaines. »

        La gloire de sainte Hélène c'est d'avoir été la mère de Constantin. « Constantin, dit saint Paulin de Nole, doit plus à la piété de sa mère qu'à la sienne d'avoir été le premier empereur chrétien. » Contrairement aux autres empereurs, Constance Chlore reconnaissait le vrai Dieu. Les prêtres chrétiens étaient admis à sa cour et y vivaient en paix. Une telle bienveillance ne peut être attribuée qu'à l'influence de l'impératrice sur le cœur de son époux. Sainte Hélène a donc joué un grand rôle dans la fin des persécutions, puisqu'elle fut l'épouse et la mère des deux hommes qui, sous son influence, protégèrent le christianisme. Qui sait même si les prières d'Hélène ne méritèrent point à Constantin l'apparition miraculeuse de la Croix, par laquelle il remporta la victoire et devint seul maître de l'empire?

Basilique du Saint-Sépulcre        Un autre événement remarquable dans la vie de sainte Hélène, c'est la découverte de la Vraie Croix du Sauveur, lors d’un pélerinage en Palestine entrepris en 326. Le bois de la croix fut découvert sur le lieu du Calvaire, après que l'on fit détruire le temple de Vénus bâti par l'empereur Hadrien, afin d'y ériger la basilique du Saint-Sépulcre. C'est au cours du chantier que trois croix auraient été trouvées. Un miracle (ou une inscription, selon les versions), aurait permis de distinguer la croix du Christ de celles des deux larrons.

        Hélène vivait sans étalage de grandeurs. Nourrir les pauvres, donner aux uns de l'argent, aux autres des vêtements, à d'autres une maison ou un coin de terre, c'était son bonheur. Sa bonté s'étendait aux prisonniers, aux exilés, à tous les malheureux. Le peuple ne pouvait voir sans une joie mêlée de larmes son impératrice venir en habits simples et communs prendre sa place à l'église dans les rangs des fidèles : une telle conduite n'a sa source que dans l'Évangile. Hélène eut, avant sa mort, la consolation de voir Constantin, protecteur de la religion de Jésus-Christ.

Saint Constantin et sainte Hélène avec la Vraie Croix, fresque VIIIe siècle

Saint Constantin et sainte Hélène avec la Vraie Croix, fresque VIIIe siècle

Sainte Hélène, détail vers 1495, jean-Baptiste Cima de Conegliano, Washington National Gallery of Art

Sainte Hélène, détail vers 1495, jean-Baptiste Cima de Conegliano, Washington National Gallery of Art

Sources: 1, 2

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17 août 2023 4 17 /08 /août /2023 00:00
Saint Hyacinthe de Cracovie, o.p. († 1257), Missionnaire dominicain, apôtre de la Pologne, saint Patron de la Lituanie

Apôtre de la Pologne, thaumaturge, saint Patron de la Lituanie, surnommé "l'Apôtre du Nord".

 

Originaire de Silésie, il fit ses études à Paris et à Bologne. Docteur en théologie et prêtre, il réforma de nombreux couvents en Pologne, en Russie et en Lituanie.

Hyacinthe était de famille illustre. À Rome, il fut le témoin d'un miracle de S. Dominique, et devint son disciple.

 

Saint Dominique reçut ses vœux et l'envoya évangéliser la Pologne, où il opéra des conversions sans nombre.

 

Hyacinthe transmit la doctrine dominicaine en Pologne et évangélisa également la Suède, la Norvège, le Danemark, l'Ecosse (d'où son surnom d'"Apôtre du Nord"), l'Asie mineure et la Grèce.

 

Sa vie n'était qu'un perpétuel exercice de charité envers toutes les misères, et de sainte cruauté contre lui-même. À l'imitation de S. Dominique, il n'avait point d'autre chambre que l'église et d'autre lit que la terre ; il se déchirait toutes les nuits les épaules avec des chaînes de fer et jeûnait fréquemment au pain et à l'eau. Parmi les prodiges qu'il opéra, on cite des résurrections de morts, la délivrance de possédés du démon, la guérison de nombreux malades. On le vit traverser le fleuve rapide de la Vistule avec plusieurs de ses frères, sur son manteau étendu.

 

Obligé de fuir devant les Tartares, il emporte du moins avec lui le Saint-Sacrement, pour en empêcher la profanation. Comme il va quitter l'église, une voix sort de la statue de Marie, qui lui demande de l'emporter aussi. Elle pèse huit ou neuf cents livres ; Hyacinthe, plein de foi, la prend d'une main et la trouve légère comme un roseau. À défaut de bateau, il traverse avec son fardeau le grand fleuve du Borysthène comme une terre ferme, pendant que son manteau sert de barque à ses frères, qui le suivent.

 

Consolé par plusieurs visites de la Sainte Vierge, il eut révélation de sa mort, qui arriva le 15 août 1257.

 

Hyacinthe a été canonisé le 17 avril 1594 par le Pape Clément VIII

 

En 1686 le Pape Innocent XI le nomma saint patron de la Lituanie.

Une basilique à Chicago porte son nom.

 

La ville de Saint-Hyacinthe au Canada est nommée en son honneur.

 

Sources : 1, 2

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16 août 2023 3 16 /08 /août /2023 00:00
Saint Armel de Bretagne, fondateur

Armel naquit au Pays de Galles en 482 où il fréquenta les écoles monastiques et fonda un monastère.

 

Lorsque le roi breton Vortigern fit appel aux Saxons, aux Angles et aux Jutes pour défendre son territoire contre les Scots venus du Nord, les protecteurs, qui étaient païens, s'en prirent bientôt aux chrétiens bretons. Saint Armel quitta alors la Bretagne insulaire lors de la grande migration bretonne devant des protecteurs qui devinrent des envahisseurs et ils s'installèrent sur le continent armoricain auquel ils donnèrent leur nom, leurs traditions, leurs structures et leur foi. (1)

 

"Quand les Bretons (de Grande-Bretagne, Ndlr.) vaincus et menacés de disparitions par les Saxons voulurent trouver le salut, un grand nombre fut heureux d'être accueilli par la catholique Cambrie (ancien nom du Pays de Galles ou Cornouaille. Ndlr.) Mais celle-ci était fort peuplée ; nombreux furent alors les fugitifs qui préférèrent tenter l'aventure dans l'Armorique païenne. Ils s'embarquèrent avec leurs prêtres, leurs évêques, leurs abbés et leurs ermites, avec leurs ornements sacrés, leurs croix et leurs livres liturgiques, et cinglèrent vers la péninsule, dans laquelle ils s'installèrent sans être repoussés, et furent si bien assimilés par la population qu'ils lui donnèrent leur religion et leur langue. Le gaulois et ses traditions furent oubliés. A partir de ce moment, on l'appela à son tour 'Bretagne', la petite Bretagne peuplée par les fugitifs de la Grande-Bretagne". (2)


Saint Armel, d'abord ermite près de Quimper, fonda un monastère au pays de Léon, Plouarzel-29229 (abbaye de Plouarzel en Bretagne).

 

Saint-Armel--Statue-moderne-du-saint-en-la-chapelle-Notre-D.jpg

Statue moderne du saint en la chapelle Notre-Dame-des-Fleurs de Plouharnel.

Il exerça son influence jusqu'à la cour du roi Childebert à Paris où il résida durant six ans, défenseur vigoureux de la justice, contre la peine de mort. Il y guérit un boiteux et un aveugle.

Chassé de la cour à la suite d'intrigues, il vint s'établir au sud de Rennes. Il débarrassa le pays d'un dragon qu'il noya dans la rivière Seiche (affluent de la Vilaine) ; on dit que l’herbe n’a jamais poussé depuis sur le sol où glissa le serpent en tombant dans la rivière. Mais le pays de Ploërmel revendique aussi ce miracle comme sien, et voici ce que nous lisons à ce sujet dans "les Légendes locales de la Haute-Bretagne", par M. Sébillot, page 174 :

 

Dans les environs de Ploërmel, la légende de Saint-Armel triomphant d’un serpent, ou dragon, qu’on appelle populairement "la Guibre", est encore très connue des paysans. La guibre était un énorme serpent, ou lézard vert, qui désolait le pays on l’appelait aussi "la beste de Guibourg", parce que, disent les anciens, c’était près de Guibourg (Jerguy) qu’elle se cachait le plus souvent, attaquant les grandes personnes, et dévorant les moutons, les poulains et les petites vaches bretonnes. Tout comme Saint-Michel terrassa le dragon, image du démon, ainsi Saint-Armel terrassa la guibre. Lorsqu’il l’eût vaincue, il la lia avec son étole, ainsi qu’en témoignent toutes les vieilles statues et les anciens vitraux du pays ; et, la guibre devenant aussi faible qu’un mouton, Saint-Armel la précipita dans l'Etang-au-Duc (ou plutôt dans la rivière d'Yvel, car l'Etang-au-Duc n’exista que plus tard). D’aucuns prétendent que c’est dans un chemin creux tout près de la pièce dite "des châteaux" ("dans le petit chemin des Châteaux de l’enfer") que se livra le combat entre la guibre et Saint-Armel. Au milieu de ce chemin on voit une grosse roche qui porte la trace d’une patte ; et ce pied est celui de la guibre, qui, précipitée du haut de la butte des châteaux alla rouler dans le ravin et se noya dans le ruisseau qui sort du grand Etang (la butte des Châteaux domine à l'Est la chaussée de l'Etang-au-Duc). Ce serait en reconnaissance de ce miracle, que le seigneur de Jerguy (Guybourg) aurait donné à Saint-Armel le territoire qui s’appela depuis Ploërmel. (3)


Bochod (nom de Saint-Armel en Ille et Vilaine au VIe siècle), Armel joua un rôle durant la plus grave sécheresse que connut la commune.

Une fois l'intégralité des puits asséchés et l'ensemble des récoltes dévastées, la population désespérée supplia le saint de la délivrer de ses tourments. Armel planta alors un bâton dans le sol et pria. L'eau se mit alors à jaillir abondamment de ce point pour - selon le saint - mettre éternellement à l'abri de la sécheresse la population. Cette fontaine miraculeuse existe toujours et est visitée chaque année par de nombreux chrétiens en quête de ses vertus miraculeuses. La voie qui y mène, le "chemin de la fontaine", commence devant la mairie de la commune. (4)

 

Armel décèda vers 570.

 

Dans l'église de Saint-Armel (Ille-et-Vilaine) est conservé un sarcophage qui serait sa tombe.

 

De nombreuses paroisses le choisirent comme patron (comme Ploërmel).


Invoqué contre la sécheresse, saint Armel est aussi le patron des aumôniers d'hôpitaux. (5)

 

Sources: (1) http://nominis.cef.fr/contenus/saint/2114/Saint-Armel.html; (2) Ivan Gobry, Le Baptême de l'Angleterre, Clovis, Condé-sur-Noireau 1998, p. 52-53 ; (3) Vie de Saint Armel ; (4) http://fr.wikipedia.org/wiki/Saint-Armel_%28Ille-et-Vilaine%29#Histoire ; (5) http://fr.wikipedia.org/wiki/Armel_des_Boschaux

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15 août 2023 2 15 /08 /août /2023 00:00
Assomption, Bonne fête nationale à tous !
 

"ASSOMPTION, se dit aujourd'hui particulièrement dans l'Eglise romaine d'une fête qu'on y célèbre tous les ans, le 15 août, pour honorer la mort, la résurrection, et l'entrée triomphante de la sainte Vierge dans le ciel.
Elle est encore devenue plus solennelle en France en 1638, que le roi Louis XIII choisit ce jour pour mettre sa personne et son royaume sous la protection de la sainte Vierge; vœu qui a été renouvelé en 1738 par le roi Louis XV."


Source : Encyclopédie théologique, Nicolas Bergier (1718-1790),  publ. par M. l'abbé Migne,  Ateliers catholiques au Petit-Montrouge, tome I, Paris 1850-1851, p. 392.

Après l’Ascension du Seigneur Jésus, les Actes des Apôtres montrent les Apôtres réunis tous ensemble, "avec quelques femmes, dont Marie, la Mère de Jésus" (Ac 1, 14). En prière, ils attendent la Pentecôte et la venue du Saint-Esprit. Marie est citée pour la dernière fois dans un livre du Nouveau Testament. En effet, les récits bibliques ne racontent pas la fin de sa vie terrestre. Aussi des chrétiens ont rédigé des textes pour l’évoquer. On les appelle des écrits apocryphes.

 

On y trouve toujours les éléments suivants.

Un ange annonce à Marie sa mort, paisible et sereine, tel un endormissement. De là vient le terme ''Dormition'' chez les Orthodoxes. Pour y assister, les apôtres, en mission d’évangélisation dans le monde, sont amenés miraculeusement par des anges. Au moment de l’endormissement de Marie dans sa mort, son âme quitte son corps. À cet instant, le Christ apparaît. Il prend dans ses bras l’âme de Marie, représentée sur les images par un bébé en signe de sa pureté. Il amène l’âme dans le Royaume de Dieu. Les apôtres célèbrent les obsèques de Marie. À la fin, les anges emmènent le corps de Marie au Paradis où son corps retrouve son âme.

 

L’empereur romain d’Orient Maurice (539-602) décide de célébrer le 15 août cette fête de la Dormition.

 

L’Église catholique ne parle pas de sa mort mais d’Assomption. Ce dogme, défini par le pape Pie XII en 1950, explique qu’à la fin de sa vie, elle fut ''assumée'', corps et âme. Selon la foi catholique, tout être humain vivra cette même assomption, pas au moment de la mort, mais à la Résurrection de la chair.

 

Ce dogme de l’Assomption est la conséquence de celui de l’Immaculée Conception (défini par le pape Pie IX en 1854); Un privilège divin a épargné Marie du péché originel. Elle échappe à la mort, conséquence de ce même péché. (eglise.catholique.fr )

 

http://leblogdumesnil.unblog.fr/files/2007/10/vanloondvictoires.jpg
Le tableau de Carle Vanloo, au-dessus du maître-autel de la Basilique N.-D. des Victoires (Paris), représente ce voeu. La Sainte Vierge apparaît assise dans un nuage, au haut du tableau; d'une main elle soutient l'Enfant Jésus, debout sur ses genoux; de l'autre elle offre une palme à Louis XIII; des groupes d'anges l'environnent. Le roi, prosterné lui présente le plan de l'église de N.-D. des Victoires. A la gauche du roi, le cardinal de Richelieu. A sa droite, un échevin de la la Rochelle lui remet les clefs de la ville, sur un plateau d'argent. Sous le nuage, où trône la Reine des Cieux, on aperçoit dans le lointain la Rochelle.

 

En 1638, le roi Louis XIII fit du 15 août jour de fête nationale. Il voua le royaume à Dieu par la Vierge Marie en remerciement de la grossesse de sa femme, le reine Anne d'Autriche enceinte du futur Louis XIV et ordonne qu'aient lieu chaque année à cette date des processions pour prier pour la France. Tel est le "Voeu de Louis XIII" institué en février 1638, encore célébré aujourd'hui le 15 août.

 

Depuis, chaque année, ont lieu des messes partout en France et des processions en l'honneur de la sainte Vierge, Patronne de la France.

 

Le jour de fête nationale est repris par la Restauration après que Napoléon Ier y ait substitué une éphémère "Saint Napoléon"...


La "République" dite "française" supprima ce jour de fête nationale.


Le 15 août est toujours la fête nationale des Acadiens.

 

C'est durant le siège de la Rochelle (1627-1628), où les protestants révoltés s'étaient constitués en "comité de salut public chargé de 'recevoir les avis secrets qui pourraient être donnés' sur l'ennemi" (le Roi de France), avec une cour de justice "pour juger les personnes accusées d'attentat contre l'ordre public", en l'espèce, les catholiques qui leur tomberaient dans les mains, ... que Louis XIII fit son voeu à la Vierge "que toute les années, par tout le royaume, l'on ferait des processions, le jour de son entrée (de la Vierge, ndlr.) dans les cieux, par son Assomption glorieuse".

 

Et ce n'est que dix ans après, en 1638, et alors que la Reine Anne d'Autriche jusque-là stérile venait miraculeusement de tomber enceinte, depuis trois mois, du futur Louis XIV, que Louis XIII rédigea officiellement son voeu. Voici le texte:

 

«Déclaration par laquelle le Roi place le royaume sous la protection spéciale de la Vierge Marie.

 

"Louis, par la grâce de Dieu, roi de France et de Navarre.

 

Dieu qui élève les rois aux trônes de leur grandeur, non content de nous avoir donné l'esprit qu'il départ à tous les princes de la terre, pour la conduite de leurs peuples, a voulu prendre un soin si spécial de notre royaume et de notre Etat, que nous ne pouvons considérer le bonheur du cours de notre règne, sans y voir autant d'effets merveilleux de sa bonté, que d'accidents qui nous menaçaient.

 

Lorsque nous sommes entrés au gouvernement de cette couronne, la faiblesse de notre âge donna sujet à quelques mauvais esprits d'en troubler la tranquilité; mais la main divine soutint avec tant de force la justice de notre cause, que l'on vit en même temps la naissance et la fin de ces pernicieux desseins.

 

En divers autres temps, l'artifice des hommes et la malice du démon, ayant sucité et fomenté des divisions, non moins dangereuses pour notre couronne, que préjudiciables à notre maison, il lui a plu d'en détourner le mal avec autant de douceur que de justice.

 

La rébellion de l'hérésie ayant aussi formé un parti dans l'Etat, qui n'avait d'autre but que de partager notre autorité (Ndlr. allusion aux guerres de religion et au siège de La Rochelle), il s'est servi de nous pour en abattre l'orgueil, et a permis que nous ayons relevé ses saints autels, en tous lieux où la violence de cet injuste parti en avait ôté les marques. 

 

Si nous avons entrepris la protection de nos alliés, il a donné des succès si heureux à nos armes, qu'à la vue de toute l'Europe, contre l'espérance de tout le monde, nous les avons rétablis en la possession de leurs Etats, dont ils avaient été dépouillés.

 

Si les plus grandes forces des ennemis de cette couronne, se sont ralliées pour conspirer sa ruine, il a confondu leurs ambitieux desseins, pour faire voir à toutes les nations, que comme la Providence a fondé cet Etat, sa bonté le conserve et sa puissance le défend.

 

Tant de grâces si évidentes font que, pour n'en pas différer la reconnaissance, sans attendre la paix qui nous viendra sans doute de la même main dont nous les avons reçues et que nous désirons avec ardeur, pour en faire sentir les fruits aux peuples qui nous sont commis, nous avons cru être obligé, nous prosternant aux pieds de sa sainteté divine, que nous adorons en trois personnes, à ceux de la sainte Vierge et de la sacrée Croix, où nous recevons l'accomplissement des mystères de notre rédemption, par la vie et la mort du Fils de Dieu, nous consacrer à sa Grandeur, par son Fils rabaissé jusqu'à nous, et à ce Fils, par sa mère élevée jusqu'à Lui, en la protection de la quelle nous mettons particulièrement notre personne, notre Etat, notre couronne et tous nos sujets, pour obtenir par ce moyen celle de la sainte Trinité, par son intercession, et de toute la cour céleste, par son autorité et par son exemple.

 

A ces causes nous avons déclaré et déclarons que, prenant la très sainte et très glorieuse Vierge pour protectrice spéciale de notre royaume, nous lui consacrons particulièrement notre personne, notre Etat, notre couronne et nos sujets, la suppliant de nous vouloir inspirer une sainte conduite, et défendre avec tant de soin ce royaume contre l'effort de tous ses ennemis, que soit qu'il souffre le fléau de la guerre ou jouisse des douceurs de la paix, que nous demandons à Dieu de tout notre coeur, il ne sorte point des voies de la grâce qui conduisent à celles de la gloire.

 

Et, afin que la postérité ne puisse manquer à suivre nos volontés à ce sujet, pour monument et marque immortelle de la consécration présente que nous faisons, nous ferons construire de nouveau le grand autel de l'église cathédrale de Paris, avec une immage de la Vierge, qui tienne en ses bras celle de son divin Fils descendu de la Croix; nous serons représenté aux pieds du Fils et de la Mère, comme leur offrant notre couronne et notre sceptre.

 

Nous admonestons le sieur Archevêque de Paris et néanmoins lui enjoignons, que tous les ans, le jour et fête de l'Assomption, il fasse faire commémoration de notre présente déclaration, à la grand'messe qui se dira en son église cathédrale, et qu'après les Vêpres dudit jour, il soit fait une procession en ladite église: à laquelle assisteront toutes les compagnies souveraines et le corps de ville, avec pareille cérémonie que celle qui s'observe aux processions générales les plus solennelles. Ce que nous voulons aussi être fait en toutes les églises, tant parochailes que celle des monastères de la dite ville et faubourgs, en toutes les villes, bourgs et villages du diocèse de Paris.

 

Exhortons pareillement tous les archevêques et évêques de notre royaume, et néanmoins leur enjoignons, de faire célébrer la même solennité en leurs églises épiscopales et autres églises de leurs diocèses, entendant qu'à ladite cérémonie les cours de parlement et autres compagnies souveraines et les principaux officiers des villes y soient présents.

 

Et d'autant qu'il y a plusieurs églises épiscopales qui ne sont point dédiées à la Vierge, nous exhortons lesdits archevêques et évêques, pour y être faite ladite cérémonie; et d'y élever un autel avec un ornement convenable à une action si célèbre et d'admonester tous nos peuples, d'avoir une dévotion toute particulière à la Vierge, d'implorer en ce jour sa protection, afin que sous une si puissante patronne, notre royaume soit à couvert de toutes les entreprises de ses ennemis, qu'il jouisse longuement d'une bonne paix, que Dieu y soit servi et révéré si saintement, que nous puissions arriver heureusement à la dernière fin, pour laquelle nous avons tous été créés: car tel est notre plaisir.

 

Donné à Saint-Germain en Laye, 10 février 1638"»

 

(Source: Louis XIII cité in Abbé Marie-Léon Vial, Jeanne d'Arc et la monarchie, 1910, réed. Editions Saint-Rémi, p. 344-345; 352;  376-379.)

 

http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/b/b3/P1000567_Paris_II_Basilique_Notre-Dame-des-Victoires_Choeur_reductwk.JPG

Le chœur de la Basilique de Notre-Dame-des-Victoires, avec les sept tableaux de Carle Van Loo

 

 

En 2015, les cloches de France sonnèrent à la volée le 15 août pour les Chrétiens d'Orient. Il y avait alors un an que les Chrétiens irakiens avaient été chassés de la plaine de Ninive par les djihadistes de l'État islamique.

En 2016, c'est "pour la France", frappée par de multiples attentats, que les cloches ont retentirent. Dominique Lebrun, archevêque de Rouen, appela tous les baptisés à venir prier dans une église le jour du 15 août "en hommage au père Hamel". La Conférence des évêques de France invita les paroisses à faire sonner "à la volée les cloches de nos églises" et à prier pour "notre pays dans les épreuves qu'il traverse".

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14 août 2023 1 14 /08 /août /2023 00:00

Abbé bénédictin à Einsiedeln, en Suisse (+ 958) dans le canton de Schwytz, saint Evrard ou Eberhard était un prêtre du diocèse de Strasbourg, il rejoignit saint Bennon de Metz au célèbre monastère d'Einsiedeln en Suisse où des ermites vivaient auparavant. Actuellement cette abbaye bénédictine est le plus important sanctuaire marial de la Suisse.

Abbaye d'Einsiedeln

 

Sources: 1; 2

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13 août 2023 7 13 /08 /août /2023 00:00
Saint Hippolyte de Rome († 235)

Hippolyte de Rome, originaire d’une famille patricienne d’Asie Mineure ou d’Alexandrie (Egypte) est né aux environs de 160–170. Il était le disciple d’Irénée, théologien réputé au IIe siècle, qu’il rencontra en Gaule vers 194.

Homme d’un grand savoir, grand travailleur, Hippolyte de Rome a été l’auteur de nombreuses œuvres exégétiques en grec, langue écrite des théologiens de son époque. 
Pécheur repentant, Hippolyte (170-235) se fit baptiser puis ordonner prêtre. Il se rebella contre le pape Calixte à qu'il reprochait d'avoir relâché la discipline pénitentielle de l'Eglise. Il fut la cause d'un des premiers schismes de l'Église. Prenant plus tard conscience de son erreur, il eut le courage de le reconnaître.

Persécuté sous Maximin Ier (empereur 235-238) vers 235, il fut envoyé dans les mines de Sardaigne où il rencontra Saint Pontien. Ensemble, ils donnèrent leur démission et appelèrent les fidèles à l'unité avant de mourir martyrs.

Hippolyte rapporte qu'il eut une vision où un nouveau-né se serait révélé à lui comme le Logos. 

Après saint Irénée, Hippolyte de Rome a posé le principe de la "tradition apostolique" (oeuvre connue grâce à la collection du SYNODOS de l'Église d'Alexandrie). 

Un sanctuaire commémoratif de la victoire des Francs chevelus sur les Sarrasins à Bourland aurait été érigé il y a fort longtemps, au lieu de Bourland dans le département du Rhône sous le patronage de saint Hippolyte. On y venait en pèlerinage de toute la région, car on obtenait beaucoup de miracles par l’intercession du saint. 

Une légende précise que ce succès excita la convoitise des gens du village voisin de Frontenas qui vinrent subrepticement enlever la statue, pour l’emporter chez eux ; mais dans la traversée du ruisseau du Merloux, la statue quitta les épaules de celui qui la portait pour regagner la chapelle.

Au cours des siècles, la chapelle primitive tomba en ruines. L’actuelle chapelle fut réédifiée en 1602 par Claude Meyssonnier, curé de Theizé. Des restaurations furent faites au XIXème siècle et récemment en 1974 et 2003.

Longtemps, on fêta au 13 août un autre saint Hippolyte, soldat romain du III° siècle converti par saint Laurent et que la tradition nous dit avoir été mis en pièces par des chevaux sauvages, sous l’empereur Valérien.

On adresse des prières à Saint Hippolyte pour le développement de la force physique. Il est le saint Patron des gardiens de prison.

 

Le martyre d'Hippolyte, Vies de saints, France, Paris, XIVe siècle

 

Sur une statue d'Hippolyte de Rome trouvée en 1551 (image ci-dessus) on y trouve une liste de ses écrits dont la Tradition apostolique d'Hippolyte. Cette dernière nous a été conservée grâce à des traductions coptes, arabes et éthiopiennes ainsi que par le palimpseste de Verone (recueil latin du IVe siècle). La première partie traite de la consécration épiscopale, de la liturgie eucharistique et de la bénédiction. La seconde partie présente les lois et les règles en vigueur pour les laïcs. Et la troisième partie s'occupe des pratiques religieuses de l'Église.

 

L'Anaphore de Saint Hippolyte

 

Historiquement, il s'agit du premier texte complet de la prière de consécration qui nous soit parvenu complet. Écrit en grec, il a été l'objet de nombreux commentaires postérieurs et s'appuie sur une théologie assez précise :

 

  • « Nous te rendons grâces, Ô Dieu, par ton fils bien-aimé, Jésus Christ, que dans les derniers temps tu nous as envoyé comme sauveur et rédempteur et messager de ta volonté : il est ton Verbe inséparable, par lequel tu as tout créé et en qui tu t'es complu : que tu as envoyé du ciel dans le sein de la Vierge où il s'est incarné : qui est né du Saint Esprit et de la Vierge ; qui pour accomplir ta volonté t'as conquis un peuple saint, et a délivré par sa passion ceux qui ont cru en lui.

  • C'est lui qui en se livrant volontairement à la passion, pour vaincre la mort, pour rompre les liens du démon, fouler aux pieds l'Enfer, illuminer les justes, atteindre le terme et manifester la résurrection : prenant le pain et rendant grâces à Toi, il a dit "Prenez et mangez, ceci est mon corps offert pour vous. De même pour le calice disant : Ceci est mon sang répandu pour vous. Quand vous faites cela, vous le faites en mémoire de moi"

  • Nous souvenant donc de sa mort et de sa résurrection, nous t'offrons le pain et le calice en te rendant grâces, parce que tu as daigné nous permettre de nous présenter devant toi et d'accomplir notre ministère, et nous te demandons d'envoyer ton Esprit Saint sur l'oblation de la Sainte Eglise afin que nous puissions te louer, te glorifier par ton fils Jésus Christ, par qui est à toi gloire et honneur, au Père au fils et au Saint Esprit dans ta Sainte Eglise et maintenant et dans les siècles des siècles. Amen » (Clavis Patrum Græcorum 1870-1925). 

 

Sources1; 23 ; 4; 5 Jean Daniélou, L'Eglise des premiers temps, Points Histoire, Tours 1999, p. 108, 159.

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11 août 2023 5 11 /08 /août /2023 00:00
Le Petit Livre des Saints, Éditions du Chêne, tome 1, 2011, p. 44.

Le Petit Livre des Saints, Éditions du Chêne, tome 1, 2011, p. 44.

Sainte Claire d'Assise, fondatrice (1194-1253)

Sainte Claire naquit à Assise, en Italie. Dès son enfance, on put admirer en elle un vif attrait pour la retraite, l'oraison, le mépris du monde, l'amour des pauvres et de la souffrance ; sous ses habits précieux, elle portait un cilice. 

À l'âge de seize ans, fortement émue de la vie si sainte de François d'Assise, elle va lui confier son désir de se donner toute à Dieu. Le Saint la pénètre des flammes du divin amour, accepte de diriger sa vie, mais il exige des actes : Claire devra, revêtue d'un sac, parcourir la ville en mendiant son pain de porte en porte. Elle accomplit de grand cœur cet acte humiliant, et, peu de jours après, quitte les livrées du siècle, reçoit de François une rude tunique avec une corde pour lui ceindre les reins, et un voile grossier sur sa tête dépouillée de ses beaux cheveux. 

Elle triomphe de la résistance de sa famille. Quelques jours après, sa sœur Agnès la supplie de l'agréer en sa compagnie, ce que Claire accepte avec joie, en rendant grâce au Ciel. « Morte ou vive, qu'on me ramène Agnès ! » s'écria le père, furieux à cette nouvelle ; mais Dieu fut le plus fort, et Agnès meurtrie, épuisée, put demeurer avec sa sœur. Leur mère, après la mort de son mari, et une de leurs sœurs, vinrent les rejoindre. 

La communauté fut bientôt nombreuse et florissante ; on y vit pratiquer, sous la direction de sainte Claire, devenue, quoique jeune, une parfaite maîtresse de vie spirituelle, une pauvreté admirable, un détachement absolu, une obéissance sublime : l'amour de Dieu était l'âme de toutes ses vertus. 

Claire dépassait toutes ses soeurs par sa mortification ; sa tunique était la plus rude, son cilice le plus terrible à la chair; des herbes sèches assaisonnées de cendre formaient sa nourriture ; pendant le Carême, elle ne prenait que du pain et de l'eau, trois fois la semaine seulement. Longtemps elle coucha sur la terre nue, ayant un morceau de bois pour oreiller. 

Claire, supérieure, se regardait comme la dernière du couvent, éveillait ses sœurs, sonnait matines, allumait les lampes, balayait le monastère. Elle voulait qu'on vécût dans le couvent au jour le jour, sans fonds de terre, sans pensions et dans une clôture perpétuelle. 

Claire est célèbre par l'expulsion des Sarrasins, qui, après avoir pillé la ville, voulaient piller le couvent. Elle pria Dieu, et une voix du Ciel cria : « Je vous ai gardées et je vous garderai toujours. » Claire, malade, se fit transporter à la porte du monastère, et, le ciboire en main, mit en fuite les ennemis.

Sa naissance au ciel eut lieu le 11 août 1253.

Assise, Basilique Sainte-Claire - détail de la fresque de la vie de la sainte

Assise, Basilique Sainte-Claire - détail de la fresque de la vie de la sainte

Sources : (1) ; (2) ; (3) Le Petit Livre des Saints, Éditions du Chêne, tome 1, 2011, p. 44.

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10 août 2023 4 10 /08 /août /2023 00:00
Saint Laurent, dans Le Petit Livre des Saints, Éditions du Chêne, tome 1, 2011.

Saint Laurent, dans Le Petit Livre des Saints, Éditions du Chêne, tome 1, 2011.

Saint Laurent de Rome, martyr à Rome sous l'empereur Valérien († 258).

 

Il y a peu de martyrs dont le nom soit aussi célèbre que celui de saint Laurent. Les plus illustres Pères latins ont employé leur éloquence pour le louer, et toute l'Eglise, dit saint Maxime de Turin.

 

Diacre à Rome, il fut exécuté en même temps que le pape Sixte II en 258, sur un gril de fer que chauffaient des charbons ardents, c'est pourquoi on le représente avec un gril et qu'il est invoqué lors de maladies de la peau.

 

Comme on le conduisait au supplice, Laurent, son diacre, suivait le pape Sixte II en pleurant : "Où allez-vous, mon père, disait-il, sans votre fils ? Où allez-vous, saint Pontife, sans votre diacre ? Jamais vous n'offriez le sacrifice sans que je vous servisse à l'autel. En quoi ai-je eu le malheur de vous déplaire ?"

 

Le saint Pape, ému, lui dit : "Je ne vous abandonne point, mon fils ; une épreuve plus pénible et une victoire plus glorieuse vous sont réservées ; vous me suivrez dans trois jours." Puis il lui ordonna de distribuer aux pauvres tous les trésors de l'Église, pour les soustraire aux persécuteurs: mission que Laurent accomplit avec joie. 

Saint Laurent de Rome, martyr († 258)

Le préfet de Rome, à cette nouvelle, fit venir Laurent et lui demanda où étaient tous les trésors dont il avait la garde, car l'empereur en avait besoin pour l'entretien de ses troupes : "J'avoue, lui répondit le diacre, que notre Église est riche et que l'empereur n'a point de trésors aussi précieux qu'elle ; je vous en ferai voir une bonne partie, donnez-moi seulement un peu de temps pour tout disposer." Le préfet accorda trois jours de délai. 

 

Le martyre de Saint-Laurent, de Pierre Paul Rubens

Pendant ce temps, Laurent parcourut toute la ville pour chercher les pauvres nourris aux dépens de l'Église ; le troisième jour, il les réunit et les montra au préfet, en lui disant : "Voilà les trésors que je vous ai promis. J'y ajoute les perles et les pierres précieuses, ces vierges et ces veuves consacrées à Dieu ; l'Église n'a point d'autres richesses. - Comment oses-tu me jouer, malheureux ? dit le préfet ; est-ce ainsi que tu outrages en moi le pouvoir impérial ?" Puis il le fit déchirer à coups de fouets. 

 

Laurent, après ce supplice, fut conduit en prison, où il guérit un aveugle et convertit l'officier de ses gardes, nommé Hippolyte. Rappelé au tribunal, il fut étendu sur un chevalet et torturé cruellement ; c'est alors qu'un soldat de la garde, nommé Romain, vit un Ange essuyer le sang et la sueur du martyr : "Vos tourments, dit Laurent au juge, sont pour moi une source de délices." Laurent fut ensuite rôti à petit feu sur un gril de fer, et quand il eut un côté tout brûlé : "Je suis assez rôti de ce côté, dit-il au juge en souriant ; faites-moi rôtir de l'autre." Bientôt, les yeux au Ciel, il rendit l'âme.

"Il est dit de Saint Laurent que le feu que Jésus-Christ allumait dans son cœur, amortissait par son activité le feu extérieur qui brûlait son corps. [...] Et il est dit encore de lui, qu'étant saintement enivré du Sang de Jésus-Christ, & qu'étant plein de la force & de la vie qu'il avait puisée dans l'Eucharistie, il devint non seulement invincible dans les tourments très cruels & très longs, mais même comme insensible, tant il était au-dessus des douleurs par sa foi & par son amour ; tant il était transformé en Jésus-Christ, dont la puissance s'était rendue maîtresse de l'infirmité de la chair. [...] Il en a été ainsi de tous les Martyrs, & principalement de ceux que Jésus-Christ a voulu rendre l'étonnement des persécuteurs, & la consolation de l'Église, qui apprenait par des tels exemples quel était le pouvoir de la grâce, & combien elle était supérieure à tout ce que la malice des hommes & la fureur des démons pouvaient inventer.

 

"[...] La grâce de Jésus-Christ nous soutient mais ne nous cache pas le fond de notre faiblesse. Elle nous inspire le courage, mais en nous faisant sentir qu'il vient d'elle & non pas de nous. (2 Co 4,7). [...] Les faibles qui avouent leur faiblesse, & qui désirent d'avoir plus de forcer & plus de courage, sont consolés par les vérités que S. Paul vient de nous enseigner. [...] Mais [...] ils doivent toujours se souvenir de S. Pierre, plein d'ardeur & de zèle, mais qui est trompé par la présence d'un sentiment qui lui cache sa faiblesse, qui s'endort au lieu de veiller & de prier avec Jésus-Christ, & qui s'expose à la tentation sans s'y être préparé par aucun des moyens légitimes. C'est sur l'exemple de Jésus-Christ qui est la force même, qu'ils doivent se régler, s'humilier & se prosterner avec lui; demander avec lui que le calice passe; l'accepter quand la nécessité les y contraint; souffrir en silence tout ce qui leur arrive; prier sans cesse, & même avec larmes, afin que la persévérance leur soit accordée; & bien se persuader qu'ils ne conserveront la grâce de Jésus-Christ que par des moyens semblables à ceux qu'il a employés pour la leur mériter : n'étant pas juste que ce qui a été le prix de son Sang, de ses opprobres, & de ses instantes prières, soit accordé à des personnes qui se contentent de la justice de leur cause, & de la gloire de souffrir pour elle, sans travailler à se conserver cet honneur par une humilité, un silence, une prière, qui aient quelque conformité avec les dispositions de Jésus-Christ.'' (Abbé Jacques-Joseph DUGUET, Explication du Mystère de la Passion de Notre-Seigneur Jésus-Christ suivant la Concorde, volume 1, éd. Jacques Estienne et François Babuty, Paris 1728, rééd. Lightning Source Milton Keynes UK, p. 84-85; 95-97.)

Au VIe siècle, son culte fut immensément populaire, on signala des reliques et des morceaux de son gril dans tous les coins d'Europe.

 

Son nom viendrait du fait que, enfant fugueur, sa mère l'aurait retrouvé près d'un laurier.

PRATIQUE: Demandons à Dieu une foi aussi vive que celle des martyrs.

 

Saint Laurent, 1618, Le Bernin, Florence, Offices, dans Rosa Giorgi, Le Petit Livre des Saints, Larousse, Tolède 2006, p. 472-473.

Saint Laurent, 1618, Le Bernin, Florence, Offices, dans Rosa Giorgi, Le Petit Livre des Saints, Larousse, Tolède 2006, p. 472-473.

SourcesVie des Saints pour tous les jours de l'année avec une pratique de piété pour chaque jour et des instructions sur les fêtes mobiles, Alfred Mame et Fils éditeurs, Tours 1867, p. 222; 2; 3 ; Le Petit Livre des Saints, Éditions du Chêne, tome 1, 2011.

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8 août 2023 2 08 /08 /août /2023 00:00
Saint Dominique, fondateur de l'ordre des Dominicains (ordre des Prêcheurs ou des Frères prêcheurs) († 1221)

Aucun saint marquant, aucune grande initiative religieuse n'avait surgi depuis la mort de S. Bernard (1153). Saint Dominique de Guzman naît dans la Vieille-Castille en 1170, dans une famille de la noblesse espagnole. Il a deux frères : Antoine, probablement mort durant la bataille tragique d'Alarcos contre les Maures en 1195, et Mamès, un homme contemplatif et saint qui se fit religieux et suivit Dominique.

 

Sa mère, Jeanne, avant sa naissance, a une vision étrange; il lui semble voir l'enfant qu'elle va mettre bientôt au monde sous la forme d'un petit chien tenant un flambeau dans sa gueule et prêt à répandre le feu sur la terre.

 

L'enfance de Dominique est marquée par plusieurs autres présages merveilleux.

 

Jeune étudiant, il vivait déjà comme un saint. Il avait chaque jour ses heures fixées pour la prière, et souvent il était ravi en Dieu. Il jeûnait presque toujours, ne buvait jamais de vin, dormait fort peu et n'avait d'autre lit que le plancher de sa chambre.

 

Un jour, ayant tout donné, il dit à une femme qui lui demandait de l'argent pour racheter son frère captif: "Je n'ai ni or ni argent; mais prenez-moi et offrez-moi aux Maures en échange de votre frère." La proposition héroïque ne fut pas acceptée, mais Dominique en eut le mérite. Dans une maladie très grave, causée par son travail et ses austérités, il fut guéri soudain par l'apparition de saint Jacques le Majeur, Apôtre (+44).

SAINT DOMINIQUE, Fondateur d'Ordre (1170-1221)

SAINT DOMINIQUE, Fondateur d'Ordre (1170-1221)

En 1203, Dominique, ayant dû venir en France avec son évêque Diègue (Diego d'Osma), découvre dans la région toulousaine, l'hérésie des "bons hommes", les Albigeois, qualifiés de "cathares" au XIXe siècle. Dominique logeait à Carcassonne et, discutant toute la nuit des vertus de la vraie foi avec son aubergiste, cathare, il le convertit. L'hérésie cathare se composait d'un mélange de vieilles hérésies, comme la négation de l'Eucharistie et du baptême catholique, sur un fond de manichéisme asiatique importé en Europe par les marchands, les pèlerins et les missionnaires revenus des Croisades. Sa présence dans le sud de la France est attestée à partir de 1140. Selon son enseignement, l'univers est en proie à la lutte de deux principes également forts et également premiers : le bien et le mal. (Jean CHELINI, Histoire religieuse de l'Occident médiéval, Pluriel, Millau 2012, p. 312.) Ce n'est pas Dieu qui a créé l'univers, c'est Satan. Toute réalité terrestre est marquée du signe du mal…

 

Le manichéisme qui avait été détruit par les arguments de S. Augustin à la fin de l'Antiquité, se présentait déjà au IVe siècle comme "une religion de la Lumière, une Eglise de la Justice, des Elus, des Justes, des Véridiques. [...] Mani (216-277) que les Latins et les Grecs ont appelé Manichée. […] Son enseignement était tout simplement la gnose de Marcion (que S. Polycarpe, le disciple de l'apôtre Jean, reconnut comme le "Fils aîné de Satan"), et de Basilide.

 

Le catharisme n'est pas original. Il insiste simplement avec une accentuation particulière sur un double principe du monde, l'existence d'un dieu bon et d'un dieu mauvais en conflit éternel et sur la réincarnation des âmes. (Etienne COUVERT, La Gnose universelle, De la Gnose à l'Oecuménisme, tome 3, Editions de Chiré, Chiré-en-Montreuil 1993, p. 14-15.) La Création tout entière est un mélange inextricable de bien et de mal. L'homme est divin, lumineux par l'âme, mais le corps, opaque, est porté vers le mal. Avec Mani, tout est simple... il faut aider le Bien contre le Mal, c'est-à-dire écarter de soi tout ce qui est matériel et diabolique. Au IVe siècle, le manichéisme apparut comme une sorte d'anarchisme spirituel propre à désagréger tous les principes les plus solides de l'éthique et de la vie. "Sinistre, intolérante, pour laquelle chaque péché était mortel et qui condamnait la joie" (Emile GEBHART), l'hérésie manichéenne, dans son expansion, rencontra partout de terribles obstacles, récusée comme hérésie et persécutée. L'Inde, après quelques mois d'essais de pénétration s'en débarrassa. Elle fut également chassée de Chine. En Turquie, les Kirghiz, ces stricts musulmans éliminèrent le dualisme manichéen. (DANIEL-ROPS, Histoire de l'Eglise du Christ, tome II Les Apôtres et les Martyrs, Librairie Arthème Fayard, Paris 1965, p. 402-403.) "Les lucifériens, c'est-à-dire les adorateurs du diable, étaient manifestement une variété de cathares qui croyaient à l'existence des deux principes moteurs de l'univers." (Jean CHELINI, Histoire religieuse de l'Occident médiéval, Pluriel, Millau 2012, p. 422.)

 

Aux yeux des cathares, Jésus est un ange dont la vie terrestre n'a été qu'une illusion, le Christ n'a pas eu à ressusciter. La Vierge Marie était un pur esprit aux apparences humaines. La procréation, elle-même est criminelle : mettre un enfant au monde, c'est précipiter une nouvelle âme dans le royaume du Mal… Toutefois, certains "parfaits" admettent les relations charnelles; condamnant seulement l'institution du contrat et du sacrement de mariage, ils en viennent à prôner la liberté sexuelle. Ils faisaient eux-mêmes profession de chasteté perpétuelle, fuyaient avec horreur les moindres occasions d’impureté ; et cependant ils admettaient dans leur société les concubines des Croyants et les faisaient participer à leurs rites les plus sacrés, même lorsqu’elles n’avaient aucune intention de s’amender. Les "Croyants" eux-mêmes n’avaient aucun scrupule de conserver leurs maîtresses, tout en acceptant la direction des "Parfaits". On a dit que leurs doctrines rigoristes n’étaient qu’un masque sous lequel se dissimulaient les pires excès. Quiconque voulait être sauvé, devant se soumettre à la loi de la chasteté rigoureuse, le mari quittait la femme, la femme le mari, les parents abandonnaient les enfants, fuyaient un foyer domestique qui ne leur inspirait que de l’horreur ; car l’hérésie leur enseignait "que personne ne saurait se sauver en restant avec son père et sa mère. Il est inutile d’insister longuement sur les conséquences antisociales de la négation de la famille. Elle ne tend à rien moins qu’à supprimer l’élément essentiel de toute société (la famille), en faisant de l’ensemble de l’humanité une vaste congrégation religieuse sans recrutement et sans lendemain... Les autres engagements que prenaient les hérétiques en entrant dans la secte, allaient à l’encontre des principes sociaux sur lesquels reposent les constitutions de tous les états. Ils promettaient, au jour de leur initiation, de ne prêter aucun serment et niaient les sanctions sociales. La pure doctrine cathare déniait absolument à la société le droit de punir. C’était l’un des liens les plus solides que les Manichéens détruisaient ainsi, et en le faisant, ils avaient l’apparence d'anarchistes. Récusant l'Eglise, la famille, la propriété et le serment d'homme à homme, les cathares nient les fondements de l'ordre social. "Observant des rites initiatiques, obéissant à une hiérarchie secrète, ils présentent toutes les apparences d'une secte. Une secte qui contrevient ouvertement à la morale commune de l'époque". (Jean Sévillia, Historiquement correct, Pour en finir avec le passé unique, Perrin, Saint-Amand-Montrond 2003, p. 50-54). Henry Charles Lea, dans son Histoire de l’Inquisition, quoique protestant et ennemi de la religion catholique, a vu que le nihilisme des Albigeois marquait un retour à la barbarie, tandis que la doctrine chrétienne représentait la civilisation et le progrès. La victoire des Albigeois, c’était le déchaînement du fanatisme le plus terrible puisqu’il faisait gloire à l’homme de se suicider et un devoir à la famille de se dissoudre ; en les combattant, l’Eglise catholique défendit, avec la vérité dont elle est dépositaire, la cause de la vie, du progrès, de la civilisation.

Dominique de Guzman, profondément touché du triste état auquel l'hérésie avait réduit les provinces du Midi, décida de discuter en public et résolut de travailler dans ce pays au triomphe de la foi en proposant d'organiser des débats publics, des disputationes. Diego et Dominique arrivèrent tous les deux dans la région de Montpellier au printemps 1206, où Dominique rencontra les légats cisterciens chargés de lutter contre l'hérésie. Devant leur découragement, l'évêque Diègue leur proposa de renvoyer équipages et bagages pour aller à pied prêcher humblement la foi catholique, priant, étudiant et discutant. Le prêche et la parole étaient les principales armes de cette bataille, mais il fallait y associer l'action et l'exemple. Sans escorte et sans argent, ils allaient à pied, mendiant leur pain de maison en maison.

 

Les dominicains, ordre des Prêcheurs ou des Frères prêcheurs qui se fondent alors, Dominique choisit de marcher pieds nus sur les chemins, sans argent, en bure, rivalisant d'austérité, pour aller discuter avec les représentants des "Bons Hommes", les "Purs" ou les "Parfaits" comme les Cathares se désignaient eux-mêmes, dans les salles de châteaux, sur les places publiques ou dans les églises.

 

Dominique et ses frères ont fait choix, pour leur communauté, de la règle de S. Augustin, qui donne comme but à la communauté d'"habiter ensemble dans l'unanimité, ne faisant qu'un coeur et qu'une âme en Dieu".

 

A Montréal en 1206, suite à la réunion où lors d’une ordalie ("jugement de Dieu"), le libellus rédigé par Dominique lui est arraché des mains par les hérétiques qui le plongent dans le feu trois fois et ressort intact : il y eut 150 conversions (une toile de Pedro Berruguete illustre cet épisode parfaitement attesté dans les chroniques); à Pamiers en 1207, le président du débat se convertit avec ses compagnons vaudois.

La Disputatio entre Saint Dominique et les Albigeois - Peinture de Pedro Berruguete

La Disputatio entre Saint Dominique et les Albigeois - Peinture de Pedro Berruguete

L'homme qui gouverne ses passions est maître de son monde. Il faut les commander ou en être esclave. Il vaut mieux être un marteau qu'une enclume.

Saint Dominique

Dominique avait, dès le début, donné à sa fondation ses buts précis : la vie évangélique et la prédication.

 

La réponse de Dominique à la crise des débuts du XIIIe siècle part d'abord d'une intuition simple, pour prêcher l'Évangile, il faut vivre selon l'Évangile. La communauté dominicaine sera donc au coeur des villes, les frères iront à l'Université et vivront de mendicité pour annoncer efficacement l'Évangile. Dominique veut aussi des frères pleinement insérés au coeur de l'Église puisque la crise médiévale est aussi une tentative de se passer de sa médiation pour accéder à l'Évangile.

 

 

Mais les cathares multiplient les attentats contre l’Eglise, ils pillent les églises et les monastères, persécutent les catholiques, massacrent les prêtres et les moines. Saint Dominique manque de se faire tuer : il voit les hommes embusqués, et chante le Veni Creator, hymne au Saint-Esprit. Les cathares sont sidérés. Plus tard, ils lui demandent :

"Qu’aurais-tu fait, si nous t’avions pris ? – Je vous aurais demandé de prolonger mon martyre en me coupant un à un tous les membres… – Pourquoi ? – Pour que je sois plus semblable à Jésus-Christ mourant sur la Croix afin de sauver vos âmes."

La nuit, on entend Dominique répéter "Seigneur, ayez pitié de votre peuple ! Seigneur, que vont devenir les pécheurs ?"

 

En 1207, ce chemin conduira Dominique jusqu’à la région de Fanjeaux, entre Carcassonne et Castelnaudary, où il s’établira dans l’œil du cyclone, arrachant à l’influence des prédicateurs pauvres et évangéliques les jeunes filles cathares de la noblesse locale qu’il installe à Prouille, en fondant ainsi une première communauté féminine de dames revenues dans l'Eglise, qui veulent mener une vie dévouée à la prière et à la pénitence dans la chasteté. Cette première communauté féminine deviendra en 1211 l'Abbaye Sainte-Marie de Prouille. Une communauté de frères se développe à côté du monastère: des fidèles s'offrent à leur tour pour la mission. C'est le moment où, au XIIIe siècle, l'Occident connaît un puissant mouvement spirituel, appelé évangélisme, qui prône une fidélité totale à l'Evangile, une pauvreté radicale et l'annonce par la parole et l'exemple de la Bonne Nouvelle.

 

Image illustrative de l'article Pierre de Castelnau En janvier 1208, la mission de Dominique est menacée à la suite de l'assassinat du légat du pape, Pierre de Castelnau, derrière lequel se dresse l'ombre menaçante de Raymond VI, comte de Toulouse, fief de l'hérésie. Les limites sont franchies. Le Languedoc est envahi par l'armée de Simon de Montfort: c'est la croisade des Albigeois, justifiée, non seulement par les doctrines subversives des Albigeois, et par les outrages de toutes sortes que depuis cent ans ils avaient accumulés contre les catholiques, mais aussi par ce meurtre qui frappait l’Eglise catholique tout entière dans la personne d’un légat du Saint-Siège. Les moines rentrent dans leurs abbayes, Arnaud regagne Cîteaux, maître Raoul est mort, et Diego est reparti en Espagne. Dominique reste seul dans la région. Il lui reste la communauté rassemblée dans le monastère de Prouille, aux environs de Fanjeaux. Il y resta jusqu'en 1214.

 

Chapelet Au printemps 1215, Dominique s'installe avec quelques frères à Toulouse.

Sentant son insuffisance pour évangéliser seul de si vastes contrées, narre le Bienheureux Alain de la Roche, c'est à cette époque que la Sainte Vierge lui apparut et lui enseigna définitivement, en lui ordonnant de la répandre, la dévotion du Rosaire (chapelets d'oraison) qui fut bientôt le plus terrible fléau de l'hérésie.

La récitation répétée de prières litaniques apparaît au IVe siècle; les ermites et les ascètes les matérialisent par de petits cailloux qu'ils portent dans un sac. En Occident, les petits cailloux sont bientôt remplacés par des graines séchées, passées dans un fil et réunies en couronne. Les laïcs récitent 150 Pater en analogie avec les 150 psaumes de la prière monastique. Vers 1050, les dévots ajoutent les premiers mots de la salutation angélique aux Pater, et récitent 150 Ave après les 150 Pater. L'ensemble des grains est appelé couronne de roses ou rosaire.

En 1213-1214, alors que S. Dominique prêchait en Espagne avec son frère Fra Bernardo, il fut enlevé par des pirates. La nuit de l'Annonciation de Marie (25 mars) une tempête détruisit le navire sur lequel ils étaient quand la Madone dit à Dominique que le seul salut à la mort pour l'équipage était de dire oui à sa Confrérie du Rosaire, donc les pirates avec les Dominicains à bord pour être les premiers membres. Depuis, le Rosaire est devenu la prière la plus populaire pour combattre les hérésies et, au fil des décennies, l'une des prières catholiques les plus traditionnelles.

On reconnait traditionnellement quinze mystères divisés en trois catégories : les mystères joyeux, les mystères douloureux, et les mystères glorieux. Chaque catégorie comprend cinq mystères, correspondant aux cinq dizaines du chapelet. Ceci permet de réciter une fois en entier le chapelet pour chaque catégorie de mystère, et trois fois le chapelet pour faire tous les mystères joyeux, douloureux et glorieux- soit un rosaire entier, composé de 15 dizaines, ou 150 prières (150 étant le nombre des psaumes).


Désormais, lui, le grand marcheur qui sillonnait les routes du Lauragais va devenir le globe-trotter de l’Europe. Il avait déjà fait deux fois le trajet de l’Espagne au Danemark en passant par Rome, mais cette fois-ci il se dirigera à deux reprises vers Rome, fin 1215 et fin 1216. Il en reviendra avec une bulle d’approbation du pape Honorius III, datée du 22 décembre 1216. Désormais son ordre devient universel et il décide d’abandonner Toulouse, ses pas le conduiront vers Paris, Madrid, Salamanque, Bologne...

 

Personne ne peut le retenir, le plus déçu dans l’affaire sera son protecteur l’évêque Foulques : "ce fut contre la volonté du comte de Montfort, de l’archevêque de Narbonne, de l’évêque de Toulouse, de l’évêque de Toulouse, et le mien propre", dit-il pour justifier cet arrachement, "je sais ce que je fais !"

 

Parmi les miracles quotidiens que Dieu opérait en sa faveur, on rapporte que, dans ses voyages, la pluie tombait souvent autour de lui sans l'atteindre; qu'un jour, son sac et ses livres, étant tombés dans une rivière, furent repêchés plusieurs jours après, sans qu'on y vît aucune trace d'eau.

 

Afficher l'image d'origine A l'occasion de l'ouverture le 11 novembre 1215 à Rome du IVe concile dans la basilique Saint-Jean-de-Latran en présence de quelques quatre cents évêques, Dominique fit le voyage de Rome pour obtenir l'approbation de l'Ordre des Frères-Prêcheurs. C'est là, alors qu'ils ne se connaissaient pas et ne se seraient pas rencontrés dans le tohu-bohu de ces quelques mille cinq cents personnes, qu'ils se reconnurent, s'embrassèrent comme deux frères et lièrent une amitié profonde qui dura jusqu'à la mort. S. Dominique rencontra François d'Assise, qu'il avait vu en songe. Dans cette vision, S. Dominique vit Jésus irrité contre le monde qui a perdu la foi et vit dans le péché. Pour l'apaiser la Vierge lui présente deux hommes dont la sainteté, lui dit-elle, est à même de racheter la mauvaise conduite des autres qui, par eux, retrouveront la voie de la vérité. Il se reconnaît dans l'un de ces hommes. Il se demande qui pourrait bien être l'autre qui a l'air d'un mendiant, vêtu d'une simple tunique de bure. Le lendemain, dans une église dont la tradition n'a pas conservé le nom, S. Dominique reconnaît, habillé comme il l'avait vu dans son extase, ce deuxième homme que la Vierge recommandait si chaleureusement au Christ. S. Dominique se serait précipité vers S. François et l'aurait serré dans ses bras en lui disant : "Vous êtes mon compagnon, vous marcherez avec moi, tenons-nous ensemble et nul ne pourra prévaloir contre nous."

 

Dominique opérait une multitude de miracles, ressuscitait les morts, et se disait: "le plus grand pécheur de l'univers".

 

La fondation de Prouille (1207) avait précédé de huit ans la création de la première communauté masculine à Toulouse (1215). A l'été 1217, Dominique envoie des frères à Paris pour étudier et établir un couvent placé sous le patronage de S. Jacques qui vaudra aux Dominicains français le surnom de Jacobins. D'autres partent pour l'Espagne ou pour l'Italie.

 

C'est lors du chapitre général de Bologne de 1220 que Dominique impose à ses frères prêcheurs le renoncement aux possessions et aux revenus, au profit d'un abandon à la providence divine. La même année 1220, des prêcheurs sont envoyés en Suède, en Angleterre, en Hongrie, au Danemark, en Pologne et peut-être aussi en Grèce.

 

Mais l'été 1221, Dominique, épuisé, tombe malade à Bologne et assure aux frères qu'il leur sera plus utile mort que vivant. Il meurt le 6 août 1221. Dès 1223, une enquête officielle sur sa sainteté et ses miracles recueille de nombreux témoignages à Bologne et dans la région toulousaine. Au terme du procès, Dominique est canonisé à Rieti le 3 juillet 1234. L'ordre s'étend sur l'Europe entière. Les provinces périphériques sont des bases d'action missionnaire pour les pays païens, musulmans, ou séparés de Rome. Dès le XIIIe siècle, des laïcs s'assemblent autour des couvents dominicains et franciscains.

 

En 1303, l'Ordre compte près de 10000 religieux. Il en compte 6000 aujourd'hui. Contemplation, étude et prédication sont les raisons de son succès. L'acharnement des dominicains à étudier pour comprendre, réfuter et témoigner explique aussi le succès des prêcheurs. C'est dans le public étudiant que les premiers frères ont cherché des vocations et ce fut en collaborant avec l'université de Paris qui naquit en leur temps, que les Dominicains ouvrirent de nouveaux chemins à l'intelligence de la foi. La scolastique s'offrait comme une méthode d'investigation du réel d'une extraordinaire fécondité.

 

Sa fête liturgique est fixée au 5 puis au 4 août. Elle est transférée au 8 août après Vatican II.

 

Postérité

 

La traduction en latin des auteurs grecs a eu lieu "non à la Renaissance mais aux siècles précédents par de pieux érudits monastiques. En effet, 'entre 1125 et 1200, une véritable vague de traduction vers le latin avait rendu accessibles les écrits grecs, une vague qui allait enfler encore au XIIIe siècle' (Grant, 1996, 23) - ce qui est largement attesté par les catalogues des bibliothèques monastiques survivantes, qui remontent jusqu'au XIIe siècle et révèlebt l'ampleur de leurs fonds en auteurs classiques. [...] L'essor de la science fut inséparable de la théologie chrétienne" (Rodney STARK, Faux Témoignages, Pour en finir avec les préjugés anticatholiques, Salvator, Paris 2019, p. 100-101.)

 

Au XIIIe siècle, on attendra de l'Ordre de S. Dominique une parole qui mène à Dieu mais qui fera droit à la raison comme l'enseignera S. Thomas d'Aquin (1225-1274) qui naîtra quatre ans après la disparition du fondateur (1221) et occupera une place particulière, à la fois comme un maître et un frère; l'Aquinate exercera son influence sur les universités de Paris, de Bologne et d'Oxford.

 

À partir de 1230, les œuvres d'Aristote, principales représentantes de la scolastique (philosophie développée et enseignée au "Moyen-Âge" dans les universités), sont traduites du grec en latin par le dominicain allemand Albert le Grand, véritable introducteur de la pensée du philosophe, et par Guillaume de Moerbeke, secrétaire de Thomas d'Aquin, et introduites dans les universités.

 

"La scolastique des XIIe et XIIIe siècles porte un esprit nouveau, celui des écoles avec leur intérêt pour la science, la philosophie. La tradition chrétienne est relue au prisme d'Aristote. La nature, le monde sont réinvestis, valorisés. Il existe une physique qui a ses lois propres, que l'on peut comprendre par la raison, sans avoir besoin de s'en référer à Dieu, et qui sert de base à un ordre politique naturel qui a lui aussi son autonomie, même s'il dépend en dernier ressort des normes divines." (Thomas TANASE, Histoire de la papauté d'Occident, Gallimard, Folio Inédit Histoire 2019, p. 189.)

 

"Ce sont les érudits de l'Église qui, bien avant la Renaissance (au XIVe siècle), ont réintroduit les études classiques, en admettant qu'elles aient jamais été perdues." (Rodney STARK, Faux Témoignages, Pour en finir avec les préjugés anticatholiques, Salvator, Paris 2019, p. 88-89.)

 

"Aristote, Platon, Euclide, Sophocle, Aristophane et  autres coryphées de l'enseignement et de la littérature classiques..., cet héritage avait été pleinement restauré bien avant la Renaissance, avec un développement clé : la traduction en latin des écrits de ces auteurs, étant donné que le grec n'était plus le langage intellectuel de la chrétienté... Ils ont été traduits non à la Renaissance, mais aux siècles précédents par de pieux érudits monastiques. En effet, entre 1125 et 1200, une véritable vague de traduction vers le latin avait rendu accessibles les écrits grecs, une vague qui allait enfler encore au XIIIe siècle, ce qui est largement attesté par les catalogues des bibliothèques monastiques survivantes, qui remontent jusqu'au XIIe siècle et révèlent l'ampleur de leur fonds en auteurs classiques." (Rodney STARK, Faux Témoignages, Pour en finir avec les préjugés anticatholiques, Salvator, Paris 2019, p. 99-100.) 

 

"Dans un autre domaine, celui des grands centres artistiques qui utilise les innovations du langage pictural au service de sa vision du monde,  (au XIVe siècle)... Rome est tout autant un centre des débuts de la Renaissance que Florence. (Thomas TANASE, Histoire de la papauté d'Occident, Gallimard, Folio Inédit Histoire 2019, p. 187-188.)

 

Dans l'histoire de l'ordre dominicain, on trouvera des artistes comme Jean de Fiesole (1387-1455), dit Fra Angelico (le Frère Angélique), qui, même devenu prieur de sa communauté, continue d'exercer son ministère par la peinture; des grands prédicateurs comme Vincent Ferrier (1350-1419); des visionnaires comme Bartolomé de Las Casas (1484-1566), défenseur et protecteur des Indiens; ou des mystiques comme Rose de Lima (1586-1617), Patronne du Pérou, de l'Amérique du Sud et des Philippines.

 

En 1790, un décret révolutionnaire supprime les Dominicains. Ils ne renaissent en France qu'en 1850 grâce à la volonté d'Henri Lacordaire (1802-1861).

 

Plus tard, Marie-Joseph Lagrange, qui fondera à Jérusalem, l'Ecole pratique d'études bibliques (Ecole Biblique), et dont la cause en béatification est en cours à Rome, sera le "saint Thomas de la question biblique".

 

Aujourd'hui, l'actuelle province de Toulouse est l'héritière des anciennes provinces médiévales de Provence et de Toulouse. Elle a en héritage trois lieux historiques et spirituels importants pour l'Ordre : Fanjeaux (lieu de prédication de Dominique, fondation des moniales); Toulouse (fondation de la première communauté); et la Sainte-Baume, sanctuaire de sainte Marie-Madeleine où l'Ordre est présent depuis sept siècles.

 

L'Ordre de S. Dominique qui se maintient en France dans ses deux provinces, est en expansion aux Etats-Unis, en Afrique et en Asie.



Sources:  (1);(2); (3); (4)(5) Jean CHELINI, Histoire religieuse de l'Occident médiéval, Pluriel, Millau 2012(6) Emile CHAVANT DE MALAN, Vie de S. François, Debécourt libraire-éditeur, 1841, p. 103. Cf aussi John MOORMAN'S, A History of the Franciscan Order, Franciscan Herald Press, 1988, p. 29, note 2, in Virgil TANASE, Saint François d'Assise, Gallimard Folio Biographies, Malesherbes 2015, p. 162-163; (7) 800e anniversaire : Qui sont les Dominicains ?, Revue La Nef, N° 274 – Octobre 2015; (8) Les Dominicains, 800 ans de prédication, in Histoire du Christianisme Magazine, bimestriel novembre - décembre 2015, n° 78, p. 30, 31; (9) F. FICARRA, Les Dominicains, éd. de Vecchi, Paris 2005; (10); (11) Le Petit Livre des Saints, Éditions du Chêne, tome 1, 2011, p. 48.

 

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6 août 2023 7 06 /08 /août /2023 00:00
Transfiguration

Jésus prend avec lui Pierre, Jacques et Jean, et les emmène, eux seuls, à l'écart sur une haute montagne. Et il fut transfiguré devant eux. Ses vêtements devinrent resplendissants, d'une blancheur telle que personne sur terre ne peut obtenir une blancheur pareille. Élie leur apparut avec Moïse, et ils s'entretenaient avec Jésus. Pierre alors prend la parole et dit à Jésus : "Rabbi, il est heureux que nous soyons ici ! Dressons donc trois tentes : une pour toi, une pour Moïse et une pour Élie." De fait, il ne savait que dire, tant était grande leur frayeur. Survint une nuée qui les couvrit de son ombre, et de la nuée une voix se fit entendre : "Celui-ci est mon Fils bien-aimé. Écoutez-le."

Soudain, regardant tout autour, ils ne virent plus que Jésus seul avec eux. En descendant de la montagne, Jésus leur défendit de raconter à personne ce qu'ils avaient vu, avant que le Fils de l'homme soit ressuscité d'entre les morts.

Et ils restèrent fermement attachés à cette consigne, tout en se demandant entre eux ce que voulait dire : "ressusciter d'entre les morts".

Evangile de Jésus-Christ selon saint Marc IX, 2-10

Notre-Seigneur Jésus-Christ, avant d'être livré par les Juifs aux autorités romaines, savait qu'ils allaient le livrer, qu'il serait mis à mort et qu'il ressusciterait le troisième jour. La fête de la Transfiguration de Jésus-Christ prouve qu'Il enseignait à ses disciples de ne rien dire avant que tout ne soit accompli. Le secret sur la nature divine du Christ ne devait être levé qu'après Sa Résurrection (voir aussi Mt, VIII, 4; Mt XVII, 9). 

Transfiguration, 1595, Louis Carrache (Ludovico Carracci), Bologne, Pinacothèque nationale, dans Rosa Giorgi, Le Petit Livre des Saints, Larousse, Tolède 2006, p. 464-465.

Transfiguration, 1595, Louis Carrache (Ludovico Carracci), Bologne, Pinacothèque nationale, dans Rosa Giorgi, Le Petit Livre des Saints, Larousse, Tolède 2006, p. 464-465.

"La Transfiguration est [...] interprétée [...] comme prémices de la Résurrection du Christ, mais aussi comme signe de notre propre gloire à venir. 

"Citons au passage une très belle homélie d'Anastase le Sinaïte, vers le milieu du VIIe siècle. Le Christ transfiguré pointe le doigt vers son propre visage et s'écrie : 'C'est ainsi que resplendiront les  justes lors de la Résurrection, c'est ainsi qu'ils seront glorifiés, c'est en ma condition qu'ils seront transfigurés, à cette forme, à cette image, à cette empreinte, à cette lumière et à cette béatitude qu'ils seront configurés et ils siégeront avec Moi le Fils de Dieu.'" (Traduction Michel Coune cité dans Joie de la Transfiguration, collection Spiritualité orientale, n° 39, Abbaye de Bellefontaine, 1985, p. 162.) (3)

Un peu avant, la célèbre mosaïque du VIe siècle de l'abside de la basilique Saint-Apollinaire in Classe, à Ravenne, nous représente dans une synthèse théologique extraordinaire le paradis reconquis par la Croix, comme une Transfiguration éternisée. (4) Saint Apollinaire au milieu des fidèles, comme le Christ au milieu de ses apôtres, célèbre la messe. Au cours de la liturgie, il a une vision de la Transfiguration du huitième jour qui ne finira jamais (il y a les six jours de la Création; le septième est celui de la faute et de la Rédemption; le huitième est celui de la vie éternelle). La Transfiguration du mont Thabor est ici évoquée par la présence de Moïse et d'Elie, et par les trois grandes brebis qui figurent Pierre, Jacques et Jean. Mais c'est une Transfiguration après la Croix. Dans l'immense cercle constellé, il y a 99 étoiles, évoquant les brebis restées avec leur pasteur. La brebis perdue, la centième, c'est toute l'humanité (et chacun de nous) ramenée dans le plérôme, au milieu des autres étoiles, en plein centre. C'est le Christ lui-même qui nous porte en Lui. Alors le Paradis nous sera rendu. (5)

Mosaïque de l'abside de la Basilique Saint-Apollinaire in Classe, Ravenne.

Mosaïque de l'abside de la Basilique Saint-Apollinaire in Classe, Ravenne.

Transfiguration, Fra Angelico v. 1395-1455

Transfiguration, Fra Angelico v. 1395-1455

La Transfiguration, église russe. Bordeaux

La Transfiguration, église russe. Bordeaux

Transfiguration du christ, Carl Heinrich Bloch

Transfiguration du christ, Carl Heinrich Bloch

Transfiguration, Raphaël 1483-1520

Transfiguration, Raphaël 1483-1520

Transfiguration du Christ, Jason Polintan

Transfiguration du Christ, Jason Polintan

Car la gloire n'est pas venue vers le corps du dehors, mais de l'intérieur, de la divinité supradivine, du Verbe de Dieu, unie au corps selon l'hypostase.

Saint Jean Damascène, in P.G. 96, col 548 C-549 A, cité dans J. MEYENDORFF (6)

Sources: (1); (2); Rosa GIORGI, Le Petit Livre des Saints, Larousse, Tolède 2006, p. 464-465; (3) Michel COUNE cité dans François BRUNE, Pour que l'homme devienne Dieu, Dangles, Collection Horizons spirituels, St Jean de Braye 1992, p. 311-312 ; (4) P. François BRUNE, Pour que l'homme devienne Dieu, ibid., p. 312; (5) P. François BRUNE, Pour que l'homme devienne Dieu, ibid., p. 316; (6) Jean MEYENDORFF, La théologie byzantine, Le Cerf 1969, p. 232.

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4 août 2023 5 04 /08 /août /2023 00:00
Saint Curé d'Ars, dans Le Petit Livre des Saints, Éditions du Chêne, tome 2, 2011, p. 119.

Saint Curé d'Ars, dans Le Petit Livre des Saints, Éditions du Chêne, tome 2, 2011, p. 119.

Qu'il est beau, qu'il est grand de connaître, d'aimer et de servir Dieu, nous n'avons que cela à faire en ce monde. Tout ce que nous faisons en dehors de cela est du temps perdu.

Saint Curé d'Ars Jean-Marie Vianney in A. Monnin, Esprit du Curé d'Ars, M.Vianney dans ses catéchismes, ses homélies et sa conversation, Paris, 1864, 7ème édition, 1873, p. 64-65.

On a dit de plus d'un personnage, de plus d'un Saint, qu'ils furent les prodiges de leur siècle. Ceci n'est peut-être vrai de personne autant que du curé d'Ars (Ain). Cet homme si humble vit, pendant une trentaine d'années, tout l'univers, pour ainsi dire, attentif à ses vertus et à sa gloire, et tout le monde chrétien à ses pieds; il est assurément l'une des merveilles de la sainteté et de l'apostolat.

Né à Dardilly, non loin de Lyon, trois ans avant la Révolution française, de simples cultivateurs profondément chrétiens, il fut d'abord berger et occupé aux travaux des champs. Dès ses premières années, il se distingua par sa candeur, sa piété, son amour pour la Sainte Vierge, et sa charité pour les pauvres. 

 

Il parvint au sacerdoce grâce à sa piété plus qu'à ses talents. Mais que d’obstacles à sa vocation sacerdotale ! Son père d’abord, qui avait trop besoin de bras pour la ferme familiale, la conscription dans les armées napoléoniennes, et jusqu’à l’examen final d’admission au sacerdoce : Jean-Marie Vianney ne parvenait pas à comprendre les questions, posées en latin. Mais la divine Marie veillait. Monsieur Courbon, premier grand vicaire du diocèse de Lyon à qui revenait la décision demanda simplement : « L’abbé Vianney est-il pieux ? A-t-il de la dévotion à la Sainte Vierge ? Sait-il dire son chapelet ?

– Oui, c’est un modèle de piété !

– Un modèle de piété ! Eh bien, je l’appelle ! La grâce de Dieu fera le reste ! »

L'âme a faim de Dieu, et rien d'autre que Dieu ne peut la rassasier. C'est pourquoi il est venu habiter sur terre et a pris un corps pour que ce corps devienne la nourriture de nos âmes.

Saint Jean-Marie Vianney

Saint Jean-Marie Vianney, Curé d'Ars († 1859)

 

Ainsi fut ordonné prêtre, en 1815, celui qui quelques années après, sera connu dans toute la France sous le nom de Curé d’Ars et qui fut l’apôtre ardent de l’Immaculée Conception dont il cachait jalousement les apparitions. Mais le saint Curé d’Ars voyait aussi Notre-Seigneur. Sous quels traits ? Il ne le révéla jamais, ni aucune des grâces extraordinaires dont il a bénéficié.



Après quelques années de vicariat, il fut appelé à la cure d'Ars, et, en apercevant le clocher de sa paroisse, il se mit à genoux pour prier Dieu et lui recommander son ministère. Son premier soin fut de visiter ses paroissiens; il les eut vite conquis par sa vertu, et l'on vit succéder aux abus de toutes sortes et à l'indifférence, grâce à son zèle, un esprit profondément chrétien, une parfaite observance du dimanche: la paroisse, sous l'impulsion d'un Saint, était devenue une communauté religieuse. 
 

Bientôt, des pays voisins, on accourut pour l'entendre, pour se confesser à lui et obtenir des miracles, qu'il attribuait à sainte Philomène, dont le culte tout nouveau croissait chaque jour en popularité; aussi l'appelait-il sa "chère petite Sainte".

Dix ans plus tard, la réputation du saint curé s'était étendue au-delà de la France, et l'on ne tarda pas à venir de plus loin; la paroisse d'Ars, jadis inconnue et solitaire, était devenue un centre d'attraction universelle; aux personnes pieuses se joignaient des impies, des incrédules, des débauchés; les conversions se multipliaient par milliers. Il passait régulièrement jusqu'à seize et dix-huit heures par jour au confessionnal, et le reste du temps en prédications, catéchisme et prières.

La nuit le démon lançait des assauts contre lui. Quand son lit prit feu, une nuit : "Le démon n'a pas pu brûler l'oiseau, il n'a brûlé que la cage" dit-il.

Un jour une personne corpulente lui dit : "Quand vous irez au Ciel, je tâcherai de m'accrocher à votre soutane", et le Curé d'Ars, qui n'avait que la peau sur les os à force de toujours tout donner et de refuser la nourriture un peu reconstituante que ses paroissiennes essayaient de lui prodiguer, de répondre :
"Gardez-vous-en bien ! L'entrée du Ciel est étroite, et nous resterions tous deux à la porte".

Il reçut la visite de
Lacordaire : "La plus célèbre visite qu'ait reçue le curé d'Ars est sans doute celle du père Lacordaire. Venant à Lyon en simple pèlerin, l'illustre dominicain arrive incognito dans une modeste voiture. Or, sous les plis de son manteau noir, quelqu'un aperçoit une robe blanche, et très vite les pèlerins d'Ars apprennent qui est le visiteur. Remous profond. Le lendemain, on voit le père Lacordaire écouter dans un humble recueillement le sermon du curé(...) Il ne le quitte qu'avec déchirement et va même, s'agenouillant devant lui, jusqu'à lui demander sa bénédiction. Après quoi, J.M.Vianney le prie de le bénir à son tour : et c'est bien une scène étrange et pathétique, éclairée d'un jour du Moyen-Âge, digne de saint François d'Assise et de saint Dominique". (Michel de Saint-Pierre, La vie prodigieuse du curé d'Ars).

 

On rapporte plusieurs faits extraordinaires. Par exemple son intuition des faits psychologiques ou des pensées d'autrui, ses moments de lévitation etc.

Citations

Si quelque chose de peu charitable est dit en votre présence, prenez la parole en faveur de l'absent, ou retirez-vous, ou si possible, arrêtez la conversation.

S. Jean-Marie Vianney

Saint Jean-Marie Vianney, Curé d'Ars († 1859)

Le Bon Dieu pardonnera plus vite le pécheur repenti qu'une mère retirera du feu son enfant.

S. Jean-Marie Vianney

"Le  sacerdoce,  c’est  l’amour  du  cœur  de  Jésus."

 

"Nous pouvons devenir des saints : si ce n'est pas par l'innocence, ce sera par la pénitence."

 

"Laissez une paroisse vingt ans sans prêtre : on y adorera les bêtes."

 

"Le bon Dieu ne pardonnera qu'à ceux qui auront pardonné : c'est la loi."

En 1929, il a été déclaré "patron de tous les curés de l'univers" par Pie XI.

Le 8 décembre 2008, Benoît XVI ouvrit une
année jubilaire 2009 pour le 150e anniversaire de saint Jean-Marie Vianney", "année sacerdotale", "pour favoriser cette tension des prêtres vers la perfection spirituelle dont dépend surtout l'efficacité de leur ministère.
Avec ce thème : "Fidélité du Christ, fidélité du prêtre". Durant toute l'Année sacerdotale, les reliques du saint-curé furent exposées dans la Basilique vaticane, amenées par Mgr. Guy Bagnard, Evêque Belley-Ars.

 

Corps incorrompu de saint Jean-Marie Vianney dans la basilique d'Ars. Diocèse de Belley. Son corps, exhumé au début du XXe siècle, est resté intact : il n'a pas subi la putréfaction.

Sources: (1) ; (2) ; (3) Le Petit Livre des Saints, Éditions du Chêne, tome 2, 2011, p. 118.

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3 août 2023 4 03 /08 /août /2023 00:00
Sainte Lydie de la Pourpre (Ier s.)

 Lydie de Thyatire (ville de Mysie, actuelle Turquie) ou Lydie de la Pourpre (Ier s.)

 

D'après Saint Luc, elle serait la première Européenne à s'être convertie au Christ.

Saint Paul l'aurait rencontrée alors qu'il arrivait en Macédoine orientale. Elle était une non-juive et venait de la Grèce d'Asie (Lydie, d'où son nom) et s'était installée à Philippes, port de la mer Egée pour son commerce de tissu et de pourpre. Philippes était une ville qui avait été fondée en 356 av. J.-C. par Philippe II de Macédoine, le père d'Alexandre le Grand. C'est là qu'elle rencontra saint Paul et saint Luc (Actes des Apôtres 16. 11). 

 

Elle crut ce que Paul lui disait du Christ et lui offrit l'hospitalité : 

"Si vous voulez bien me considérer comme une servante de Dieu, descendez chez moi." On ne sait ce qu'elle devint.

 

Paul écrira plus tard :

«Vous le savez vous-mêmes, Philippiens : dans les débuts de l’Évangile, quand je quittai la Macédoine, aucune Église ne m’assista par mode de contributions pécuniaires; vous fûtes les seuls, vous qui, dès mon séjour à Thessalonique, m’avez envoyé, et par deux fois, ce dont j’avais besoin.» (Philippiens. 4, 15-16).

 

Elle dut mourir vers 50-55, puisque Paul écrivant aux chrétiens de Philippes ne la mentionne pas dans sa lettre.

Sainte Lydie de la Pourpre (Ier s.)

Sources : 1, 2, 3, 4

 

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1 août 2023 2 01 /08 /août /2023 00:00
Saint Alphonse-Marie de Liguori

Évêque, fondateur de la “Congregatio Sanctissimi Redemptoris”

 

Docteur de l'Église

 

Alfonso Maria de Liguori naît à Marianella, près de Naples, le 27 septembre 1696, dans une famille noble.

 

Après de fort brillantes études, docteur en droit civil et canonique à seize ans, il embrassa la carrière d'avocat. Pendant les dix années qu'il remplit cette charge, il fut le modèle du parfait chrétien.

 

Dévoué aux plus humbles, il est visiteur des malades dans les hôpitaux. Il entre dans la congrégation de la Misericordia, une oeuvre de laïcs chargée de pourvoir aux besoins des clercs emprisonnés dans la ville.

 

Il commençait à se relâcher, quand il échoua dans un plaidoyer superbe où il avait déployé tous ses talents ; "Ô monde ! s'écria-t-il, désormais je te connais; tu ne m'auras plus."

 

Peu après, le 28 août 1723, il visite les malades de l'hospice des incurables de Naples quand soudain une lumière mystérieuse l'entoure et il entend une voix lui disant : "Abandonne le monde et livre-toi à moi tout entier !" Aussitôt il répondit, fondant en larmes : "Ô Dieu ! Me voici, faites de moi ce qu'il Vous plaira." Aussitôt, Alphonse va déposer à l'église de la Sainte Vierge son épée de gentilhomme, prend bientôt l'habit ecclésiastique, fait ses études de théologie, et au bout de trois ans reçoit le sacerdoce. Désormais le voilà embrasé du zèle des âmes ; il se mêle au peuple des campagnes et s'éprend d'un amour spécial pour lui.

Saint Alphonse-Marie de Liguori

C'est alors que l'idée lui vint de fonder, pour exercer l'apostolat parmi cette classe si intéressante de la société, la "Congrégation des Rédemptoristes". Traité d'insensé par son père, ses proches et ses amis, persécuté et abandonné bientôt par plusieurs de ses premiers collaborateurs, délaissé et méprisé par son directeur lui-même, Alphonse endura toutes les souffrances morales qui peuvent tomber sur un homme : rien ne put l'abattre ni le décourager.

Assurément, parmi toutes les dévotions, celle d’adorer Jésus sacrement est la première après les sacrements, la plus chère à Dieu, et celle qui nous est la plus utile.

Dès sa jeunesse, Alphonse est thaumaturge; ses guérisons sont nombreuses : un enfant muet se met à parler, un autre en train d'agoniser se rétablit après que le futur saint eut tracé sur le signe de croix; le 27 juillet 1729, Michele Monichino Brancia retrouve l'usage de la vue à Nole.

Le 3 octobre 1731, soeur Marie-Céleste (+1755) voit le Christ accompagné de saint François d'Assise et d'un prêtre inconnu qu'elle identifiera plus tard comme étant Alphonse. Elle entend : "C'est lui [le prêtre] que j'ai voulu pour être la tête de mon Institut." Cette religieuse, [...] attesta observer à plusieurs reprises la silhouette de Jésus dans une hostie consacrée. Le 22 mars 1732, à Foggia, la Vierge lui apparaît ainsi qu'Alphonse.

 

Selon de tels témoignages, la fondation de l'ordre des Rédemptoristes (congrégation du Très-Saint Rédempteur) aurait donc eu une origine surnaturelle, comme nombre de congrégations ou de lieux de culte. [4]

 

Il eut plusieurs visions de la très Sainte Vierge ; une fois, pendant un sermon sur les gloires de Marie, il fut ravi, et environné d'une éblouissante lumière.

 

Un jour, son pauvre accoutrement le fit prendre pour le cocher des autres missionnaires, et, à son premier sermon, son éloquence fit dire au peuple : "Si le cocher prêche si bien, que sera-t-il des autres !" Aux travaux apostoliques, Alphonse joignait les travaux intellectuels, et il composa un grand nombre d'ouvrages de piété et de morale qui l'ont fait élever au rang des docteurs.

Pour bien prier, il faut d'abord prier avec humilité. Dieu résiste aux orgueilleux et fait grâce aux humbles. Dieu rejette les demandes des orgueilleux, mais ne permet pas que les humbles s'en aillent sans avoir entendu toutes leurs prières.

Saint Alphonse

Sacré évêque, Alphonse égala par ses vertus les plus saints pontifes.

 

Mais au cours des trois dernières années de sa vie, il traversa une "nuit de l'esprit" sans pareil. Il se sentit envahi de multiples tentations et se sentit rejeté par Dieu. 

 

Il eut le temps d'écrire 111 ouvrages dont les fameuses Gloires de Marie. Les miracles ont jalonné son existence; mais il note dans l'Art d'aimer Jésus-Christ qu'ils deviennent dangereux à partir de l'instant où on les désire, rejoignant en cela toute la tradition de l'Église catholique et, en particulier, les conseils de saint Benoît et de tous ses fils spirituels à travers les siècles : "... De tels désirs doivent être repoussés, parce qu'ils sont contraires à l'humilité."

 

Alphonse passa de la terre au ciel, à l'âge de quatre-vingt-onze ans, le Ier août 1787, à Pagani, en Campanie.

 

Il a été déclaré saint en 1839 par Grégoire XVI puis Docteur de l'Église en 1871 par Pie IX. [5]

 

Congrégation du Très Saint Rédempteur. Devise : Copiosa apud Eum redemptio.

 

Saint Alphonse-Marie de Liguori

C'est donc uniquement dans l'Église catholique qu'on trouve le véritable amour envers Dieu et envers le prochain, le véritable zèle à propager la foi, et la véritable sollicitude des pasteurs à la conserver.

Œuvres complètes de S. Alphonse de Liguori, Tome II, éd. H. Casterman (1867), Vérité de la Foi, Partie III, Chapitre I, § 1, p. 14

Sources: (1) ; (2) ; (3) ; Le Petit Livre des Saints, Éditions du Chêne, tome 1, 2011, p. 12-13; (4) Patrick SBALCHIERO, Enquête sur les miracles dans l'Église catholique, Artège, Paris 2019, p. 267-268 ; (5) Frédérick M. JONES, Alphonse de Liguori, 1696-1787, fondateur des Rédemptoristes, Gill and Macmillan Ltd 2012.

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31 juillet 2023 1 31 /07 /juillet /2023 00:00
Le Petit Livre des Saints, Éditions du Chêne, tome 1, 2011, p. 85.

Le Petit Livre des Saints, Éditions du Chêne, tome 1, 2011, p. 85.

Un militaire

 Saint Ignace naquit en 1491 au château de Loyola, en Espagne. Il était le dernier de douze enfants, et il donna dès son bas âge des marques d'une grande vivacité d'esprit. Sa jeunesse fut celle d'un homme nourri des maximes du monde. Il fut d'abord page du roi Ferdinand V; puis il embrassa la carrière des armes. Il ne le céda en courage à personne, mais négligea complètement de vivre en chrétien, dirigé uniquement par l'orgueil et l'amour des plaisirs. De ce chevalier mondain, Dieu allait faire l'un des premiers chevaliers chrétiens de tous les âges. 



Au siège de Pampelune, un boulet de canon brisa la jambe droite du jeune officier, qui en peu de jours fut réduit à l'extrémité et reçut les derniers sacrements. Il s'endormit ensuite et crut voir en songe saint Pierre, qui lui rendait la santé en touchant sa blessure. A son réveil, il se trouva hors de danger, quoique perclus de sa jambe.



Pour se distraire, il demanda des livres; on lui apporta la Vie du Christ de Ludolphe le Chartreux (ou "de Saxe") et La Vie des Saints, La Légende dorée de Jacques de Voragine. Il les lut d'abord sans attention, puis avec une émotion profonde. Il se livra en lui un violent combat; mais enfin la grâce l'emporta, et comme des hommes de cette valeur ne font rien à demi, il devint, dans sa résolution, un grand Saint dès ce même jour. Il commença à traiter son corps avec la plus grande rigueur; il se levait toutes les nuits pour pleurer ses péchés. Une nuit, il se consacra à Jésus-Christ par l'entremise de la Sainte Vierge, refuge des pécheurs, et Lui jura une fidélité inviolable. Une autre nuit, Marie lui apparut environnée de lumière, tenant en Ses bras l'Enfant Jésus.

Saint Ignace de Loyola, fondateur de la Compagnie de Jésus

Rédacteur des "Exercices Spirituels"

Peu après, Ignace fit une confession générale et se retira à Manrèze dans une grotte écarlate, pour s'y livrer à des austérités qui n'ont guère d'exemple que dans la vie des plus célèbres anachorètes: vivant d'aumônes, jeûnant au pain et à l'eau, portant le cilice, il demeurait tous les jours six ou sept heures à genoux en oraison.

 

Le démon fit en vain des efforts étonnants pour le décourager. C'est dans cette solitude qu'il composa ses Exercices spirituels, l'un des livres les plus sublimes qui aient été écrits par la main des hommes. "Exercices, dit le sous-titre, pour amener l'homme à se vaincre, à se dégager de toute affection désordonnée, à se faire une vie chrétienne". Un tel programme est exactement celui que tout baptisé doit se proposer, et il est bien vrai que n'importe qui, pourvu qu'il soit croyant, trouve dans les Exercices de quoi alimenter sa vie religieuse, l'aider à se mieux connaître et à régir son âme. Saint François de Sales, dans son Traité de l'amour de Dieu (1616), conseillera aux évêques, aux prêtres et religieux de les utiliser.

"Ignace se place, dans le prolongement du Connais toi toi-même de l'Imitation de Jésus-Christ." (Pierre Chaunu, Église, Culture et Société, Essais sur Réforme et Contre-Réforme 1517-1620, S.E.D.E.S, Paris 1981, p. 390.)

Saint Ignace de Loyola, fondateur de la Compagnie de Jésus

Fondateur de la Compagnie de Jésus (Jésuites)

Passons sous silence son pèlerinage en Terre Sainte et différents faits merveilleux de sa vie, pour rappeler celui qui en est de beaucoup le plus important, la fondation de la Compagnie de Jésus (1534), que l'on pourrait appeler la chevalerie du Christ et le boulevard de la chrétienté. Cette fondation est assurément l'une des plus grandes gloires de l'Église catholique; sciences profanes et sciences sacrées, enseignement, apostolat, rien ne devait être étranger à la Compagnie d'Ignace. Les vertus du fondateur égalaient ses grandes oeuvres; elles avaient toutes pour inspiratrice cette devise digne de lui: Ad majorem Dei gloriam! "A la plus grande gloire de Dieu!".
Il s'associa neuf compagnons, qui firent avec lui le voeu de renoncer à tout pour travailler au salut des âmes. Aucune bonne oeuvre n'étrangère à cet institut. Ses membres s'occupent aux missions, à la visite des malades et des prisonniers. Ils ont pour but principal d'instruire la jeunesse dans les sciences et dans la piété, et d'aller prêcher en quelque lieu qu'il plaira au pape de les envoyer.

 

D'une grande indulgence envers les hérétiques

"Ignace de Loyola écrit dès les années 1530, ..., dans l'avis préalable de ses Exercices Spirituels, que le chrétien doit être plutôt disposé à sauver une proposition de son prochain qu'à la condamner. Vingt ans plus tard il donne aux religieux de sa Compagnie de Jésus cette directive : 'En classe comme en chaire [...], ils ne démontreront la fausseté des principes de nos adversaires que la le simple exposé de notre croyance. Que jamais, une parole d'injure ne soit sur leurs lèvres, et qu'ils ne témoignent aucune indignation envers les hérétiques.'" [6]

 

"Cet homme que si souvent, on représentera dur, rigide, impitoyable, lorsqu'il veut résumer en trois lignes toute sa doctrine - comme c'est le cas dans une lettre aux scolastiques de Coïmbre -, il ne parle ni de discipline, ni de crainte sacrée de Dieu, mais il dit simplement : "Par-dessus tout, je voudrais exciter en vous le pur amour de Jésus-Christ, le désir de son honneur et celui du salut des âmes qui furent rachetées par lui." [7] 

 

Le saint fondateur mourut en 1556.

 

PRATIQUE. Faites toutes vos actions pour la plus grande gloire de Dieu.

 

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Saint Ignace de Loyola, fondateur de la Compagnie de Jésus

Extrait des Exercices spirituels : Les Deux Etendards 
 

Quatrième jour : LES DEUX ETENDARDS

Méditation de deux étendards : l'un de Jésus-Christ, notre chef souverain et notre Seigneur ; l'autre de Lucifer, ennemi mortel de la nature humaine.

136 ‹ L'oraison préparatoire est toujours la même.

137 ‹ Le premier prélude consiste à se rappeler le fait historique de la méditation. Ici c'est, d'un côté, Jésus-Christ qui appelle tous les hommes et veut les réunir sous son étendard ; de l'autre, c'est Lucifer qui les appelle sous le sien.

138 ‹ Le second prélude est la composition de lieu. Ici, on se représentera une vaste plaine près de Jérusalem, au milieu de laquelle se trouve Notre Seigneur Jésus-Christ, chef souverain de tous les hommes vertueux, et une autre plaine près de Babylone, où est Lucifer, le chef des ennemis.

139 ‹ Le troisième prélude consiste à demander ce que je veux obtenir. Dans cet exercice ce sera, premièrement, la connaissance des ruses du chef des méchants et le secours dont j'ai besoin pour m'en défendre ; secondement, la connaissance de la véritable vie, qui nous est montrée par le chef souverain et légitime, et la grâce nécessaire pour l'imiter.

Première partie :

140 ‹ Dans le premier point, je me représenterai le chef du parti ennemi dans cette vaste campagne de Babylone, assis dans une chaire élevée, toute de feu et de fumée, sous des traits horribles et d'un aspect épouvantable.

141 ‹ Dans le second point, je considérerai comment il appelle autour de lui des démons innombrables ; comme il les répand, les uns dans une ville, les autres dans une autre, et ainsi dans tout l'univers, n'oubliant aucune province, aucune condition, aucun lieu, aucune personne en particulier.

142 ‹ Dans le troisième point, j'écouterai le discours qu'il leur adresse, comme il leur ordonne avec menaces de jeter des filets et des chaînes. Ils doivent tenter les hommes, en leur inspirant d'abord le désir des richesses, comme il fait le plus souvent lui-même, afin de les conduire plus facilement à l'amour du vain honneur du monde, et de là à un orgueil sans bornes.. Suite

 

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Expansion de la Compagnie de Jésus et conceptions

 

La Compagnie de Jésus témoigna en Europe et plus encore en Asie ou en Amérique d'un respect pour les peuples et leurs cultures qui n'avait d'égal nulle part ailleurs.

 

En 1541, saint François-Xavier s'embarquait pour les Indes.

 

En 1548, les jésuites débarquait au Maroc.

 

En 1549, ils s'installaient au Brésil.

 

En 1555, Jules III désignait plusieurs pères pour aller créer une hiérarchie catholique en Ethiopie. Ignace de Loyola leur conseillait de se faire éthiopiens avec les Ethiopiens.

 

Au Japon

 

En 1563, quinze ans après le départ de François-Xavier, la communauté catholique japonaise comptait 150 000 membres.

 

En Chine

 

Quand les jésuites pénètrent pour la première fois en Chine à la fin du XVIème siècle ils découvrent une civilisation en pointe dans l'observation du ciel et la conception de calendriers. 

 

Après une premier voyage de François-Xavier en Chine au milieu du XVIe siècle, en 1582, les pères Ruggieri et Ricci arrivaient en Chine à Macao. Ils gagnent Nankin puis Pékin, possèdent une vaste culture encyclopédique; ils sont à l'avant-garde de leur époque pour les connaissances mathématiques, astronomiques et cosmologiques. Ils parlent et écrivent le chinois. Ils se sont rendus compte de la valeur humaine du confucianisme, religion de l'empereur et de l'élite du pays. Ils s'efforcent d'intégrer au christianisme un certain nombre de concepts confucéens de telle sorte que la révélation chrétienne puisse devenir une réalité intellectuelle pour cette élite.

Étudier les étoiles nous rapproche un peu plus de Dieu.

Matteo Ricci

Portrait de Matteo Ricci par le frère chinois Emmanuel Pereira

Portrait de Matteo Ricci par le frère chinois Emmanuel Pereira

Demeuré seul Ricci s'avance très loin dans cette voie, particulièrement dans le domaine de la liturgie qui est par excellence celui des symboles. Ayant adopté un nom chinois, il s'habille à la manière des mandarins dont il respecte strictement les usages.

Lui et un de ses compagnons jésuites, Michele Ruggieri, s'habillent d'abord en moines bouddhistes, puisqu'ils sont religieux, mais adoptent plus tard le vêtement des lettrés, ayant appris que les bonzes étaient généralement incultes et mal considéré. (Philippe Oswald, Ce jésuite qui ouvrit les portes de la Chine, Famille chrétienne no 1686, 8-14 mai 2010) 

 

Pour les Chinois d'autrefois, le temps avait une signification particulière. Ils voulaient faire chaque chose au moment approprié. Ils pensaient que ce moment approprié était déterminé par le rythme de la nature. Pendant la dynastie Ming, pour asseoir, la légitimité impériale, l'empereur était proclamé "fils du ciel". Il représentait le peuple devant le ciel et le ciel devant le peuple. Il était donc l'intermédiaire entre le peuple et le ciel. Le pouvoir suprême de l'empereur provenait naturellement du pouvoir de la guerre, de la conquête d'un territoire ou d'un pays, mais une fois cela accompli, s'il voulait devenir un souverain légitime, il devait être investi du "mandat du ciel".

 

Matteo Ricci et son ami mandarin, Xu Guangqi

 

Le calcul du temps et du calendrier était la prérogative de l'empereur. Le soleil symbolisant l'empereur, la prévision des éclipses de soleil était essentielle. 

 

Matteo Ricci fut formé à Rome au Collège romain et eut comme professeur le mathématicien et astronome, le jésuite allemand Christophe Clavius, surnommé l'"Euclide du XVIe siècle", qui fut à l'origine du calendrier grégorien, nouveau calendrier qui corrigeait l'erreur du calendrier Julien (1582).

  

Au cours de son périple, Matteo Ricci découvre par hasard l'ancien observatoire de Nankin, avec ses étonnants instruments astronomiques. Dans son journal, il note : "J'ai découvert quelque chose qui dépassait tout ce que je pouvais imaginer." Les instruments chinois utilisaient un système de coordonnées équatoriales, alors qu'en Europe, depuis la Grèce antique jusqu'au XVIe siècle, les astronomes ont toujours utilisé le système de coordonnées écliptiques. "Observer le ciel au moyen de l'écliptique, c'est se référer à la trajectoire du soleil, mais les calculs sont moins précis alors qu'il est plus simple de se référer à l'Equateur pour déterminer la position des corps célestes. Je ne pouvais pas imaginer que la Chine avait un système astronomique si complet", écrit Matteo Ricci dans son journal.

 

Système de coordonnées écliptiques

Après 20 ans d'activité missionnaire, Matteo Ricci arrivait enfin aux portes de la capitale Pékin, aux portes de la Cité interdite (1601). Il se rendit compte que les Chinois étaient intéressés par tout ce qui concerne les sciences mathématiques et en particulier l'astronomie, qui était une activité officielle organisée par l'État. Les astronomes étaient des fonctionnaires qui faisaient partie intégrante de la bureaucratie. Il comprit vite que l'art de mesurer le temps et de prévoir les phénomènes célestes, notamment les éclipses lunaires et solaires, était aux sources de l'autorité impériale. Lorsqu'il y avait des erreurs de prévision dans le calcul d'une éclipse de soleil ou de lune, cela indiquait qu'il y avait un problème de gouvernement du pays. L'empereur devait faire son examen de conscience et revoir sa politique. 

Certains ne comprennent pas pourquoi nos missionnaires doivent parler de science et de mathématiques avec les Chinois, mais si nous voulons que les Chinois s'intéressent à nos enseignements religieux, le meilleur moyen est de leur donner de la science avec de la religion. Cela retient mieux leur attention que tout le reste, et ils voient que notre science est construite sur des preuves solides. C'est ce qui leur fait penser que notre religion doit être aussi bien fondée.

Matteo Ricci, cité dans le documentaire "Chine, l'empire du temps (1/2) Les jésuites à la conquête de la Cité interdite"

 

Quand Ricci est arrivé en Chine, depuis des années les calendriers officiels traversaient une crise et il y avait eu plusieurs tentatives de réforme infructueuses. Ricci, qui n'était pas lui-même un spécialiste, a donc adressé une lettre à Rome pour demander que soient envoyés en Chine des jésuites qui soient formés en astronomie : "Je répète avec insistance une requête que j'ai déjà formulée et qui est restée sans réponse. Il serait très bénéfique d'avoir à la cour de Pékin un père ou un frère qui soit astronome. Je connais suffisamment l'astronomie, l'horlogerie, et les astrolabes, et j'ai les ouvrages nécessaires. Mais les Chinois attachent moins d'importance à ces sciences qu'au mouvement des planètes, au calcul des éclipses, et en fait, au calendrier. J'espère que vous traiterez de cette question qui est de la plus haute importance pour la Chine avec le père général." (Lettre au Pape Paul V, 1607)

 

Mappemonde de Matteo Ricci

Ricci dessina des mappemondes qui firent connaître aux Chinois le reste du monde, traduisit en chinois des livres de philosophie, de mathématiques et d'astronomie. Sa rencontre avec les proches de l'empereur fut à l'origine de l'essor de l'horlogerie moderne en Chine. 

 

Le lettré mathématicien et astronome Xu Guangqi dont Ricci devint grand ami, se convertit au christianisme et fut baptisé en 1603 sous le nom de Paul. Il traduira en chinois de nombreux ouvrages scientifiques occidentaux, principalement en astronomie et mathématiques (notamment les Éléments d'Euclide). 

 

Les ouvrages de Ricci aidèrent à faire progresser la cartographie chinoise, participant à la popularisation de la représentation de la Terre comme étant une sphère. [Timothy Brook (trad. Odile Demange), Sous l’œil des dragons : La Chine des dynasties Yuan et Ming, Paris, Payot, 2012, p. 233-237]

La chaine Arte diffuse ces jours-ci un documentaire sur les Jésuites en Chine, intitulé "Chine : L'empire du temps". S'appuyant sur des reconstitutions historiques soignées, cet éclairant documentaire-fiction bénéficie d'un accès sans précédent à de nombreux laboratoires et installations astronomiques chinois comme le FAST, le plus grand radiotélescope du monde, mis en service en 2016. 

 

Ce documentaire est visible en rediffusion sur le site d'Arte du 28 juillet 2018 au 05 août.

 

Bande-annonce: 

Chine, l'empire du temps (1/2) Les jésuites à la conquête de la Cité interdite :

En 1610, année de la mort de Matteo Ricci, le Bureau astronomique impérial à Pékin échoue à prévoir convenablement une éclipse de très forte magnitude. Être capable de prévoir une éclipse était le test suprême d'un système astronomique en Chine, et le plus difficile était de prédire une éclipse de soleil. Après cet échec, il devint vital pour l'empereur de lancer une nouvelle réforme du calendrier

 

Les connaissances scientifiques et techniques en astronomie et en horlogerie de Matteo Ricci lui valurent les faveurs de l'empereur et une influence si grande à la cour que lorsqu'il mourut en 1610 à Pékin, on lui fit des funérailles nationales. Il fut inhumé avec une permission spéciale de l'empereur, à proximité de la Cité interdite (palais impérial à Pékin des dynasties Ming et Qing). 

 

Son travail et ses activités ont toujours eu une perspective d'évangélisation en profondeur, même s'il n'a pas cherché à baptiser en masse. On estime à 2 500 le nombre de chrétiens chinois à sa mort. Et 9 des 18 jésuites œuvrant en Chine étaient chinois.

 

Ricci est considéré comme le fondateur de l'Église chinoise. Aujourd'hui, au "Millennium Center" de Pékin, le bas-relief consacré à l'histoire de la Chine ne comporte que deux étrangers, tous deux italiens : Marco Polo à la cour de Kubilaï Khan et Matteo Ricci scrutant le ciel et habillé comme un mandarin confucéen.

 

Dans la religion populaire chinoise, Matteo Ricci est vénéré comme maître des horloges et protecteur des horlogers. Sa cause en béatification est maintenant étudiée à Rome par la Congrégation pour la Cause des Saints.

 

Les successeurs jésuites de Ricci en Chine eurent la même ligne de conduite. En 1626, le jésuite allemand Johann Adam Schall von Bell écrivit le premier traité chinois sur le télescope, le Yuanjingshuo.

 

Les idées de Johannes Kepler et de Galilée pénétrèrent lentement en Chine grâce au jésuite polonais Michał Piotr Boym (1612–1659) en 1627 et au traité d'Adam Schall von Bell en 1640. Les travaux de Boym incluront une traduction du texte se trouvant sur la stèle nestorienne découverte dans Sian (Xi'an) en 1625, qui témoigne de la présence du christianisme nestorien dans la Chine du VIIIe siècle. Cette traduction est publiée dans le China illustrata d'Athanasius Kircher.

 

La "méthode Ricci" se caractérisait par quatre principes directeurs : une politique d'ajustement ou d'adaptation à la culture chinoise; la propagation de la Foi et l'évangélisation par "le haut" : les jésuites s'adressent à l'élite instruite; la propagation indirecte de la Foi : l'exposé des sciences et techniques européennes doit attirer l'attention des chinois instruits et les persuader du degré d'avancement de la civilisation européenne; l'ouverture aux valeurs chinoises et la tolérance à leur égard : Ricci considère qu'il côtoie une société aux hautes valeurs morales, pour laquelle il éprouve une profonde admiration. Suivant la tradition humaniste, il estime que Confucius (552-479 av J.-C.) est tout à fait comparable à "un autre Sénèque". Il plaide pour un retour au confucianisme initial qu'il considère comme une philosophie fondée sur la loi naturelle et qui contient l'idée de Dieu. Enfin, il adopte une attitude de tolérance envers les rites confucéens tels que le culte des ancêtres ou la vénération de Confucius, considérés comme des "rites civils".

 

Pour calculer l'éclipse de 1629, Xu Guangqi collabore avec Johann Schreck, un jésuite astronome allemand envoyé par Rome et ami de Galilée. À la suite de cette éclipse, l'empereur Chongzhen (1627-1644) - dernier empereur de la dynastie Ming, renversé par une révolte qui amena au pouvoir la dynastie mandchoue Qing - approuva les résultats obtenus par Xu Guangqi grâce aux méthodes occidentales, et confia à Xu Guangqi la réforme du calendrier.

Sur le moment du calcul de l'éclipse, les Chinois étaient à une minute et les européens à quinze minutes, mais la magnitude calculée par les Européens était plus précise. Ce n'était pas la compétence des Chinois qui était en cause, mais leur système. Les Européens les aidèrent à le corriger. 

 

Xu Guangqi fit venir à Pékin deux missionnaires, l'allemand Johann Adam Schall von Bell (1592-1666) et le jésuite italien Giacomo Rho (1593-1638), qui commencèrent la rédaction du nouveau calendrier selon la méthode occidentale. Ce sont eux qui ont jouèrent le rôle le plus important dans la réforme du calendrier chinois. Après le renversement de la dynastie Ming en 1644, Adam Schall von Bell ne put se résoudre à voir réduit à néant le travail accompli depuis l'arrivée de Matteo Ricci. Il décida de rester à Pékin.

Chine, l'empire du temps (2/2) Le procès des jésuites :

Bien que les Mandchous aient eu une armée très puissante et qu'ils aient vaincu les Ming, culturellement ils étaient relativement en retard. Pour régner sur un grand pays comme la Chine, ils devaient assurer la continuité de certaines choses, comme le confucianisme et l'idée de "mandat du ciel".

 

Une éclipse du soleil fut annoncée pour le 1er septembre 1644; le nouveau pouvoir eut besoin d'une prévision fiable. Schall y vit l'occasion de relancer la mission des jésuites en Chine. Il écrivit à l'empereur : "Votre sujet, soumet à votre grandeur, des prédictions concernant une éclipse de soleil, qui aura lieu le premier jour du huitième mois, calculée selon la nouvelle méthode occidentale. [...] Les données ayant servi à cette prédiction sont dans la présente lettre. Votre sujet prie humblement votre grandeur de publier un décret pour que le ministère des rites examine publiquement la précision de cette prédiction de l'éclipse de soleil." Le régent Dorgon, durant la minorité du nouvel empereur, accorda la permission. Pour cette éclipse, comme pour toutes les autres éclipses, un fonctionnaire du Bureau astronomique impérial surveillait les observations. Von Bell fut déclaré vainqueur. La méthode chinoise fut moins précise. L'erreur maximale de la méthode occidentale était de 9 minutes, alors qu'elle se situait entre 21 et 30 minutes pour la méthode chinoise. L'observation prouva que la méthode occidentale était plus précise et que les méthodes chinoises lui étaient nettement inférieures. Schall von Bell se vit offrir la direction du Bureau impérial d'astronomie. Pour la première fois dans les missions jésuites, un missionnaire occupait un poste au sein du mandarinat chinois. Quelques années plus tard, pour obéir à l'ordre de l'empereur, Adam Schall introduisit le système selon le calendrier occidental.

 

Lorsque en 1650 à la mort du régent Dorgon, le jeune empereur mandchou Shunzhi, accéda au trône, il était très lié à Adam Schall depuis sa tendre enfance, et l'appelait grand-père.

 

Schall enseignait que la terre était sphérique, ce qui lui valut les pamphlets de Yang Guangxian, un chinois musulman confucéen, à la tête du Bureau de l'astronomie de 1665 à 1669. Il abandonna le calendrier occidental pour revenir au calendrier chinois : "Schall dit que la terre est sphérique. Ceux qui vivent dans l'hémisphère supérieur se tiendraient debout, donc à l'opposé de ceux qui vivent dans l'hémisphère inférieur. Comment des gens pourraient être la tête en bas ? Je n'ai entendu parler que de gens qui se tiennent debout, jamais de gens qui se tiendraient horizontalement ou la tête en bas.

 

Plus grave, Yang Guangxian soutint que Adam Schall était responsable de la mort du régent Dogon, en choisissant un jour défavorable pour l'enterrement de son fils en 1658. En avril 1665, Schall et sept de ses assistants chinois, accusés de sédition, furent reconnus coupables et condamnés à mort. Lors du procès, Verbiest, répondant pour Schall, alors malade, déclara: "Si nous étions des traîtres, nous aurions un appui militaire et un arsenal, mais où sont ces forces ? Où sont ces armes ? Nous avons toujours conseillé au peuple de vénérer l'empereur et de respecter la loi. C'est un non-sens absolu que de nous qualifier d'agitateurs."

 

Finalement, seulement cinq chinois chrétiens furent exécutés: tous les missionnaires chrétiens furent exilés à Macao, seulement quatre jésuites restant à Pékin. Adam Schall, mort en 1666, ne vécut pas assez longtemps pour voir l'interdiction levée en 1671. En 1668, Yang Guangxian fut démis de son poste et remplacé par le collaborateur de Schall von Bell, le jésuite flamand Ferdinand Verbiest, parce qu'il ne put pas produire un calendrier valide lors d'une compétition avec les astronomes jésuites.

 

Le Pere Ferdinand Verbiest.gifEn cette année 1668 en effet, Kangxi, fils de Shunzhi, devenu officiellement empereur à l'âge de quatorze ans, trouva des moyens pour renforcer son pouvoir: l'astronomie. Il demanda aux jésuites de vérifier le calendrier qui devait être publié l'année suivante. On alla donc chercher le collaborateur de Schall, Ferdinand Verbiest. Sa réponse fut que le calendrier était truffé d'erreurs et qu'il avait de solides éléments pour le prouver. L'empereur décida qu'il ne voulait plus jamais voir de chose aussi honteuse à sa cour dans un domaine qui avait autant de conséquences. En 1669, Kangxi nomma Ferdinand Verbiest à la tête du Bureau de l'astronomie pour garder le contrôle sur le calendrier. Verbiest devint le nouveau président du tribunal mathématique. C'est lui qui modernisa l'observatoire de Pékin et fit traduire en chinois saint Thomas d'Aquin.

 

Sur les instruments astronomiques fabriqués par Verbiest en 1673 - 1674 et conservés à Pékin, en dépit de leur caractère occidental, on relève des motifs de dragons et phénix, symboles du pouvoir impérial. On a donc une union entre l'astronomie avancée de l'Occident et le pouvoir de l'empereur Kangxi. Ces instruments symbolisent ces deux dimensions. Verbiest devint l'ami de Kangxi, à qui il enseigna la géométrie. Mort en 1688, Verbiest sera enterré près de ses prédécesseurs Matteo Ricci et Adam Schall.

 

L'affaire précédente contre les Jésuites fut réexaminée et toutes les conclusions furent inversées. 

 

Les jésuites brilleront également en médecine et obtiendront en 1692, après avoir guéri l'empereur Kang Hsi avec de l'écorce de quinquina ("l'écorce des jésuites"), l'autorisation de prêcher publiquement dans tout le pays.

 

Vers 1700, il y avait plus de 300 000 Chinois baptisés et l'embryon d'un clergé indigène. Cela marque un échange unique et sans précédent de connaissances scientifiques entre deux civilisations, unique parce qu'il s'est déroulé sur un pied d'égalité.

 

Le 29 septembre 2016, la Chine a inauguré le FAST, le plus grand radiotélescope du monde. À la différence d'un télescope traditionnel qui reçoit de la lumière visible, le radiotélescope reçoit des signaux radios de l'espace comme le rythme impulsé par un pulsar et en déduire les micro-variations de cet astre dans l'univers. Et si l'on traduit le pulsar en son, cela ressemble au battement du coeur, très régulier. C'est même plus stable qu'une horloge atomique. Ici, les Chinois ont installé une scène parfaite pour les scientifiques. Bientôt ils pourront y réaliser leur projet et montrer leur talent.

 

Aux Indes entre 1606 et 1656

Robert de Nobili, missionnaire jésuite parmi les brahmes d'Inde du Sud

Robert de Nobili, missionnaire jésuite parmi les brahmes d'Inde du Sud

Roberto de Nobili (1577-1656) était admis à Maduré dans la caste supérieure des brahmanes. Connaissant le sanskrit et le tamoul, il abandonna jusqu'à son nom pour se faire appeler Tatuva Podapar Suami, "le maître des 96 perfections du sage".

 

En 1609, 70 brahmanes de la province se convertirent au catholicisme sans avoir le sentiment d'être infidèles à l'enseignement des vedas ni renoncer à leurs pratiques rituelles (bains, encensement au santal, etc.)

 

A Lisbonne, le tribunal de l'Inquisition saisi de l'affaire par les adversaires de la Compagnie, donna raison à de Nobili.

Le pape Grégoire XV confirma le jugement et décida qu'il y aurait désormais plusieurs rites (c'est par impropriété de terme qu'on les a qualifiés de "rites malabars" au lieu de rites de Maduré).

 

Malheureusement, en 1780 en Chine, à la mort du père Martial Cibot, l'un des derniers jésuites qui survécurent quelques années en Chine après la destruction de leur ordre en 1773, la pénétration du christianisme avait été totalement interrompue dans les milieux lettrés du fait de l'interdiction par Rome en 1739 des rites locaux indiens malabars et chinois quelques années plus tard.

 

Il faudra attendre 1942 pour que Pie XII, se référant explicitement à l'autorisation de Paul V en 1615, permît à nouveau de célébrer la messe en langue littéraire chinoise !

 

Actuellement les contacts de la Compagnie de Jésus avec la Chine continentale restent sporadiques.

 

Au Paraguay et en Uruguay, entre 1600 et 1725

 

La confusion est complète entre les pouvoirs religieux et civil. La politique est en fait dirigée de Madrid par le Conseil des Indes. La confusion du spirituel et du temporel, grave dans son principe et dans ses effets, recèle néanmoins ici quelques avantages. Les jésuites, en effet, ont reçu de Madrid la charge d'administrer les régions que n'habitaient pas encore les Blancs. Ils y jouissaient d'une large autonomie à laquelle ils devraient bientôt renoncer si les colons espagnols s'installaient. Or l'expérience leur montra les conséquences fâcheuses du contact entre indigènes et colons. Ces derniers, par leur racisme et leur avidité au gain, donnaient le plus mauvais exemple et ne provoquaient que ressentiment. Tout poussa donc ces évangélisateurs à perpétuer un isolement si favorable à leur dessein. Ainsi fondent-ils en 1610 le tout premier village chrétien composé uniquement d'Indiens guaranis, la "réduction" de Saint-Ignace.

 

En 1700, il y aura trente réductions d'environ 3000 à 4000 habitants. Ces villages où les Européens n'étaient donc pas admis étaient tous constitués sur le même modèle: l'église et la résidence des pères était construite au centre; autour étaient installées l'école et les bâtiments sociaux, puis venait le cercle des habitations (une par famille), enfin, à la périphérie, il y avait les ateliers. Au-delà, les terres labourables étaient propriété collective. Le maire, indigène, était élu par les habitants. La justice était rendue par les jésuites, la peine la plus grave étant l'expulsion du village. Ces petites républiques guaranis formaient un véritable Etat jésuite, à la fois collectiviste et théocratique. Elles prospérèrent jusqu'au jour où un accord conclu entre l'Espagne et le Portugal fera passer treize des plus importantes réductions sous l'autorité fort peu libérale du gouvernement de Lisbonne. La rébellion indienne qui suivra l'emprise maladroite des fonctionnaires portugais sera imputée aux jésuites. Quant aux réductions demeurées sous la tutelle espagnole, elles tomberont après la dissolution de la Compagnie de Jésus en des mains peu scrupuleuses qui les exploiteront sans vergogne et l'aventure se terminera misérablement.

Les jésuites partirent en mission également en Turquie, au Moyen-Orient.

Au Canada et en Amérique du Nord de 1634 à 1760

 

C'est notamment les Saints Martyrs Canadiens, missionaires († 1642/1649), Jean de Brébeuf, Isaac Jogues, Gabriel Lalemant, Charles Garnier, Antoine Daniel, Noël Chabanel, René Goupil, Jean de la Lande, Patrons du Canada.

 

La Compagnie utilisait les cultures locales pour donner à l'Evangile et à la foi un support, une expression, un langage qui soient compris des populations. Cet effort pour intégrer au christianisme des civilisations exotiques (que reprend saint François-Xavier) avait été jadis celui de l'Eglise palestinienne à l'égard de Rome ou celui des premiers évangélisateurs de la Gaule, saint Martin, saint Hilaire qui firent construire des lieux de culte catholiques sur d'anciens sanctuaires druidiques.

 

Au XVIe siècle, la Compagnie de Jésus arrivait dans un contexte où les conceptions luthérienne et calvinienne du péché originel faisaient prévaloir l'idée que la faute initiale de l'humanité avait totalement détruit dans l'homme la faculté du libre arbitre et vicié toutes ses entreprises à la base.

 

Luther affirmait que nul homme ne pouvait être "juste" aux yeux de Dieu. Même baptisé et élu, disait-il, un chrétien conserve sa tare fondamentale de pécheur. Au contraire de cette position, les Jésuites (Jacques LainezAlfonso Salmeron) affirmaient que la faute du péché originel n'avait pas complétement détruit dans l'homme la faculté du libre arbitre et que les mérites du Christ et son amour pouvaient apporter cette "justification inhérente" qui permet d'espérer une pleine participation à la divinité du Fils. Sous l'influence directe de saint Ignace de Loyola, l'humanité recevait une promesse inouïe de divinisation par la voie même du Concile de Trente (1542-1563) qui proclama que tout homme, fût-il non baptisé, avait la possibilité d'agir sans déplaire à Dieu.

Jacques Lainez (1512-1565) - Jacques Lainez, deuxième Supérieur Général des Jésuites

Jacques Lainez (1512-1565) - Jacques Lainez, deuxième Supérieur Général des Jésuites

Pendant le Concile de Trente, de Lainez et Salmeron au belge Lessius en 1587, et aux espagnols Molina, Banez ou Escobar, cible préférée de Pascal, les jésuites s'efforcèrent d'affirmer la prééminence de la liberté humaine contre des doctrines, souvent défendues par l'ordre rival des Dominicains, qui tendaient à subordonner au bon vouloir divin l'exercice du libre arbitre humain. Ces débats nous font maintenant l'impression d'un dialogue de sourds car les interlocuteurs ne parlaient pas de la même chose. Les jésuites, bien entendu, ne mettaient pas en question la toute-puissance de Dieu comme on les en accusait, ni le "néant" de la créature réduite à elle-même. Ils se contentaient de reconnaître implicitement ce qu'admettent aujourd'hui la plupart des théologiens, à savoir que cette toute-puissance ne s'exerce que dans le sens de l'Amour infini. L'homme, certes, ne peut se sauver que par la grâce de Dieu, mais cette grâce ne lui est jamais refusée. Dans le mécanisme du salut, c'est donc la volonté de l'homme qui est "souveraine" : elle, seule, peut faire obstacle à un Dieu qui ne se refuse pas (en enfer, il n'y a que des volontaires, pourrait-on résumer).

 

La doctrine inverse (défendue par les protestants et les jansénistes), qui subordonnait au bon vouloir divin l'exercice du libre arbitre aurait pu être le rappel d'une vérité évidente dans l'ordre de l'ontologie. Mais elle n'avait de sens que si elle supposait un Dieu qui ne veut pas le salut de tous les hommes. La logique de cette doctrine conduira les jansénistes à défendre contre les jésuites la thèse de la prédestination.

 

Les conceptions jansénistes ne pouvaient être que méfiantes, voire hostile à l'égard des cultures locales et profanes alors que les conceptions jésuites sur le libre arbitre et la "justification" portaient la marque foncièrement prophétique, accueillante et optimiste de la Compagnie de Jésus. Cette porte ouverte sur l'humanité non chrétienne permit à la Compagnie d'adopter des coutumes, des symboles et même des liturgies que l'on considérait jusqu'alors comme païennes, c'est-à-dire foncièrement mauvaises.

 

Cette audace lui fit adopter (dans la liturgie) les langues et les coutumes exotiques de ces peuples et qu'elle appliqua à la confession pour l'appréciation des cas de conscience (casuistique) faillit lui coûter la vie. En 1773, le pape Clément XIV, cédant à la pression des Bourbons de France, d'Espagne et de Naples, décidera de suspendre ses activités pour des motifs qui n'avaient rien à voir avec la Foi (voir plus bas).

 

Pendant plus de deux siècles, le jansénisme a profondément marqué le catholicisme français. Son rigorisme a été repris et adopté par le clergé qui a écarté des sacrements une grande partie des croyants et arraché de leur esprit la figure du Christ miséricordieux au profit d'un Dieu vengeur. La confession a été le lieu de ce véritable drame qui a éloigné les uns de la religion et a stérilement culpabilisé les autres. La question du délai ou du refus de l'absolution a constitué l'enjeu de ce que l'on a appelé improprement la querelle du laxisme; des millions d'hommes et de femmes en ont été les victimes.

 

C'est l'assemblée du clergé dominée par Bossuet et réunie à Saint-Germain-en-Laye, qui, en 1700, orienta l'Eglise gallicane vers un rigorisme qui, sur le plan de la fréquentation des sacrements, n'avait rien à envier à celui de Port-Royal. Bossuet, tout en rejetant la doctrine janséniste, n'hésitait pas à en approuver la rigueur envers les pécheurs. Si le régime de l'absolution refusée, ou différée (quelques fois pendant plusieurs années) s'est implanté, c'est à lui et à l'assemblée de clergé gallican qu'on le doit. Sous leur influence, les évêques de France et les confesseurs refuseront l'absolution à des pécheurs repentants et "en progrès", parce que la sincérité de leur contrition n'est pas certaine. Le délai d'absolution était encore recommandé par les manuels des séminaires au milieu du XIXe siècle. On devra attendre 1832 et la publication par l'abbé Thomas Gousset (futur cardinal) d'une Justification de la Théologie morale de saint Alphonse de Liguori (fondateur de l'ordre des Rédemptoristes) pour que le clergé de France commence à en revenir à une tradition évangélique, qui se matérialisera plus tard dans la recommandation de la pratique fréquente de l'Eucharistie. C'est Thomas Gousset, alors prefesseur au séminaire de Besançon, qui s'attaquera d'une manière décisive aux doctrines rigoristes et permettra leur reflux. C'est aux pécheurs récidivistes les plus enfoncés dans leurs faiblesses qu'il faut rendre facile l'accès à la confession, un "aliment pour les faibles" dira le pape jésuite François dans son Exhortation évangélique Evangelii Gaudium, n°47 (sur le fondement de saint Ambroise, De sacramentis, IV, 6, 28 : PL 16, 464 ; SC 25, 87 : « Je dois toujours le recevoir pour que toujours il remette mes péchés. Moi qui pèche toujours, je dois avoir toujours un remède » ; IV, 5, 24 : PL 16, 463 ; SC 25, 116 : « Celui qui a mangé la manne est mort ; celui qui aura mangé ce corps obtiendra la rémission de ses péchés ». saint Cyrille d’Alexandrie, In Joh. Evang. IV, 2 : PG 73, 584-585 : « Je me suis examiné et je me suis reconnu indigne. À ceux qui parlent ainsi je dis : et quand serez-vous dignes ? Quand vous présenterez-vous alors devant le Christ ? Et si vos péchés vous empêchent de vous approcher et si vous ne cessez jamais de tomber – qui connaît ses délits ?, dit le psaume – demeurerez-vous sans prendre part à la sanctification qui vivifie pour l’éternité ?). Au XIXe siècle, le point de vue de saint Alphonse de Liguori et du cardinal Gousset était celui des jésuites au XVIIe. Il allait exactement à l'encontre de la morale janséniste et gallicane du clergé français. C'était la faculté pour le confesseur de tenir compte des situations; de ne pas décourager le repentir par une exigence qui serait conforme aux principes moraux, mais inapplicable. C'est faire confiance au discernement humain et à la miséricorde divine; en deux mots : à la raison et à la grâce. Cette voie était celle d'Ignace de Loyola et ce sera l'un des mérites des jésuites que d'avoir contribué à la rouvrir à la suite d'Alphonse de Liguori et contre l'école des moralistes religieux français du XVIIIe siècle.

 

Leurs adversaires au XVIIe siècle trouvèrent en Blaise Pascal un polémiste de génie qui sut faire descendre le débat du plan théologique où il se situait au niveau de la morale pratique, domaine dans lequel la Compagnie était beaucoup plus vulnérable pour avoir voulu donner forme écrite et systématiser ce qui ressortissait à la seule conscience du confesseur. Le succès des Lettres à un Provincial contribua à imposer dans l'esprit public une caricature du jésuite qui n'est pas encore totalement effacée.

 

Le rôle des jésuites dans l'éducation et l'enseignement

 

Le jésuite Pierre Canisius organisa la défense de l'Eglise par le livre et l'école. Chacun des grands collèges créés par lui devint un centre de résistance aux thèses luthériennes et calvinistes. Canisius n'avait à son arrivée en Allemagne en 1550 que deux compagnons pour le seconder. Près de mille deux cents jésuites y exerçaient leur activité trente ans plus tard. Et dans toute l'Europe, suivant une ligne stratégique qui traversait le nord de la France, la Belgique, l'Allemagne, la Hongrie et la Pologne, furent fondés les universités et les collèges de la Contre-Réforme.

 

"Le triomphe de la papauté, a estimé l'historien anglais Macaulay, a été dû principalement à un grand reflux de l'opinion publique... Cinquante ans après la séparation des luthériens, a-t-il écrit, le catholicisme pouvait à peine se maintenir sur les rives de la Méditerranée. Cinquante ans plus tard, le protestantisme pouvait à peine se maintenir sur les rives de la Baltique."

 

Ce résultat fut, en grande partie, l'oeuvre de la Compagnie de Jésus, de ses collèges, de ses prédicateurs, de ses théologiens.

 

Dès 1590, les jésuites consacraient plus des trois quarts de leur activité à la formation des jeunes. L'accent était mis sur les humanités gréco-latines parce qu'elles constituaient alors la culture de l'honnête homme. Diverses congrégations plus ou moins liées à la Compagnie permettaient à celle-ci d'étendre son influence au-delà de la sphère universitaire. Charles Borromée, auteur du fameux catéchisme connu sous le nom de Catéchisme du Concile de Trente (1566), fut un de leurs membres et contribua à l'installation des jésuites dans les cantons catholiques de Suisse. C'est sur son insistance que le pape Clément XIII ordonna à la Compagnie de fonder des collèges à Lucerne et à Fribourg (en Suisse).

 

Un tel développement et une telle influence devait fatalement inquiéter les pouvoirs régants et la Compagnie aura longtemps à souffrir de leur méfiance.

 

Pourtant, dès l'origine, elle tentera de se prémunir contre l'hostilité des princes en interdisant formellement à ses membres de se mêler de la politique intérieure des pays.. L'auteur de cette consigne, le père Claudio Aquaviva, cinquième général de l'ordre (1581), ira même plus loin en conseillant au pape de se soumettre aux injonctions de la République de Venise qui exigeait l'expulsion des jésuites comme condition de sa fidélité aux Saint-Siège.

 

En France, les jésuites, comme serviteurs de la papauté ne pouvaient qu'être suspects aux yeux du Parlement gallican et de la Sorbonne. Néanmoins, vers 1610, au nombre de 1400 environ, ils possédaient déjà trente-six collèges, l'un des plus célèbres étant celui de La Flèche où sera formé Descartes.

 

La défense de "l'unité du peuple français", la défense du pouvoir monarchique

 

On trouve dans l'ouvrage "Histoire du Peuple français, De la Régence aux trois Révolutions", de Pierre Lafue quelques développements instructifs sur le rôle positif des Jésuites dans la défense de "l'unité du peuple français et pour l'extension du pouvoir monarchique" contre les Gallicans et les Jansénistes au XVIIIe siècle.

 

Ainsi, "lors de la réaction des ordres privilégiés, ont-ils été l'objet de l'hostilité de nombreux prélats - particulièrement des 6 cardinaux jansénistes dont le Cardinal de Noailles, archevêque de Paris, est le chef relativement modéré. En outre, l'Université et le Parlement se sont prononcés contre les partisans de l'ultramontanisme (les jésuites NDLR.).

 

... La coalition formée contre eux va toutefois demeurer assez longtemps impuissante par suite de l'attitude du roi qui leur sait gré, non seulement de fournir des confesseurs à toute sa famille, mais encore de désavouer la coterie parlementaire dressée contre le trône qui a tenté d'imposer la loi commune en matière d'impôt." [8]

 

 

La Compagnie de Jésus, cible de la franc-maçonnerie

 

Le Principal ministre de Louis XV entre 1758 et 1770, le comte de Choiseul, "allié des magistrats, fera alors pression pour obtenir l'expulsion des Jésuites." [9]

 

Comme par hasard, Choiseul était franc-maçon, "Vénérable de la Loge Les Enfants de la Gloire" en 1761. [10]

 

Tout en se disant "l'artisan du renouveau français et de la revanche contre l'Angleterre" [11], cet esprit des Ténèbres qui s'illustrait dans la destruction méthodique de la Nouvelle-France (Amérique française), était lié aux "philosophes" [12], et il était le complice des Parlements dans leur obstruction au roi... [13]

 

Les jésuites subirent ainsi les attaques conjuguées des jansénistes, des gallicans, des parlementaires et des "philosophes" de l’"Encyclopédie".

 

Le 6 août 1761, le parlement de Paris ordonna que les écrits de 23 jésuites dont Bellarmin, Toledo et Lessius fussent bannis comme "contraires à la morale et nuisibles à la jeunesse". Interdiction leur fut faite de recevoir des novices. Dans les villes où existaient d’autres écoles, les collèges jésuites durent fermer le 1er octobre 1761, et ailleurs ils furent fermés en avril 1762. Louis XV, favorable aux jésuites, intervint plusieurs fois, temporisa et obtint quelques délais. Cela tourna au conflit politique entre le parlement et le roi. Des compromis successifs, tous à tendance gallicane (pratiquement une séparation vis-à-vis de Rome), furent proposés aux jésuites et furent rejetés comme inacceptables.

 

Défiant le roi, le parlement de Paris, le 6 août 1762, déclara que la Compagnie de Jésus "nuit à l’ordre civil, viole la loi naturelle, détruit la religion et la moralité, corrompt la jeunesse" et la bannit de France. Certains parlements régionaux (comme celui de Flandre) refusèrent d’emboiter le pas ; la plupart temporisèrent. Le roi, de nouveau, obtint un délai. Mais malgré l'intervention du pape Clément XIII, pape de 1758 à 1769 qui défendit vigoureusement la Compagnie de Jésus, il dut finalement s’incliner tout en mitigeant les mesures prises. En novembre 1764, Louis XV édicta ce qui devint la mesure pour toute la France : la Compagnie de Jésus était proscrite en France, et ses biens étaient confisqués. Les jésuites furent cependant autorisés à y demeurer comme "bons et fidèles sujets", sous l’autorité des évêques. Les jésuites anglais de Saint-Omer durent également partir : ils s’installèrent dans les Pays-Bas méridionaux (alors autrichiens).

 

Si l’exécution de l’édit royal se passa moins dramatiquement qu’au Portugal les conséquences en furent tout aussi graves. L’enseignement en France fut désorganisé, de nombreux jésuites ayant choisi de partir en exil. Outremer, les missions des jésuites français furent confiées aux pères de Missions étrangères de Paris, mais ils ne suffisaient pas à la tâche. De nombreux postes furent fermés.

 

L'alliance de circonstance entre jansénistes, gallicans et philosophes des Lumières eut raison des jésuites. En 1761, dans une lettre à Voltaire, D’Alembert écrivit : "Que la canaille janséniste nous débarrasse des polissons jésuites. Ne fais rien pour empêcher que ces araignées se dévorent les unes les autres". En 1763 il triompha : "Les jésuites étaient les troupes régulières et disciplinées luttant sous l’étendard de la Superstition […] Les jansénistes ne sont que des cosaques dont la Raison va vite se débarrasser maintenant qu’ils doivent se battre seuls."

 

L’"affaire Lavalette" (scandale financier à la suite de la banqueroute du prêtre jésuite Antoine Lavalette) contraint Louis XV à interdire la Compagnie et à la bannir de France en 1763-1764, en fermant ses deux cents collèges. Déjà chassés du Portugal en 1759 par le ministre portugais franc-maçon, le marquis de Pombal, ils le furent encore d'Espagne en 1767 et du duché de Parme et de Plaisance en 1768. Cependant le roi Stanislas, avant 1766, les accueillit dans son duché de Lorraine, resté théoriquement indépendant du royaume de France.

 

Supérieur des Missions Françaises de l'Amérique du Sud en 1754, mais avec un ordre explicite d'arrêter toute entreprise commerciale, le Père Antoine Lavalette ignora cet ordre et poursuivit sa compagnie commerciale. Quelque temps plus tard, il emprunta pour acheter des terres. Or une épidémie en 1756 décima les ouvriers qui devaient les défricher et les mettre en culture pour exploiter la canne à sucre puis plusieurs de ses navires furent saisis par les pirates anglais à leur retour en Europe. La guerre de Sept Ans interrompant le trafic de sa maison de commerce avec la métropole, cette dernière fit faillite qui s'élevait à deux millions quatre cent mille livres. Deux de ses créanciers, de gros négociants marseillais, Gouffre et Lionci, poursuivirent La Valette devant le parlement à Aix qui le condamna. Le provincial des Jésuites fit appel, l'affaire remonta au Parlement de Paris. Ce dernier sous prétexte de se prononcer sur cette simple faillite, ordonna aux Jésuites de déposer au greffe un exemplaire des Constitutions de leur ordre et prononça un arrêt le 6 août 1762 qui déclarait la Compagnie de Jésus "inadmissible par sa nature dans tout État policé". [14]

 

Fritz Hochwälder a popularisé leur tragédie dans sa pièce Sur la terre comme au Ciel, véritable drame de l'obéissance. Les jésuites étaient soupçonnés à juste titre de fidélité romaine. La soumission ne leur épargna pas le bannissement qui précédera de peu la dissolution de la Compagnie !

 

L'opposition des cours européennes fut si forte que le pape Clément XIV en vint, le 21 juillet 1773, à supprimer la Compagnie de Jésus partout dans le monde ; c'est le bref Dominus ac Redemptor, qui dit que la Compagnie a souvent été sévèrement critiquée (mais ne dit pas si ces critiques étaient justifiées ou pas).

 

Leur salut viendra de l'Est. En Russie, la tsarine orthodoxe Catherine II interdit la promulgation de la bulle papale, et en Prusse le roi protestant Frédéric II fit de même, heureux de marquer sa désapprobation au Pape, tout en profitant de l'aubaine que constituaient tous ces savants et ces professeurs pour organiser l'enseignement et la recherche dans ses États.

 

En France, les maisons d'éducation des Jésuites furent fermées, et cette victoire fut représentée audacieusement par les partisans de l'opposition à la monarchie comme une mesure 'libérale'... [15] Dans sa lutte pour la domination politique, l'oligarchie parlementaire s'appuyait sur la secte religieuse des Jansénistes, grâce à laquelle elle s'est emparée de l'opinion publique, qui sans cela n'eût sans doute pas été abusée par son faux libéralisme.

 

La calomnie joua son rôle. On réédita de prétendus statuts secrets, Monita Privata Societatis Jesu, imprimés à Cracovie en 1614. Ce document republié sous le titre Monita Secreta, voulait prouver les visées temporelles (pouvoir, domination) de la Compagnie de Jésus. Il s'agissait d'un faux dont l'auteur était un ex-jésuite polonais, Jérôme Zahorowski. [16]

 

Au XVIIIe siècle toute la magistrature était devenue janséniste. C'est cette secte religieuse, alliée de la franc-maçonnerie qui empêchera toute saine réforme de l'Etat royal et obstruera la volonté du roi d'établir l'égalité devant l'impôt et sera à l'origine de la Révolution dite française.

 

Lire : La guerre des juges contre l'Eglise et la monarchie au XVIIIe siècle (Marion Sigaut)

 

La politique de la Compagnie au-delà des mers fit éclater la crise. Les jésuites ayant toujours défendu les droits et valeurs des civilisations indigènes sur les territoires de leurs missions, leur attitude, combattue par les protestants et les jansénistes, provoqua la haine des colons, commerçants ou négriers des possessions d'Asie, d'Afrique et d'Amérique, et n'avait pas été complètement comprise par Rome.

 

Restauration de la Compagnie et nouveaux ennuis

 

Après les guerres napoléoniennes, le climat politique changea. Les monarques qui avaient expulsé les Jésuites n'étaient plus au pouvoir. Le pape Pie VII procèda à la restauration universelle de la Compagnie en promulguant le décret Sollicitudo omnium ecclesiarum (en français: la sollicitude pour toutes les Églises) du 7 août 1814.

 

Pie VII avait d'abord discrètement approuvé son existence en Russie (bref Catholicae fidei du 7 mars 1801) et dans le royaume de Naples en 1804.

 

Le 7 août 1814, le pape Pie VII célébra une messe solennelle dans l'église du Gesù à Rome où se trouve le tombeau de saint Ignace, le fondateur de la Compagnie de Jésus. Ensuite, il fit lire la bulle qui autorisait à nouveau l'existence de l'Ordre dans le monde entier. En même temps, il nomma le supérieur des jésuites de Russie, Tadeusz Brzozowski, "Supérieur général de la Compagnie de Jésus". La Bulle fut promulguée le lendemain, le 8 août.

 

En 1828 néanmoins, Charles X expulsa les jésuites. De 1835 à 1845, la Compagnie se développa jusqu'à ce que Louis-Philippe et la Deuxième république leur imposent de nouvelles épreuves. Le Second empire et les tout débuts de la Troisième république seront une période plus heureuse.

 

En 1880, lorsque Jules Ferry ordonna le 29 mars la "dissolution et l'évacuation" des collèges que la Compagnie de Jésus "occupe sur la surface du territoire de la République", ceux-ci étaient au nombre de 29.. Ils enseignaient près de 11 000 élèves et réunissaient 815 professeurs.

 

Le conservatisme des jésuites était l'objet des quolibets des polémistes et des attaques d'un Edgar Quinet ou d'un Jules Michelet qui dénonçaient le "jésuitisme" et s'en prenaient aux visées "secrètes" de la Compagnie.

 

Précisons simplement que les Constitutions de l'Ordre, dont le document définitif n'a été promulgué qu'en 1594, ont subi de nombreuses modifications car la souplesse est une marque de la Compagnie qui a toujours su rester maîtresse de sa règle fondamentale, notamment par des décrets qui vinrent périodiquement en corriger les archaïsmes. Les Constitutions ne devaient pas être considéres comme une loi figée. Chaque congrégation avait le pouvoir de modifier les Constitutions, de les compléter et même de les abroger... Cette charte est donc loin d'avoir le caractère sacré d'autres documents du même genre, par exemple les Constitutions d'Anderson, qui fondent les loges maçonniques.

 

Bien des adversaires de bonne foi ignorent encore, par exemple, que "les Constitutions n'obligent pas sous peine de péché." Autrement dit, leur violation par un jésuite n'est pas en soi une faute aux yeux de Dieu. Cette disposition relativise considérablement les règles de l'Ordre, y compris, évidemment, celles qui impliqueraient les visées "secrètes" de la Compagnie.

 

Aujourd'hui: les attaques et les calomnies contre les Jésuites persistent

 

La Compagnie de Jésus est accusée d'être à l'origine du Nouvel ordre mondial.., au prétexte qu'un ex-jésuite fonda l'ordre maçonnique des Illuminati.

 

Or, Adam Weishaupt, le fondateur des Illuminati, était né dans une famille juive le 6 février de 1748 à Ingolstadt. Converti, il devint jésuite. Il tomba dans la pratique de la sorcellerie et se sépara de l'Eglise. Professeur de droit à l'Université d'Ingolstadt en Allemagne, il fut accepté dans la franc-maçonnerie en 1778; mais il avait créé deux ans plus tôt l'ordre occulte des Illuminati, les Illuminés, ceux qui ont la lumière, ceux qui savent (Illuminisme) en copiant certains statuts des Jésuites. Il croyait être appelé à "régénérer" l'humanité.

 

L'Abbé Barruel, prêtre jésuite, dans ses Mémoires pour servir à l'histoire du jacobinisme (1798), indique que "dans les jours où ce conspirateur conçut ses projets (+) il ne connaissait point encore l'objet de la Franc-Maçonnerie: il savait seulement que les Francs-Maçons tenaient des assemblées secrètes: il les voyait unis par un lien mystérieux, se connaissant pour frères à certains signes, à certaines paroles, de quelque nation & de quelque religion qu'ils fussent..." (Augustin Barruel, Mémoires pour servir à l'histoire du jacobinisme, 1798, t. III, p. 13)

 

En 1785, après la découvertes des papiers de la secte illuminée par la police bavaroise, Adam Weishaupt fut destitué de sa chaire professorale, "proscrit de sa patrie comme traître à son Souverain & traître à l'Univers" (Augustin Barruel, Mémoires pour servir à l'histoire du jacobinisme, 1798, t. III, p. 2), il s'exila lui-même; se réfugia d'abord à Regensburg, puis dans l'état du prince Ernest-Louis, duc de Saxe-Gotha, "nourri de pensions sur le Trésor public, décoré du titre de conseiller honoraire."

 

Weishaupt recruta à Weimar, le duc Charles-Auguste (Eschylus), Goethe (Abaris), Herder (Damasus pontifex), Shardt (Appollonis), von Fritsh (Werner), le duc Ernest II de Saxe-Cobourg-Gotha, le baron de Dalberg, le duc Ferdinand de Brunswick, le comte (futur prince) de Metternich.

 

De nos jours, les attaques et des diffamations faites par la franc-maçonnerie contre les jésuites continuent par tous les moyens (média, musiques).

SOURCES

 

[1] Vie des Saints pour tous les jours de l'année avec une pratique de piété pour chaque jour et des instructions sur les fêtes mobiles, Alfred Mame et Fils éditeurs, Tours 1867, p. 212;

[2] www.levangileauquotidien.org/main.php?language=FR&module=saintfeast&localdate=20090731&id=5666&fd=0

[3] fr.wikipedia.org/wiki/Ignace_de_Loyola

[4] www.christ-roi.net/index.php/Exercices_spirituels

[5] sanctoral.com/fr/saints/saint_ignace_de_loyola.html

[6] Pachtler, Ratio studiorum (Mon. Germ. paed., Berlin 1887-1897, t. III, p. 470-474 cité in Jean DUMONT, L'Eglise au risque de l'Histoire, Préface de Pierre Chaunu de l'Institut, Editions de Paris, Ulis 2002, p. 325-326)

[7] Daniel-Rops, Histoire de l'Eglise du Christ, tome VI, La Réforme catholique, Librairie Arthème Fayard, Éditions Bernard Grasset, Paris 1965, p. 45

[8] Histoire du Peuple français, De la Régence aux trois Révolutions, Pierre LAFUE, Nouvelle Librairie de France, tome 3, Paris 1960, p. 36, 37

[9] Histoire du Peuple français, De la Régence aux trois Révolutions, Pierre LAFUE, ibid., p. 37

[10] Sur l'appartenance maçonnique de Choiseul : Grande Loge Suisse Alpina http://www.freimaurerei.ch/f/alpina/artikel/artikel-2006-4-01.php

[11] Choiseul avait "en réalité, par calcul personnel,[...] laissé la crise morale et institutionnelle se développer jusqu'à mettre le royaume en péril" : Pierre PLUCHON, Histoire de la colonisation française, tome 1er, Le Premier empire colonial, Des origines à la Restauration, Fayard, Saint-Amand-Montrond 1996, p. 294.

[12] Pierre GAXOTTE de l'Académie française, Le siècle de Louis XV, Texto, Paris 2015, p . 295.

[13] Choiseul "de coeur avec les Parlements et presque leur complice" in P. GAXOTTE, ibid., p. 343.

[14] François RIBADEAU THOMAS, Grandeur et misère des Jésuites, Dervy, 1994, p. 262

[15] Histoire du Peuple français, De la Régence aux trois RévolutionsPierre LAFUE, ibid., p. 37

[16] Alain GUICHARD, Les Jésuites, Club français du livre, Editions Grasset et Fesquelle, Ligugé 1974, p. 70

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30 juillet 2023 7 30 /07 /juillet /2023 00:00
Le martyre de sainte Julitte (anonyme, 2e moitié du XVIIe siècle), église Saint-Cyr-et-Sainte-Julitte de Villejuif

Le martyre de sainte Julitte (anonyme, 2e moitié du XVIIe siècle), église Saint-Cyr-et-Sainte-Julitte de Villejuif

Julitte de Tarse ou Juliette de Césarée est une riche veuve de Césarée (aujourd'hui Kayseri en Turquie), dépouillée par un homme d'affaires qu'elle voulut poursuivre en justice ; mais les chrétiens du début du ive siècle ne pouvaient témoigner à un procès qu'en reniant leur foi. La persécution qu'elle voulut éviter la força à venir à Tarse en Cilicie, avec son fils, Cyr, âgé de trois ou quatre ans. Elle refusa d'abjurer sa foi et elle fut condamnée au bûcher sous le règne de Dioclétien ; elle est fêtée le 16 juin1 en Occident et le 30 juillet en Orient2,3 Son jeune fils Cyr, dit aussi parfois saint Quirice, est l'un des plus jeunes martyrs de la chrétienté à la suite des saints Innocents.

Nous la connaissons par l'un des sermons d'un de ses contemporains, saint Basile de Césarée.

 

À Césarée de Cappadoce, en 303, sainte Julitte, martyre. Ayant refusé sans relâche d'offrir de l'encens sur un autel, comme le juge le lui ordonnait, elle fut jetée dans le feu.

 

Martyrologe romain

 

Sources : 12 

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29 juillet 2023 6 29 /07 /juillet /2023 00:00
Sainte Marthe, dans Le Petit Livre des Saints, Éditions du Chêne, tome 2, 2011, p. 141.

Sainte Marthe, dans Le Petit Livre des Saints, Éditions du Chêne, tome 2, 2011, p. 141.

Sainte Marthe était soeur de Lazare. C'est elle qui dirigeait la maison de Béthanie et s'en montrait digne par sa douceur et son amabilité envers les siens, par sa charité envers les pauvres et par l'hospitalité si dévouée qu'elle offrait au Sauveur et à Ses disciples. Un jour, Marthe était absorbée par les soins domestiques, tandis que Madeleine se tenait aux pieds de Jésus. Marthe se plaignit:

 

"Seigneur, dites donc à Marie de venir m'aider, ne voyez-Vous pas qu'elle me laisse toute la charge?

Marthe, Marthe, lui dit le Maître, vous vous agitez trop. Une seule chose est nécessaire; Marie a choisi la meilleure part, et elle ne lui sera point enlevée."


 

C'est Marthe qui fit prévenir Jésus de la maladie, puis de la mort de son frère Lazare: "Seigneur, Lui dit-elle, dès qu'elle L'aperçut, si Vous eussiez été ici, mon frère ne serait pas mort." Et Jésus lui donnant des paroles d'espérance: "Seigneur, ajouta-t-elle, je crois que Vous êtes le Christ, Fils du Dieu Vivant."

 

Après la mort de la Très Sainte Vierge, Marthe subit le sort de Lazare et de Madeleine: exposée par les Juifs endurcis sur une frêle barque, à la merci des flots irrités, elle est portée avec les siens vers les beaux rivages de la Provence. Là elle participe à l'apostolat de son frère Lazare, qui devint évêque de Marseille, et à la sainte vie de Madeleine. Après un passage à Avignon, elle va se fixer à Tarascon, en Provence, où la tradition lui attribue la mort de la Tarasque.

 

Marthe est devenue célèbre par l'enchaînement d'un dragon. Au moment où elle commençait à prêcher la foi sur les rives du Rhône, un monstre effroyable, connu sous le nom de Tarasque, jetait la terreur dans toute la contrée. Un jour que Marthe annonçait la parole divine dans la ville de Tarascon, la foule s'écria: "Si vous détruisez le dragon, nous embrasserons votre foi."

Si vous êtes disposés à croire, répondit Marthe, tout est possible à celui qui croit." Et seule, elle s'avance vers la caverne du monstre. Pour combattre cet ennemi, Marthe se munit du signe de la Croix ; le monstre baisse la tête et tremble. Elle s'avance, l'enlace avec sa ceinture et l'amène comme un trophée de victoire aux habitants, et bientôt la Tarasque tombe écrasée sous les coups vengeurs de tout le peuple. En triomphant de ce monstre, Marthe avait triomphé du dragon infernal.

 

Marthe s'établit dans la ville, devenue chrétienne, se fit la servante des pauvres, et fonda une communauté de vierges.

 

Elle affectionnait sa retraite où elle préparait son apostolat par une ascèse des plus rudes : elle était vêtue de toile grossière, pratiquait un jeûne continuel, couchait sur un amis de branches d'arbres et de sarments...; malgré son attrait pour la solitude, elle consacrait tout le temps nécessaire à la propagation de la doctrine du Christ, qui confortait son zèle en lui faisant multiplier les miracles. Ainsi elle guérissait les lépreux, les paralytiques, ressuscitait les morts; elle rendait l'usage de leurs organes aux aveugles, aux muets, aux sourds et à toutes sortes de malades. Voilà qui illustre fort bien la prophétie de l'Évangéliste : "Ceux qui croiront en lui chasseront en son nom les démons, parleront plusieurs langues, rendront aux malades la santé, détruiront les monstres." (Mc, 16, 17-18).

 

Voici la narration par Françoise Bouchard, d'un de ses plus grands miracles (in Marthe, L'hôtesse du Seigneur, Résiac, 2° éditon, Montsûrs, 2005). Un jour aux portes d'Avignon, elle haranguait une foule immense rassemblée sur le bord du Rhône. Sur l'autre rive, une jeune homme, gêné par le tumulte des flots ne parvenait pas à l'entendre; il se jeta donc à l'eau pour rejoindre l'auditoire à la nage. Emporté par le courant, il disparut dans un tourbillon d'écume. Ce fut aussitôt la consternation générale. Malgré l'intervention rapide de quelques pécheurs, il resta introuvable. Au grand désespoir de ses parents, on se résigna donc à abandonner les recherches à la tombée de la nuit. Le lendemain - trois jours plus tard affirment certains -, vers la neuvième heure, le fleuve rejeta son corps inerte sur le rivage. On accourut de toutes parts auprès de Marthe et on lui apporta le cadavre tuméfié, en la suppliant de le ramener à la vie. Celui qui avait fait sortir son frère du tombeau au bout de trois jours ne devait-il pas, en l'occurence, prouver qu'il était le seul vrai Dieu en le ressuscitant aussi ? Réalisant que la conversion de son auditoire était en jeu, elle se mit en prière; et, en s'avançant tout près du jeune homme, elle lui dit d'une voix ferme, en serrant sa main raide et glacée dans la sienne : "Au nom du Seigneur, Sauveur, Fils de Dieu, levez-vous et soyez témoin de la puissance et de la bonté du Dieu que j'annonce." L'enfant se leva, le visage aussi frais que s'il se réveillait d'un long sommeil. Un tel événement eut ses effets retentissants : tout d'abord, le baptême immédiat du jeune homme et de toute l'assistance, et ensuite le ralliement au christianisme de tous ceux qui en furent informés. Pour commémorer ce miracle, on érigea sur cet emplacement, une petite chapelle (c'est tout près de cette chapelle que S. Dominique eut à coeur de faire bâtir un couvent de son ordre) qui disparut, comme tant d'autres, sous les pics et les pioches des Révolutionnaires de 1789.

 

Après sa mort, Sainte Marthe fit encore de nombreux miracles; au V° siècle, elle obtint la guérison de Clovis venu la prier sur son tombeau à Tarascon en 500. À peine eut-il touché le tombeau de la bienheureuse qu'il fut délivré d'une maladie de reins dont il avait été jusqu'alors tourmenté. En reconnaissance, Clovis donna à Dieu par une charte scellée de son sceau la terre située autour de l'église de Sainte-Marthe, jusqu'à trois lieues de l'un et l'autre côté du Rhône.

 

Le tombeau de sainte Marthe, qui contient encore ses reliques, est un sarcophage, en marbre blanc, ayant des sujets sculptés sur l'une de ses faces, comme on en voit beaucoup dans les catacombes. Il représente Moïse faisant jaillir l'eau du rocher pour désaltérer le peuple hébreu dans le désert; Notre-Seigneur multipliant les pains et les poissons pour nourrir une grande foule dans le désert; Suzanne entre les deux vieillards figurant l'Église persécutée par les Juifs et par les païens; Notre-Seigneur changeant l'eau en vin aux noces de Cana; puis prédisant le reniement de S. Pierre, en enfin ressuscitant Lazare.

 

Dans ses Biographies évangéliques publiées en 1881, Mgr Jean-Joseph Gaume indique :

 

"depuis deux siècles le tombeau de la sainte n'est plus visible aux pélerins; ... on en a fait mouler les bas-reliefs, il y a une trentaine d'années (soit vers 1850, sans doute au moment de la Seconde république. Ndlr.) et on les a reproduits en fonte dans l'église supérieure.

... En 1793, les impies qui avaient mutilé le portail de l'église, brisé les statues des saints et les pierres sépulcrales, voulurent aussi détruire le tombeau de sainte Marthe et profaner ses reliques. Trois fois ils descendirent dans la crypte, et trois fois la puissance divine les arrêta. C'est alors qu'un ancien magistrat fit murer l'entrée de la crypte, qui fut rouverte quelques années après, et où Notre-Seigneur glorifie encore sa sainte hôtesse par des guérisons miraculeuses.

L'église de Sainte-Marthe perdit à la Révolution une croix de cuivre à deux branches superposées, celle d'en haut plus étroite que celle d'en bas, dont on croit que sainte Marthe se servit quand elle prit la Tarasque. C'est ainsi qu'elle est mentionnée dans un inventaire de 1487. Elle était représentée dans les sculptures du portail qui date du douzième siècle. Cette croix servit de modèle à celle que portaient les chevaliers, les religieux et les religieuses de l'Ordre du Saint-Esprit."

(Mgr Gaume, Biographies évangéliques, 1881-1893, tome I, Nouvelle édition ESR, 2007, p. 317-318.)

 

Église Sainte-Marthe de Tarascon

 

Ci-dessous, image de la Croix de l'Ordre du Saint-Esprit, "croix de cuivre à deux branches superposées, celle d'en haut plus étroite que celle d'en bas, dont on croit que sainte Marthe se servit quand elle prit la Tarasque" (Mgr Gaume) :

Croix de l'Ordre du Saint-Esprit. Supprimé en 1791 pendant la Révolution française, l’ordre du Saint-Esprit fut ensuite rétabli en 1814. Louis XVIII le conférera notamment à Alexandre Ier de Russie, à Francois Ier d'Autriche, à Frédéric-Guillaume III de Prusse et au duc de Wellington. Charles X restaura les cérémonies de l'ordre.  Comme l'ordre de Saint-Michel, l'ordre du Saint-Esprit n'est plus attribué par l'État à partir de la Révolution de juillet 1830.

Croix de l'Ordre du Saint-Esprit. Supprimé en 1791 pendant la Révolution française, l’ordre du Saint-Esprit fut ensuite rétabli en 1814. Louis XVIII le conférera notamment à Alexandre Ier de Russie, à Francois Ier d'Autriche, à Frédéric-Guillaume III de Prusse et au duc de Wellington. Charles X restaura les cérémonies de l'ordre. Comme l'ordre de Saint-Michel, l'ordre du Saint-Esprit n'est plus attribué par l'État à partir de la Révolution de juillet 1830.


Sources : (1); (2); (3) Françoise Bouchard, Marthe l'hôtesse du Seigneur, Résiac, 2° édition, Montsûrs, 2005, p. 45-46; (4) Mgr Gaume, Biographies évangéliques, 1881-1893, tome I, Nouvelle édition ESR, Cadillac 2007, p. 317-318 ; (5) Le Petit Livre des Saints, Éditions du Chêne, tome 2, 2011, p. 140.

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28 juillet 2023 5 28 /07 /juillet /2023 00:00
Saint Samson, évêque (v. 565)

Moine gallois, il partit prêcher en Irlande puis en Cornouailles avant de se rendre en Bretagne.

Né en 490, Samson est l'un des nombreux
saints bretons que les traditions font venir des pays celtiques d'outre-Manche. Il est l'un des sept saints fondateurs de Bretagne. († v. 565). La ville de Dol-de-Bretagne est une étape du pèlerinage médiéval des sept saints de Bretagne continentale appelé Tro Breizh (Tour de Bretagne).

 

Il fonda un monastère et une ville, Dol, se créa autour. Lorsque le suzerain se fit renverser, Samson alla voir Childéric Ier pour qu'il rétablisse son suzerain qui l'avait aidé dans ses projets missionnaires. Il évangélisa la basse Seine avant de revenir mourir à Dol.

 

Son arrivée se signala par un miracle : la guérison de deux femmes, l'une lèpreuse et l'autre possédée du démon. D'après la légende, le mari de la lèpreuse fit don à saint Samson d'un terrain sur lequel s'élèvera le monastère de Dol.

 

Samson aurait reçu sa formation dans le monastère de saint Iltud (Llantwitt). Il est consacré évêque du Pays de Galles par Dubric et décide de s’exiler en Armorique où il débarque à l’embouchure du Guioul avant de fonder le monastère de Dol. On le retrouve lors des tractations entre le roi franc Childebert Ier (511-588) et le chef breton Judual (Judikaël), qui grâce à son intervention, est rétabli dans ses droits sur la Domnonée.

 

Sources : (1); (2); (3)

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27 juillet 2023 4 27 /07 /juillet /2023 00:00
Saints Nathalie, Aurèle et leurs compagnons, martyrs († 852)
Saints Georges, Aurèle et Nathalie de Cordoue, Félix et Liliose, martyrs (+ 852)

Le 27 juillet 852, deux couples, Nathalie et son mari Aurèle, Félix et sa femme Liliane, accusés d’avoir renié l’Islam sont exécutés sur ordre du calife Abderrahman II. Cette histoire ne manque pas de concordance avec l'époque actuelle.

L’émirat de Cordoue (756-1031) en Andalousie est souvent décrit comme un symbole de la tolérance entre Musulmans, Chrétiens et Juifs. Les relations étaient souvent bonnes mais à condition que les Chrétiens acceptent leurs positions de dhimmis ou protégés, qu’ils n’épousent pas de musulmanes, et surtout qu’ils ne renient pas l’Islam s’ils avaient à un moment ou l’autre changé de religion.

Les dhimmis étaient 'protégés' moyennant l'acquittement d'un lourd impôt de capitation (jizya), d'un impôt foncier (kharâj), d'une certaine incapacité juridique et du respect de certaines règles édictées dans un "pacte" conclu avec les autorités. Ils ont une liberté de culte restreinte (interdiction de construire de nouveaux lieux de culte ou l'interdiction du prosélytisme)...

La majeure partie des Chrétiens d'Espagne n'avait déjà plus de Chrétien que le nom, ils dérangeaient fort peu les occupants musulmans. Les plus fervents et convaincus pratiquaient essentiellement en cachette, les prêtres non-apostats ne devaient pas avoir beaucoup de paroissiens... Des siècles d'arianisme jamais guéri et d'autres aventurismes théologiques, tout cela avait éloigné une bonne partie de la population du Christ. Mêmes causes, mêmes effets, voyez le restant de l'Occident de nos jours... Notons que cela n'empêcha pas ensuite la fameuse Reconquista, maison par maison, forêt par forêt... mais, il est vrai, il y avait alors les rois catholiques.

Certains comme l’évêque de Cordoue, prônaient la négociation, le compromis... D’autres comme le moine Euloge, criaient à la compromission et poussaient à des gestes ou des paroles jugées 'provocantes' qui aboutissaient au martyre. Le résultat ce sont 48 martyrs entre 851 et 858, souvent des prêtres accusés de blasphème antimusulman. Une histoire relativement moderne donc...

Aurèle et sa femme Nathalie faisaient comme tous les chrétiens de Cordoue : ils cachaient leur foi. Aurèle était fils d'un Arabe et d'une Espagnole de la haute société. Ces derniers moururent quand il était encore jeune et le confièrent à une tante qui l'éleva Chrétiennement. Devenu grand, il se crut autorisé à faire preuve d'un certain conformisme aux usages des autorités occupantes, mais il n'abandonnait pas sa religion secrète. Mieux, il confirma dans sa Foi sa jeune épouse Sabigothe, nommée aussi Nathalie (ou Noéle), née de parents musulmans, mais qu'un beau-père Chrétien avait de très bonne heure amenée au Christianisme.

Aurèle avait un parent, Félix, qui avait cru prudent d'abandonner toute profession extérieure de la Foi, mais qui la pratiquait dans l'intimité avec sa femme Liliose, fille de Chrétiens cachés. Voyant un jour un chrétien se faire bafouer en public, ils décidèrent avec des amis de ne plus se cacher ni d'avoir peur. Arrêtés parce que les femmes ne portaient pas le voile, ils furent condamnés à être décapités.

Lorsque Cordoue eut un émirat indépendant : il y eut une véritable persécution. Saint Euloge, archevêque de Tolède, y fut massacré en 859. Mais avant d'être décapité, le saint conta par écrit la fin héroïque des Chrétiens qui l'avaient précédé dans le martyre. Il a consacré des pages émouvantes, dans son "Memoriale sanctorum" (2,10), aux saints que nous fêtons aujourd'hui. Parmi ces martyrs de Cordoue que nous fêtons tout au long de l'année, voici donc ce groupe important.

Un jour, Aurèle croisa sur sa route ce cortège tragique : un Chrétien, nommé Jean, à califourchon sur un âne, tourné vers la queue, précédé de crieurs, suivi de sbires. Son torse sanglant était fouetté par la valetaille mauresque. Aurèle voulut racheter ses petites compromissions en imitant ce saint. Il se prépara au sacrifice suprême en adoptant avec Nathalie une vie toute vouée à la pénitence et à la charité. Ils mirent de côté le strict nécessaire à l'entretien d'une fillette qu'ils laisseraient après eux.

Nathalie et Liliose parurent dans la rue sans le voile habituel aux musulmanes. Bientôt les 2 ménages durent comparaître devant le cadi, le responsable musulman local. Avec eux fut arrêté Georges, un moine quêteur venu de Palestine. Celui-ci fit une violente déclaration contre Mahomet, "fidèle du diable, ministre de l'anti-Christ, labyrinthe de tous les vices." C'en était trop : il fut condamné à partager le sort des autres. On tua d'abord Félix, puis Georges, puis Liliose, et enfin Aurèle et Nathalie. C'était le 27 juillet 852.

En 858, Usuard rapporta des reliques d'Aurèle et de Georges à Saint-Germain-des-Prés.

 
Il ne faut pas la confondre avec une autre sainte Nathalie, fêtée le 26 août avec son mari saint Adrian, martyrs à Nicomédie au tout début du 4ème siècle.

 

Sources : (1); (2); (3); (4)

 

Autres saints au calendrier martyrisés par des musulmans:

 

 
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26 juillet 2023 3 26 /07 /juillet /2023 00:00

Sainte-Anne--Mere-de-la-Tres-Sainte-Vierge-Marie.jpg

Sainte Anne : la Mère de la très Sainte Vierge

 

Sainte Anne appartenait à ce peuple choisi qui, dans les desseins de Dieu, devait donner naissance au Sauveur des hommes. Elle était de la tribu de Juda et de la race de David. Ses parents, recommandables par leur origine, devinrent illustres entre tous leurs concitoyens par l'éclat d'une vie pleine de bonnes oeuvres et de vertus. Dieu, qui avait prédestiné cette enfant à devenir l'aïeule du Sauveur, la combla des grâces les plus admirables.

Après Marie, aucune femme plus que sainte Anne ne fut bénie et privilégiée entre toutes les autres. Toute jeune enfant, elle était douce, humble, modeste, obéissante et ornée des naïves vertus de son âge. Plus tard, comme elle sut bien garder intact le lis de sa virginité! Comme elle dépassait toutes les filles, ses compagnes, par sa piété, par la réserve de sa tenue, son recueillement et la sainteté de toute sa conduite!

 


Puis, quand il plut à Dieu d'unir son sort à celui de Joachim, combien Anne fut une épouse prévenante, respectueuse, laborieuse, charitable et scrupuleusement fidèle à tous les devoirs de son état, vaquant à propos au travail et à la prière. Dieu lui refusa longtemps de devenir mère; elle se soumit humblement à cette épreuve et l'utilisa pour sa sanctification. Mais à l'épreuve succéda une grande joie, car de Joachim et d'Anne, déjà vieux, naquit miraculeusement Celle qui devait être la Mère du Sauveur et, dans l'ordre de la grâce, la Mère du genre humain. C'est sans doute un grand honneur pour sainte Anne, que d'avoir donné naissance à la Mère de Dieu; mais il lui revient beaucoup plus de gloire d'avoir formé le coeur de Marie à la vertu et à l'innocence!

L'Église célébrera dans tous les âges la piété maternelle de sainte Anne; la gloire de sa Fille rejaillira sur elle de génération en génération.

 

Le culte de sainte Anne a subi diverses alternatives.

Son corps fut transporté dans les Gaules, au premier siècle de l'ère chrétienne, et enfoui dans un souterrain de l'église d'Apt, en Provence, à l'époque des persécutions romaines. A la fin du VIIIe siècle, il fut miraculeusement découvert et devint l'objet d'un pèlerinage. Mais c'est essentiellement au XVIIe siècle que le culte de sainte Anne acquit la popularité dont il jouit.


De tous les sanctuaires de sainte Anne, le plus célèbre est celui d'Auray, en Bretagne; son origine est due à la miraculeuse découverte d'une vieille statue de la grande Sainte accompagnée des circonstances les plus extraordinaires et suivies de prodiges sans nombre. Sainte-Anne d'Auray est encore aujourd'hui l'objet d'un pèlerinage national.

 

Wikipedia relève une légende "Anne, La « grand-mère des Bretons »".

 

En breton, sainte Anne est surnommée « Mamm gozh ar Vretoned », c’est-à-dire la grand-mère des Bretons. Des légendes la décrivent comme originaire de Plonévez-Porzay (Gwenc'hlan Le Scouëzec, Guide de la Bretagne (page 457), Coop Breizh, Spézet, 1997). Anatole Le Braz publie un récit (Magies de la Bretagne, tome 1 - Le Pardon de la mer, page 1088, Robert Laffont, coll. « Bouquins », Paris, 1994) dans laquelle Anne est mariée à un seigneur cruel et jaloux, qui lui interdit d’avoir des enfants. Lorsqu’elle tombe enceinte, il la chasse du château de Moëllien. Son errance avec la petite Marie la conduit à la plage de Tréfuntec où l’attend un ange, près d’une barque. Selon la volonté de Dieu, l'ange l'amène jusqu’en Galilée. Bien des années plus tard, Marie épouse Joseph et devient la mère du Christ. Anne revient en Bretagne pour y finir sa vie dans la prière et distribue ses biens aux pauvres. Toujours selon cette légende, le Christ vient lui rendre visite, accompagné de ses disciples Pierre et Jean, et lui demande sa bénédiction, avant de retourner en Terre sainte. Son corps aurait disparu après sa mort, mais des pêcheurs auraient retrouvé une statue à son effigie en baie de Douardenez. Celle-ci, installée près de l'endroit où Jésus avait fait jaillir une source, est devenue le but du plus ancien pèlerinage consacré à Sainte Anne et a pris le nom de Sainte-Anne-la-Palud.

Le Grand Pardon qui, depuis l'antiquité, rassemble des milliers de pèlerins, le dernier week-end d'août de chaque année, est certainement le plus authentique et le plus ancien d'Armorique.

 

Dans la mythologie du monde celte, une "divine Ana" (di-ana) était déjà réputée pour être la mère de tous les dieux et l'épouse d'un dieu-père jupitérien (un caractère comparable à celui du Jupiter classique). Cette grand-mère, incarnation de la Terre elle-même, était surnommée Matrona, "la Mère divine".

 

"Appelée Ana ou Dana en Irlande, Anna ou Dôn en Galles, elle s'est maintenue comme Ste Anne, la 'Grand-mère de tous les Bretons', en Armorique. [...] "le sol, la terre", [...] une incarnation de la Terre elle-même, ce que confirment son autre appellation fréquente  -Ana - 'la Mère, la Nourrice' - sa présentation comme celle qui assure la nourriture des occupants du monde.

En Irlande, "son souvenir s'est perpétué jusqu'à nos jours dans la tradition orale qui situe en effet sa cour féérique - Seanhaile Anann, l'antique Cour d'Ana' - toutes les nuits près de Waterford en Leinster.

 

[...] En Armorique, le culte d'Anne, la grand-mère du Christ, ne date, à ce que l'on sait, que du XIIe siècle et son nom n'est attesté plus anciennement que par l'anthroponymie et la toponymie. Le succès de ce culte n'en a pas moins été si important qu'il a valu à Anne le titre de patronne officielle du pays et celui, populaire, de Mamm Gozh ar vretoned, la 'Grand-Mère, Ancêtre des Bretons. Connaissant le satut divin éminent d'Ana/Dana en irlande et d'Anna/Dôn au pays de Galles, on ne peut croire que ce ne soit là qu'une 'coïncidence miraculeuse', d'autant plus que déjà l'Antiquité celte, une 'divine Ana', Di-Ana, était déjà réputée comme grande Mère de tous les dieux et épouse du dieu-père identifié à Jupiter..." (Claude STERCKX, La mythologie du Monde celtique, Poche Marabout, Allemagne 2014, p. 218-219)



L'historienne Anne Bernet évoque elle aussi dans son livre Clovis et le Baptême de la France, un lien entre Ste Anne et la religion primitive de la Gaule. Elle indique non pas que sainte Anne serait originaire de Bretagne, y aurait vécu avant d'aller en Galilée, puis serait revenue en Bretagne, mais que "le culte d'une déesse-mère chtonienne, maîtresse de la vie et de la mort, associée à l'agriculture, protectrice des troupeaux et des chevaux, parfois identifiée à la lune, aux sources, au feu, et guérisseuse" était répandu en Gaule.

Ce qui est étonnant, c'est que sainte Anne était déjà connue et vénérée chez nous en France, avant l'apparition du christianisme. "Elle est ainsi évoquée, écrit Anne Bernet, selon les lieux et les circonstances, sous le nom d'Epona ou de Rigantona...; sous le nom d'Anna ou de Dana, aïeule des dieux et des hommes... ; et parfois sous ceux de Belisima (la 'Très Brillante') ou de Rosmerta.

 

C'est encore sous une autre appellation, la 'Vierge qui enfantera', que la connaissent les druides du collège national de la forêt des Carnutes. Encore très populaire aux premiers temps du christianisme, la déesse a été convertie.

Le sanctuaire de la 'Virgo paritura' correspond à la cathédrale de Notre-Dame de Chartres; tant la croyance des Carnutes en la Vierge-Mère était propre à annoncer le mystère de l'Incarnation. Les sanctuaires d'Anna sont devenus ceux de sainte Anne, aïeule elle aussi, mais du vrai Dieu, et que les Bretons nomment toujours 'Mamm Goz', grand-mère".

La fête de Sainte Anne, la grand mère de Jesus-Christ, en Bretagne.

"Marie aime la France, elle lui a envoyé les amis de son coeur, Lazare, Marthe et Marie-Madeleine, et lui a confié les reliques de sainte Anne sa mère. La cathédrale Sainte-Anne d'Aprt, dans le Vaucluse, l'une des plus anciennes églises d'Occident à avoir mis en honneur le culte d'Anne, détient une partie de ses reliques rapportées d'Orient. Celles qui se trouvent en Bretagne, notamment à Sainte-Anne d'Auray, en Italie, au Canada, proviennent d'Apt." (Père Marie-Antoine de Lavaur, Les Grandes Gloires de Saint Antoine de Padoue, Éditions du pech, Toulouse 2016, pp. 27-28.)

Sainte Marie jeune lisant pour sa mère Anne, Manuscrit du XVe siècle

Sainte Marie jeune lisant pour sa mère Anne, Manuscrit du XVe siècle

Sources: (1); (2); (3) Claude STERCKX, La mythologie du Monde celtique, Poche Marabout, Allemagne 2014, p. 218-220; (4) Anne Bernet, Clovis et le Baptême de la France, Editions Clovis, 1995, p. 28-30.

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25 juillet 2023 2 25 /07 /juillet /2023 00:00
Le Petit Livre des Saints, Éditions du Chêne, tome 1, 2011, p. 69.

Le Petit Livre des Saints, Éditions du Chêne, tome 1, 2011, p. 69.

Il (Hérode Agrippa Ier) supprima Jacques, frère de Jean, en le faisant décapiter.

Actes, XII, 2

Saint Jacques le Majeur, fils de Zébédée et de Salomé, était frère de saint Jean l'Évangéliste.

 

On le surnomma le Majeur, pour le distinguer de l'Apôtre du même nom surnommé le Mineur (fête le 3 mai), qui fut évêque de Jérusalem.

 

Jacques était de Galilée et vint au monde douze ans avant Jésus-Christ. Il exerçait la profession de pêcheur, ainsi que son père et Jean, son frère. Un jour qu'ils nettoyaient leurs filets dans une barque sur les bords du lac de Génésareth, Jésus appela les deux frères; à l'instant, quittant leur barque et leur père, ils se mirent à Sa suite et furent bientôt agrégés au collège des Apôtres.

Le choix que Jésus fit des deux frères pour être, avec Pierre, témoins de Sa Transfiguration, et plus tard de Sa prière au Jardin des Oliviers, montre assez l'affection dont Il les honorait. Après la dispersion des Apôtres, Jacques le Majeur vint en Espagne, dont Dieu le destinait à faire la conquête. Il la parcourut en tous sens et la féconda de ses sueurs; mais il ne put convertir que neuf disciples. N'est-ce pas un sujet de consolation pour les prédicateurs dont les efforts ne sont pas toujours couronnés de succès? Dieu Se plaît ainsi à éprouver Ses envoyés; ils sèment, d'autres recueilleront la moisson.

Du reste, Jacques eut une grande consolation: la Sainte Vierge, vivante encore, lui apparut et lui demanda de construire, en Son honneur, une chapelle qui serait une protection pour l'Espagne. La Sainte Vierge a maintes fois prouvé depuis aux Espagnols qu'ils étaient sous Sa sauvegarde.

Saint Jacques revint à Jérusalem, y prêcha la foi de Jésus-Christ et convertit beaucoup de personnes. L'Apôtre gagna à Jésus-Christ deux magiciens qui avaient cherché à le confondre par leur art diabolique.

 

Un jour qu'il prêchait, une émeute, préparée à l'avance, se souleva contre lui; on le conduisit au gouverneur Hérode, en disant: "Il séduit le peuple, il mérite la mort." Hérode Agrippa Ier, homme sans conscience, visant avant tout à plaire, commanda de trancher la tête au saint Apôtre.

Saint Jacques le Majeur, fêté le 25 juillet, est le premier apôtre martyr, décapité sur l'ordre d'Hérode Agrippa vers 41 (Ac. 12, 1-2) lors des premières grandes persécutions contre les communautés chrétiennes à Jérusalem

Saint Jacques le Majeur, fêté le 25 juillet, est le premier apôtre martyr, décapité sur l'ordre d'Hérode Agrippa vers 41 (Ac. 12, 1-2) lors des premières grandes persécutions contre les communautés chrétiennes à Jérusalem

Eusèbe, d'après Clément d'Alexandrie, raconte que ce martyre fut l'occasion de la conversion du dénonciateur de Jacques, qui soutenant l'accusation devant le tribunal, fut bouleversé par le courage de l'apôtre, se convertit sur l'heure et se déclara chrétien. Conduit au supplice avec sa victime, il le supplia de lui pardonner. Jacques réfléchit un instant. "La paix soit avec toi, dit-il. Et il l'embrassa." (1) Le dénonciateur s'appelait Josias. (Source: Clément d'Alexandrie cité par Eusèbe, Historia Ecclesiastica)

 

Le privilège de l'épithète "majeur" lui vient de sa plus grande ancienneté parmi les appelés du Christ. (2) Ayant repéré Jacques et Jean, son frère, qui rangeaient leurs filets dans leur barque, Jésus leur dit : "Venez à ma suite, et je vous ferai pêcheurs d'hommes." (Mt, IV, 18-19;)

 Une tradition fit de Jacques l'évangélisateur de l'Espagne, avant sa mort ou par ses reliques. Sa dépouille mortelle y fut conduite par quelques disciples. Il n'est peut-être pas au monde un ancien pèlerinage plus célèbre que celui de Saint-Jacques de Compostelle.

 

St Jacques a été souvent le défenseur de l'Espagne contre les Sarrasins. Il y est particulièrement vénéré sous le nom de Santiago. Son corps aurait été découvert en 813 grâce à une étoile dans un champ, d’où le nom de "Compostelle". "C'est alors que St Jacques devient le patron de la Reconquête sur l'islam. On l'a vu apparaître, en 844, au fort de la bataille de Clavijo, pour conduire l'épée à la main, les armées de la chrétienté contre celle de l'Infidèle. St Jacques est le Matamore, celui qui vainc les Maures." (3)

"L'an 844 est, ... selon la tradition, l'année de la bataille de Clavijo où l'apôtre saint Jacques apparaît pour aider les chrétiens à battre les musulmans." (4)

Mais dès 776, on trouvait déjà cette idée que St Jacques devait défendre les chrétiens contre les musulmans dans les Commentaires de l'Apocalypse de Beatus, un personnage influent de la cour des Asturies. (5)

Le pèlerinage vers St Jacques de Compostelle a été le grand pèlerinage depuis le Moyen Age, et les "jacquets" marchent toujours vers le champ de l’étoile.

Saint Jacques en matamore. Musée de Carrión de los Condes, sur le Camino francés

Saint Jacques en matamore. Musée de Carrión de los Condes, sur le Camino francés

En 844, alors que Ramire Ier, dixième descendant de Pelayo, venait de subir une sévère défaite à Albelda, face à l'armée d'Abd al-Rahman II, il remporta une victoire sur son opposant. S'étant retiré sur la proche colline de Clavijo pour passer la nuit, saint Jacques lui apparut en songe, l'encouragea à reprendre les armes le lendemain et l'assura de sa protection. Au cours de ce nouveau combat, monté sur un destrier étincelant de blancheur, l'apôtre prêta main forte à ses protégés, qu'il mena à la victoire, et libéra du tribut les cent vierges que l'émir percevait chaque année depuis le règne de Mauregat des Asturies. Le 25 mai 844, en signe de gratitude, le roi Ramire Ier institua la Voto de Santiago, un tribut dû à la cathédrale de Compostelle, renouvelable chaque année, sur les céréales, par les agriculteurs du Nord de la péninsule Ibérique. Ce tribut ne fut aboli qu'en 1812 par les Cortès de Cadix. Il s'agit de la première manifestation historique de saint Jacques en matamore.

Clavijo, ermitage : Santiago, tableau Matamore. A Clavijo, dans l'ermitage, sur la montagne où se retira le roi Ramire avant la bataille, un tableau commémore sa victoire.

Clavijo, ermitage : Santiago, tableau Matamore. A Clavijo, dans l'ermitage, sur la montagne où se retira le roi Ramire avant la bataille, un tableau commémore sa victoire.

Des routes de pélerinage s'inscrivent sur la carte de l'Europe. Ce sont les routes que les pélerins se conseillent mutuellement, celles que leur indiquent les monastères. Ce sont aussi les routes où les pélerins sont assurés de trouver gîte, soins et assistance en des hospices conçus pour eux et financés à cette fin par la charité publique. Les hôpitaux sont des lieux sacrés, des maisons de Dieu, qui procurent le réconfort aux pélerins, le repos aux indigents, la consolation aux malades, le salut aux morts et l'aide aux vivants.

 

Les plus célèbres de ces "chemins" sont ceux de Compostelle, dont le réseau étendu sur toute l'Europe organise la convergence et facilite les aménagements logistiques.

Les Chemins de St Jacques de Compostelle au Moyen Âge. Image extraite du livre de Jean FAVIER, "Les Grandes découvertes, d'Alexandre à Magellan", Fayard, Paris 1991, p. 124-125.

Les Chemins de St Jacques de Compostelle au Moyen Âge. Image extraite du livre de Jean FAVIER, "Les Grandes découvertes, d'Alexandre à Magellan", Fayard, Paris 1991, p. 124-125.

Il y a le "Chemin" par excellence, le Camino, dont le tronçon final atteint Compostelle depuis Saint-Jean-Pied-de-Port et le Val de Cize par le col de Roncevaux, Pampelune, Logrono, Burgos et Leon.

 

Une route littorale par Bayonne, Bilbao, Santander et Oviedo double le "Chemin".

 

Vers ces passages des Pyrénées convergent en France quatre grandes routes.

 

L'une vient de la Loire et de l'Aquitaine. C'est celle des pélerins regroupés à Paris, où le départ se donne traditionnement à Saint-Jacques-de-la-Boucherie et où les premiers soins sont donnés en haut de la rue St Jacques, à l'établissement tenu par les frères Hospitaliers de Saint-Jacques-du-Haut-Pas. Par Orléans, Tours, Poitiers, Saint-Jean-d'Angély, Saintes et Bordeaux, elle gagne Ostabat et la montée vers le Col. Quelques-uns préfèrent à Poitiers, abandonner la route traditionnelle et passer par Charroux et Angoulême. Pour l'essentiel, cette "route de Tours" est celle qui permet de prier sur la tombe de l'Apôtre des Gaules : saint Martin est à peu près aussi célèbre que saint Jacques. En 732, devant l'invasion des Arabes, le monde franc eut peur pour son sanctuaire de Tours où est le tombeau de St Martin. Pouvoir conjuguer les deux pélerinages ne laisse personne indifférent. D'autres, les Normands et les Bretons, partent du Mont-Saint-Michel; par Nantes ou par Angers, ceux-là rejoignent le gros des pélerins à Poitiers ou à Saint-Jean-d'Angély.

 

L'autre part de Vézelay. Elle en tire une grande renommée. Ste Marie-Madeleine va protéger le pélerin au long de sa route (en 882 le moine Badilon apporta de Saint-Maximin-la-Sainte-Baume à Vézelay, des reliques de Marie-Madeleine.) C'est la "route limousine", celle des pélerins venus de Champagne et de Lorraine; voire d'Allemagne. Dès le départ, elle offre une "option" : on peut, avant de prendre la route du sud-ouest, faire une excursion à Avallon et Cluny, voir Autun ou Tournus. De Vézelay, on gagne Neuvy-Saint-Sépulcre, soit par le nord, c'est-à-dire par La Charité, Bourges et Châteauroux, où l'on se repose à l'abbaye de Déols, soit par le sud, c'est-à-dire parNevers, Saint-Amand et La Châtre. Les deux cheminements de la route limousine se joignent à Neuvy-Saint-Sépulcre, d'où la plupart des pélerins gagnent Saint-Léonard-de-Nobat, Limoges, Périgueux. On prie Saint Léonard de Noblat, contemporain de Clovis, célèbre pour avoir fait libérer des prisonniers, saint Martial, évêques des Gaules, et saint Front, et l'on admire par la même occasion, les trésors de reliquaires qui font la réputation de l'émail limousin aussi bien que les extraordinaires coupoles des églises périgourdines. On fait la provision de médailles. Le Musée de Cluny conserve de ces médailles de plomb, comme celle où, sur une silhouette de château crénelé, on voit Léonard briser en levant la main les chaînes d'un prisonnier. La médaille protégera des mauvaises rencontres.

 

La troisième route vient du Puy. Elle passe par Figeac et Cahors. Elle offre la possibilité de vénérer à Conques les reliques de sainte Foy, l'une des martyres les plus renommées de la France médiévale, morte cuite sur un lit d’airain et décapitée à l’âge de douze ans, à Agen en Gaule, en 303. On peut aussi trouver à l'abbaye de Moissac l'occasion de prier et de se faire panser. Sur cette route cheminent les pélerins venus de Lyon, de Vienne et de l'au-delà, du Dauphiné comme de la comté de Bourgogne et de tout l'Empire. C'est la "route des Teutons". Elle comporte une variante par Brioude, Aurillac et Souillac. Mais le pélerin peut aussi rejoindre à Clermont la route de Tulle et de Souillac.

 

Une quatrième route ne rejoint le "Chemin" qu'au-delà des Pyrénées: c'est la "route de Saint-Gilles" qui, de Provence, atteint l'hospice d'Oloron-Sainte-Marie et le col du Somport en visitant Arles, Saint Gilles-du-Gard, Saint-Guilhem-le-Désert et Toulouse. Les pélerins venus d'Italie, voire d'Orient, l'empruntent avec les Provençaux et les languedociens. Par cette route, ils peuvent prier devant les restes de Saint Trophime, fondateur de l'église d'Arles au IIIe siècle, Saint-Gilles, moine ermite du VIIe siècle, et Saint-Sernin, martyr du IIIe siècle, mais on peut aussi flâner aux Alicamps et rêver là aux héros des chansons de geste, puis faire le détour par les Saintes-Maries-de-la-Mer.

Sources
 

(1) DANIEL-ROPS, Histoire de l'Eglise du Christ, tome II Les Apôtres et les Martyrs, Librairie Arthème Fayard, Paris 1965; (2) Xavier BARRAL I ALTET, Compostelle, Le Grand chemin, Découvertes Gallimard, p. 14; (3) Jean FAVIER, Les Grandes découvertes, d'Alexandre à Magellan, Fayard, Paris 1991, p. 122; (4) Serafin FANJUL, Al-Andalus, L'Invention d'un mythe, La réalité historique de l'Espagne des trois cultures, L'Artilleur, Condé-sur-Noireau 2017, p. 35; (5) Xavier BARRAL I ALTET, Compostelle, Le Grand chemin, Découvertes Gallimard, p. 19-20; (6); (7); (8); (9) ; (10) Le Petit Livre des Saints, Éditions du Chêne, tome 1, 2011, p. 68-69.

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24 juillet 2023 1 24 /07 /juillet /2023 00:00
Sainte Christine de Rome, Vierge et Martyre († vers l'an 300)

Christine était une enfant de dix ans; cependant il ne fallut pas moins de trois tyrans successifs pour la faire mourir, car les deux premiers furent victimes de leur cruauté. Elle devait périr sous les flèches, puis attachée à une roue, puis mordue par des serpents..

Elle avait pour père un gouverneur romain, nommé Urbain, très attaché au culte des faux dieux. Christine, inspirée d'en haut, après avoir ouvert les yeux à la vraie foi, enleva toutes les idoles d'or et d'argent que son père adorait dans sa maison, les mit en pièces et les donna en aumône à de pauvres chrétiens. A cette nouvelle, la colère de son père ne connut pas de bornes; elle fut souffletée, fouettée, déchirée avec des griffes de fer et jetée dans une profonde prison.

Au milieu de ces tortures, l'héroïque enfant conservait la paix de son âme et ramassait les morceaux de sa chair pour les présenter à son père dénaturé. Le supplice de la roue et celui du feu lui furent inoffensifs. 

 

Un Ange vint ensuite dans la prison de Christine guérir ses plaies. Son père tenta un dernier effort; il la fit jeter dans le lac de Bolsène (Italie centrale) avec une pierre au cou, mais un Ange la conduisit saine et sauve au rivage. Ce nouveau prodige irrita tellement le père barbare, que, le lendemain, on le trouva mort dans son lit.

Un nouveau gouverneur fut l'héritier de sa cruauté; il fit coucher Christine dans un bassin d'huile bouillante mêlée de poix; mais elle fit le signe de la Croix Salut du monde, sur elle, et ne ressentit pas les atteintes de ce supplice. Après de nouvelles tortures, on la conduisit dans le temple d'Apollon; dès qu'elle y entra, l'idole se brisa en pièces, et le tyran tomba raide mort. Sur le coup, trois mille infidèles se convertirent à la vraie foi.

La courageuse martyre dut être présentée devant un troisième juge, qui eut à c
œur de venger la honte et la mort de ses deux prédécesseurs. Il fit jeter la jeune martyre dans une fournaise ardente, où elle resta cinq jours sans en rien souffrir. Les bourreaux, à bout d'expédient, la laissèrent en prison au milieu d'une quantité de vipères que ne lui firent aucun mal. On lui coupa la langue sans qu'elle perdît l'usage de la parole. Enfin, attachée à un poteau, elle fut percée de flèches.

Son tombeau fut retrouvé à Bolsena, ville italienne du sud  de la Toscane, en 1880.

La tradition chrétienne célèbre le miracle du Corporal, survenu à Bolsena en 1263. Un prêtre originaire de Bohème, Pierre de Prague, durant la célébration de l'Eucharistie dans l’église de sainte Christine, aurait eu des doutes sur la transsubstantiation. Du sang, jailli de l'hostie consacrée, mouilla le corporal et les linges liturgiques. Le pape Urbain IV, qui se trouvait dans la ville voisine d'Orvieto, fut informé de cet événement et envoya l'évêque Giacomo pour contrôler la situation, avec la mission de ramener avec lui le linge consacré ensanglanté qui se trouve toujours dans la cathédrale d'Orvieto. Le pape, constatant le miracle ainsi que saint Thomas d’Aquin, promulgua le 11 août 1264 la bulle Transiturus de hoc mundo ad Patrem qui instituait la Fête du Corpus Domini (Fête-Dieu).

 

PRATIQUE. Ne vous rebutez d'aucune difficulté; dites avec saint Paul: "Je puis tout en Celui qui me fortifie."

Sainte Christine portant des flèches et avec sa meule est accompagnée par saint Jacques. Peinture flamande vers 1490. Ancienne Pinacothèque de Munich

Sainte Christine portant des flèches et avec sa meule est accompagnée par saint Jacques. Peinture flamande vers 1490. Ancienne Pinacothèque de Munich

Sainte Christine de Rome ne doit pas être confondue avec deux autres saintes du même nom, Christine de Tyr, célébrée en Orient, et qui a été victime à 14 ans des persécutions de l’empereur Dioclétien vers 300, a subi de terribles supplices en gardant le sourire, avant d’avoir le cœur transpercé par une lance; eChristine l’admirable, une mystique du XIIIème siècle dont les expériences sont "admirables" et incroyables bien que rapportées par un sage chroniqueur, le cardinal Jacques de Vitry.

Sources: (1) Vie des Saints pour tous les jours de l'année avec une pratique de piété pour chaque jour et des instructions sur les fêtes mobiles, Alfred Mame et Fils éditeurs, Tours 1867, p. 205; (2) Abbé L. Jaud, Vie des Saints pour tous les jours de l'année, Tours, Mame, 1950.

 

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23 juillet 2023 7 23 /07 /juillet /2023 00:00
Sainte Brigitte, dans Le Petit Livre des Saints, Éditions du Chêne, tome 2, 2011, p. 29.

Sainte Brigitte, dans Le Petit Livre des Saints, Éditions du Chêne, tome 2, 2011, p. 29.

Fille de parents nobles, sainte Brigitte fut éducatrice à la cour royale de Suède, épouse, mère de famille, veuve et fondatrice d'une congrégation religieuse. Favorisée de révélations célestes, elle fut appelée à jouer un rôle éminent aussi bien auprès des papes qu'auprès des dirigeants politiques de Suède et d'Europe, comme put en faire autant Ste Catherine de Sienne (1347-1380).


Sainte Brigitte naquit en Suède vers l'an 1302, 
dans le Roslagen à une cinquantaine de kilomètres au nord de Stockholm. Elle était fille de Birgier Magnusson, prince du sang royal de Suède. Sa mère avait été sauvée d'un naufrage en considération de l'enfant qu'elle portait dans son sein. Bien qu'à sa naissance un saint personnage eût reçu de la Sainte Vierge l'assurance que cette enfant ferait entendre sa voix dans tout l'univers, Brigitte fut muette, jusqu'à l'âge de trois ans; mais, ce temps écoulé, elle parla tout à coup aussi bien qu'une grande personne.
 

Dès son enfance, elle ne prenait plaisir qu'à des discours sérieux. La grâce agissait si puissamment dans son coeur, qu'elle n'avait d'attrait que pour les exercices de piété. A l'âge de dix ans, elle fut singulièrement touchée d'un sermon sur la Passion du Sauveur. La nuit suivante, elle vit le divin Crucifié tout couvert de plaies et de sang, et L'entendit dire: "Regarde, Ma fille, comme J'ai été traité. – Et qui Vous a traité si cruellement? dit-elle. – Ce sont ceux qui Me méprisent et sont insensibles à Mon amour pour eux." À partir de cette époque, la seule pensée des mystères de la Passion lui faisait couler ses larmes. Horrifiée par l’état physique dans lequel Il se trouvait, elle fut prise de dévotion pour les Saintes Plaies du Christ, à qui elle en demanda le nombre précis.

 

Une nuit que Brigitte était en prière, sa tante, chargée de son éducation après la mort de sa mère, la surprit et voulut la frapper; mais la verge se rompit entre ses mains. Brigitte, tout enfant, était souvent assaillie par le démon qui prévoyait en elle une grande ennemie; mais elle trouvait un secours assuré en courant dans sa chambre se jeter aux pieds du crucifix qui lui avait parlé.

Malgré son goût pour la virginité, Brigitte accepta le mariage par obéissance; elle et le prince Ulf, son mari, se préparèrent par un an de prières et de bonnes oeuvres aux obligations de leur état. Dieu donna à ces pieux époux huit enfants, dont sainte Catherine de Suède. Brigitte fut le modèle des mères par sa sollicitude envers sa famille; elle éloignait de sa maison tout ce qui n'y aurait pas apporté l'édification et la vertu:

 

 

"Après la lecture de la Bible, répétait-elle à ses enfants, n'ayez rien de plus cher que la Vie des Saints."

 

Elle fut appelée en 1335 à la Cour de Suède  pour être la gouvernante de la jeune épouse du roi Magnus Eriksson, Blanche de Namur.

 

Après avoir accompli son premier pèlerinage au sanctuaire de Saint Olav, à Nidaros (Trondheim), Brigitte et Ulf entreprirent en 1341 le pèlerinage de Compostelle. Ce fut à cette occasion qu'elle prit conscience de ce qui fut toujours pour elle le plus grand scandale, le séjour du pape à Avignon. Au retour, Ulf tomba malade à Arras, et les époux auraient fait voeu d'entrer en religion. Ulf n'eut pas le temps de le réaliser, puisqu'il mourut le 12 février 1344 au monastère cistercien d'Alvastra. Commença alors pour Brigitte la seconde partie de sa vie.
 

 

 

Sainte Brigitte de Suède (1302-1373), Patronne de la Suède et des pèlerins, co-patronne de l'Europe

À la mort de son mari, elle s'adonna aux saintes oeuvres avec plus de liberté que jamais, apprenant à ses enfants à laver les pieds des pauvres, à soigner les plaies des malades, à soulager toutes les misères.

 

Jusqu'en 1349, s'étant dépouillée de ses biens, elle mena dans une dépendance d'Alvastra une vie de pénitence et de prière. Là se manifestèrent les premières révélations, dont ses confesseurs lui affirmèrent l'authenticité et l'origine divine. Elle prit alors conscience de la mission dont Dieu l'avait investie : travailler au salut du peuple chrétien. Son premier champ d'action fut la cour de Suède, mais les avertissements divins qu'elle transmit à Magnus Eriksson et à son entourage ne reçurent pas l'accueil favorable qu'elle espérait.

 

Ses révélations étonnantes ont fait d'elle la merveille de son siècle. Ainsi, eut-elle la vision d'un saint martyr qui lui dit: "Moi et d'autres saints, nous avons obtenu pour toi, de Dieu, la grâce d'entendre, voir et connaître les choses spirituelles, et l'Esprit de Dieu enflammera ton âme." Ce qui l'amènera à révéler la présence au purgatoire de son mari décédé peu de temps auparavant.

 

En 1349, accompagnée de ses confesseurs et de sa fille Catherine, Brigitte partit pour Rome dans un triple but : assister au jubilé proclamé pour 1350 par Clément VI; obtenir l'approbation de la maison religieuse qu'une révélation lui avait commandée de fonder; engager, par ordre du Christ, le pape à regagner la ville des Apôtres. Elle y mena une vie de prière, de pénitence et d'oeuvres charitables, entrecoupée de visites aux différents sanctuaires de la ville et de la campagne romaine.

Cette ascèse, sainte Brigitte l'a poussée à l'extrême. Elle s'adonnait quotidiennement à une mortification volontaire: refus de dormir dans un lit,  jeûnes prolongés, flagellation, port de cordes nouées sur la chair. La souffrance appliquée à son propre corps exprimait non seulement une volonté exacerbée de pénitence, mais aussi le désir de s'identifier au Christ souffrant. La vision de la Passion du Christ, qu'elle eut dès son enfance, a été toute sa vie l'objet particulier de ses méditations, et dans les Révélations, elle la décrit avec insistance et avec un réalisme extrême. Elle y ajoutait une dévotion à la maternité douloureuse de Marie, intermédiaire privilégiée entre l'homme et la justice divine, dévotion qui transparaît dans la place essentielle que Brigitte accorde à la Vierge dans ses Révélations. Elle attribuait plus de vertu à l'humilité et à la simplicité de l'âme qu'au savoir intellectuel: cette opinion, ni nouvelle ni originale, allait à l'encontre de l'idée répandue depuis le XIIIe siècle que la science pouvait être source de sainteté.

Pendant toute ces années elle envoya aussi quantité de messages de reproches, de menaces et d'exhortation au repentir et à la réforme, que le Christ lui commandait de transmettre aux abbés, aux cardinaux, aux souverains (l'empereur Charles IV, le roi de France, la reine de Naples...), aux papes surtout, à Clément VI, puis à Innocent VI, à Urbain V et à Grégoire XI. Tous ces grands personnages de la scène politique ne s'en émurent guère, et si Urbain V fit son entrée à Rome le 16 octobre 1367, il semble bien que les objurgations de Brigitte n'aient pas joué de rôle dans ce retour. Le pape repartit d'ailleurs en 1370, non sans avoir approuvé la fondation du monastère de Vadstena.

La fondation de Vadstena et aussi l'organisation de sa vie, à Alvastra puis à Rome, montrent la fascination qu'exerçait sur elle la vie monastique, bien qu'elle fût demeurée laïque. Son assiduité à la prière et à la méditation quotidienne ainsi qu'au sacrement de l'eucharistie dépassait largement ce qui était demandé à une simple laïque.



C'est à Rome, où elle aimait à séjourner près des tombeaux des Saints, que le Sauveur lui fit connaître l'heure de sa mort prochaine; elle rendit le dernier soupir en 1373 en prononçant avec amour les dernières paroles de Jésus expirant:

 

"Mon Père, je remets mon âme entre Vos mains."


Sa contemporaine, sainte Catherine de Sienne, liée aux Dominicains, meurt en 1380. Ces deux saintes ont en commun de ne n'avoir pas hésité à prendre à partie les puissants de leur temps, jusqu'aux papes; toutes les deux soutinrent avec fermeté l'idée d'un retour pontifical à Rome. (Thomas TANASE, Histoire de la papauté d'Occident, Gallimard, Folio Inédit Histoire 2019

p. 219.)

 

Le crucifix qui a parlé à sainte Brigitte se trouve dans la basilique Saint Paul Hors les Murs au sud de Rome.

Abside de la basilique Saint-Paul-hors-les-murs - Christ bénissant entouré de saints

Abside de la basilique Saint-Paul-hors-les-murs - Christ bénissant entouré de saints

S'agissant des Quinze oraisons attribuées à sainte Brigitte, oraisons à réciter 365 fois pendant un an, qu'elle aurait reçues par la bouche du crucifix, il faut préciser qu'il faut les prendre avec prudence compte tenu du fait qu'elles seraient fausses. En Suède, elles n'ont ainsi jamais été attribuées à sainte Brigitte et ne figurent pas dans son livre des Révélations Célestes et ne sont pas même éditées avec ce livre en supplément sinon à partir du XIXe siècle : certains esprits critiques les pensent donc apocryphes, par exemple réalisées par une religieuse brigittine du nom de Mary Oestrewyk, pourtant elles sont toujours répandues et popularisées sous le nom de Sainte Brigitte : elles ne furent très répandues qu'à partir du XVe siècle.

 

Une édition fut mise à l'Index en 1661, et elles furent condamnées par l'autorité épiscopale au XIXe siècle (Sainte Brigitte de Suède : sa vie, ses révélations et son œuvre par Madame de Flavigny) puis interdites par Rome en janvier 1954 pendant la période de "crise de l'Église" (soit quatre ans près l'interdiction faite à Henri de Lubac d'enseigner à la suite de son livre Surnaturel.)

 

 

« AVERTISSEMENT DU SAINT-OFFICE CONCERNANT LES RÉVÉLATIONS DE SAINTE BRIGITTE (28 janvier 1954)

 

On répand en diverses régions un opuscule traduit en plusieurs langues qui a pour titre : "Le secret du bonheur. Les quinze oraisons révélées par Notre-Seigneur à sainte Brigitte dans l'église Saint-Paul à Rome", et est édité à Nice et ailleurs. Comme cette brochure affirme que Dieu aurait fait à sainte Brigitte certaines promesses dont l'origine surnaturelle n'est nullement prouvée, les Ordinaires des lieux doivent veiller à ce que ne soit pas accordé le permis d'éditer les opuscules qui contiendraient ces promesses ». (Avertissement du Saint-Office concernant les révélations de sainte Brigitte, Acta Apostolicae Sedis, 1954, p. 64.)

 

Les Quinze oraisons furent cependant approuvées par un très grand nombre de prélats, de Papes (Urbain VI , Pie IX, le 31 mai 1862), et de religieux ("Ces Oraisons et ces Promesses ont été copiées sur un livre imprimé à Toulouse en 1740 et publié par le P. Adrien Parvilliers, de la Compagnie de Jésus, missionnaire apostolique de la Terre Sainte, avec approbation, permission et recommandation de les répandre"), de souverains (elles furent éditées sous Mary Tudor en Angleterre où elles jouèrent également un très grand rôle. The Medieval mystical tradition in England: Exeter Symposium VII : papers Edward Alexander Jone, Annette Grisé Pages 83-85), et furent manuscrites puis imprimées et enfin enregistrées et numérisées de siècles en siècles jusque de nos jours.

Sainte Brigitte de Suède, aux côtés de saint Benoîta été déclarée par Jean-Paul II co-patronne de l'Europe avec sainte Catherine de Sienne et sainte Thérèse-Bénédicte de la Croix. (Lettre apostolique « Spes aedificandi » 02/10/1999)

Le 4 octobre 2002 à l'occasion du jubilé de sainte Brigitte de Suède, de nombreux évêques luthériens étaient présents à Rome, ainsi que la princesse Victoria de Suède et la princesse Bénédicte de Danemark

 

Le 27 octobre 2010, Benoît XVI a consacré sa catéchèse à sainte Brigitte de Suède. (Audience générale, Place Saint-Pierre, Mercredi 27 octobre 2010)

 

Le site Abbaye-saint-benoit.ch a publié une Vie de Sainte Brigitte écrite d'après les documents authentiques par une religieuse de l'Adoration perpétuelle avec approbation épiscopale (tome second, Paris Librairie Saint-JOSEPH, Libraire éditeur, 1879)


Sources

 

(1) Vie des Saints pour tous les jours de l'année avec une pratique de piété pour chaque jour et des instructions sur les fêtes mobiles, Alfred Mame et Fils éditeurs, Tours 1867, p. 283; (2), (3); (4); (5); (6); (7); (8) ; (9) Le Petit Livre des Saints, Éditions du Chêne, tome 2, 2011, p. 28 ; (10) Dictionnaire des saints et Grands témoins du christianisme, Sous la direction de Jean-Robert ARMOGATHE et André VAUCHEZ, CNRS Éditions, Paris 2019, pp. 194-199.

 

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22 juillet 2023 6 22 /07 /juillet /2023 00:00
Sainte Marie Madeleine (1er siècle), l'Apôtre des Apôtres

"Dis-nous, Marie-Madeleine, qu'as-tu vu en chemin ?" "J'ai vu le sépulcre du Christ vivant, j'ai vu la gloire du Ressuscité. J'ai vu les anges ses témoins, le suaire et les vêtements. Le Christ, mon espérance, est ressuscité ! Il vous précédera en Galilée."

Séquence, liturgie de Pâques

Sainte Marie Madeleine

Sainte Marie Madeleine

Patronne des convertis, des pécheurs repentants, de la tentation sexuelle et des femmes, Marie Madeleine, soeur de Marthe et de Lazare, était d'une famille distinguée de Béthanie. Après la mort de ses parents, Marie avait reçu en héritage le château de Magdala, en Galilée, d'où lui vint le surnom de Madeleine, et elle y vivait dans le luxe et les plaisirs au point qu'elle devint le scandale de toute la Galilée, et qu'on ne la connut bientôt que sous le nom de la Pécheresse. En punition de ses débordements, elle fut possédée du démon jusqu'au jour où le Sauveur, lui remettant ses péchés, la délivra de la domination de Satan.


Dieu avait fait naître en ce coeur coupable le désir de voir Jésus; ce désir devait être son salut, car le Sauveur voulait donner en Madeleine un exemple frappant de Sa miséricorde infinie en même temps que de la plus parfaite pénitence. C'est elle qui, ayant un jour suivi le Seigneur chez Simon le Pharisien, versa sur les pieds de Jésus un vase de parfum précieux, les arrosa de ses larmes et les essuya avec ses cheveux, et qui entendit ensuite cette parole:

"Beaucoup de péchés lui sont pardonnés, parce qu'elle a beaucoup aimé." (1) 

 

Nous la rencontrons, depuis lors, très souvent dans l'Évangile; elle contemple Jésus et L'écoute, dans la maison de Béthanie, pendant que sa soeur Marthe s'occupe seule du service de la maison: "Marie, dit le Sauveur, a choisi la meilleure part." Une autre fois, dans les derniers jours de sa vie, Jésus voit Madeleine répandre un parfum délicieux sur cette tête divine qui bientôt sera couronnée d'épines. Elle accompagne le Sauveur au sommet du Calvaire, assiste à Sa mort et à Sa sépulture, et bientôt reçoit l'une des premières visites du Christ ressuscité: "Marie!" S'écrie le Sauveur. Et Marie, reconnaissant Jésus, Lui répond dans une effusion d'amour: "O mon Maître!" (Jn 20:16). (1) Marie-Madeleine avait connu les ténèbres du péché, elle s'était égarée dans un amour passionnel et sensible, alors que, comme beaucoup sans le savoir, elle recherchait le véritable amour. Et elle rencontra Jésus, celui qui pouvait, à lui seul, combler son coeur. Elle se jeta à ses pieds jusqu'à ce que Sa miséricorde la délivre du mal et la relève. Elle l'a suivi sur les chemins de Galilée. C'est l'amour qui la rend fidèle et lui donne la force d'être au pied de la Croix. C'est encore lui qui la fait courir au tombeau dès le lever du jour de Pâques. Elle qui avait connu de si profondes ténèbres, celles du péché qui conduit à la mort, elle découvre, la première, les lueurs du jour de Pâques qui ne finira jamais. La foi de l'Église en la résurrection du Christ se manifeste merveilleusement dans l'obéissance de son amour.

 

Fondée sur la tradition écrite et la tradition orale de l'Église, la séquence de la liturgie catholique de Pâques, petit chant ou poème récité avant la lecture de l'Évangile qui condense ou résume l'Évangile, indique ainsi : "Dis-nous, Marie-Madeleine, qu'as-tu vu en chemin ?" "J'ai vu le sépulcre du Christ vivant, j'ai vu la gloire du Ressuscité. J'ai vu les anges ses témoins, le suaire et les vêtements. Le Christ, mon espérance, est ressuscité ! Il vous précédera en Galilée".(2) [Mt 28:1-10Mc, 16:1-10Lc 24:1-10Jn 20:1-18]



Peu après, les Juifs endurcis, fatigués de ses exhortations et de celles de Marthe et de Lazare, les exposèrent sur la mer par une tempête, dans une pauvre barque sans rames ni voiles. La nacelle voguait à la garde de Dieu, et vint aborder, après quelques jours, au rivage de Marseille. Les pieux disciples du Christ firent là de nombreuses conquêtes.

Quant à Madeleine, elle s'enfonça dans les montagnes sauvages et solitaires et fut transportée par les anges dans une grotte appelée depuis
la Sainte-Baume, où elle mena une vie plus angélique qu'humaine, favorisée des grâces les plus merveilleuses, ne vivant que de la Sainte Communion, soupirant et versant des larmes de pénitence et d'amour.

 

Au pied de la montagne dans le Var et aux portes des Bouches du rhône, la basilique Sainte Marie-Madeleine de Saint-Maximin-la-Sainte-Baume, achevée en 1532 est le plus important exemple de style gothique en Provence.

Dans la tradition chrétienne médiévale, après avoir débarqué aux Saintes-Maries-de-la-Mer, Sainte Marie-Madeleine aurait occupé pendant trente ans une grotte du massif de la Sainte-Baume (départements des Bouches-du-Rhône et du Var),
près de Marseille, pendant qu'elle évangéliseait la Provence, de nombreuses années dans le dénuement et l'abandon le plus total, on dit qu'un ange venait lui apporter à manger. A sa mort, elle aurait été ensevelie dans la crypte de la basilique de Saint-Maximin-la-Sainte-Baume. Une église y a été élevée et les reliques de Sainte Marie Madeleine y sont conservées, ainsi que dans la basilique de Saint-Maximin.
 
Chaque année, les Dominicains qui entretiennent ce lieu organisent une fête le jour de sa fête, le 22 juillet, et une procession avec les reliques a lieu du couvent jusqu'à la grotte, sous forme de chemin de croix. On gravit la montagne et arrivés en haut, avant les dernières marches dans le virage, on se trouve devant une scène de l'Evangile: la croix de Jésus et celles des deux larrons, avec la Vierge Marie, Saint Jean et Sainte Marie Madeleine au pied de la croix de Jésus, d'un réalisme saisissant et émouvant; et juste avant de pénétrer dans la grotte, on se trouve devant Sainte Marie Madeleine pleurant au pied de la croix. Ce pèlerinage en souvenir de celle qui a tant aimé Jésus et a radicalement changé de vie est très porteur et nous plonge 2000 ans en arrière...
La basilique est mondialement connue pour son orgue, magnifique témoin de l'école française, ayant conservé l'intégralité de ses 2960 tuyaux d'origine. En juillet 1971 André Stricker (1931-2003) y donne un récital "Des fils de Bach à Beethoven" d'où est extrait ce choral de Buxtehude: "Wie schön leuchtet der Morgenstern", d'aprés l'hymne de 1599 de Philipp Nicolai dont Bach tirera sa cantate du même nom.
 
Saint Louis est allé en pélerinage à la Sainte Baume. Il semble qu'il se soit beaucoup intéressé à la vie de Marie-Madeleine.
Marie-Madeleine ou Myriam ou Maya qui signifie aussi goutte d'eau de mer.
 

Saint Jean-Paul II, dans sa lettre apostolique Mulieris dignitatem, a mis en relief le rôle particulier de Marie-Madeleine. Elle est la première témoin du tombeau vide au matin de Pâques, la première à rencontrer le Christ ressuscité, et la première à lui rendre témoignage devant les Apôtres. C'est pour cela qu'on l'a même appelée "l'apôtre des Apôtres".

Pour Jean-Paul II, cet événement est révélateur de la volonté du Christ de transmettre la vérité divine aux femmes, sur un pied d'égalité avec les hommes.

À propos de Sainte Marie-Madeleine, Grégoire de Nysse explique que "puisque c'est par une femme qu'a été causée la séparation d'avec Dieu par la désobéissance, il convient qu'une femme soit aussi le premier témoin de la Résurrection, afin que la ruine résultant de la désobéissance soit redressée par la foi en la Résurrection". (3)

Un décret publié le 10 juin 2016 par la Congrégation du culte divin a élevé la mémoire de Marie de Magdala le 22 juillet au rang de fête dans le calendrier liturgique. Lorsque Jésus lui dit : "Ne me touche pas, car je ne suis pas encore monté vers le Père", c’est à toute l’Église que cette invitation s’adresse, pour qu’elle entre dans une expérience de foi capable de dépasser toute appropriation matérialiste et toute compréhension humaine du mystère divin. Ces mots ont une portée ecclésiale et constituent une leçon pour les disciples de Jésus afin qu’ils ne cherchent pas les certitudes humaines ou les titres mondains, mais la foi dans le Christ vivant et ressuscité. Voilà pourquoi la célébration liturgique de cette femme a désormais le même caractère festif réservé à la célébration des apôtres dans le calendrier romain afin qu’elle soit un modèle pour toute femme dans l’Église.

Sainte Marie Madeleine (1er siècle), l'Apôtre des Apôtres

Peu après, les Juifs endurcis, fatigués de ses exhortations et de celles de Marthe et de Lazare, les exposèrent sur la mer par une tempête, dans une pauvre barque sans rames ni voiles. La nacelle voguait à la garde de Dieu, et vint aborder, après quelques jours, au rivage de Marseille. Les pieux disciples du Christ firent là de nombreuses conquêtes.

Quant à Madeleine, elle s'enfonça dans les montagnes sauvages et solitaires et fut transportée par les anges dans une grotte appelée depuis
la Sainte-Baume, où elle mena une vie plus angélique qu'humaine, favorisée des grâces les plus merveilleuses, ne vivant que de la Sainte Communion, soupirant et versant des larmes de pénitence et d'amour.

 

Au pied de la montagne dans le Var et aux portes des Bouches du rhône, la basilique Sainte Marie-Madeleine de Saint-Maximin-la-Sainte-Baume, achevée en 1532 est le plus important exemple de style gothique en Provence.

Dans la tradition chrétienne médiévale, après avoir débarqué aux Saintes-Maries-de-la-Mer, Sainte Marie-Madeleine aurait occupé pendant trente ans une grotte du massif de la Sainte-Baume (départements des Bouches-du-Rhône et du Var),
près de Marseille, pendant qu'elle évangéliseait la Provence, de nombreuses années dans le dénuement et l'abandon le plus total, on dit qu'un ange venait lui apporter à manger. A sa mort, elle aurait été ensevelie dans la crypte de la basilique de Saint-Maximin-la-Sainte-Baume. Une église y a été élevée et les reliques de Sainte Marie Madeleine y sont conservées, ainsi que dans la basilique de Saint-Maximin.
 
Chaque année, les Dominicains qui entretiennent ce lieu organisent une fête le jour de sa fête, le 22 juillet, et une procession avec les reliques a lieu du couvent jusqu'à la grotte, sous forme de chemin de croix. On gravit la montagne et arrivés en haut, avant les dernières marches dans le virage, on se trouve devant une scène de l'Evangile: la croix de Jésus et celles des deux larrons, avec la Vierge Marie, Saint Jean et Sainte Marie Madeleine au pied de la croix de Jésus, d'un réalisme saisissant et émouvant; et juste avant de pénétrer dans la grotte, on se trouve devant Sainte Marie Madeleine pleurant au pied de la croix. Ce pèlerinage en souvenir de celle qui a tant aimé Jésus et a radicalement changé de vie est très porteur et nous plonge 2000 ans en arrière...
La basilique est mondialement connue pour son orgue, magnifique témoin de l'école française, ayant conservé l'intégralité de ses 2960 tuyaux d'origine. En juillet 1971 André Stricker (1931-2003) y donne un récital "Des fils de Bach à Beethoven" d'où est extrait ce choral de Buxtehude: "Wie schön leuchtet der Morgenstern", d'aprés l'hymne de 1599 de Philipp Nicolai dont Bach tirera sa cantate du même nom.
 
Saint Louis est allé en pélerinage à la Sainte Baume. Il semble qu'il se soit beaucoup intéressé à la vie de Marie-Madeleine.
Marie-Madeleine ou Myriam ou Maya qui signifie aussi goutte d'eau de mer.
 

Saint Jean-Paul II, dans sa lettre apostolique Mulieris dignitatem, a mis en relief le rôle particulier de Marie-Madeleine. Elle est la première témoin du tombeau vide au matin de Pâques, la première à rencontrer le Christ ressuscité, et la première à lui rendre témoignage devant les Apôtres. C'est pour cela qu'on l'a même appelée "l'apôtre des Apôtres".

Pour Jean-Paul II, cet événement est révélateur de la volonté du Christ de transmettre la vérité divine aux femmes, sur un pied d'égalité avec les hommes.

À propos de Sainte Marie-Madeleine, Grégoire de Nysse explique que "puisque c'est par une femme qu'a été causée la séparation d'avec Dieu par la désobéissance, il convient qu'une femme soit aussi le premier témoin de la Résurrection, afin que la ruine résultant de la désobéissance soit redressée par la foi en la Résurrection". (3)

Un décret publié le 10 juin 2016 par la Congrégation du culte divin a élevé la mémoire de Marie de Magdala le 22 juillet au rang de fête dans le calendrier liturgique. Lorsque Jésus lui dit : "Ne me touche pas, car je ne suis pas encore monté vers le Père", c’est à toute l’Église que cette invitation s’adresse, pour qu’elle entre dans une expérience de foi capable de dépasser toute appropriation matérialiste et toute compréhension humaine du mystère divin. Ces mots ont une portée ecclésiale et constituent une leçon pour les disciples de Jésus afin qu’ils ne cherchent pas les certitudes humaines ou les titres mondains, mais la foi dans le Christ vivant et ressuscité. Voilà pourquoi la célébration liturgique de cette femme a désormais le même caractère festif réservé à la célébration des apôtres dans le calendrier romain afin qu’elle soit un modèle pour toute femme dans l’Église.

Le matin de la résurrection, par Edward Burne-Jones (1833-1899). Guidée par deux anges, Marie-Madeleine aperçoit le Christ ressuscité.

Le matin de la résurrection, par Edward Burne-Jones (1833-1899). Guidée par deux anges, Marie-Madeleine aperçoit le Christ ressuscité.

Sources: (1) Abbé L. Jaud, Vie des Saints pour tous les jours de l'année, Tours, Mame, 1950; (2) Missel du Dimanche 2018, Nouvelle Traduction liturgique, Année B, Bayard Éditions, Lonrai 2017, p. 378 (3) Missel du dimanche 2018ibid., p. 341 ; Le Petit Livre des Saints, Éditions du Chêne, tome 1, 2011, p. 126.

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21 juillet 2023 5 21 /07 /juillet /2023 00:00
Saint Victor, dans Le Petit Livre des Saints, Éditions du Chêne, tome 2, 2011, p. 185

Saint Victor, dans Le Petit Livre des Saints, Éditions du Chêne, tome 2, 2011, p. 185

Le culte de ce militaire romain est très ancien puisqu'on construisit en 415, à Marseille, un monastère portant son nom. Il aurait été un brillant officier, mais il refusa de trahir le Christ. Saint Victor naquit vers le milieu du IIIè siècle, d'une noble famille de Marseille. Ses parents en firent un chrétien, et quand il fut en âge de choisir une profession, il choisit le métier des armes, où il servit les empereurs avec honneur et vaillance. Le co-empereur Maximien, les mains encore fumantes du sang de la légion thébaine, et de celui de plusieurs autres martyrs qu'il avait répandu en divers provinces des Gaules, vint à Marseille, où il y avait une église florissante. Victor ayant appris l'arrivée de l'empereur à Marseille pour persécuter les chrétiens, au lieu de cacher sa foi, il sentit s'accroître en lui son zèle pour la défendre. Il parcourait hardiment les rangs de ses compagnons chrétiens pour les encourager à ne pas faiblir. Jour et nuit il se rendait de maison en maison, exhorter les fidèles à souffrir généreusement pour Jésus-Christ; il allait même accompagner les martyrs jusque dans leurs supplices, pour les fortifier dans le combat suprême.

Saint Victor de Marseille, soldat et martyr (+ 303)

​​​​​​Trahi par son zèle, il fut chargé de chaînes et conduit à l'empereur lui-même. Maximien employa successivement les promesses et les menaces pour l'engager à sacrifier aux dieux; le Saint, inébranlable, confondit le tyran en démontrant la vanité des idoles et la divinité de Jésus-Christ. On lui lia les bras dans le dos et on le traîna dans la cité. L'empereur crut qu'une grande humiliation pourrait triompher de Victor; il le fit poursuivre par les coups et les huées de la populace païenne. Après ce premier tourment, Victor répondit aux nouvelles questions: "Je ne sacrifierai pas ; cela est dû au Créateur, non à une créature." Frappé à coups de gourdin et suspendu pour être flagellé, il console les frères : "Refusez d'être tristes pour moi. [...] lorsque j'étais suspendu et flagellé au fouet de cuir, je vis près de moi un homme très beau, tenant en main une croix qui me disait d'une voix lente : 'C'est moi, Jésus, qui subit les outrages et les tourments, en la personne de mes confesseurs.'" À ces mots, on l'étendit sur un chevalet, on lui trancha son pied coupable, et son corps fut affreusement déchiré. Pendant ce supplice, Jésus-Christ lui apparut la Croix à la main, en lui promettant une immortelle couronne, et cette vision adoucit le sentiment de ses douleurs.

Saint Victor de Marseille, soldat et martyr (+ 303)

 

La nuit suivante, dans sa prison, il fut visité par les Anges. Trois gardiens, frappés de voir le cachot resplendir d'une miraculeuse clarté, se convertirent, furent baptisés et reçurent le martyre avant Victor lui-même.

Trois jours après, Maximien rappela Victor devant son tribunal et lui ordonna d'adorer une idole de Jupiter. Il donna un coup de pied à l'autel et le renversa : "Je suis chrétien, je méprise vos dieux et je confesse Jésus-Christ." Le tyran, pour venger son dieu, fit couper le pied au vaillant chrétien. Victor offrit ce membre à Jésus-Christ comme les prémices de son sacrifice. Ensuite, il fut placé sous la meule d'un moulin pour être broyé, mais la machine se brisa; il fallut, pour achever la victime, lui trancher la tête. En ce moment, une voix céleste fit entendre ces paroles: "Victor, Victor, tu as vaincu!"

Les chrétiens dérobèrent son corps et le cachèrent. Au XIVe siècle, Urbain V confiera le pied de Victor à l'abbaye parisienne qui l'avait pour saint Patron. 

Le saint est représenté auprès d'une meule, avec épée et palme, attributs du soldat martyr.

Victor figure au propre du diocèse de Marseille comme fête patronale de la ville.

 

PRATIQUE. Ayons constamment les yeux fixés sur Dieu, notre souverain bien.

Sources : (1) Vie des Saints pour tous les jours de l'année avec une pratique de piété pour chaque jour et des instructions sur les fêtes mobiles, Alfred Mame et Fils éditeurs, Tours 1867, p. 202; (2); (3); (4) ; Le Petit Livre des Saints, Éditions du Chêne, tome 2, 2011, p. 184.

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